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1st International Multidisciplinary Congress
on Salivary Gland Diseases
Genève, 27-30 janvier 2002
● D. Chevalier*
a première conférence internationale de pathologie des
glandes salivaires s’est tenue à Genève du 27 au
30 janvier 2002. Plus de 300 participants ont tenté de
faire le point sur de nombreux thèmes.
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GÉNÉRALITÉS
Une première session sur la physiologie et la biologie des glandes
salivaires a permis un rappel sur l’histologie normale de ces
glandes.
● G. Proctor (Grande-Bretagne) a rappelé la composition
ionique de la salive. La sécrétion est dépendante de stimuli
réflexes sous contrôle du système nerveux autonome. Par le biais
d’une augmentation de la perméabilité cellulaire aux ions, la
salive est riche en sodium, en bicarbonates et en chlore. Elle est
habituellement hypotonique, ce qui rend plus sensible les récepteurs gustatifs au sel contenu dans l’alimentation.
● J. Ekstrom (Suède) a montré le rôle du système nerveux autonome dans le contrôle nerveux des glandes salivaires. D’une
manière générale, le système parasympathique est responsable
du débit salivaire alors que le système sympathique influence la
composition de la salive. Les cellules acineuses sont responsables
de la sécrétion salivaire primaire et répondent à une stimulation
nerveuse. Les cellules myoépithéliales, du fait de leur contraction, sous dépendance du système nerveux autonome, permettent
un afflux de salive dans la cavité buccale. Ultérieurement, afin
de maintenir des débits salivaires suffisants, les sécrétions sont
assurées grâce à un échange sanguin rapide. L’auteur a montré
également, à partir d’études animales, qu’il existait, au cours de
l’alimentation, un œdème périglandulaire et une extravasation de
protéines à partir de la microvascularisation. L’ensemble de ces
travaux suggérait l’intervention de neuropeptides en complément
des systèmes parasympathique et sympathique.
* Service ORL, hôpital Claude-Huriez, 1, place de Verdun, 59037 Lille Cedex.
LES PAROTIDITES RÉCIDIVANTES
● I. Brook (États-Unis) rappelait que la glande parotide est le
plus souvent concernée par les infections salivaires. Parmi les
causes bactériennes, le staphylocoque est souvent associé à des
germes anaérobies (Prevotella, Porphyromonas, Fusobacter,
Peptostreptococcus). Les germes à Gram négatif sont ceux le
plus souvent retrouvés chez les patients hospitalisés. Les mycobactéries typiques ou atypiques sont plus rarement en cause. Le
traitement repose toujours sur une antibiothérapie adaptée en
association avec une réanimation et une parfaite hydratation du
patient.
Le traitement préventif est le maintien d’une hygiène buccale
satisfaisante et la mise en route d’un traitement précoce.
XÉROSTOMIE, HYPERSIALORRHÉE
● K. Vogt (Allemagne) a présenté les résultats de la ligature du
canal de Sténon à visée thérapeutique. Il a proposé cette technique chez 59 enfants et 50 adultes présentant une parotidite chronique récidivante associée ou non à des anomalies des canaux
excréteurs. Les indications retenues étaient les parotidites récidivantes non obstructives et le syndrome de Sjögren. L’intervention était faite sous anesthésie générale avec dissection par
voie endobuccale, aussi loin que possible du canal de Sténon.
Celui-ci était ensuite ligaturé. Les auteurs ont observé un succès
dans plus de 90 % des cas, avec diminution des épisodes de tuméfaction parotidienne. Les échecs ont été surtout notés en présence
d’une dilatation du canal de Sténon et, dans ce cas, une parotidectomie superficielle a été réalisée.
L’objectif de ce traitement est de provoquer une atrophie et
une sclérose de la glande afin de diminuer les épisodes de tuméfaction.
● À propos de la place de la radiothérapie, L. Franzen (Suède)
a présenté une série de 18 patients atteints d’une sclérose latérale
amyotrophique évoluée et souffrant d’une hypersalivation sévère.
La dose délivrée était de 7,5 Gy en une seule séance, de manière
bilatérale, au niveau de l’aire parotidienne et de la partie postérieure des glandes sous-mandibulaires. Dans 16 cas sur 18, il était
noté une nette régression de l’hypersalivation avec un recul de
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4 à 6 mois. Dans un cas, la xérostomie était au contraire importante et nécessitait un traitement par salive artificielle. Enfin, l’état
d’un patient n’a pas été amélioré.
