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RESUME
Le développement d’un cancer chez un individu immunocompétent témoigne, en partie, d’un
échappement tumoral au système d’immunosurveillance. L’échappement tumoral est un
phénomène complexe, multifactoriel, au cours duquel les cellules tumorales vont déjouer les
mécanismes de défense de l’hôte en modifiant leur microenvironnement. Par conséquent, la
restauration ou l’induction de ces mécanismes de défense anti-tumorale est une des
stratégies thérapeutiques actuelles. Un des principes de l’immunothérapie est basé sur
l’injection d’anticorps ayant pour cible la cellule tumorale ou les cellules effectrices de
l’immunité. L’efficacité anti-tumorale de ces anticorps a été considérablement améliorée par
une meilleure compréhension des modes d’action et des effets modulateurs de ces anticorps.
Ainsi, afin d’optimiser l’action des effecteurs immunitaires sur les cellules tumorales, un
anticorps bispécifique, trifonctionnel, le catumaxomab, capable de se lier à la molécule
d'adhérence des cellules épithéliales (EpCAM) exprimée par les cellules tumorales et à
l'antigène CD3 des lymphocytes T, a été développé, essentiellement en traitement intra-
péritonéal des ascites néoplasiques réfractaires.
L’objectif de cette étude était de déterminer les effets immunomodulateurs du catumaxomab
sur des cellules néoplasiques exprimant EpCAM, à partir de deux modèles expérimentaux
(allogénique et autologue), de rechercher une cytotoxicité induite par la catumaxomab, et de
la caractériser, notamment en analysant la présence ou non de signaux de stress inducteurs
d’une mort immunogène tels que l’exposition membranaire de la calréticuline par les cellules
tumorales pré-apoptotiques, la libération d’HMGB1 et d’adénosine triphosphate (ATP) dans
le milieu extra-cellulaire, responsables d’une activation des lymphocytes T.
En présence de cellules EpCAM+, le catumaxomab entrainait une activation majeure des
lymphocytes T (expression de CD69, CD107a, HLA-DR et PD1), stimulait une réponse
inflammatoire de type Thelper 1(Th1), et provoquait la synthèse d’interféron-gamma par les
lymphocytes T CD8. Le catumaxomab engageait le CD16 (FcR) des cellules monocytaires et
NK. De plus, sur des modèles allogéniques, le catumaxomab, provoquait une mort cellulaire
associée à la libération d’ATP et induisait une mort immunogène après pré-incubation dans
de l’oxaliplatine.
Par conséquent, le catumaxomab permet de moduler l’environnement immunitaire dans les
ascites néoplasiques, et de convertir une inflammation chronique et immunosuppressive
(Th2) en une inflammation aigüe et immunogène (Th1). En revanche, dans ces conditions,
l’administration seule de catumaxomab ne semble pas déclencher de mort immunogène.
Différents moyens pourraient permettre d’améliorer la cytotoxicité de cet anticorps
bispécifique : (1) le combiner avec un agent anti-néoplasique tel que l’oxaliplatine afin de
promouvoir une mort immunogène, (2) affiner son action sur le CD3 des lymphocytes en
modifiant sa configuration spatiale (anticorps BiTE), (3) amplifier son affinité pour le
récepteur Fcγ des cellules accessoires (Fc défucosylé), (4) augmenter sa cytotoxicité en
modifiant la cible dirigée contre la molécule du système immunitaire (anti-PD-1…). Enfin,
l’utilisation clinique pourrait être facilitée en humanisant cet anticorps chimérique murin afin
d’éviter la formation d’anticorps anti-murins, dirigés contre le catumaxomab.
Un essai thérapeutique de phase II dont le but est d’évaluer l’efficacité du catumaxomab
intrapéritonéal après chirurgie de cytoréduction complète d’une carcinose gastrique, chez
des patients ayant reçu en préopératoire une chimiothérapie systémique à base
d’oxaliplatine vient de débuter. Au cours de cette étude, nous allons valider la capacité du
catumaxomab 1) à induire un stress cellulaire immunogène et la mort des cellules
cancéreuses, 2) à modifier la polarisation des cellules effectrices vers une maladie
inflammatoire Th1, 3) à promouvoir l'expression des molécules de costimulation et TRAIL sur
les cellules NK et monocytes, et corréler ces biomarqueurs immunitaires à l’efficacité du
traitement.