MISE AU POINT
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La Lettre du Pneumologue - Volume V - no4 - juillet-août 2002
I
l existe de nombreuses myopathies susceptibles de provo-
quer une atteinte simultanée des muscles des membres, du
tronc et des muscles respiratoires. La plus connue, et la
plus étudiée, est la dystrophie musculaire de Duchenne de Bou-
logne. Sa prévalence est d’environ 3/100 000. La plus fréquente
des myopathies est la myotonie de Steinert (prévalence
8/100 000). Contrairement à la précédente, son histoire naturelle
est pourtant moins bien connue du fait de la diversité des formes
cliniques. Dans le tableau I, nous avons tenté de résumer la clas-
sification des myopathies les plus fréquentes susceptibles de pro-
voquer une atteinte respiratoire.
Le point le plus important de ces 20 dernières années est que la
mise en place d’une ventilation prolongée améliore de façon spec-
taculaire l’espérance de vie de ces patients. Il est maintenant bien
établi que la majorité des patients atteints d’une dystrophie mus-
culaire de Duchenne de Boulogne décédaient auparavant à l’âge
de 20 ans. Les moyens actuels de ventilation permettent d’obte-
nir des gains de survie de 10 à 15 ans environ.
Pourtant, la prise en charge de ces patients pose de très réels pro-
blèmes d’organisation. Peu d’équipes peuvent s’engager dans la
prise en charge prolongée de grands handicapés moteurs et res-
piratoires. L’une des difficultés tient au fait qu’il faut faire appel
Ventilation à domicile au long cours
dans les myopathies de l’adulte.
Les principes de la prise en charge
J.C. Raphael*
* Pôle ventilation à domicile, service de réanimation médicale, hôpital Raymond-
Poincaré, Garches.
Points forts
Il existe de nombreuses myopathies susceptibles de provoquer une atteinte respiratoire.
Leur prise en charge est complexe et nécessite des équipes multidisciplinaires.
La gravité du syndrome restrictif est habituellement sous-estimée.
La mesure de la capacité vitale, à l’état stable, est indispensable.
L’indication d’une “ventilation de nécessité” repose sur l’existence d’une hypercapnie diurne (PaCO2supérieure ou égale à
45 mmHg) et/ou d’une capacité vitale inférieure à 30 % des valeurs théoriques.
Le bénéfice d’une ventilation dite “de prévention” chez les patients qui n’ont pas ces critères de gravité reste à démontrer.
Il est indispensable d’établir un suivi de ces patients traités à domicile, ce qui impose de travailler en réseau avec les diffé-
rents professionnels concernés (associations d’insuffisants respiratoires, hospitalisation à domicile ou équivalent, différents
médecins libéraux et paramédicaux, services sociaux).
Tableau I. Principales myopathies susceptibles d’entraîner une
atteinte de la fonction respiratoire.
Dystrophies* musculaires progressives
Duchenne de Boulogne et Becker
Sarcoglycanopathie
Dystrophie des ceintures
Dystrophies* musculaires congénitales
Avec ou sans déficit en mérosine
Myopathies congénitales
Nemaline myopathie
Central core
Myotubulaire
Dystrophie* myotonique
Steinert
Maladies inflammatoires
Polymyosite et dermatomyosite
Myopathies métaboliques
Myopathie mitochondriale
Lipidose (déficit en carnitine)
Glycogénose (déficit en maltase acide)
* Les dystrophies sont caractérisées par un aspect particulier des fibres musculaires
(irrégularité de taille) et le fait qu’elles sont la conséquence d’un déficit d’une des
dystrophines.
MISE AU POINT
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La Lettre du Pneumologue - Volume V - no4 - juillet-août 2002
à des structures spécifiques, bien organisées, multidisciplinaires,
susceptibles de faire face aux demandes médicales, qui sont nom-
breuses, mais également à tous les problèmes sociaux et écono-
miques que posent la majorité de ces patients.
Le but de cette mise au point est de brièvement résumer les prin-
cipales étapes de cette prise en charge, en insistant sur les pro-
blèmes respiratoires.