● M. Borg (Australie) a également présenté une série de
34 patients traités par radiothérapie pour diminuer une hypersialorrhée. Quatre-vingt-deux pour cent d’entre eux présentaient une
bonne réponse à ce traitement, nécessitant une nouvelle séance
pour 2 patients. Les auteurs notaient que les doses faibles d’irradiation étaient aussi efficaces que les doses élevées.
● D. Uglietti (Italie) a cherché une relation entre les paresthésies buccales et une éventuelle xérostomie. L’étude a été conduite
chez 30 patients présentant des brûlures buccales essentielles.
L’objectif était de comparer les sécrétions salivaires par rapport
à une population témoin. Il n’était pas noté de différence significative de débit salivaire dans les deux populations. Ces patients,
qui se plaignent souvent d’une sensation de sécheresse buccale,
ne présentent en fait aucune diminution du débit salivaire.
● R. Nagler (Israël) s’est intéressé au mécanisme de la xérostomie postradiothérapique. Il a montré que, même pour des doses
faibles, inférieures à 10 Gy, il existe rapidement une perte de la
composante séreuse des sécrétions salivaires. Les cellules souches
acineuses semblent être plus fragiles et sont plus précocement
atteintes. Les glandes parotides contiennent plus de cellules acineuses et sont donc plus rapidement exposées à une réduction
importante de leur sécrétion. Le mécanisme de destruction de ces
cellules fait intervenir les altérations de l’ADN, mais serait aussi
la conséquence de granulations contenant du fer, du cuivre et du
manganèse, que l’on trouve de manière abondante à proximité
du noyau des cellules.
L’HYPERTROPHIE DIFFUSE DES GLANDES PAROTIDES
C’est un motif de consultation fréquent dans les services de médecine et d’ORL.
● J. Evenson (Grande-Bretagne) en a rappelé les principales
causes. Elles peuvent être infectieuses, et tout d’abord virales.
L’infection par un myxovirus, fréquente chez l’enfant, survient
de manière épidémique, s’accompagne d’une dégénérescence
des cellules acineuses avec une infiltration diffuse, lymphocytaire, intraparenchymateuse, associée à une hyperhémie. Elle
explique l’augmentation de volume des glandes parotides. Pour
les autres causes virales moins fréquentes, les infections à
cytomégalovirus et à VIH sont en cause. Dans cette dernière étiologie, il ne faut jamais méconnaître les infections tumorales intraparotidiennes comme les lymphomes ou les sarcomes de Kaposi.
Les infections bactériennes ont déjà été exposées par d’autres
auteurs, notamment la maladie des griffes du chat, qui peut être
liée à la présence de ganglions intra- ou paraparotidiens. Les
causes non infectieuses, non spécifiques, au premier rang desquelles la sarcoïdose, sont responsables de tuméfactions parotidiennes. Les étiologies plus rares sont la maladie de Wegener,
l’amylose, la sialadénite xantogranulomateuse. Enfin, on note
également les sialadénites auto-immunes et les sialadénoses non
inflammatoires et non tumorales. Elles auraient des causes nutritionnelles (boulimie, déficit en vitamine A, malnutrition), métaboliques (alcoolisme, cirrhose) et endocriniennes (diabète, hypo12
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thyroïdie, etc.). Dans cette situation, il est noté une hypertrophie
des cellules acineuses avec compression des canalicules et, progressivement, congestion du tissu parotidien, qui est, à long
terme, l’objet d’une transformation lipomateuse.
LE SYNDROME DE FREY
De nombreux auteurs se sont intéressés à différents aspects de
cette complication retardée de la chirurgie parotidienne.
● P. Dulguerov (Suisse) a rappelé les différentes théories pouvant expliquer ce syndrome. La plus courante est la réinnervation aberrante des fibres parasympathiques qui sont sectionnées
lors de la chirurgie parotidienne. Il a rappelé qu’il existait une
période de latence avant l’apparition des signes, au minimum de
un à deux mois. Les symptômes sont abolis par des injections
locales de substance anticholinergique. La méthode d’analyse la
plus classique de l’hypersudation au cours de l’alimentation est
le test de Minor, qui utilise une pâte contenant de l’alcool iodé,
de l’éthanol et une huile. Plus facile à utiliser, l’auteur a présenté
la méthode du papier buvard avec mesure de son poids avant et
après stimulation gustative. Une variante est celle du papier
imbibé d’iode, qui modifie sa couleur lorsqu’il est au contact de
la sueur. Après calibration, ces tests permettent d’obtenir des données quantitatives et topographiques pouvant aider au suivi thérapeutique.
