Le risque de transmission d’arbov i rus par les tiques en Th a ï l a n d e
était connu en Thaïlande pour ne parasiter que le chien
d o m e s t i q u e , il s’av è r e parasiter aussi les bovidés (4). Rh. hae -
maphysaloides (Supino, 1897) est typiquement asiatique. Il
est présent depuis les plaines d’Afghanistan, du Pa k i s t a n , d u
Népal, de l’Inde et du Sri Lanka, vers l’est à travers l’Asie
du Sud-Est continentale jusqu’à Taiwan et aux îles indoné-
siennes de Sumatra et de Sulawesi (17). Cette tique est pré-
sente aussi en Th a ï l a n d e. Elle n’a jamais permis d’ i s o l e m e n t
de virus, mais expérimentalement des larves de Rh. haema -
physaloides gorgées sur des rongeurs en phase virémique
peuvent transmettre à la stase nymphale le virus KFD à des
rongeurs sains, et à la stase adulte de la tique le virus peut
être détecté 245 jours après son infection (18).
Les Ixodidae ne sont représentés que par un seul ge n r e
en Asie : le ge n re Ixodes. Les Ixodes parasitent l’homme, l e s
m a m m i f è r es et les oiseaux et transmettent un certain nombre
d ’ a r b ov i r us. En Th a ï l a n d e, le ge n re est assez bien rep r é s e n t é
avec 7 espèces dont une,Ix. granulatus (Supino, 1897) qui
t r ansmet le virus Langat (1), ap p a rtenant au groupe des viru s
des encéphalites à tiques (Tick Borne Encephalitis = TBE)
et responsable de méningo-encéphalite.
DISCUSSION
Si la plupart des arbovirus de tiques ont été isolés
d’Europe, d’Afrique, d’Asie Orientale et du sous-continent
i n d i e n , il n’en reste pas moins vrai qu’en Asie du Sud-Est un
risque potentiel existe (Tableau III). Bien que pour certains
arbovirus le vecteur principal soit absent de Thaïlande,
comme le ge n re H yalomma par exemple pour le virus CCHF,
De. marginatus (Schulzer, 1776) pour le virus de la Fièvre
h é m o r ragique d’Omsk ou Ixodes pers u l c atus ( S c h u l z e, 1 9 3 0 )
pour le virus RSSE, ces vecteurs principaux sont remplacés
par d’autres ve c t e u rs vicariants. Ainsi par exe m p l e ,
Rhipicephalus sanguineus présent en Thaïlande est un vec-
teur vicariant connu en A f rique et qui peut tra n s m e t t r e le viru s
CCHF (16). Il en est de même pour le virus KFD dont le
risque est augmenté par sa distribution géographique éten-
due en Inde. De plus, ce virus possède un grand nombre de
vecteurs mais aussi un grand nombre de réservoirs comme
les oiseaux migrateurs et les chauve-souris, dont plusieurs
sont présents en Thaïlande.
Le groupe des virus des encéphalites à tiques
( T B E ) , constitue la principale cause d’infection virale du sys-
tème nerveux central chez l’homme en Europe Centra l e. On
distingue deux types de virus : la souche orientale ou
ex t r ê m e - o rientale et la souche occidentale. Dans 5 à 30% des
cas, l’infection évolue vers l’apparition de signes neurolo-
giques et méningés, avec un taux de mortalité pouvant
atteindre 20 à 40%. Si initialement le virus avait été isolé
d’Ixodes, actuellement des souches sont isolés d’Argas, de
D e r m a c e n t o r,d ’H a e m a p hy s a l i s , et de H y alomma ( Tabl e a u I ) .
Le virus Langat (qui appartient aussi au groupe TBE), isolé
initialement d’Ixodes granulatus en 1956 en Malaisie, a
pu l’être en 1976 d’Ha. papuana (Thorell, 1883) en
Thaïlande (3).
Des virus émergents (19, 20) comme le virus Banna,
ont été isolés en Chine chez des patients présentant des mani-
festations fébriles avec quelquefois un syndrome neurolo-
gique à type d’encéphalite. Le virus Banna a été aussi isolé
à partir de tiques en Chine du Sud (non publié). Ce virus
ap p a rtient au nouveau sous-groupe taxonomique des
Seadornavirus du genre Coltivirus (19).
Les oiseaux migrat e u rs et les ch a u ve - s o u ris sont aussi
des hôtes vertébrés importants d’arbovirus (Chikungunya,
S i n d b i s , KFD et West Nile). Ils sont encore peu étudiés et mal
connus du point de vue du risque d’émergence et représen-
tent un risque de transmission mais aussi de dispersion du
virus. Les oiseaux migrateurs (21, 22) qui, dans leur phase
de virémie, i n fectent les tiques, p e u v ent ap p a rtenir aux ge n r e s
les plus divers (Fig.1). Des hérons garde-boeuf (Bubulcus
i b i s , Linné) marqués au départ de la Guadeloupe, p e u v ent dis-
séminer Amblyomma variegatum à plus de 300 km de leur
lieu de lâcher (21). Sur l’île de Chy p re, huit espèces de tiques
ont été récoltées sur des oiseaux migrat e u rs venant d’Afri q u e
et d’Eurasie,et 16 souches virales ont pu être isolées (22).
Kaiser et Hoog s t raal ont été les pre m i e r s à écri r e «The re m a r -
kably wide distribution of Crimean-Congo Haemorrhagic
fever virus in Africa and Eurasia is likely to be due to inter -
continental carriage of the virus and ticks by migrating
birds » (23).
En Thaïlande, vingt deux familles d’oiseaux migra-
teurs sont présentes et se déplacent vers toutes les régions
zoogéographiques du globe à l’exception de la région néo-
tropicale (Amérique du Sud et Centrale). Sur 172 observa-
tions d’espèces de migrateurs, plus de la moitié (55%) ont
été faites dans la région ori e n t a l e,33% dans la région holarc-
tique, 4% dans la région australienne,et 8% dans la région
éthiopienne (Fi g. 1). De ces observations on peut déduire que
les migrations concernent la région orientale et se font
d’abord à l’intérieur même de la région, puis préférentielle-
ment vers la région paléarctique, recouvrant d’Est en Ouest
la distribution du complexe TBE (24). Parmi les migrateurs
Médecine Tropicale • 2004 • 64 • 1 47
Figure 1 : Régions zoogéographiques (d’après Dekeyser) (32).
Région
néotropicale
Région
néarctique
Région
paléarctique Région
orientale
Région
éthiopienne
Thaïlande
Région holartique
néarctique
paléarctique
Région australienne
Région tropicale éthiopienne
néotropicale
orientale