CONFIRMATION DU DIAGNOSTIC
D’une façon générale, le diagnostic d’une maladie neuromus-
culaire, et en particulier celui des myopathies, est difficile. Outre
les signes cliniques, la connaissance de ces maladies évolue de
façon très rapide grâce aux progrès de la génétique et de la bio-
logie moléculaire. Il est pourtant essentiel de faire ce diagnos-
tic dans un but pronostique, mais également dans un but de pré-
vention (conseils génétiques) puisque de nombreuses maladies
sont à transmission génétique. Ce problème peut se poser lors
de la mise en route de la ventilation. Dans notre expérience, pour
10 à 15 % des patients que nous suivons, le diagnostic initial a
dû être modifié.
INFORMATION DU PATIENT
ET DE SA FAMILLE
Ce chapitre majeur mériterait un long développement, qui ne
peut être que résumé ici. Le constat habituel est que l’informa-
tion est notoirement insuffisante, surtout en ce qui concerne les
éléments du pronostic, le recours éventuel à un moyen de ven-
tilation mécanique, tous les problèmes de la vie quotidienne
(aménagement du lieu de vie, ressources économiques, organi-
sation du travail, des loisirs, etc.). L’une des explications de ce
fait est la multiplicité des intervenants et l’absence habituelle de
coordination. Les patients ont été en contact avec de nombreux
spécialistes (pneumologue, rééducateur, neurologue, pédiatre,
chirurgien) : on comprend aisément que l’information délivrée
ne soit pas cohérente, surtout si le diagnostic n’est pas établi
avec certitude. L’information sur le problème spécifique de la
ventilation est soit inexistante, soit erronée. Des études récentes
ont montré que les spécialistes n’informaient pas leurs patients
de ces problèmes soit parce qu’ils craignaient que cela ne soit
pas réalisable à domicile, soit parce qu’ils étaient eux-mêmes a
priori contre cette possibilité, avant même d’en informer le
patient (1, 2). Cette attitude est évidemment contraire aux prin-
cipes internationaux de l’éthique médicale.
Une des solutions possibles serait d’élaborer un document
décrivant les différentes étapes de la maladie, comme cela a été
proposé dans la sclérose latérale amyotrophique (3). Il faut recon-
naître que cette solution est peu conforme aux habitudes françaises
et que, de toute façon, elle ne règle pas la question de l’informa-
tion orale qui, dans ces maladies, doit être particulièrement longue
et répétée. L’information doit également porter sur le mode de ven-
tilation (invasive ou non invasive). Les principales associations ou
services ont élaboré des documents décrivant ces méthodes. Il est
également possible, grâce aux systèmes associatifs, de prendre
contact avec des patients déjà soumis à ces traitements.
ÉVALUATION DU HANDICAP RESPIRATOIRE
D’une façon générale, l’atteinte respiratoire de ces patients est
sous-évaluée, voire totalement ignorée. La dyspnée est habi-
tuellement absente, ou très modeste chez des sujets qui pré-
sentent parfois une restriction majeure de leur capacité vitale,
inférieure à 30 % des valeurs théoriques. Ce fait surprenant est
classiquement expliqué par la limitation de l’effort physique
(4). Cette explication mériterait d’être confirmée. L’existence
d’une orthopnée, surtout lorsqu’elle survient de façon immé-
diate, dès le passage en décubitus, doit faire évoquer la présence
d’une paralysie diaphragmatique bilatérale. La paralysie dia-
phragmatique a des conséquences majeures sur la mécanique
respiratoire. Non seulement elle provoque une réduction mar-
quée de la capacité vitale, mais de plus elle accentue le syn-
drome restrictif en position couchée du fait de la gravité, qui
repousse les viscères vers le haut. Ce phénomène, encore
aggravé durant le sommeil, a des répercussions majeures sur
l’hématose. Il contribue à l’apparition de l’hypercapnie diurne.
Les céphalées matinales, l’hypersomnie diurne, les troubles du
sommeil sont des signes classiques de l’insuffisance respira-
toire chronique qu’il faut savoir rechercher par un interroga-
toire particulièrement rigoureux.
