Répertoire de la pratique du Conseil de sécurité
400
J’ai l’honneur d’accuser réception de votre lettre datée du
15 juillet 1992 concernant la situation en Haïti. J’ai porté votre lettre à l’attention des membres du
Conseil de sécurité qui en ont pris note lors des consultations
officieuses tenues le 20 juillet 1992.
13. Questions relatives à la situation au Panama
Débats initiaux
A. Lettre datée du 25 avril 1989, adressée
au Président du Conseil de sécurité
par le Représentant permanent
du Panama auprès de l’Organisation
des Nations Unies
Dans une lettre datée du 25 avril 1989 adressée
au Président du Conseil de sécurité
1
, le Représentant
permanent du Panama auprès de l’Organisation des
Nations Unies a demandé la convocation immédiate
d’une réunion du Conseil de sécurité pour examiner la
grave situation à laquelle se heurtait son pays à cause de
l’intervention flagrante des États-Unis dans ses affaires
intérieures, à cause de la politique de déstabilisation et de
coercition poursuivie par les États-Unis à son encontre et
aussi à cause de la menace constante d’emploi de la force
qui pesait sur lui. Il a indiqué que la situation résultant de
l’action menée par les États-Unis contre la souveraineté,
l’indépendance politique, la sécurité économique et
l’intégrité territoriale de la République du Panama, en
violation flagrante de la Charte des Nations Unies et des
principes du droit international, s’était considérablement
détériorée en raison d’une nouvelle escalade dans les
actes d’agression et de subversion qui mettaient en
danger la paix et la sécurité internationales.
À sa 2861
e
séance, le 28 avril 1989, le Conseil a
inscrit la lettre du représentant du Panama à son ordre
du jour. Après l’adoption de l’ordre du jour, le Conseil
a invité le représentant du Panama, sur sa demande, à
participer au débat sans droit de vote. Le Président
(Union des Républiques socialistes soviétiques) a
ensuite porté à l’attention des membres du Conseil une
lettre datée du 26 avril 1989 adressée au Secrétaire
général par le représentant du Panama
2
lui transmettant
le texte de la déclaration prononcée le 24 avril 1989
par le Président panaméen à propos de l’ingérence des
États-Unis dans le processus électoral au Panama.
__________________
1
S/20606.
2
S/20607.
À la même séance, le représentant du Panama a
remercié le Conseil pour la rapidité avec laquelle il
avait convoqué la réunion, en application des Articles
34 et 35 de la Charte, pour examiner la grave situation
créée par la série de violations du droit international
commises par les États-Unis contre son pays, qui
mettaient en danger la paix et la sécurité internationales.
Il a déclaré que le Panama avait essayé de remédier, par la
négociation, aux causes de conflit dans les relations entre
le Panama et les États-Unis dû à l’existence du canal de
Panama. Cependant, lorsque son gouvernement avait
dénoncé les interprétations unilatérales des États-Unis
au sujet du Traité du canal de Panama de 1977 visant à
étendre la présence militaire américaine dans le pays
au-delà de l’an 2000, le Panama avait subi une série
d’actes d’agression économique, politique et financière
et connu une intensification des menaces de recours à
la force militaire. De plus, les États-Unis avaient abusé
des privilèges diplomatiques de leur ambassade au
Panama pour planifier, organiser, financer et exécuter
des actes d’ingérence dans les affaires intérieures du
pays et participer à des activités séditieuses. Selon des
informations parues dans la presse des États-Unis, ce
pays avait approuvé un plan secret où était envisagée la
possibilité d’assassiner le commandant en chef des
forces de défense panaméennes et octroyait un appui
financier à l’un des candidats de l’opposition.
L’intervenant a indiqué que son pays avait en outre
faire face notamment à des mouvements d’unités des
forces armées américaines en dehors de leurs positions
de défense, à des violations de son espace aérien, à des
infiltrations par les services de renseignement, au
survol des installations militaires panaméennes et à des
actes mettant en danger l’aviation civile dans le pays.
