ORL PÉDIATRIQUE
L’otite moyenne aiguë (OMA) de l’enfant représente 5 mil-
lions de diagnostics par an. Depuis quelques années, de plus en
plus d’otites ne guérissent pas sous un traitement médical anti-
biotique de première intention. A. Bequignon et al. (Caen) ont
étudié sur deux ans les OMA résistantes au traitement médical
de première intention. Leurs critères d’inclusion étaient un enfant
qui, après 48 heures d’antibiothérapie, présentait des signes infec-
tieux généraux et, à l’otoscopie, un aspect d’otite collectée. Entre
juin 1996 et juin 1999, ils ont recensé 31 enfants et réalisé 39 para-
centèses. La moyenne d’âge était de 25,5 mois et 71 % des enfants
avaient moins de deux ans. Le traitement de première intention
avait été, dans 39 % des cas, l’association amoxicilline-acide cla-
vulanique et, dans 40 % des cas, une céphalosporine orale. Le
prélèvement est revenu positif dans deux tiers des cas, avec une
prédominance de Haemophilus influenzae sécréteur de ß-lacta-
mases, et seuls quatre pneumocoques présentaient une CMI à la
pénicilline supérieure à 1 mg/ml. Deux cultures étaient polymi-
crobiennes. Les prélèvements bactériologiques étaient stériles
dans 30 % des cas, et les auteurs ont soulevé le problème du rôle
des virus dans l’OMA. Les virus sont certainement initiateurs du
processus infectieux, mais sont-ils des agents responsables de
l’otite ou simplement des cofacteurs ? Une étude est en cours afin
d’éclaircir la responsabilité des virus dans ces OMA en échec
d’un traitement antibiotique classique de première intention. Les
facteurs de risque d’échec d’un traitement antibiotique de pre-
mière intention dans l’OMA sont :
un âge inférieur à deux ans ;
le mode de garde de l’enfant en collectivité ;
des antécédents d’otite moyenne aiguë ;
un mauvais choix de l’antibiotique initial, une mauvaise durée
du traitement ou une posologie insuffisante.
La prévalence des poches de rétraction tympaniques et des
cholestéatomes est plus élevée chez les enfants porteurs d’une
malformation cranio-faciale que dans la population générale.
Il s’agit essentiellement d’enfants présentant une fente labiopa-
latine, une trisomie 21, un syndrome vélo-cardio-facial (appa-
renté au syndrome de Di George), un syndrome de Turner ou
une association de CHARGE. F. Denoyelle et al. (Paris) ont pré-
senté une série rétrospective de 63 enfants opérés entre 1996 et
2000 d’un cholestéatome (39 %) ou d’une poche de rétraction.
Le retard diagnostique est fréquent et la pose d’aérateurs trans-
tympaniques ne semble pas protéger ces enfants de l’évolution
vers une otite chronique. L’atteinte est bilatérale dans 83 % des
cas, une surdité de perception est souvent associée (25 % des
cas) et le Rinne préopératoire est souvent important. Ces enfants
constituent une population à risque qui nécessite une surveillance
otologique très rapprochée. L’idéal serait une recherche des otoé-
missions acoustiques provoquées dans les trois premières
semaines de vie avant l’apparition d’une otite séreuse (très pré-
coce dans ces pathologies), puis un bilan otoscopique et audio-
métrique tous les six mois. I1 ne faut pas hésiter à réaliser des
otoscopies sous anesthésie générale dans les cas difficiles et une
chirurgie de renforcement tympanique avant l’apparition d’un
cholestéatome.
Les cholestéatomes de l’enfant se différencient de ceux des
adultes par leur caractère diffus, l’atteinte de la gouttière posté-
rieure et la lyse précoce des osselets. Les pics de fréquence sont
dix et quinze ans. G. Legrand et al. (Rennes) ont présenté une
série rétrospective de 92 cholestéatomes chez 83 enfants, soit
181 temps opératoires. Dans 23 % des cas, une cavité d’évide-
ment a été réalisée d’emblée en raison d’un volumineux choles-
téatome, de complications ou d’anomalies anatomiques. Dans
55 % des cas, la technique fermée a été maintenue après un
deuxième temps opératoire. Le pronostic audiologique dépend
de la lyse de l’étrier et de la technique employée : ouverte ou
fermée. Le suivi doit être au minimum de six ans et idéalement
de dix ans. Dans la série présentée, 83 % des patients étaient
indemnes de lésions à l’âge adulte.