C’est à l’état stable, deux mois au moins à distance d’un épi-
sode aigu de décompensation, que cette évaluation clinique et
paraclinique devrait être faite. Comme les signes cliniques ne
sont ni sensibles, ni spécifiques, ce sont, en pratique, la mesure
de la capacité vitale et, si besoin, l’étude des gaz du sang arté-
riel qui vont permettre de quantifier la sévérité du syndrome
restrictif. La capacité vitale (CV) reste le meilleur paramètre
objectif qui permette de quantifier la diminution globale de la
force des muscles respiratoires (5, 6). L’expérience acquise avec
les poliomyélitiques a bien montré l’intérêt de la surveillance
répétée de ce paramètre. La comparaison des chiffres obtenus
en positions assise et couchée permet, de surcroît, de sus-
pecter une atteinte diaphragmatique en cas de baisse significa-
tive de la CV mesurée en position couchée. La mesure de la CV
est simple, non coûteuse, non invasive, facilement disponible.
Elle devrait faire partie intégrante du bilan de tout malade atteint
d’une maladie neurologique susceptible d’entraîner une para-
lysie des muscles respiratoires. En cas de réduction notable, ou
de signes cliniques évocateurs, elle doit être complétée par la
mesure des gaz du sang artériel diurnes. D’autres explorations
sont disponibles, qui ne peuvent être détaillées ici, comme
l’étude du sommeil. Signalons que la mesure des pressions
maximales, inspiratoire et expiratoire, effectuées à la bouche,
est un reflet de la force développée par les muscles inspiratoires
et expiratoires. Le sniff-test est un bon indice de la force déve-
loppée par le diaphragme.
INDICATION ET CHOIX
D’UN MOYEN DE VENTILATION MÉCANIQUE
Deux types d’indication ont pu être définis, ventilation de néces-
sité et ventilation de prévention (7-9). Le prérequis indispensable
est la participation active du patient et de sa famille.
139
La Lettre du Pneumologue - Volume V - no4 - juillet-août 2002
La ventilation de nécessité
Ce type d’indication doit être compris comme un moyen palliatif
destiné à suppléer de façon plus ou moins complète la paralysie
des muscles respiratoires. Sans ventilation, on peut supposer que
le décès ou des complications graves vont survenir dans les mois
qui viennent. Comme cela a déjà été dit, cette décision doit idéa-
lement être prise à l’état stable, à distance d’une poussée aiguë de
décompensation. Bien que les critères d’indication soient diffé-
rents d’une pathologie à l’autre, il est actuellement consensuelle-
ment admis qu’une hypercapnie diurne, supérieure à 45 mmHg
(6 kPa), et/ou une CV < 30 % de la théorique, associées à des
signes cliniques, même modestes, et à une élévation du CO2total
qui traduit l’hypoventilation alvéolaire chronique, sont des signes
de gravité suffisamment inquiétants pour proposer une ventila-
tion à domicile (10). Sauf contre-indication évidente tenant à un
dysmorphisme buccofacial ou à des troubles de la déglutition, la
stratégie habituellement préconisée est de proposer en première
intention une ventilation non invasive en pression positive inter-
mittente par masque nasal, buccal, ou bucconasal, sans que le
choix entre ces différentes techniques puisse être actuellement
défini (11). Le mode volume contrôlé est la méthode de référence
car il est le plus simple à utiliser à domicile et assure a priori la
plus grande sécurité. Les modes volume contrôlé assisté ou pres-
sion assistée permettent peut-être de faciliter l’adaptation au ven-
tilateur. Néanmoins, il n’existe pas, à l’heure actuelle, de travaux
évaluant, dans cette indication particulière, ces trois modes de ven-
tilation, ce qui fait que, dans l’état actuel des connaissances, il
paraît légitime de n’utiliser en routine que la méthode de réfé-
rence. La ventilation invasive par trachéotomie est réservée aux
échecs de la ventilation non invasive, aux contre-indications, aux
cas particuliers des malades qui seraient trachéotomisés à l’occa-
sion d’une situation aiguë de décompensation, bien qu’il ait été
préconisé dans ces cas de fermer la trachéotomie et de préférer à
domicile une méthode non invasive (12). Cette ventilation est ins-
tituée la nuit, ce qui est logique, à la fois pour des raisons de
confort, de tolérance, et du fait de l’aggravation nocturne des
troubles respiratoires qui accompagnent ces maladies. Cette ven-
tilation nocturne peut être complétée par une ventilation diurne.