Par ailleurs, les États-Unis avaient introduit une équipe
militaire spécialisée dans l’attaque qui n’avait jamais
fait partie des forces utilisées pour défendre le canal de
Panama. Les mouvements de troupes et d’armements
avaient été continus, de même que les manœuvres
militaires faisant étalage d’une puissance toujours prête
à attaquer. Malgré tout cela, le Gouvernement panaméen
Chapitre VIII. Examen des questions relevant de la responsabilité
du Conseil de sécurité à l’é
g
ard du maintien de la paix
et de la sécurité internationales
401
comptait tenir les élections prévues pour le 7 mai.
Toutefois, le processus électoral était devenu lui aussi
un nouveau champ ouvert à l’intervention des États-
Unis qui avaient entamé une phase de participation
directe dans le dessein de perturber l’ordre public, de
semer le chaos, de promouvoir une déstabilisation
généralisée et de créer ainsi un prétexte à l’intervention
militaire directe. Cette conduite était non seulement
inacceptable mais aussi extrêmement dangereuse, car
elle mettait en péril le bon déroulement du processus
électoral et la paix et la sécurité internationales dans
une région vitale pour la navigation et le commerce
mondiaux
3
.
Le représentant des États-Unis a déclaré que son
pays avait de grands doutes quant à la régularité et à la
liberté des prochaines élections au Panama, doutes que
partageait la Commission interaméricaine des droits de
l’homme relevant de l’Organisation des États américains.
Il était de plus en plus clair que le régime militaire
continuait de saper toute expression populaire par le
recours à la fraude, à la coercition et à l’intimidation.
Pourtant, c’était au peuple panaméen qu’il incombait
de mener, dans le pays, un débat libre et ouvert sur le
Panama; c’était au Panama, et non au Conseil, qu’on
pourrait remédier à l’absence de démocratie. La crise
du Panama n’était pas due à une ingérence des États-
Unis dans les affaires intérieures du pays. Elle avait
pour origine la politique du général Noriega qui s’était
arrogé un pouvoir absolu sur la vie civique et avait
patronné et encouragé la corruption à grande échelle, y
compris le trafic de drogues et d’armements.
L’intervenant a insisté sur le fait que la communauté
internationale ne devait pas contribuer aux efforts
déployés par le régime de Noriega pour détourner
l’attention en saisissant le Conseil de ce qui est
fondamentalement un problème découlant de ses
élections injustes et truquées. Cest le régime de
Noriega qui devrait plutôt rétablir immédiatement les
conditions minimales qu’exigeaient des élections libres
et permettre à la presse et aux observateurs internationaux
de surveiller complètement les élections. Les États-Unis,
pour leur part, demeuraient fermement décidés à
appuyer les efforts déployés par le peuple panaméen
pour instaurer une authentique démocratie civile et
pleinement attachés aux traités relatifs au canal de
Panama
4
.
__________________
3
S/PV.2861, p. 6 à 18/20.
4
Ibid., p. 18/20 à 24/25.
Le représentant du Panama est ensuite intervenu à
deux reprises pour dire que le Conseil ne se réunissait
pas pour examiner la question des élections dans son
pays, qui relevait des affaires intérieures de son
gouvernement, mais plutôt celle de la menace
grandissante du recours à la force militaire et du risque
que le déploiement de cette force conduise à des actes
de violence dans le pays. Il a indiqué que le représentant
des États-Unis n’avait fait aucune allusion à cette
question. Il l’a donc invité à déclarer catégoriquement
qu’il n’y aurait pas de recours à la force au Panama à
l’occasion des prochaines élections
5
.
Avant de clore la séance, le Président a dit que la
date de séance suivante du Conseil de sécurité consacrée
à la poursuite de l’examen de la question serait annoncée
après consultation avec les membres du Conseil.
Dans une lettre datée du 7 août 1989, adressée au
Président du Conseil de sécurité
6
, le représentant du
Panama a demandé de convoquer, le plus rapidement
possible, le Conseil de sécurité en séance publique
pour reprendre l’examen de la question étant donné que
les troupes des États-Unis en territoire panaméen
avaient continué à intensifier dangereusement leurs
actes d’intimidation, de provocation et d’agression
contre le Panama au mépris de sa souveraineté et de
son intégrité territoriale, ainsi qu’en violation des
traités relatifs au canal de Panama.