Suite à l’expérience anglo-saxonne, la chirurgie ambula-
toireest de plus en plus pratiquée en France, notamment en ORL
pédiatrique. Les bénéfices sont surtout économiques. A. Man-
ceau et al. (Tours) ont rapporté leur expérience de 2 395 hospi-
talisations de jour en ORL pédiatrique entre 1997 et 1999. Les
interventions pratiquées étaient principalement : adénoïdecto-
ACTUALITÉ
107eCongrès français d’ORL (1)
Paris, 1er-3 octobre 2000
I. de Gaudemar*, M. François**, N. Noël-Petroff**, C. Médard***
5
La Lettre d’Oto-rhino-laryngologie et de chirurgie cervico-faciale - no258 - décembre 2000
* Service ORL, hôpital Saint-Vincent-de-Paul, 74-82, avenue Denfert-Rochereau,
75674 Paris Cedex 14.
** Service ORL, 48, boulevard Sérurier, 75019 Paris.
*** Pontoise.
mie, amygdalectomie et endoscopie des voies aériennes supé-
rieures. Parmi ces patients, 34 avaient une hypertrophie amyg-
dalienne qui, selon l’interrogatoire des parents, entraînait un
syndrome d’apnées du sommeil. Les critères d’exclusion de
l’ambulatoire étaient un éloignement de plus de trente minutes
de l’hôpital, une pathologie associée (notamment un trouble de
l’hémostase), ou un contexte social difficile. Dans cette série, la
décision de prise en charge en ambulatoire a eu lieu en consul-
tation ORL, sans laisser le choix aux parents. L’hospitalisation
de jour prévue s’est transformée en hospitalisation classique dans
16 % des cas, essentiellement pour des troubles alimentaires per-
sistants, l’apparition de fièvre ou des problèmes hémorragiques.
Aucun enfant n’est revenu consulter dans les 12 heures après sa
sortie. En revanche, la satisfaction des parents est plus difficile
à évaluer : elle était de 92 % au huitième jour postopératoire,
mais plus mitigée pour les premières vingt-quatre heures post-
opératoires dans les amygdalectomies. À noter : la bonne effi-
cacité de l’ondansétron dans les vomissements postopératoires
immédiats après amygdalectomie.
L’avis de 1’ORL est parfois sollicité chez des enfants qui ont
une dysmorphie faciale. Celle-ci peut parfois évoquer un syndrome
particulier, ce qui peut amener à faire faire certains examens, à la
recherche d’une pathologie associée. C’est le cas par exemple dans
la microdélétion 22q11.2 présentée par M.P. Morisseau-Durand
et al. (Paris). En période néonatale, ces enfants ont un faciès rond,
une hypoplasie du malaire, une racine du nez courte, un télécan-
thus, des lèvres fines, des oreilles implantées bas, mal ourlées, sans
lobule. Dès cet âge, la brièveté du voile peut se manifester par un
reflux nasal. Chez l’enfant plus âgé, il faut évoquer ce diagnostic
en cas de rhinolalie ouverte, dans un contexte de retard de langage
avec retard psychomoteur, souvent associés à des épisodes infec-
tieux ORL fréquents. Le diagnostic se fait sur le caryotype. Le syn-
drome de microdélétion 22q11.2 peut être associé à une hypocal-
cémie, une scoliose, une cardiopathie, une hypoplasie ou une
aplasie thymique (syndrome de Di George) qui nécessitent des
explorations et un suivi particulier. Signalons le site Web de l’asso-
ciation de parents d’enfants ayant une microdélétion 22q11.2 :
www.pediatrie.net/generation22.