● À propos de la prévention de la survenue du syndrome de Frey,
L. Cesteleyn (États-Unis) a montré l’intérêt de l’utilisation du
système musculo-aponévrotique superficiel (SMAS) et du lambeau de fascia temporal. À partir d’une série de 146 cas, il a montré que la survenue de cette complication diminuait de 33 % à
4 % lorsque l’une ou l’autre des deux méthodes était utilisée et
que, par ailleurs, elle avait un rôle esthétique en diminuant la
dépression dans l’aire de parotidectomie.
● A. Eckaerdt (Allemagne) a présenté son expérience de l’utilisation de la toxine botulinique. Cent cinquante et un patients
étaient évaluables et 60 présentaient un syndrome de Frey. La
moitié d’entre eux se plaignaient d’une altération de la qualité de
vie. Soixante-neuf patients ont bénéficié d’une injection de toxine
botulique à la dose de 0,5 unités/cm2. La dose moyenne utilisée
chez ces patients était de 20 unités. La tolérance était bonne et la
récidive était notée 8 fois sur 30, autorisant le renouvellement du
traitement.
ADÉNOME PLÉOMORPHE DE LA GLANDE PAROTIDE
● J. Evenson (Grande-Bretagne) a présenté les caractéristiques
histopathologiques des adénomes pléomorphes. Sur le plan
macroscopique, la capsule est d’aspect variable, quelquefois
épaisse, quelquefois fine. La tumeur peut être bosselée, irrégulière ou au contraire tout à fait lisse et parfaitement sphérique.
L’auteur a montré la présence d’une nécrose intratumorale soit
spontanée, soit, à son avis, consécutive à la réalisation d’une ponction à l’aiguille fine pour examen cytologique. Il s’est intéressé
à l’extension intravasculaire, sans pouvoir prouver qu’elle avait
une influence sur l’évolution, et suggère qu’il pourrait s’agir
d’artéfacts.
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● M. Mac Gurk (Grande-Bretagne) défend une attitude minimaliste vis-à-vis des adénomes pléomorphes. Il est partisan d’une
dissection extracapsulaire car, dans son expérience, le taux de
récidive locale est le même, alors que le risque pour le nerf facial
est moindre. Cette attitude ne fait pas l’unanimité et est combattue par la majorité des auteurs. La présentation par M. Zanaret
(France) précise que l’énucléation, même élargie, est abandonnée depuis les années 50 en raison du fort risque de récidive locale
noté dans de nombreuses publications. Les arguments sont le
caractère parfois polylobé de la tumeur et/ou la description de
tumeurs satellites à proximité immédiate de la masse tumorale.
Avec les techniques de parotidectomie exofaciale ou subtotale,
le taux de récidive locale ne dépasse pas 2,5 %. Pour l’auteur, la
technique chirurgicale est choisie en fonction de la localisation
exacte de la tumeur, surtout s’il existe des arguments cytologiques
ou si l’IRM est en faveur de l’adénome pléomorphe. Les exérèses profondes peuvent être proposées lorsque la tumeur se situe
en dessous du plan du nerf facial. Tous les auteurs s’accordent à
craindre les récidives d’adénome pléomorphe, en particulier en
raison du risque de paralysie faciale postopératoire.
● P. Bradley (Grande-Bretagne) confirme que le taux de récidive est habituellement compris entre 2 et 5 %. L’imagerie est
systématique, idéalement réalisée par IRM associée à un examen
cytologique à l’aiguille fine. La chirurgie doit toujours tenter
d’éviter le sacrifice du nerf facial. Les difficultés rencontrées pour
l’exérèse de certaines récidives, alors qu’il s’agit d’une tumeur
bénigne, sont en faveur d’une option mesurée de simple surveillance, en particulier chez des patients âgés.
L’autre alternative à la chirurgie serait la radiothérapie, et l’auteur
rapporte un contrôle qui ne dépasse pas 90 %, avec un risque de
récidive locale pouvant survenir jusqu’à vingt ans plus tard.
Les exceptionnels adénomes pléomorphes métastasés qui surviennent en général après l’exérèse incomplète et inadéquate
s’accompagnent de multiples localisations cervicales, en général de très mauvais pronostic. Dans son expérience, l’auteur note
que le risque de dégénérescence d’une récidive locale est évalué
à 1,9 %, et que 65 % des récidives locales sont multinodulaires.