À sa 2874
e
séance, le 11 août 1989, le Conseil a
repris l’examen de la question. Après l’adoption de
l’ordre du jour, le Président du Conseil (Algérie) a
invité le représentant du Panama à participer à la
discussion, sans droit de vote, conformément à la
décision que le Conseil avait prise à sa 2861
e
séance, le
28 avril 1989. Le Président a informé les membres du
Conseil que le représentant du Panama avait l’intention,
au cours de sa déclaration, de présenter des documents
vidéo en rapport avec la question à l’examen et que,
conformément à la pratique suivie antérieurement et
comme convenu au cours des consultations du Conseil,
il avait prié le Secrétariat de prendre les dispositions
techniques nécessaires.
Le représentant du Panama a déclaré que
l’intensification des activités des forces armées des
États-Unis sur le territoire panaméen, en violation de la
souveraineté et de l’intégrité territoriale du Panama,
__________________
5
Ibid., p. 27 et 28.
6
S/20773.
Répertoire de la pratique du Conseil de sécurité
402
ainsi que des traités relatifs au canal de Panama et de la
Charte des Nations Unies, avait obligé son pays à
appeler l’attention du Conseil sur la nécessité de
prendre des mesures concrètes pour éviter un conflit
armé. Il a constaté que la situation s’était aggravée
depuis que les États-Unis avaient pris des mesures
contraires aux traités relatifs au canal de Panama et à
d’autres accords. Parmi ces mesures, il a noté
particulièrement que les forces armées des États-Unis
avaient soudain, sans aucune explication, décidé d’agir
au mépris de la réglementation relative à la présence
militaire au Panama selon laquelle en dehors des
périmètres de défense, les manœuvres devaient être
planifiées et exécutées conjointement par les deux
pays, et les vols effectués par les forces aériennes des
États-Unis se conformer aux règles établies par les
autorités panaméennes de l’aviation. Des manœuvres
hostiles avaient commencé en avril 1988 et avaient été
portées à l’attention du Secrétaire général de
l’Organisation des Nations Unies et de l’Organisation
des États américains. Depuis lors, ces actes hostiles
n’avaient fait que se multiplier pour dépasser toutes
limites raisonnables. L’intervenant a ensuite cité
plusieurs incidents, y compris des déplacements
unilatéraux de troupes dans des régions sous contrôle
militaire panaméen et dans des zones civiles, ainsi que
des survols de villes par des hélicoptères et des avions
de combat, y compris de la capitale. Il était également
en mesure de confirmer que plusieurs centaines de
citoyens panaméens avaient été placés en détention,
attaqués ou humiliés par des soldats américains. Il a
ensuite demandé aux membres du Conseil de décider si
les actes qu’il avait décrits ne constituaient pas bel et
bien des actes d’agression aux termes de l’annexe de la
résolution 3314 (XXIX) de l’Assemblée générale,
considérant qu’ils visaient à créer un incident en se
livrant à des provocations qui amèneraient les
Panaméens à réagir pour se défendre ou à justifier le
lancement d’une opération visant à s’emparer du
Panama par la force.
Poursuivant son discours, le représentant du
Panama a souligné que le cas du Panama était différent
de tous ceux dont le Conseil avait été saisi jusque-là
dans le cadre de sa mission de maintien et de
rétablissement de la paix. Larmée des États-Unis n’avait
pas besoin d’envahir le Panama, car elle s’y trouvait déjà;
et il en était de même pour ses forces aériennes et navales.
Par ailleurs, autre aspect inhabituel de la situation, si le
cas du Panama devait constituer un précédent, toutes les
garanties prévues dans la Charte pour les pays faibles
sur le plan militaire seraient alors bafouées, car
l’interprétation et l’application des principes et
dispositions de cet instrument seraient soumises à
l’arbitraire d’une nation dotée du pouvoir d’imposer sa
volonté. Compte tenu de l’évolution de la situation, les
forces armées panaméennes étaient en état d’alerte
permanent, ce qui signifiait que toute « folie » contre
son pays ne saurait se produire sans effusion de sang.
