DOSSIER
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La Lettre du Sénologue - n° 29 - juillet/août/septembre 2005
Caractéristiques
Dès le départ, il était clair que la Commission européenne ne
pouvait subventionner de programmes de dépistage du cancer
du sein locaux/régionaux ou nationaux. De tels services sont
sous la responsabilité des systèmes de santé nationaux/régio-
naux et doivent être financés par des ressources nationales
publiques ou privées (principe de subsidiarité). Il a été montré
que la mise en œuvre de ressources publiques par un système
de santé centralisé était plus efficace dans la mise en place
d’un programme de dépistage systématique que les systèmes
décentralisés bien que ces derniers aient apporté des exemples
réussis. L’existence de registres de cancers peut apporter une
aide, non seulement pour fournir l’incidence et la mortalité par
cancer du sein à chaque instant, mais aussi pour participer au
suivi et à l’évaluation des programmes.
Outre les différences de systèmes de santé parmi les pays euro-
péens, il existe des différences culturelles particulières en pra-
tique médicale dans la délivrance et la performance des ser-
vices. Dans certains pays, le principe de multidisciplinarité et
de revue par ses pairs est de pratique courante. L’active vérifi-
cation des qualifications, la mise en place des objectifs, la défi-
nition de standards minimaux, la formation, la certification et
la transparence des services de dépistage du cancer du sein ont
été souvent des nouveautés pour les différents acteurs et
n’étaient pas toujours bien acceptés. Cependant, ces critères de
qualité ont amélioré la délivrance et les résultats de ces ser-
vices et réduit les effets négatifs du dépistage.
Parmi les seize projets dans dix pays européens, sept fonction-
nent dans un système de santé centralisé (Copenhague,
Navarre, Galice, Valence, Coimbra, Florence et Turin), sept
dans un système décentralisé (Bruxelles, Cologne, Louvain,
Luxembourg, Marseille, Ormylia et Strasbourg) et deux dans
un système mixte (Irlande et Athènes). Douze des seize projets
ont introduit pour les activités de dépistage des nouvelles
structures, sous forme d’unités statiques ou semi-mobiles,
quatre opèrent avec les structures existantes de radiologie
(Bruxelles, Luxembourg, Marseille et Strasbourg). Douze des
seize projets utilisent également ces structures existantes, sur-
tout pour le diagnostic des lésions dépistées. Depuis la créa-
tion, cinq pays européens ont instauré ou sont sur le point
d’instaurer un programme national de dépistage : Allemagne,
France, Belgique et Irlande. Le Luxembourg a été le seul pays,
dans le cadre du réseau, à démarrer dès le début un programme
national.
Résultats
Au cours des dix années de suivi du réseau (1989-1999) se
dessine une homogénéité conforme aux recommandations des
European guidelines for Quality Assurance in Mammography
Screening (3eédition) (9) surtout en ce qui concerne les cri-
tères opérationnels : gratuité, tranche d’âge 50-64 ans s’éten-
dant progressivement à 69 ans, deux incidences au moins à la
première vague, intervalle de 2 ans, double lecture des mam-
mographies.
Au cours des années, les seize projets ont amélioré leurs activi-
tés dans le domaine de l’assurance de la qualité en appliquant
les European guidelines dans les activités de dépistage : for-
mation des radiologues et des manipulateurs, adaptation des
protocoles de qualité technique, standardisation des comptes-
rendus anatomopathologiques et de la collecte des données
épidémiologiques. Ces collectes ont permis de comparer les
indicateurs précoces d’efficacité dans les différents projets.
Ceux-ci paraissent répondre aux normes des recommandations
européennes quel que soit le système utilisé (taux de détection
et stade des cancers dépistés) (tableau I). Il est trop tôt pour
apprécier les résultats en termes d’effet sur la mortalité. On
sait que cet effet est difficile à mesurer car il dépend de la
situation avant et en dehors du dépistage dans la région consi-
dérée.
Évolution actuelle du réseau européen
Le nouveau programme d’action communautaire 2003-2008 ne
subventionne plus de programme relatif à une maladie spéci-
fique et le réseau européen EBCN ne pouvait plus être financé.
Le nouveau plan d’action a permis le regroupement de services
de dépistage et a favorisé la création d’un réseau européen de
lutte contre le cancer, l’European Cancer Network (ECN). Ces
dispositions étaient en accord avec les recommandations du
Indicateur de performance Niveau acceptatble Niveau souhaitable
Proportion de femmes > 70 % > 75 %
participant au dépistage
parmi les femmes invitées > 70 % > 75 %
Proportion de femmes
rappelées pour des examens
complémentaires
– au dépistage initial < 7 < 5
– au dépistages ultérieurs < 5 < 3
Taux de détection de cancer
exprimé en multiple du taux
d’incidence attendu en absence
de dépistage (IR)
– au dépistage initial 3 x IR 1,5 x IR
– aux dépistages ultérieurs > 3 x IR > 1,5 x IR
Taux de cancer d’intervalle
en proportion du taux
d’incidence de cancer du sein
attendu en absence de dépistage
– la 1ère année (0-11 mois) 30 % 50 %
– la 2eannée (12-23 mois) < 30 % < 50 %
Proportion de cancers 10 % 10-20 %
canalaires in situ parmi les
cancers dépistés
Proportion de cancers
stade II+ parmi les cancers
dépistés
– au dépistage initial 25 % 20 %
– aux dépistages ultérieurs < 25 % < 20 %
Proportion de cancers dépistés
sans envahissement ganglionnaire
– au dépistage initial 70 % 75 %
– aux dépistages ultérieurs > 70 % > 75 %
Proportion de cancers ≤10 mm
parmi les cancers dépistés invasifs
– au dépistage initial ≥20 % ≥25 %
– aux dépistages ultérieurs ≥25 % ≥30 %
Taux bénin/malin en biopsie
chirurgicale
– au dépistage initial ≤1 : 1 ≤1 : 1
– aux dépistages ultérieurs ≤0,5 : 1 ≤0,2 : 1
Tableau I. Indicateurs de performance dans un programme organisé de
cancer du sein. Les objectifs sont indiqués pour une population de plus
de 50 ans. Ce tableau est tiré de European Guidelines for Quality
Assurance in mammography screening (3eédition) (9).