Le dépistage des troubles auditifs congénitaux ou péri-
nataux par les otoémissions provoquées (OEP) permet de
réduire considérablement les demandes d’enregistrement des
potentiels évoqués auditifs précoces (PEA), qui sont très chro-
nophages chez le tout-petit. Sur 1 531 nouveau-nés à risque audi-
tif, C. Dubreuil et al. (Lyon) ont isolé après un ou deux tests par
OEP 170 enfants suspectés de surdité auxquels ils ont proposé un
enregistrement des PEA, soit 1l % des enfants. Après PEA et
consultation ORL, il s’est avéré que 22 enfants avaient un déficit
auditif dû à un épanchement rétrotympanique et 14 enfants, soit
0,9 % de la population initiale, avaient une surdité de perception
bilatérale. Cette étude fait par ailleurs apparaître un écueil qu’ont
rencontré toutes les équipes qui se sont intéressées au dépistage
précoce des troubles auditifs : le nombre important d’enfants per-
dus de vue, malgré des relances par courrier et par téléphone. Ce
problème va être résolu de manière autoritaire au Luxembourg
(E.Panosetti)par l’obligation de compléter le bilan néonatal com-
portant les OEP pour bénéficier des allocations postnatales !
Il est tout à fait possible de faire un examen audiométrique
en conduction osseuse chez le nourrisson de moins d’un an.
M. Delaroche et al. (Bordeaux) ont présenté leur expérience avec
une vidéo très démonstrative. Le seuil approximatif est approché
par un test à la voix. Puis le son est présenté à l’enfant au vibra-
teur, d’abord sur les aigus, en augmentant progressivement
l’intensité jusqu’à déclencher chez lui une réaction. Quand
l’attention de l’enfant est à nouveau dérivée vers autre chose, une
fréquence plus basse est testée. L’écart entre la CO mesurée avant
l’âge de un an et celle mesurée à deux ans et demi, chez 51 enfants
sourds, n’a jamais été supérieur à 15 dB. Il a été inférieur à 10 dB
chez 90 % des enfants testés avant six mois et 92,5 % des enfants
testés entre six et douze mois.
La surdité de l’enfant est un réel problème de santé publique,
comme l’a rappelé le Pr Vaneecloo (Lille) lors d’un atelier. On
peut s’étonner de l’absence de chiffres statistiques précis sur l’âge
moyen de dépistage des surdités en France, avec encore fré-
quemment des cas de surdité profonde non diagnostiqués avant
l’âge de deux ans ! Une étude des cas d’enfants implantés
cochléaires à Lille a montré un âge moyen de dépistage de ces
surdités sévères ou profondes de 21 mois, ce qui doit correspondre
à peu près à la valeur pour le reste du territoire français.
Pourquoi instituer un dépistage à la naissance ?
Dans les pays du Nord de l’Europe, le dépistage est systématique
à l’âge de 9 mois, et l’on connaît actuellement l’enjeu d’un dia-
gnostic précoce, avec de meilleures performances notamment
pour l’acquisition de la langue orale chez les enfants implantés
précocement. Aux Pays-Bas, les enfants âgés de 9 mois sont
convoqués pour les tests de dépistage et sont amenés manu mili-
tari en cas de non-présentation à la troisième convocation !
À Hawaï, 100 % des nouveau-nés sont dépistés : les résultats
publiés font état de 10 000 enfants dépistés sur 5 ans. La fré-
quence des surdités sévères/profondes est de 1,4/1 000. Tous les
enfants sont pris en charge avant 6 mois, avec un développement
quasi normal du langage et de la parole pour tous. Le coût du
dépistage a été estimé à 17 dollars par enfant.
En Autriche, 70 % des enfants sont dépistés (56 000/90 000) par
une méthode volontariste : 2,4/1 000 présentent une surdité avec
perte auditive supérieure à 40 dB. La prise en charge est faite
avant 6 ans ; l’âge moyen d’implantation est de 12 à 16 mois.
Si une surdité légère et moyenne bilatérale peut entraver l’appren-
tissage correct de la langue, sans de lourdes conséquences tou-
tefois pour l’avenir, une surdité sévère ou profonde empêche tout
accès au langage : présente en période prélinguale, aucun lan-
gage ne pourra spontanément apparaître ; acquise en période post-
linguale, le langage déjà acquis risque de s’altérer rapidement en
l’absence d’une prise en charge adaptée.