On se trouvait dans une situation où la guerre était
imminente et à laquelle le Conseil devait porter une
attention immédiate. La menace militaire présentait un
grave danger pour le fonctionnement du canal et pour
la paix dans cette partie extrêmement sensible de
l’Amérique centrale, dont la stabilité était vitale pour
les usagers de cette voie de communication. Si le
Panama avait décidé de confier au Conseil la charge de
suivre la mise en œuvre des traités relatifs au canal,
c’était pour faire en sorte qu’ils soient strictement
respectés et pour garantir le fonctionnement normal et
efficace de cette voie qui se trouvait mise en danger à
la suite des violations constantes des traités régissant
son administration. Le Panama a également demandé
que des observateurs militaires soient dépêchés dans la
région et prié le Secrétaire général d’envoyer une
mission de bons offices pour éviter une rupture
imminente de la paix dans la région, évaluer sur place
la situation et encourager la prise de mesures urgentes
pour réduire la tension entre les deux pays
7
.
Le représentant des États-Unis a estimé qu’il était
vraiment regrettable que le Conseil doive consacrer du
temps et des ressources précieux à écouter les
doléances infondées du représentant du régime du
général Noriega. La vérité était simple et les faits avaient
été exposés devant l’Organisation des États américains
(OEA), lors des trois réunions extraordinaires des
ministres des relations extérieures tenues en mai, juin
et juillet 1989. Il a rappelé que le 7 mai 1989, le peuple
panaméen s’était rendu aux urnes et que, malgré les
mesures d’intimidation, de répression et les efforts de
fraude massifs, les candidats de l’opposition au général
Noriega avaient gagné par une marge de plus de trois
contre un. Ce résultat avait été vérifié par un grand
nombre d’observateurs internationaux et par l’Église
catholique. N’ayant pu en maîtriser l’issue, le général
Noriega avait alors annulé les élections et réprimé
violemment les protestations de l’opposition
mocratique. Son action avait été condamnée par les
gouvernements de tout l’hémisphère occidental et le reste
__________________
7
S/PV.2874, p. 3/5 à 26.
Chapitre VIII. Examen des questions relevant de la responsabilité
du Conseil de sécurité à l’é
g
ard du maintien de la paix
et de la sécurité internationales
403
du monde. Dans sa résolution du 17 mai, l’Organisation
des États américains avait reconnu que la crise au
Panama concernait essentiellement la personne et la
conduite du général Noriega et appelé à une passation
démocratique du pouvoir dans le pays. Une mission de
l’Organisation des États américains
8
, qui avait é
chargée de proposer d’urgence des formules de
compromis qui permettraient de parvenir à un accord
national propre à assurer un transfert démocratique du
pouvoir dans les meilleurs délais, avait réaffirmé ce
fait dans son rapport du 19 juillet. Les États-Unis
appuyaient ces efforts régionaux visant à trouver une
solution pacifique à la crise, grâce à la diplomatie
multilatérale.
