QUALITÉ DE VIE
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La Lettre du Sénologue - n° 1 - juin 1998
es progrès thérapeutiques ont permis à une femme
traitée pour cancer du sein de voir augmenter ses
chances de guérison et souvent de conserver son
sein. Il reste cependant toujours indispensable
d’effectuer un curage axillaire du côté de la tumeur. Celui-ci
permet de réaliser l’ablation des ganglions susceptibles de
contenir des cellules tumorales et de définir la stratégie théra-
peutique médicale adjuvante.
Le risque de séquelles lymphatiques n’est cependant pas égal
chez toutes les femmes. Il est fonction du capital lymphatique
de chacune, de l’importance de la destruction et de l’évolution
des cicatrices profondes.
Le lymphœdème peut survenir plus ou moins tôt après le trai-
tement du cancer. Il est parfois déclenché par une agression
minime.
Les conseils aux patientes reposent donc sur une hygiène de vie
adaptée, les préservant des agressions quotidiennes. La pratique
du sport a-t-elle sa place dans ce nouveau mode de vie ?
LA PRATIQUE DU SPORT APRÈS TRAITEMENT POUR
CANCER DU SEIN EST-ELLE POSSIBLE ?
La question nous est parfois posée en consultation, générale-
ment par d’anciennes sportives, mais aussi, quelquefois, par
des patientes qui ont envie de faire du sport dans les suites du
traitement d’un cancer du sein.
CEPENDANT, N’EST-CE PAS DANGEREUX ?
La réalisation systématique d’un curage n’a-t-elle pas altéré
fortement le drainage lymphatique du membre supérieur du
côté traité ?
Certes, l’équilibre lymphatique du membre supérieur après
curage est précaire et toute agression augmente ce risque :
gestes répétitifs, port de charges lourdes, contractions muscu-
laires durables, étirements, chocs...
Néanmoins, le sport présente des effets très positifs : il permet
de retrouver confiance dans son corps, il permet de lutter
contre l’ostéoporose chez des patientes qui ne peuvent plus
bénéficier du traitement hormonal substitutif, il a un effet
dynamisant et “antidépresseur”. Il aide à la réhabilitation, au
retour à la vie antérieure. Enfin, il participe à
la rééducation de l’épaule et évite l’ankylose.
QUE DIRE AUX PATIENTES QUI ONT ENVIE
DE PRATIQUER UN SPORT ?
Plutôt que de leur asséner une série d’inter-
dits, il est préférable de leur expliquer, si
possible à l’aide de schémas, le système lym-
phatique et les modifications apportées par le traitement, de
discuter de leurs activités sportives, et de les aider éventuelle-
ment dans leur choix. Il faut leur apprendre à s’observer après
un effort, à savoir reconnaître les signes d’alarme : lourdeur,
gêne du bras, fatigabilité, discret œdème d’un doigt qui
n’apparaît bien souvent que 24 à 48 heures après l’effort.
QUELS CONSEILS LEUR DONNER ?
Tout d’abord, ne pas tenter de défi, ne pas rechercher la perfor-
mance.
Recommencer le sport progressivement en s’autorisant des
pauses. Après l’effort et pendant le temps de repos, favoriser le
drainage lymphatique en mettant le membre supérieur en sur-
élévation, éventuellement asperger le bras d’un jet d’eau
fraîche. Enfin, en cas de lymphœdème connu et surveillé,
porter un brassard de contention pendant l’activité sportive.
Y A-T-IL DES SPORTS PARTICULIÈREMENT CONSEILLÉS ?
■La natation, notamment la brasse et le crawl, est possible.
L’amplitude de l’épaule est améliorée ; l’effort musculaire
développé dans l’eau est moindre. Certaines patientes ont
découvert la gymnastique aquatique, d’autres ont appris à
nager...
■La gymnastique, dont il est préférable de choisir les formes
douces : éviter le “body building” et la musculation. Ménager
l’épaule et le bras du côté traité, mais il n’est pas interdit de
faire des abdominaux, sauf bien entendu après reconstruction
mammaire par lambeau du muscle grand droit.
■La marche, sans limitation, en évitant le port de sac à dos
chargé.
■Sont possibles également, sans restriction, de nombreux
sports : plongée sous-marine, parachutisme, aile volante, équi-
tation, vélo...
Sport après cancer du sein
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V. Servent*
L
* Centre Oscar-Lambret, Lille.