La fréquence des surdités sévères et profondes est estimée à
1/1 000 à la naissance et à 2/1 000 à 1 an. Il s’agit donc d’une
pathologie plus fréquente que certaines maladies faisant l’objet
d’un dépistage systématique (phénylcétonurie, hypothyroïdie),
ACTUALITÉ
6
La Lettre d’Oto-rhino-laryngologie et de chirurgie cervico-faciale - no258 - décembre 2000
7
La Lettre d’Oto-rhino-laryngologie et de chirurgie cervico-faciale - no258 - décembre 2000
avec de graves conséquences pour l’avenir de l’enfant alors qu’il
existe des possibilités de prise en charge adaptée. À noter : 30 à
50 % de ces surdités seraient d’origine génétique.
Les techniques subjectives de dépistage comprennent :
le test de Veit et Bizaguet pour les nouveau-nés, qui consiste
en une recherche de réactions de l’enfant à des bruits blancs fil-
trés dans les fréquences graves et dans les fréquences aiguës. Sa
fiabilité dépend des conditions d’examen et de l’expérience de
l’examinateur, avec des risques de faux positifs comme de faux
négatifs ;
le test d’Ewing, pour les nourrissons pouvant rester assis sur
les genoux de leur mère et pour les enfants plus grands. C’est un
test comportemental avec recherche des réactions de l’enfant à
des bruits familiers calibrés (pleurs d’enfants, bruits d’animaux,
choc sur un verre, etc.) délivrés à différentes intensités par deux
haut-parleurs situés de part et d’autre de la tête de l’enfant :
l’enfant va alors rechercher la source du bruit (réflexe d’orienta-
tion), ou réagir par la peur ou la description du bruit entendu,
pour les plus âgés. Ce test a pour limite d’être épuisable, avec
désintérêt progressif de l’enfant ;
le ROC et le ciné-show pour les enfants entre 2 et 6 ans. Lors
du ROC, l’enfant s’oriente vers le son perçu qui est associé, de
façon désynchronisée, à une “récompense” (boîte qui s’anime,
écran qui s’allume, etc.) sans participation active de sa part ; il
s’agit ici d’un conditionnement. Lors du ciné-show, l’enfant est
invité à répondre à la perception d’un son en appuyant sur un
bouton ou une pédale qui va alors déclencher la récompense du
type susdit ;
–laudiogramme classique pour les enfants de plus de 6 ans.
L’enfant va lever la main lorsqu’il perçoit un son.
Il est à rappeler que tout test pratiqué en champ libre (stimula-
tion par haut-parleurs, sans casque) correspond à un test auditif
global rapportant les réponses de la meilleure oreille et ne per-
mettant aucunement d’estimer l’audition de chaque oreille.
Les tests objectifs utilisés pour le dépistage comprennent essen-
tiellement les otoémissions acoustiques (OEA) et les PEA :
Les PEA : il s’agit, dans ce contexte, des PEA précoces. Une
fréquence de stimulation suffisamment lente est nécessaire pour
obtenir de belles ondes bien amples (> 25 clicks/seconde de pré-
férence). À la naissance, seules les ondes I et V sont retrouvées,
puis, avec la maturation des voies nerveuses, les latences se rac-
courcissent et les autres ondes apparaissent (III, puis II). Le sti-
mulus est un click alterné avec un maximum d’intensité dans la
zone des 2 000-3 000 Hz. Le test est pratiqué le plus souvent pen-
dant le sommeil physiologique de l’enfant.
Aux États-Unis, dans le cadre du dépistage, un appareil de PEA
automatisé est très souvent utilisé : il s’agit d’une stimulation
simultanée des deux oreilles à 35 dB, ce qui permet un temps
d’examen réduit. Le résultat est donné sous forme de “bon” ou
“mauvais”.
Les OEA : il s’agit des OEA provoquées : un click est émis (au
moyen d’une sonde) au niveau du conduit auditif externe, traverse
l’oreille moyenne pour aller stimuler les cellules ciliées externes
(CCE) de l’oreille interne ; celles-ci répondent par un son spéci-
fique qui est amplifié et moyenné avant d’être affiché. Lorsqu’elles
sont présentes, les OEA témoignent d’un bon fonctionnement des
CCE de la cochlée. En revanche, toute pathologie de l’oreille
moyenne, toute perte auditive supérieure à 30 dB sur la meilleure
fréquence annulera les OEA ; ce test reste périphérique et n’explore
pas les pathologies situées en amont de la cochlée.