● G. Arnold (Allemagne) propose, en cas de récidive d’adénome
pléomorphe, la résection systématique de la cicatrice cutanée, en
particulier après énucléation. Une étude histologique a en effet
montré la présence de nombreux nodules, dont certains de moins
de 1 mm de diamètre au pourtour de la zone d’exérèse initiale.
Si ces nodules sont particulièrement fréquents dans la cicatrice
cutanée, on en trouve également au niveau de la graisse ou du
muscle adjacent.
● O. Guntinas-Lichius (Allemagne) a réalisé une étude prospective sur 100 cas d’adénomes pléomorphes de la glande parotide traités par parotidectomie exofaciale ou par parotidectomie
subtotale. La moitié des cas était d’un type myxoïde ; 97 % des
tumeurs avaient une capsule fine, inférieure à 20 microns d’épaisseur. Dans cette étude, l’auteur a montré qu’il pouvait y avoir une
absence focale de capsule en contact direct avec le tissu parotidien normal. Enfin, il a présenté quelques observations de nodules
satellites et de pseudopodes. Il confirme que, dans son expérience,
l’énucléation des adénomes pléomorphes est insuffisante pour
traiter chirurgicalement et de manière satisfaisante ces tumeurs.
LES CANCERS DES GLANDES SALIVAIRES
Bien que leur incidence soit moins fréquente que celle des adénomes pléomorphes, ce sujet préoccupe tous ceux qui prennent
en charge les pathologies tumorales des glandes salivaires.
● C. Witterkindt (Allemagne) a étudié la place du PET scan au
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FDG sur 24 patients. L’acquisition a été faite 12, 20, 90 et
150 minutes après l’injection. Il existe une activité importante
pour les cancers et pour les tumeurs de Warthin. Tous les adénomes pléomorphes présentaient une activité faible. Le PET scan
peut, en revanche, différencier les tumeurs malignes des tumeurs
de Warthin, car l’activité continue à augmenter après 90 minutes
en présence de tissu tumoral malin.
● H. Goepfert (États-Unis) a rappelé que la chirurgie est le traitement standard de la majorité des tumeurs malignes des glandes
salivaires, avec une exérèse totale si possible. Les facteurs pronostiques sont représentés par le stade de la tumeur, le type histologique et son grade, et le mode d’invasion locale, en particulier si les recoupes chirurgicales sont saines ou non. La
chimiothérapie n’a pour l’instant pas apporté la preuve d’un bénéfice. La radiothérapie exclusive est proposée lorsque l’exérèse
chirurgicale est impossible.
● M. Catterall (Grande-Bretagne) présentait une communication sur la place de la neutronthérapie dans le traitement des
tumeurs malignes salivaires à propos de 65 patients (glande parotide 44, sublinguale 9, autres 12). Dans 38 cas, il s’agissait d’une
récidive locale après chirurgie et, dans 14 cas, les patients avaient
au préalable déjà été traités par radiothérapie conventionnelle.
Plus de la moitié des tumeurs étaient classées T4. Sur l’ensemble
de la population étudiée, le taux de contrôle local était de 71 %,
avec un bon comportement vis-à-vis du nerf facial, puisque les
auteurs notaient une récupération de la paralysie faciale dans
45 % des cas lorsque celle-ci existait. La neutronthérapie est
donc un traitement de choix pour les tumeurs non résécables des
glandes salivaires.
● E. Stennert (Allemagne) s’est intéressé au devenir du nerf
facial après chirurgie parotidienne pour cancer. Tous les patients
étudiés ont bénéficié d’une dissection du nerf facial et d’une parotidectomie, sous microscope opératoire. Un contrôle électromyographique a été effectué. La survie dans sa série était importante, puisque, tous stades confondus, elle était de 13 % à 5 ans.
Après une dissection méticuleuse du nerf au microscope, il était
possible de préserver le nerf facial dans 80 % des cas, sans que
cela altère le pronostic.
● Les carcinomes adénoïdes kystiques sont rares et représentent
10 à 20 % des tumeurs malignes des glandes salivaires principales et accessoires. Néanmoins, ils constituent une entité histopathologique distincte caractérisée par son évolution progressive,
l’invasion périneurale, et la survenue de métastases à distance
parfois tardives. H. Kokemueller (Allemagne) a rapporté son
expérience sur 74 patients durant ces vingt dernières années.
L’âge moyen était de 58 ans et la majorité des tumeurs était localisées au niveau des glandes salivaires accessoires (dans 44 cas
sur 74). La survie à 5, 10 et 15 ans était de 69, 51 et 37 % respectivement ; 42 patients ont présenté une progression tumorale
locale régionale ou à distance.
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