En fait, la détermination de la durée optimale de ventilation quo-
tidienne se fait le plus souvent de façon empirique, en tenant
compte de la demande du patient. Des critères objectifs, par
exemple la variation de la capnie artérielle, sont extrêmement inté-
ressants, mais, malheureusement, ils ne peuvent être surveillés
que de façon très discontinue.
La ventilation de prévention
L’objectif de la ventilation de prévention est totalement diffé-
rent. La question est ici de savoir si la prescription précoce d’un
moyen de ventilation mécanique pourrait prévenir, ou tout au
moins réduire, l’aggravation en principe inéluctable du syndrome
restrictif chez des patients qui, par ailleurs, n’ont aucun des cri-
tères d’une ventilation de nécessité. Deux types d’arguments phy-
siopathologiques peuvent justifier cette prescription. Le premier,
ancien, fait appel à des notions de mécanique respiratoire. Il est
en effet bien établi que la diminution de la force des muscles res-
piratoires s’accompagne d’une diminution de la compliance pul-
monaire, ce qui accroît encore la diminution de la CV. Le méca-
nisme de la diminution de la compliance pulmonaire n’est pas
parfaitement connu mais il pourrait être la conséquence de micro-
atélectasies. Une hyperinsufflation périodique du parenchyme
pulmonaire pourrait lutter contre ce phénomène, comme cela
avait été proposé dans les séquelles respiratoires de la polio-
myélite. Les altérations pariétales dues à la cyphoscoliose asso-
ciée, aux rétractions tendineuses, aux déformations de la cage
thoracique sont d’autres arguments en faveur d’une ventilation
de prévention. Cependant, il a été montré qu’une hyperinsuffla-
tion de 15 minutes ne modifiait pas à court terme la compliance
pulmonaire de dix patients atteints de pathologies neurologiques
diverses (13). Nous ne connaissons pas de travaux évaluant ce
paramètre avec un traitement et un suivi plus prolongés.
Le second argument repose sur les relations complexes qui exis-
tent entre les apnées nocturnes et le retentissement sur l’hyper-
capnie diurne. Les conséquences de l’hypotonie physiologique
des muscles respiratoires survenant durant le sommeil sont majo-
rées dans les maladies neurologiques associées à un syndrome res-
trictif. Ce phénomène est particulièrement évident chez les patients
atteints d’une paralysie diaphragmatique, cas dans lequel l’asso-
ciation de la position couchée et de l’hypotonie explique que le
risque d’apnée nocturne et de désaturation soit très élevé. La désa-
turation et l’hypercapnie nocturne pourraient favoriser l’appari-
tion d’une hypercapnie diurne. La ventilation nocturne permet de
diminuer, voire de faire disparaître, les épisodes de désaturation
nocturne, ce qui aurait pour effet de faire reculer l’aggravation de
l’hypercapnie diurne. Là encore, nous ne connaissons pas de tra-
vaux confirmant cette hypothèse sur un suivi prolongé.
Finalement, la preuve de l’efficacité de la ventilation de préven-
tion reste à apporter. Le seul essai thérapeutique disponible
concerne la dystrophie musculaire de Duchenne de Bou-
logne(14). Aucun bénéfice n’a pu être démontré chez les patients
non traités par rapport au groupe traité par ventilation nasale noc-
turne. Fait inattendu, la mortalité était plus élevée dans le groupe
traité, ce qui a conduit à l’arrêt prématuré de cette étude.
ORGANISATION DU SUIVI
Cette population de patients qui sont soit sur le point d’être ven-
tilés, soit déjà ventilés, nécessite une surveillance attentive. Ce
suivi peut difficilement se faire en consultation traditionnelle
(nécessité d’examens, d’explorations fonctionnelles, vérification
de la tolérance et de l’efficacité de la méthode de ventilation uti-
lisée, vérification du matériel, étude du sommeil, etc.). L’hospi-
talisation de courte durée paraît donc la moins mauvaise solu-
tion ; elle est néanmoins peu appréciée par ces patients. La
majorité d’entre eux ont une expérience ancienne de l’hôpital et
en gardent habituellement un mauvais souvenir. Là encore, il faut
informer les patients des objectifs de ce bilan et tenter de les
convaincre de son utilité, tout en respectant un confort minimal,
difficile à réaliser dans les conditions habituelles des hôpitaux
publics. Il faut rappeler que, sur le plan réglementaire, les caisses
d’assurance maladie exigent un renouvellement annuel de la pres-
cription du matériel de ventilation, ce qui impose un minimum
d’examens cliniques et paracliniques.
