La Lettre du Neurologue - n° 1 - vol. IV - février 2000
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Quelles sont la durée et la fréquence optimales
de la rééducation, par jour, par semaine (combien
de séances hebdomadaires et sur quelle durée) ?
Il n’y a pas de réponse définitive à cette question qui n’a pas
réellement fait l’objet d’études contrôlées. Toutefois, il est clair
que l’efficacité de la rééducation dépend en grande partie de son
intensité. Quelques études peu nombreuses ont comparé l’effet
d’une rééducation intensive versus une rééducation plus
conventionnelle et ont montré un bénéfice léger mais significa-
tif en faveur des traitements intensifs. Cela est également vrai
pour la rééducation de l’aphasie. Comme le notait récemment
Joseph, des études anciennes, qui utilisaient des durées courtes
de rééducation hebdomadaires du langage (moins de 2 heures),
avaient rapporté des résultats négatifs, alors que la plupart des
études ayant utilisé des durées de 5 heures par semaine ou plus
de rééducation orthophonique ont pu mettre en évidence un
effet significatif.
L’idéal serait donc d’avoir, dans les trois premiers mois de l’ac-
cident vasculaire cérébral, une séance par jour de 45 minutes
d’orthophonie et de rééducation motrice, et ce quatre ou cinq
jours par semaine. Cela n’est toutefois pas toujours possible, en
particulier du fait du faible nombre de rééducateurs disponibles
dans les services non spécialisés.
Quand arrêter la rééducation orthophonique
motrice ?
Là encore, cette question n’est pas complètement résolue.
Comme on l’a vu plus tôt, il est certain que la rééducation la
plus efficace est celle qui est pratiquée précocement, dans les
trois à six premiers mois. Au-delà d’un an, l’efficacité décroît
même si elle n’est pas nulle. Aucune étude contrôlée ne permet
donc de répondre formellement à cette question. La pratique
veut qu’il soit habituel de réduire le nombre de séances de
rééducation au-delà de la première année. Cela doit toutefois
être évalué au cas par cas, et il peut être utile chez certains
patients de reprendre, après quelques mois d’interruption,
durant une période de un à deux mois, une rééducation plus
intensive en centre spécialisé de façon à éviter que le patient ne
perde ce qu’il a pu acquérir.
Faut-il rééduquer la négligence ?
La réponse est certainement oui, même si l’efficacité des réédu-
cations de la négligence unilatérale reste discutée. Il est certain
que la négligence joue un rôle péjoratif sur la récupération de
l’autonomie dans les activités de la vie quotidienne. La rééduca-
tion traditionnelle de la négligence unilatérale est essentielle-
ment empirique, fondée sur un réentraînement de l’exploration
visuelle vers la gauche en utilisant un indiçage à gauche.
L’efficacité de ces traitements semble cependant surtout mar-
quée sur les tâches utilisées en rééducation et se généralise peu à
des situations non directement travaillées. Le transfert des acquis
dans les activités de la vie quotidienne reste incertain. Toutefois,
plus récemment, certaines publications ont pu démontrer l’inté-
rêt d’autres techniques de prise en charge, telles que l’activation
motrice de l’hémicorps gauche ou encore l’adaptation à des
prismes, déviant de 10 ° les images vers la droite. L’efficacité de
ces techniques demande encore à être confirmée.
Y a-t-il des médicaments qui potentialisent
l’effet de la rééducation ?
Aucune étude clinique n’a pour l’instant démontré de façon
convaincante l’efficacité de médicaments sur la récupération
neurologique. Des données expérimentales obtenues chez l’ani-
mal laissent penser que dans l’avenir certaines drogues, notam-
ment des dérivés des amphétamines, pourraient être utiles. Cela
demande à être confirmé chez l’homme.
Quelle est la place de l’ergothérapie ?
L’objectif principal de l’ergothérapie est la réacquisition de
l’autonomie dans les actes de la vie quotidienne (habillage, toi-
lette, prise de la douche ou du bain, par exemple).
L’ergothérapie est également utile dans la rééducation du
membre supérieur de l’hémiplégique, même si, là encore, nous
manquons d’études contrôlées qui démontrent l’efficacité de ce
type de prise en charge. Enfin, les ergothérapeutes ont une com-
pétence spécifique dans la rééducation de la négligence unilaté-
rale qui, comme nous l’avons vu, est un point important de la
rééducation des hémiplégiques gauches.
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
• Azouvi P. La rééducation améliore-t-elle les troubles secondaires à l’atteinte de
l’hémisphère mineur ? Annales de Réadaptation et de Médecine Physique 1997 ;
40 : 205-11.
• Joseph P.A. Quand doit-on commencer la rééducation orthophonique chez
l’hémiplégique aphasique ? Selon quelles modalités et pendant combien de
temps ? Annales de Réadaptation et de Médecine Physique 1998 ; 41 : 53-65.
• Ottenbacher K.J., Jannell S. The results of clinical trials in stroke rehabilitation
research. Archives of Neurology 1993 ; 50 : 37-44.