Le dépistage systématique de tous les enfants de moins de 9 mois
est du domaine du possible grâce aux examens subjectifs et objec-
tifs à notre disposition. Son application dépend d’une volonté de
politique de santé publique, d’une formation adéquate des géné-
ralistes, pédiatres et ORL pour se sentir tous concernés.
PATHOLOGIE RHINOSINUSIENNE
Les nouveautés dans le domaine de la chirurgie endonasale assis-
tée par ordinateur ont été le sujet principal de communications
libres dans une séance animée par P. Dessi et D. Stoll, le lundi
2octobre : les auteurs ont décrit les appareils actuellement sur le
marché, et la mise au point de systèmes de localisation de plus
en plus performants.
R. Véricel (Antony) a montré les avantages de l’utilisation du
microdébrideur couplé à l’ordinateur pour les polyposes diffi-
ciles, à l’égard desquelles le contrôle vidéo-endoscopique est par-
fois insuffisant compte tenu de saignements et de la modification
de l’anatomie quand le patient a déjà été opéré.
Il a étudié une série de 550 patients depuis deux ans, chez les-
quels a été réalisée une ethmoïdectomie totale. Grâce au micro-
débrideur, l’exérèse des polypes de la fosse nasale peut aller
jusqu’aux structures osseuses sans les léser, et atteindre le sphé-
noïde. L’ethmoïdectomie est alors menée d’arrière en avant. On
réalise successivement la sphénoïdotomie, la méatotomie
moyenne, l’ethmoïdectomie postérieure, l’ethmoïdectomie anté-
rieure et le drainage du sinus frontal.
L’avantage du microdébrideur est d’éviter la traction sur les
polypes ; il est moins traumatisant pour la muqueuse, et permet
un geste rapide. En le couplant à l’ordinateur, on gagne en pré-
cision et en sûreté, grâce à un repérage dont les modalités tech-
niques s’affinent. Avec le système Landmarx®, l’ordinateur est
compatible avec le scanner, et on peut transférer en quelques
minutes les données de l’imagerie en trois dimensions dans la
machine. Grâce à un arc de référence sur la tête du patient, qui
fixe quatre points de surface avec des diodes infrarouges (tragus,
canthus externe, épine nasale antérieure, pointe du nez), on peut
avoir une localisation des instruments à 1-1,5 mm près.
G. Bolot (Villeurbanne) a exposé une étude originale, et
d’actualité, sur les coûts d’utilisation de la chirurgie endonasale
assistée par ordinateur.
Trois auteurs se sont déjà intéressés au problème depuis 1994
(Anon et al. en 1994, Fried et al. en 1998 et Metson et al. en
1999). Metson a montré que, pour un taux de complications
réduit : 2,7 % versus 4,7 % pour la chirurgie endonasale conven-
tionnelle, il existe une réduction de la durée opératoire signifi-
cative et donc intéressante en termes de coût. En effet, il calcule
que 17 minutes de bloc opératoire coûtent 500 dollars. Les auteurs
français ont donc étudié une série de 35 patients opérés avec
l’appareil Landmarx®de Medtronic : le coût de l’ordinateur à
ACTUALITÉ
8
La Lettre d’Oto-rhino-laryngologie et de chirurgie cervico-faciale - no258 - décembre 2000
l’achat est d’un million de francs. Les coûts induits par interven-
tion sont répartis en “consommables” (matériel à usage unique)
et en coût du temps passé dans le bloc, évalué à 182 dollars pour
15 minutes opératoires, et à 66 dollars pour 15 minutes d’anes-
thésie. Enfin, il reste le coût des services après vente de mainte-
nance des appareils, qui dépend de la fiabilité du constructeur (dif-
ficile à évaluer, car nous avons peu de recul avec ces appareils).
En pratique, l’acquisition des données dans l’ordinateur peut se
faire à partir du scanner diagnostique, ce qui évite le coût d’un
second scanner. Les auteurs la réalisent au bloc opératoire, pen-
dant le changement de malade, à partir d’un disque optique enre-
gistré sur l’ordinateur du scanner (le disque optique coûte
200 francs pour 15 patients). L’opération dure trois minutes.