Le représentant des États-Unis a soutenu que les
activités militaires de son pays au Panama étaient
menées en conformité totale avec les traités relatifs au
canal de Panama. L’invocation par le Panama du principe
de la non-ingérence visait à détourner l’attention du
Conseil du déni violent et arbitraire du droit de son peuple
à l’autodétermination auquel se livrait le général Noriega
en empêchant la tenue d’élections régulières et libres et
en réprimant une protestation pacifique. Le régime de
Noriega avait lui-même commis diverses violations des
dispositions des traités relatifs au canal de Panama
depuis février 1988, dont beaucoup étaient accompagnées
de menaces et de mauvais traitements imposés aux
membres des forces armées des États-Unis en poste au
Panama, tandis que d’autres consistaient à tenter
d’entraver les opérations du canal. Les États-Unis
avaient accru leur présence militaire au Panama et leur
état de préparation en réaction directe aux actes
hostiles du régime de Noriega. En demandant la tenue
de la présente réunion, ce régime souhaitait notamment
renforcer sa propre légitimité et détourner l’attention
internationale des efforts faits par l’Organisation des
États américains pour amener le général Noriega à
abandonner le pouvoir et favoriser le passage à un
gouvernement démocratique, légitime et représentatif. La
seule solution aux problèmes du Panama était celle que
préconisait l’OEA. Les accusations mensongères
portées devant le Conseil ne sauraient dissimuler ce
fait et cet organe ne devait plus perdre de temps à s’en
préoccuper. En conclusion, l’intervenant a réaffirmé
l’engagement que les États-Unis avaient pris en vertu
des traités relatifs au canal de Panama d’assurer
__________________
8
La mission était composée des Ministres des affaires
étrangères de l’Équateur, du Guatemala et de la Trinité-
et-Tobago et du Secrétaire général de l’OEA.
l’efficacité et la sécurité du fonctionnement du canal
jusqu’à ce que la gestion du canal soit transférée au
Panama en l’an 2000
9
.
Prenant à nouveau la parole, le représentant du
Panama a projeté des séquences vidéo en précisant
qu’il s’agissait d’images prises par un amateur à
Panama, bien loin des périmètres de défense du canal,
montrant l’occupation d’une agglomération civile, la
fouille de civils sans aucune autorisation et la présence
de tanks et de personnel militaire des États-Unis en vue
de harceler la population panaméenne civile. En ce qui
concerne la mission de l’OEA, il a souligné que son
gouvernement lui avait toujours facilité la tâche,
surtout quand elle s’était rendue au Panama pour aider
les forces politiques panaméennes à trouver un accord
national. Il a vivement engagé les États-Unis à ne pas
empêcher qu’une mission des Nations Unies se rende
au Panama pour constater sur place les violations du
Traité et le danger imminent d’affrontement
10
.
Intervenant à nouveau, le représentant des États-
Unis a réaffirmé que le Conseil faisait face à une
tentative destinée à détourner l’attention de la cause
profonde du problème – la persistance illégale du
général Noriega à se cramponner au pouvoir contre le
souhait de son peuple. C’était de cette question-là qu’il
fallait s’occuper
11
.
Dans une dernière déclaration, le représentant du
Panama a regretté qu’il n’ait même pas été fait mention
d’une mission des Nations Unies qui pourrait se rendre
sur place pour examiner la situation de près.
12
Le Président du Conseil a annoncé que la date de
la séance suivante du Conseil de sécurité consacrée à la
poursuite de l’examen de la question serait fixée après
consultation avec les membres du Conseil.
B. La situation au Panama
Décision du 23 décembre 1989 (2902
e
séance) :
rejet d’un projet de résolution
Dans une lettre datée du 20 décembre 1989,
adressée au Président du Conseil de sécurité
13
, le
représentant du Nicaragua a demandé qu’une réunion
__________________
9
Ibid., p. 26 à 34/35.
10
Ibid., p. 34/35 à 42.
11
Ibid., p. 42 et 43.
12
Ibid., p. 43.
13
S/21034.
Répertoire de la pratique du Conseil de sécurité
404
immédiate du Conseil de sécurité soit convoquée
d’urgence afin d’examiner la situation qui avait conduit
à l’invasion de la République du Panama par les États-
Unis.