MISE AU POINT
140
La Lettre du Pneumologue - Volume V - no4 - juillet-août 2002
Le suivi hospitalier de patients traités à domicile impose de tra-
vailler en collaboration étroite avec les structures de “terrain”
(système associatif ou libéral d’associations d’insuffisants res-
piratoires, associations de malades, structures d’hospitalisation
à domicile, différents médecins libéraux, différents lieux de vie).
Ce fonctionnement en réseau, bien qu’il soit fortement recom-
mandé par les pouvoirs publics, reste à l’évidence perfectible,
Tableau II. Liste des participants (groupe VAD “Registre”).
Centre 1
M. le Pr Jean-Claude Raphael Service de réanimation médicale,
M. le Dr David Orlikowski hôpital Raymond-Poincaré,
M. le Dr Karim Chadda 92380 Garches
Centre 2
Suisse (Lausanne-Genève)
M. le Pr Jean-William Fitting Division de pneumologie,
CHU Vaudois, 1011 Lausanne
M. le Dr Jean-Paul Janssens Division de pneumologie,
hôpital universitaire de Genève,
1211 Genève-14
M. le Dr Christophe Uldry Centre de réhabilitation respiratoire,
hôpital de Rolle, 1180 Rolle
Centre 3
M. le Dr Jacques Milane Réanimation médicale,
assistance respiratoire
M. le Pr Olivier Jonquet Service de réanimation médicale,
CHU de Montpellier, hôpital
Gui-de-Chauliac, avenue Bertin-
Sans, 34295 Montpellier Cedex 05
Centre 4
M. le Dr Deries Direction médicale,
Mme le Dr Marie-Françoise Rodet Centre médical infantile
de Romagnat, 63540 Romagnat
Centre 5
M. le Dr Jean-René Ordronneau Service de pneumologie 1,
M. le Dr Xavier Tchenio hôpital Guillaume-et-René-Laennec,
BP 1005, 44093 Nantes Cedex 01
Centre 6
M. le Dr Éric Hazouard Service de réanimation médicale,
CHU Bretonneau, 2, boulevard
Tonnelé, 37044 Tours Cedex
Centre 7
M. le Pr Jean-François Muir Service de pneumo-phtisiologie
M. le Dr Luis Molano Centre hospitalier régional
et universitaire de Rouen,
hôpital de Boisguillaume,
147, avenue du Maréchal-Juin,
BP 100, 76031 Rouen Cedex
Centre 8
M. le Dr Jean-Marie Bedicam Centre Édouard-Rist
14, rue Boileau, 75016 Paris
Centre 9
M. le Pr Jean-Philippe Derenne Service de pneumologie
M. le Dr Jésus Gonzalez CHU Pitié-Salpêtrière,
47-83, boulevard de l’Hôpital,
75651 Paris Cedex 13
Centre 10
M. le Dr Bernard Wuyam Service de pneumologie, pavillon D,
M. le Dr Pepin CHU, hôpital Albert-Michalon,
BP 217 X, 38043 Grenoble Cedex
Tableau III. Principales myopathies suivies dans l’étude multicen-
trique (n = 251).
n
Dystrophie musculaire de Duchenne 104
Dystrophie musculaire de Becker 14
Dystrophie des ceintures 29
Dystrophie de Steinert 39
Myopathie congénitale 7
Déficit en maltase acide 15
Myopathie congénitale 11
Autres 32
d’autant que cette population est très inégalement répartie sur le
territoire et que le nombre de centres capables de remplir ces mis-
sions est limité. Outre les problèmes de ventilation, il ne faut pas
oublier les problèmes associés (kinésithérapie respiratoire et
méthode de désencombrement, kinésithérapie des membres,
adaptation d’un fauteuil, nombreux problèmes orthopédiques qui
ne peuvent être détaillés ici). Dans certaines pathologies, des
troubles de la déglutition peuvent apparaître. Lorsqu’ils sont per-
sistants, et non transitoires, comme cela peut apparaître après une
trachéotomie, ils peuvent conduire à une alimentation entérale
qui, le plus souvent, se fera par une gastrostomie. L’alimentation
entérale peut être partielle ou complète.