L’ordinateur reconstruit alors un “masque virtuel” en trois dimen-
sions. Le choix des quatre points repères de surface prend
1minute. L’installation complète du malade, incluant le casque
et sa plate-forme infrarouge, et les champs opératoires, dure
8,3 minutes. L’ordinateur met ensuite 2 minutes pour faire la cor-
respondance entre le masque virtuel acquis par les images scan-
ner et les données des points de surface. Puis le référençage des
instruments prend 1 minute. La durée de navigation est estimée
à 12,3 minutes, mais c’est une moyenne qui reflète peu les dif-
férences entre les chirurgiens selon leur expérience. Au total, les
coûts induits ne sont pas supérieurs à une chirurgie convention-
nelle, car les instruments (pointeur, aspiration) spécifiques sont
restérilisables. Le temps d’installation est plus long de 15 minutes,
mais on le compense par une navigation plutôt plus courte (mais
opérateur-dépendante). Par ailleurs, l’utilisation de l’ordinateur
est facile sans compétence informatique particulière, et ne néces-
site pas de personnel supplémentaire. Il ne reste donc à prendre
en compte que le coût initial de l’achat de l’appareil (1 million
de francs), qui peut être pris en charge par plusieurs spécialités
puisque ce type de navigation intéresse aussi les orthopédistes et
les neurochirurgiens. La fiabilité à plus long terme reste aussi à
déterminer.
S. Schmerber (Grenoble) a présenté le prototype d’un autre
système de navigation que son équipe a mis au point en collabo-
ration avec une société informatique grenobloise : il s’agit de la
station Entact®. L’originalité de l’appareil réside dans ce travail
commun : les chirurgiens ont entièrement monté le cadre fixé à
la tête du malade, qui permet les mouvements de celle-ci. Le coût
du système est comparable à celui du Landmarx®: un million de
francs.
P. Verdalle (Val-de-Grâce, Paris) a montré un autre modèle
de casque permettant une localisation plus précise des points de
repérage. Les points de repérage sont au nombre de cinq ; des
marqueurs radio-opaques sont utilisés dès la réalisation du scan-
ner, puis repositionnés en peropératoire avec des appuis fixes.
F. Postec (Lyon) a présenté ses indications de navigation assis-
tée par ordinateur chez l’enfant. Elle est utile en cas de reprise
de polypose, quand les repères anatomiques ont disparu. Dans la
chirurgie endonasale chez des enfants atteints de mucoviscidose,
elle accélère le repérage au milieu des sécrétions purulentes, et
diminue le temps opératoire chez ces patients fragiles. Dans les
atrésies choanales, l’ordinateur permet de mesurer les structures
osseuses et de calculer les limites de résection. Il ne limite pas
le risque de resténose à distance. L’équipe de Lyon utilise le
Brainlab®, avec un casque infrarouge. Un système de repérage
par marqueurs autocollants (Z touch) est à l’étude, qui permet-
trait la suppression du casque.
En conclusion, la chirurgie assistée par ordinateur semble pro-
gresser rapidement dans la précision des mesures. La marge
d’erreur est aujourd’hui réduite à 1-1,5 mm. Elle a aussi gagné
en facilité d’utilisation, grâce à des programmes permettant de
recueillir les images du scanner, à des repérages peropératoires
de plus en plus simples et fiables, à une instrumentation adaptée.
Le coût représente toujours un obstacle important dans le contexte
de limitation des dépenses de santé, pour un appareil dont les
indications sont encore limitées.
Les communications libres au cours de la séance présidée par
A. Coste et L. Gilain le 3 octobre ont réuni des études sur les
dacryocystorhinostomies par voie endonasale.
A. Raji (Casablanca, Maroc) a comparé les résultats obtenus
après chirurgie endonasale et ceux de la chirurgie par voie
externe, chez 30 patients. Par voie externe, la littérature montre
que le taux de succès d’une dacryocystorhinostomie se situe
entre 87 % et 95 %, et, par voie endonasale, il se situe entre
81 % et 89 %. L’étude des 30 cas montre des pourcentages simi-
laires : les résultats sont comparables, et l’abord endonasal per-
met d’éviter une cicatrice et les risques de désinsertion du liga-
ment canthal interne.
Les causes d’échec sont des anomalies hautes des canaux lacry-
maux non diagnostiquées avant la chirurgie, les bourgeons
muqueux cicatriciels, l’inexpérience du chirurgien.