Dans une lettre datée du 20 décembre 1989,
adressée au Président du Conseil de sécurité
14
, le
représentant des États-Unis a fait savoir, conformément
à 1’Article 51 de la Charte des Nations Unies
15
, que les
forces des États-Unis avaient exercé le droit naturel de
légitime défense que leur reconnaissait le droit
international en ripostant au Panama aux attaques
armées de forces agissant sous la direction de Manuel
Noriega. Il a déclaré que cette opération, qui visait à
protéger la vie de citoyens américains, était conforme à
l’obligation qui incombait aux États-Unis de préserver
l’intégrité des traités relatifs au canal de Panama. Les
États-Unis avaient décidé d’agir après avoir consulté
les dirigeants démocratiquement élus du Panama et
obtenu leur appui et après avoir épuisé tous les moyens
diplomatiques de régler pacifiquement les différends
avec M. Noriega. L’intervention américaine avait été
déclenchée après que M. Noriega, ayant assumé le rôle
de « chef de gouvernement » du Panama, avait déclaré
le 15 décembre qu’un état de guerre existait avec les
États-Unis, et à l’issue d’attaques brutales que les
forces de M. Noriega avaient lancées contre du
personnel américain qui se trouvait légalement sur
place. Le représentant des États-Unis a déclaré en outre
que les forces armées de son pays n’auraient recours à
la force que dans la mesure nécessaire pour assurer la
sécurité des Américains et l’intégrité des traités relatifs
au canal de Panama. Toutes les dispositions possibles
avaient été prises pour réduire au minimum le risque de
dommages ou de pertes en vies humaines parmi la
population civile.
À sa 2899
e
séance, le 20 décembre 1989, le
Conseil a inscrit la lettre du représentant du Nicaragua
à son ordre du jour. Il a examiné la question de ses
2899
e
à 2902
e
séances, du 20 au 23 décembre 1989. Il a
invité, sur leur demande, les représentants suivants à
participer au débat, sans droit de vote : à la
2899
e
séance, le représentant du Nicaragua; à la
2900
e
séance, les représentants de Cuba, d’El Salvador,
__________________
14
S/21035.
15
Pour l’examen des dispositions de l’Article 51, voir
chap. XI.
de la Jamahiriya arabe libyenne et du Pérou; et à la
2901
e
séance, le représentant du Panama
16
.
À la 2899e séance également, le Président (Colombie)
a appelé l’attention des membres du Conseil sur la
lettre datée du 20 décembre 1989, émanant du
représentant des États-Unis.
Le représentant du Nicaragua a déclaré que
l’invasion du Panama ce jour-là par les troupes
américaines constituait une violation flagrante des buts
et principes énoncés dans la Charte des Nations Unies
et du droit international. Cette atteinte à la souveraineté
et à l’intégrité territoriale du Panama – qui survenait
six ans après l’invasion par les États-Unis d’un autre
pays de la région – constituait une menace non
seulement pour l’Amérique centrale mais aussi pour la
paix et la sécurité internationales. Il a invoqué le
paragraphe 2 de l’Article premier et le paragraphe 4 de
l’Article 2 de la Charte, ainsi que le principe de non-
ingérence, notant que ce dernier avait été réaffirmé
dans divers instruments des Nations Unies et par la
Cour internationale de Justice. Il a rappelé en outre
que, dans le contexte du système interaméricain, la
Charte de l’OEA, divers traités régionaux et d’autres
instruments interdisaient le recours à la force et
l’ingérence dans les affaires intérieures d’autres États
et prévoyaient des moyens pacifiques de règlement des
différends. Par leurs actes, les États-Unis avaient ainsi
manqué aux obligations qui leur incombaient en vertu
de tous ces instruments. En droit international, aucune
explication ne saurait justifier l’invasion du Panama
par les États-Unis et aucun motif ne pouvait justifier
une intervention contre un État souverain.
Lintervenant a rejeté l’argument des États-Unis selon
lequel leur action visait à protéger les citoyens
américains, prétexte auquel les gouvernements
successifs des États-Unis avaient recouru à maintes
reprises pour justifier l’agression et légitimer les
invasions. Il a déclaré que la crise qui existait dans les
relations entre le Panama et les États-Unis s’était
aggravée à la suite de l’adoption par les États-Unis de
diverses mesures contraires au droit international et
aux principes de la coexistence pacifique. Il a rappelé
que dans les derniers mois, le Panama avait demandé à
deux reprises la convocation du Conseil de sécurité
afin d’examiner les graves menaces de l’emploi de la
__________________
16
Deux demandes de participation en tant que représentant
du Panama reçues par le Président ont été ensuite
retirées : voir S/PV.2902, p. 2. Voir premier paragraphe,
p. 89.
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