nouvelles disciplines4, utilisation de l'informatique généralisée, encyclopédies et bibliothèques
numériques5, MOOC6) ; mutations des corps comme des facultés cognitives (neurosciences,
biotechnologies, Intelligence artificielle, post-humanisme, mémoires, accès à l’information) ;
mutations du rapport à l’espace et au temps (géolocalisation, déplacements, télétravail,
instantanéité des communications à distance). Si ce champ d’objets s’impose à la recherche,
c’est d’abord en raison de son extension et de son impact apparent sur tous les domaines de
l’existence ; en effet, c'est l'ensemble du monde humain qui semble touché : la majorité des
individus sont connectés à Internet, les nouvelles technologies peuvent possiblement intégrer
le champ entier du social (milieu du travail, de la recherche, des loisirs, de la politique, de
l'économie, de la culture, des échanges marchands, de la médecine). Ce nouveau « système
technique » (Simondon) nous invite à repenser le sujet, tout comme l’humain en général, tant
dans leur rapport à la technique que dans leur définition même. Pour échapper à la conception
d'un sujet humain insulaire, hors du monde, faisant face aux moyens neutres de la technique,
l'effort doit porter sur la compréhension du tissage de l'un dans/avec l'autre, sur le devenir
technique de « l'être-au-monde », affectant ses modes de perception, sa corporéité, sa
sensibilité ou encore ses modes de catégorisation. Cette journée d’étude se propose donc de
repenser l'humain et le sujet, dans leur rapport à un non-humain spécifique, le non-humain
technologique, et dans la médiation généralisée instituée par le numérique. Cela nous engage
à articuler tout un ensemble de thèmes et de problèmes, que cette journée se propose de
structurer selon les deux axes suivants :
Le premier enjeu de cette journée est de questionner le statut ontologique de ces
« objets » et de mesurer leur impact sur le monde humain. Ces hybrides, à la fois sociaux et
naturels, non-humains technologiques, doivent être analysés dans leur commerce avec
l'humain, au croisement entre philosophie de la technique et ontologie ; cela implique de se
défaire d’une définition unilatérale du sujet libre et actif face à un monde d'objets inertes et
passifs. Il s'agit alors, dans ce contexte, tant d'étudier les pratiques, les activités, les
sensibilités que les discours impliqués par ces non-humains spécifiques, ainsi que leurs
conséquences sociales et politiques. Tout d’abord, qu’entend-t-on sous ce terme commun de
« nouvelles technologies » ? Quels sont donc ces « objets », ces « non-humains », ces
« artefacts », que l'on regroupe sous ce terme trop général ? Quel appareillage conceptuel
mobiliser pour constituer ce champ d'objets ? Est-ce le numérique ? Le virtuel ? Le
cyberespace ? Le travail critique doit avoir pour préalable de trancher dans la profusion de
termes, discours et thèses contradictoires7, dont bon nombre semblent s'appuyer sur un
imaginaire collectif largement implicite – élaboré notamment par la science-fiction du siècle
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3A"propos"des"conflits"sociaux,"voir"par"exemple"De"Lagasnerie"Geoffroy,"L’a rt & de& l a& ré vo lte !:"Snowden,"Assange,"
Manning," Fayard," 2015." Concernant" les" conflits" armés," voir" Chamayou!Grégoire,) Théorie( du( drone," éd." La"
Fabrique,*2013.!
4Citons'par'exemple'la'robotique,'l’intelligence'artificielle'et'plus'récemment'les'data$sciences!et#les#humanités#
numériques.!
5Wikipedia(est(le(modèle(le(plus(connu(d’une(telle(transformation.!
6Massive'Open'Online'Courses.!
7!Par exemple : le Web amène la perte du lien social et du corps. Voir Turkle Sherry, Alone Together, Basic
Books, 2011 ; la technique est essentiellement aliénante. Voir Ellul Jacques, Le Système technicien, Calmann-
Lévy, 3e édition, 2012 ; ou à l'inverse, la célébration des nouvelles technologies comme liberté augmentée,
démocratie radicale, village global, accès à un savoir illimité et non soumis aux lois du marché capitaliste. Voir
Lévy Pierre, Cyberdémocratie, essai de philosophie politique, éd. Odile Jacob, 2002.!