E. Racy (Lariboisière, Paris) a présenté les résultats d’une
étude prospective standardisée sur 100 patients entre 1997 et
1999. La dacryocystorhinostomie est réalisée après un dacryo-
scanner, qui est systématique pour définir les rapports anato-
miques du sac lacrymal à ouvrir. Il a insisté sur l’utilité de l’unci-
formectomie pour exposer tout le sac et éviter les stagnations
lacrymales dans le haut de celui-ci. Une turbinectomie moyenne
est effectuée s’il existe un risque de synéchies. Les échecs de
leur technique (12 cas) ont concerné principalement des sacs
fibro-atrophiques.
P. Klap (fondation Rothschild, Paris) a décrit son expérience
sur 76 patients, avec l’utilisation d’un nouveau matériel en sili-
cone qui limiterait les synéchies postopératoires. Il s’agit d’une
attelle endonasale, dont la partie supérieure ménage un tunnel
pour l’aération de la fosse nasale, et la partie inférieure est fixée
au septum. Elle est laissée 8 jours. Son utilité reste à évaluer de
façon objective.
CHIRURGIE PLASTIQUE
Réunion de la Société française de chirurgie plastique
et esthétique de la face et du cou
“Le lifting : indications, technique et détails”, par B. Cornette
de Saint-Cyr, invité d’honneur.
Il est important de rappeler que le but du lifting est de restaurer
les caractères de la jeunesse, qui comprennent : les volumes, qui
.../...
ACTUALITÉ
11
La Lettre d’Oto-rhino-laryngologie et de chirurgie cervico-faciale - no258 - décembre 2000
se réduisent avec l’âge, notamment sur les pommettes ou au
niveau des paupières inférieures, la pureté des lignes, atténuée
par les rides (visible surtout au niveau de la mandibule et du cou :
“double menton”). Enfin, les traits du visage ne doivent pas être
sensibles à la gravitation. Sur un visage jeune qui se penche, les
traits ne bougent pas. Ce phénomène est surtout visible de pro-
fil, et constitue un bon critère pour évaluer les résultats du lifting
en postopératoire, à moyen et long termes. Il faut garder les che-
veux temporaux (les “pattes”).
B. Cornette de Saint-Cyr pratique deux types d’incisions : l’inci-
sion précapillaire est réalisée de préférence, car elle est la plus
efficace, n’emportant que la peau sans cheveux. En cas de che-
veux fins coiffés en arrière, l’incision sous-capillaire de Mac Indoo
est préférable, car moins visible. Mais elle n’a aucune action tem-
porale. On peut alors lui associer une incision temporale séparée
endoscopique, ou une technique de Fogli. Celle-ci consiste en une
résection triangulaire inférieure externe de l’orbiculaire des pau-
pières, suivie d’une pexie avec enroulement du muscle, qui réa-
lise un lifting temporal.
Pour le décollement sous-cutané, il utilise le décolleur de Trep-
sat pour éviter de léser les filets du VII en avant de la parotide.
Le décollement cutané préparotidien va jusqu’à une ligne qui
joint l’angle externe de l’œil au gonion. Au lifting facial, on peut
associer des gestes de lipostructures de Coleman (injection de
graisse sous-cutanée après centrifugation), surtout dans la région
médiofaciale pour combler les sillons nasogéniens et les ridules
de la bouche. Le double menton est traité par liposuccion et par
lifting de façon combinée. La suture cutanée doit être prudente
au niveau du lobule de l’oreille : il faut prendre garde à ne pas le
fixer trop bas, car, avec le temps, il s’étire et on arrive à un aspect
“en oreilles de diable”.
Les nécroses postopératoires ne sont survenues, dans son expé-
rience, que de façon limitée au niveau du tragus ou de la cica-
trice mastoïdienne, chez des femmes fumeuses.
Les communications libres
de la réunion d’automne du 3 octobre
de la Société française de chirurgie plastique et esthétique
de la face et du cou ont porté sur des sujets variés
F. Postec (Lyon) a exposé ses facteurs prédictifs d’une exérèse
incomplète de tumeurs cutanées, grâce à une revue de 200 patients
dont 11 étaient immunodéprimés. Les tumeurs étaient des épithé-
liomas basocellulaires (76 %), spinocellulaires (21 %), ou des mala-
dies de Bowen (3 %). L’âge, le sexe, l’immunodépression, la taille
de la tumeur, la chirurgie de rattrapage n’étaient pas des facteurs
péjoratifs. Le risque d’exérèse incomplète dépend de la localisa-
tion et du type histologique. En effet, les localisations au conduit
auditif externe (100 % de chirurgie incomplète), au nez (20 %), à
la région péri-orbitaire, sont plus difficiles d’exérèse et de recons-
truction. Les types histologiques à risque sont l’épithélioma baso-
cellulaire sclérodermiforme et l’épithélioma spinocellulaire.
