Dossier thématique
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Photo 1.
Acné induite par les anti-EGF.
La Lettre du Cancérologue - Vol. XVI - n° 9 - novembre 2007
TROUBLES DE LA PIGMENTATION
Les hyperpigmentations sont fréquentes, diff uses ou localisées
(par exemple au niveau des ongles ou au niveau du dos, avec un
aspect de fl agellation, à la suite d’un traitement par bléomycine).
Elles sont dues à l’accumulation de mélanine au niveau de l’épi-
derme par stimulation directe des mélanocytes. Bléomycine,
cyclophosphamide, méthotrexate, 5-FU ou chlorméthine sont
le plus souvent en cause.
La pigmentation des ongles peut être longitudinale, transversale
ou diff use, plus ou moins foncée, indolore, visible au niveau
des ongles des mains aussi bien que des orteils, apparaissant
quelques semaines après le début du traitement pour disparaître
beaucoup plus lentement, parfois au bout de plusieurs mois.
Doxorubicine, cyclophosphamide, melphalan, bléomycine et
5-FU sont les principaux responsables. Le sunitinib (Sutent
®
)
donne un teint jaune, “ictérique”, aux sujets à peau blanche, et
induit une dépigmentation en taches ou généralisée chez les
sujets à peau noire. Le seul traitement que l’on puisse actuel-
lement proposer est l’utilisation d’un maquillage. Ces troubles
de la pigmentation se retrouvent aussi sur les phanères, avec
des modifi cations de la couleur des cheveux, qui deviennent
poivre et sel et qui peuvent alors être teints.
ACNÉS (photo 1)
Elles sont principalement observées avec les anti-EGFR, que ce
soit les Ac monoclonaux ou les inhibiteurs de la tyrosine kinase,
chez 50 %, voire 100 %, des patients. Ces éruptions acnéiformes
débutent peu après le début du traitement, dès la première,
voire la deuxième, chimiothérapie. Elles s’améliorent parfois
malgré la poursuite du traitement et disparaissent toujours
lors de son arrêt. L’aspect clinique est très stéréotypé, marqué
par l’apparition de papules folliculaires évoluant en pustules,
discrètes ou profuses, isolées ou confl uentes, prurigineuses,
voire douloureuses, croûteuses en se dessèchant, localisées sur
les zones séborrhéiques (visage, décolleté et dos) mais parfois
plus diff uses et pouvant s’observer sur le cuir chevelu, les régions
rétro-auriculaires et les épaules. Lorsque les lésions sont très
croûteuses, elles peuvent évoquer une dermite séborrhéique
profuse infl ammatoire. Lorsqu’elles sont très infl ammatoires sur
le visage, l’aspect peut évoquer une rosacée. Elles n’imposent
que très rarement l’arrêt du traitement. La prise en charge des
patients est indispensable, car la survenue de ces éruptions est
inconfortable et mal acceptée. Lorsque les acnés sont asymp-
tomatiques, de simples émollients suffi sent. Lorsqu’elles sont
gênantes, la prescription d’une antibiothérapie p.o. (cyclines)
est proposée. Lorsqu’elles sont très prurigineuses, un dermo-
corticoïde peut lui être associé. La survenue d’une éruption
acnéiforme n’implique pas, dans la majorité des cas, de modi-
fi cation des doses thérapeutiques ni d’arrêt, d’autant que ces
médicaments sont effi caces et que leur arrêt serait préjudiciable.
Il est dit que le taux de réponse au traitement serait plus élevé,
de même que la durée de survie, parallèlement à la sévérité de
l’éruption, mais cela reste à démontrer.
XÉROSE CUTANÉE
Une sécheresse de la peau et des muqueuses est souvent observée
avec les chimiothérapies. Elle peut être généralisée ou localisée.
Pour y remédier, il convient de proposer l’utilisation d’émollients
plusieurs fois par jour. Avec les anti-EGFR et, surtout, les inhi-
biteurs de la tyrosine kinase, la sécheresse cutanée s’observe
dans 10 à 35 % des cas.
ATTEINTE DES ONGLES
De nombreuses anomalies des ongles sont observées lors des
chimiothérapies : stries noires ou lignes de Beau, douleurs au
niveau des ongles, fragilité, onycholyse se traduisant par une
perte partielle ou complète de l’ongle, voire photo-onycholyse,
paronychies. Toutes ces manifestations n’impliquent pas l’arrêt
du traitement. Les médicaments le plus souvent en cause sont
la mitoxantrone, la leucoverine, le méthotrexate, la bléomycine,
le 5-fl uoro-uracil, l’étoposide, les taxanes. Pour améliorer le
confort des patients, il faut leur conseiller d’éviter les trauma-
tismes au niveau des mains et des orteils en portant des gants,
surtout en cas de travaux ménagers ou d’exposition au froid, en
mettant des chaussures confortables, et en utilisant des vernis à
ongles à base de silicium, qui renforcent la résistance de l’ongle
pendant la durée du traitement et les six mois qui le suivent.
On proposera également le port d’enveloppes réfrigérantes
durant le passage intraveineux du traitement. Pour les parony-
chies invalidantes, traînantes et douloureuses, la prescription
de cyclines s’impose.