ÉTUDE MULTICENTRIQUE NATIONALE :
ORGANISATION ET RÉSULTATS PRÉLIMINAIRES
Depuis une dizaine d’années, nous coordonnons une étude mul-
ticentrique qui a comme objectif le suivi en commun de la popu-
lation plus générale des malades neuromusculaires ventilés à
domicile dans une indication de nécessité. Cette étude comprend
dix centres français et suisse (tableau II), qui, au 1er mars 2002,
avaient inclus 401 patients, la majorité étant des myopathes
(n = 251, tableau III). Soixante pour cent des patients sont en
ventilation non invasive, 40 % en ventilation invasive par tra-
chéotomie. D’ores et déjà, on peut constater que la mortalité est
plus faible que dans la population générale d’insuffisants respi-
ratoires traités à domicile, ce qui est en accord avec les données
déjà disponibles (15). La qualité de vie, notamment dans la dys-
trophie de Duchenne de Boulogne, est supérieure à ce que l’on
pourrait a priori penser dans une population d’adolescents très
handicapés et très dépendants (15, 16). La ventilation non inva-
sive, qui est un moyen de plus en plus répandu, nécessite une
surveillance très attentive. Nous avons ainsi noté que 20 % envi-
ron des patients traités par ce moyen restaient hypercapniques
sous ventilation (PaCO2supérieure ou égale à 45 mmHg). Cela
nous a conduit à réfléchir sur l’interface (type de masque), la
mesure systématique des fuites, en particulier durant le sommeil.
La ventilation invasive est plus efficace, mais elle n’est pas tou-
jours acceptée par le patient : elle impose des contraintes sup-
plémentaires (changement de canule par exemple), et nécessite
141
La Lettre du Pneumologue - Volume V - no4 - juillet-août 2002
des précautions particulières (surveillance systématique de la
trachée, choix des canules, adaptation pour maintenir la parole,
formation de personnel à l’aspiration trachéale).
D’une façon plus générale, il ne faut pas oublier que ce mode de
ventilation doit être adapté pour le domicile. Il faut donc utiliser
des méthodes simples, des machines robustes, penser à la sécu-
rité (batterie autonome), pouvoir adapter la machine de ventila-
tion sur le fauteuil roulant (figure 1). Pour aider le prescripteur,
l’institut Garches (association loi 1901) a récemment créé un site
Internet où sont présentés les différents modèles de canules et de
masques disponibles dans le commerce (www.handicap.org).
CONCLUSION
La prise en charge des myopathes adultes a fait des progrès sub-
stantiels depuis une dizaine d’années. Il n’en reste pas moins
que d’importants efforts doivent être poursuivis, tant en termes
de soins (renforcement des réseaux de soins) qu’en termes de
recherche physiopathologique (compréhension du mécanisme
de l’atteinte respiratoire) et de recherche clinique appliquée
(résultats obtenus en termes de morbidité, de mortalité, de qua-
lité de vie, précision des indications). Il faudrait poser à plus
grande échelle les problèmes de santé publique et de politique
sociale : définition des structures optimales, coût réel de la prise
en charge, conseils adaptés, formation des médecins et des per-
sonnels paramédicaux.
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Figure 1. Exemple d’adaptation d’un respirateur sur un fauteuil rou-
lant électrique. Noter que le poids de la machine est un point crucial :
un poids excessif peut modifier le centre de gravité et rendre inopérant
le système de propulsion du fauteuil. Cette adaptation doit être faite par
un professionnel.
Remerciements
Nous remercions les membres de l’étude multicentrique, les associations pour
insuffisants respiratoires et, notamment, l’ADEP (Association d’entraide des
polios et handicapés) et l’AFM (Association française de lutte contre les myo-
pathies), qui a financé l’étude multicentrique.
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