L’auteur propose, dans ces cas à risque, la conduite à tenir
suivante :
pratiquer la reconstruction dans un deuxième temps à chaque
fois que c’est possible, pour attendre le résultat définitif de l’ana-
tomopathologiste ;
dans les cas où la reconstruction différée n’est pas possible
(paupière, lèvre), il faut demander un examen extemporané et
privilégier la réalisation de lambeaux cutanés ne modifiant pas
l’orientation des recoupes, c’est-à-dire les lambeaux de transla-
tion ou d’avancement, en proscrivant les lambeaux de rotation et
de transposition.
M.A. Germain (IGR, Villejuif) a décrit 34 cas de reconstruc-
tion de langue par lambeau libre de grand dorsal. Ce lambeau est
à la fois vascularisé et innervé : il estime les résultats bons dans
les cas de glossectomie subtotale et moyens pour les glossecto-
mies totales. Parmi ses patients, 3 mangent normalement et 13
ont une élocution compréhensible. Ses conseils techniques sont
de respecter le nerf laryngé supérieur, de suspendre le larynx à
l’os hyoïde, de réaliser un transplant long, et d’en suturer les
branches nerveuses motrices et sensitives. Il ne semble pas utile
de reformer un sillon gingivo-lingual.
Deux communications ont porté sur la reconstruction des pertes
de substance du pavillon de l’oreille externe :
J.M. Chirol (Angers) a exposé la technique du lambeau de
conque en îlot (technique de Davis). Il s’agit d’un lambeau local
de rotation chondrocutané. Il est pédiculé sur l’artère auriculaire
postérieure. Il est utilisable pour les pertes de substance du tiers
supérieur du pavillon, qu’elles soient d’origine traumatique, mal-
formative ou après une exérèse tumorale. L’incision cutanée par-
court la face postérieure de la conque, en prenant un excès de
peau rétro-auriculaire, de manière à bien capitonner le cartilage
greffé. La conque est découpée en ellipse en fonction de la perte
de substance à combler, et la peau antérieure est réséquée. On
réalise le modelage du cartilage de façon à former un néo-anthé-
lix. La zone de prélèvement est laissée en cicatrisation dirigée
avec du tulle gras. Le cartilage restant réalise une armature, il n’y
a donc pas de rétraction à ce niveau.
J.B. Lecanu (Boucicaut, Paris) a décrit un cas d’utilisation de
sangsues dans le traitement postopératoire d’une réimplantation
de pavillon après amputation traumatique. Dans le cas exposé, la
réimplantation a consisté en une suture simple du pavillon en
deux plans. En postopératoire immédiat s’est posé le problème
d’un retour veineux insuffisant, avec une oreille bleue. Des sang-
sues médicinales ont été appliquées à travers deux orifices sca-
rifiés pendant trois jours, 24 heures sur 24, et changées toutes les
deux heures. Elles ont été associées à l’application locale d’une
solution d’héparine, et à une antibioprophylaxie poursuivie une
semaine après avoir enlevé les sangsues. Cette méthode s’est sol-
dée par un succès. L’avantage de la sangsue est qu’elle possède
dans sa salive un vasodilatateur histamine-like, de l’hirudine,
antithrombotique, et un anesthésique local.
Cette description a été l’occasion de rappeler les autres techniques
de réimplantation immédiate de pavillon après amputation.
Les réimplantations simples, associées à des traitements géné-
raux par héparine et macromolécules sont très souvent des échecs,
car les sutures microchirurgicales sont difficiles, et la vasculari-
sation est aléatoire.
Mladick a proposé, en 1971, d’enfouir le cartilage déserpider-
misé en nourrice dans une loge sous-cutanée rétro-auriculaire
pendant 6 à 8 semaines, puis de poser une greffe de peau mince
.../...
1 / 6 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !