La Lettre de L’Hépato-Gastroentérologue - n° 4 - août 1998 191
gine humaine nécessitant préalablement à leur réalisation un contrôle
obligatoire des compatibilités”.
Cet article a été légèrement modifié dans l’énoncé du décret 93.345
du 15 mars 1993 (10) qui précise que “l’infirmier est habilité à accom-
plir sur prescription médicale écrite, qualitative et quantitative, datée
et signée une injection ou une perfusion de produits sanguins d’origi-
ne humaine... à condition qu’un médecin puisse intervenir à tout
moment”.
L’exégèse des textes permet de souligner que les responsables ont
introduit une terminologie ambiguë en ce qui concerne la présence
médicale au moment de la transfusion, puisque l’on est passé de “en
présence d’un médecin” à “à condition qu’un médecin puisse interve-
nir à tout moment”.On peut remarquer que le texte ne comporte pas
de précision dans sa version récente sur le délai d’intervention. Une
position maximaliste pourrait être que “ à tout moment ” signifie
immédiatement et, dans ce cas, le texte n’est pas différent du précé-
dent.Une position moins rigoureuse serait compatible avec une inter-
vention médicale rapide sous réserve que l’infirmière prenne des
mesures immédiates d’arrêt de la transfusion en cas de suspicion d’in-
cident ou d’accident. Cette distinction est d’un intérêt capital en pra-
tique. Dans le premier cas, l’organisation des services médicaux où
sont pratiquées couramment des transfusions,comme c’est le cas dans
la majorité des services d’hépato-gastroentérologie,doit être celle des
services de “soins intensifs”,avec présence permanente d’un médecin
dans les unités de soins, alors que dans la seconde hypothèse, une
organisation de type “soins continus”,avec une astreinte médicale per-
mettant au médecin de se déplacer à la demande,est suffisante.Nul ne
peut dire aujourd’hui en cas de contentieux à l’occasion d’un accident
transfusionnel grave quelle sera l’interprétation des juges.Il serait inté-
ressant de connaître les raisons qui ont conduit à modifier le libellé du
texte,tant il est rare que la législation dans le domaine sécuritaire évo-
lue dans le sens d’une réduction des contraintes ! Actuellement, on
peut recommander vivement aux responsables des services hospita-
liers d’hépato-gastroentérologie fonctionnant sur le mode des soins
continus d’avoir des procédures écrites et affichées concernant la
conduite à tenir en cas d’incident ou d’accident transfusionnel.
CONCLUSION
Le renforcement de la sécurité de la transfusion sanguine et de l’admi-
nistration de dérivés du sang est une réponse pertinente à une deman-
de légitime dans le domaine de la santé,qui vise à rechercher un risque
zéro pourtant inaccessible.Sous les pressions de l’opinion publique,des
médias et des experts,les responsables politiques ont élaboré une mul-
titude de textes réglementaires qui progressivement risquent d’être
déconnectés de la pratique en raison de difficultés considérables d’ap-
plication.Elles sont de ce fait pour certaines peu ou pas appliquées sans
que le législateur ne réagisse, du moins jusqu’à ce jour. Cette appa-
rente tolérance peut s’expliquer par le fait que l’existence de textes
réglementaires défausse le législateur de sa responsabilité et la transfè-
re vers les exécutants et notamment les médecins transfuseurs.Or,en
matière de responsabilité médicale, la jurisprudence est changeante et
l’évolution actuelle conduit vers une obligation de résultat mais aussi de
sécurité.Face à cette évolution, les médecins gastroentérologues pres-
crivant et réalisant des transfusions sanguines doivent être conscients
qu’ils sont susceptibles,en cas d’accident ou de contamination,de sup-
porter comme pour un accident endoscopique la charge de preuve. Il
est de leur intérêt d’informer “a priori” le malade,le plus complètement
possible,des risques avérés et théoriques qui sont liés aux produits san-
guins labiles et aux médicaments dérivés du sang, et d’appliquer à la
lettre l’ensemble des mesures réglementaires. À moins que craignant
un éventuel “procès du sang” et prétextant de l’impossibilité maté-
rielle d’être présent physiquement pendant le déroulement des trans-
fusions, il confie cette mission à un collègue réanimateur … à qui en
quelque sorte il “transmettrait le mistigri” !
