MISE AU POINT
La Lettre du Neurologue - vol. VIII - n° 6 - juin 2004
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importante ou au cours d’un exercice physique (2). L’encéphalo-
pathie survient le plus souvent brutalement, mais elle peut aussi
s’installer graduellement en quelques heures. Elle peut se traduire
notamment par un délire, des hallucinations, des crises convul-
sives, un coma (2,3), une décérébration, un nystagmus, des ano-
malies pupillaires, etc. Des céphalées, des troubles digestifs non
spécifiques, assez fréquemment un choc, voire une défaillance
multiviscérale, peuvent s’y associer. Les examens biologiques
peuvent montrer une hyperleucocytose, une thrombopénie, des
signes de coagulation intravasculaire disséminée, une alcalose
respiratoire ou une acidose métabolique, une hyperglycémie, une
hypophosphatémie (2), etc. La survenue d’une rhabdomyolyse
ou d’une insuffisance rénale est possible.
Le NMS survient soit suite à la prise de neuroleptiques – lors de
la mise en route du traitement ou lors d’une modification poso-
logique, mais parfois aussi après plusieurs années d’un traitement
stable –, soit lors de l’arrêt brutal d’un traitement par des ago-
nistes dopaminergiques. Il se traduit par une hyperthermie d’ap-
parition progressive avec syndrome extrapyramidal, troubles dys-
autonomiques et altération des fonctions supérieures, auxquels
s’associent une hyperleucocytose, une altération des fonctions
hépatiques et une rhabdomyolyse (7).
ÉVOLUTION
L’évolution du CC serait mortelle dans 20 % des cas selon la lit-
térature (avec des extrêmes de 10 et 50 % des cas selon les moda-
lités de prise en charge [3]). Le décès, à la phase aiguë, est lié
essentiellement à une défaillance multiviscérale ou à une coagu-
lation intravasculaire disséminée. Parfois, le décès peut être
retardé (28 % de mortalité à 1 an après la sortie de l’hôpital).
Dans les autres cas, en général lorsqu’un refroidissement a été
obtenu, une conscience normale est recouvrée en quelques
heures. Il peut néanmoins persister des troubles transitoires des
fonctions supérieures durant quelques semaines (difficultés de
concentration, irritabilité, etc.) et des troubles fonctionnels pro-
longés. Les séquelles sont fréquentes chez les survivants, et ce
d’autant plus que la prise en charge a été tardive.
Un NMS non traité serait également mortel dans 20 % des cas,
avec un risque de séquelles neurologiques chez les survivants.
Parmi les séquelles de ces deux pathologies, le syndrome céré-
belleux est le plus fréquent (3, 7, 8), avec une incidence de 20 %
en cas de CC (2). Il se caractérise par les éléments suivants :
ataxie cérébelleuse avec marche ébrieuse, élargissement du poly-
gone de sustentation, “danse des tendons”, hypotonie et troubles
de l’exécution du mouvement (dysmétrie, adiadococinésie, asy-
nergie et tremblement, dyschronométrie). Il peut survenir après
un intervalle libre de quelques semaines et son intensité est
variable, parfois très sévère. La récupération, inconstante, est
imprévisible et non corrélée aux images radiologiques.
Ont également été décrits dans le cadre du CC :
– un cas de syndrome parkinsonien associé à un syndrome céré-
belleux ;
– une aphasie et une paralysie flasque avec hypersignaux loca-
lisés à l’IRM en T1 de la substance blanche hémisphérique et
du corps strié gauche, et une atrophie cérébelleuse apparue un
an après le CC et plus sévère deux ans après ;
– une quadriplégie flasque par atteinte des cornes antérieure et
intermedio-latérale de la moelle ;
– une encéphalopathie avec atteinte des fonctions supérieures (3) ;
– une myélinolyse centropontine ;
– un syndrome de Guillain-Barré (3) ;
– une myélopathie transverse ;
– des hémorragies cérébrales ou des lésions ischémiques (cap-
sule externe, thalamus).
Au décours du NMS, un cas de coma a été décrit, avec tétraplé-
gie, hypodensité de la substance blanche pariéto-occipitale et
hyposignal T2, ainsi qu’un cas de neuropathie périphérique.
PHYSIOPATHOLOGIE
Les aspects physiopathologiques du CC ont été bien décrits par
Bouchama et Knochel (2).
La réponse physiologique à l’hyperthermie comporte : la redis-
tribution de la masse sanguine vers les territoires cutanés, avec
vasodilatation et augmentation du débit cardiaque contrôlée par
des centres hypothalamiques, la libération de cytokines par les
cellules endothéliales et les leucocytes, responsable d’un syn-
drome inflammatoire, et la production par les cellules d’heat
shock proteins à fonction cytoprotectrice.
L’apparition d’un CC tel que nous l’avons défini serait liée à un
défaut de régulation de ces phénomènes chez des personnes pré-
disposées, notamment chez des patients cardiopathes, consom-
mateurs de médicaments inotropes négatifs ou diminuant la suda-
tion (comme les neuroleptiques à action anticholinergique),
deshydratés (pas de redistribution possible), âgés (1), non accli-
matés à de hautes températures ou ayant des prédispositions
génétiques (diminution de secrétion des heat shock proteins).
Par ailleurs, une ischémie du secteur digestif s’y associerait,
par redistribution sanguine vers la périphérie, avec libération dans
la circulation de facteurs toxiques responsables d’une activation
de la coagulation et de l’adhérence à l’endothélium, par des
mécanismes immunologiques. Cette dysrégulation favoriserait
l’apparition d’un syndrome inflammatoire incontrôlé, avec
défaillance multiviscérale et CIVD (2).
Sur le plan neurologique, les mécanismes lésionnels connus sont
les suivants : toxicité directe de la chaleur et effets de certaines
cytokines libérées lors du CC. La chaleur aurait pour effet direct
sur le SNC d’entraîner une souffrance puis une mort cellulaire.
Par ailleurs, elle serait à l’origine d’un œdème cérébral et