BIBLIOGRAPHIE DES PRINCIPAUX TEXTES RÉGLEMENTAIRES
(par ordre chronologique de parution)
1. Circulaire DGS/3B/552 du 17 mai 1985, relative à la prévention des acci-
dents transfusionnels et des accidents d’allo-immunisation.
2. Circulaire DGS/3B-DH/9D n° 589 du 3 juillet 1990, relative à la transfusion
autologue en vue d’une intervention programmée.
3. Circulaire DGS/3B/763 du 28 août 1987, relative à l’utilisation des produits
sanguins.
4. Circulaire DGS/3B/N°400 du 17 mai 1989, relative à la prévention des mala-
dies transmissibles par la transfusion sanguine.
5. Arrêté du 3 décembre 1991, relatif à l’utilisation du plasma congelé.
6. Circulaire DH/DGS/3B n° 47 du 15 janvier 1992, relative au suivi de la sécu-
rité transfusionnelle entre les établissements de transfusion sanguine et les éta-
blissements de soins.
7. Circulaire n° 94-54 du 23 septembre 1992, relative au plasma frais congelé.
8. Loi n° 93-5 du 4 janvier 1993, relative à la sécurité en matière de transfusion
sanguine et du médicament (80-85).
9. Décret n° 84-698 du 17 juillet 1984, relatif aux actes professionnels et à
l’exercice de la profession d’infirmier.
10. Décret n° 93-345 du 15 mars 1993, relatif aux actes professionnels et à
l’exercice de la profession d’infirmier.
11. Décret n° 93-353 du 15 mars 1993, destiné à l’application de l’article 13 de
la loi n° 93-5 du 4 Janvier 1993 relative à la sécurité en matière de transfusion
sanguine et du médicament.
12. Circulaire du 26 mars 1993, relative à la recherche des malades transfusés.
13. Décret n° 94-68 du 24 janvier 1994, relatif aux règles d’hémovigilance pris
pour application de l’article L 666-12 du code de la santé publique et modifiant
ce code.
14. Circulaire DGS/DH n° 40 du 7 juillet 1994, relative au décret n° 94-68 du
24 janvier 1994 sur l’hémovigilance pris pour application de l’article L 666-12
du code de la santé publique et modifiant ce code.
15. Arrêté du 4 août 1994, portant homologation du règlement de l’AFS relatif
aux bonnes pratiques de distribution et pris en application de l’article L 668-3
du code de la santé publique.
16. Arrêté du 8 décembre 1994, fixant les clauses obligatoires de la convention
entre un établissement de santé et un établissement de transfusion sanguine pour
l’établissement d’un dépôt de sang et modifiant le règlement relatif aux bonnes
pratiques de distribution homologué par arrêté du 4 août 1994.
17. Circulaire DGS/DH n° 92 du 30 décembre 1994, relative à la traçabilité.
18. Circulaire DGS/DH/AFS n° 85 du 10 octobre 1995, relative à la conduite à
tenir en cas d’incident bactérien lié à la transfusion sanguine.
19. Code de déontologie médicale – Édition décembre 1997.
20. Circulaire DGS n° 96-499 du 6 août 1996, relative à la conduite à tenir en
cas de découverte d’une séroconversion ou d’une sérologie positive chez un
receveur de produits sanguins labiles ainsi qu’aux suites à donner aux demandes
d’enquêtes des établissements de transfusion sanguine sur les receveurs de pro-
duits sanguins labiles présentant un risque viral.
21. Circulaire DGS/DH n° 609 du 1er octobre 1996, relative aux analyses et tests
pratiqués sur des receveurs de produits sanguins labiles.
22. Circulaire DGS/DH/AFS n° 97-149 du 26 février 1997, relative à l’accès
aux patients aux informations dans le domaine de la transfusion sanguine,
notamment dans le cadre d’une action en responsabilité.
23. Circulaire DGS/DH/AFS n° 97-662 du 30 septembre 1997, relative à l’in-
formation des médecins prescripteurs de produits sanguins labiles et des
malades transfusés vis-à-vis de la mesure d’ajournement définitif du don de sang
des receveurs de produits sanguins labiles.
24. Circulaire DGS/DH n° 98-231 du 9 avril 1998, relative à l’information des
malades, en matière de risques liés aux produits labiles et aux médicaments déri-
vés du sang et sur les différentes mesures de rappel effectuées sur ces produits
sanguins.