Médecine
& enfance
DIAGNOSTIC,
EPIDÉMIOLOGIE
ET GÉNÉTIQUE
La prévalence de la STB est estimée
entre 1/6000 et 1/10000. Cette mala-
die autosomique dominante résulte de
mutations sur deux gènes suppresseurs
de tumeurs : TSC1, situé en 9q34, co-
dant pour l’hamartine, et TSC2, situé en
16p13, codant pour la tubérine. Ces
deux protéines régulent la prolifération
et la différenciation cellulaire en inhi-
bant le complexe mTOR (mammalian
target of rapamycin). Une mutation de
l’un de ces deux gènes est trouvée dans
90 % des cas. Les formes cliniques de la
maladie liées à une mutation de TSC2
sont plus graves. Dans deux tiers des
cas, la maladie est liée à une mutation
sporadique.
La STB se caractérise cliniquement par
la formation multisystémique d’hamar-
tomes ; les organes les plus fréquem-
ment touchés sont le cerveau, la peau,
les reins, l’œil, le poumon et le cœur. Le
diagnostic repose sur des critères cli-
niques, radiologiques et histopatholo-
giques (tableau I) et sur l’identification de
mutations du gène TSC1 ou TSC2. Les
critères diagnostiques de STB sont éta-
blis depuis 1998. Le diagnostic de STB
est certain si deux critères majeurs ou
un critère majeur et deux critères mi-
neurs sont présents ; le diagnostic est
probable si l’on trouve un critère majeur
et un critère mineur.
FORMES CLINIQUES
ANTÉ- ET NÉONATALES :
ATTEINTES CARDIAQUES
ET CÉRÉBRALES
Durant la période anté- et périnatale, ce
sont les atteintes cardiaques et céré-
brales qui prédominent.
Dès la vingt-sixième semaine d’aménor-
rhée, la découverte par échographie ou
IRM fœtales d’un rhabdomyome car-
diaque, tumeur bénigne intra-cavitaire
et/ou intra-murale, conduit dans 50 à
80 % des cas au diagnostic de STB. Le
rhabdomyome intracardiaque unique
ou multiple est le plus souvent asymp-
tomatique et involue spontanément
avec l’âge. En période néonatale, ces
anomalies sont rarement associées à
des arythmies ou des signes de cardio-
myopathie. Des signes d’insuffisance
cardiaque sont très exceptionnels.
Au niveau cérébral, les hamartomes
consistent en des tubers corticaux et des
nodules sous-épendymaires (figures 2 et
3). Les tubers corticaux sont des masses
lisses et fermes situées au sommet des
circonvolutions cérébrales et consti-
tuées de neurones dystrophiques, de
larges astrocytes et de cellules géantes
multinuclées. Ils sont présents chez
80 % des sujets atteints de STB.
La découverte d’un rhabdomyome intra-
cardiaque ou l’atteinte d’un des parents
doit faire demander une IRM fœtale, afin
de rechercher des tubers corticaux ou
NEUROLOGIE
La sclérose tubéreuse de Bourneville (STB) est une maladie génétique, de
transmission autosomique dominante. C’est une affection multisystémique,
d’expression variable, touchant l’enfant et l’adulte. A l’âge adulte, 95 % des
patients présentent des lésions spécifiques, cutanées, cérébrales, cardiaques,
rénales, pulmonaires et/ou rétiniennes (figure 1). Les manifestations cliniques
caractéristiques de la STB dépendent de l’âge du patient. Il semble donc pri-
mordial de connaître les signes cliniques devant faire évoquer ce diagnostic
pour chaque tranche d’âge, afin d’établir le suivi et la conduite à tenir au cours
de l’enfance, de la période anténatale à l’adolescence.
Rubrique dirigée par S. Auvin
Sclérose tubéreuse de Bourneville :
mise au point et perspectives
B. Desnous, S. Auvin
service de neurologie pédiatrique
hôpital Robert-Debré, Paris
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des nodules sous-épendymaires. La nor-
malité de L’IRM n’exclut pas le diagnos-
tic ; en effet, les tubers corticaux et no-
dules sous-épendymaires sont présents
très tôt mais pas toujours visibles, ce qui
rend le conseil génétique difficile.
Dans sa forme néonatale, la STB est gé-
néralement peu symptomatique, même
si les symptômes et leur fréquence sont
bien établis. Aussi ces derniers ne
conduisent-ils le plus souvent qu’au dia-
gnostic et à la mise en place d’un suivi.
FORMES CLINIQUES
DU NOURRISSON :
L’ÉPILEPSIE
L’atteinte neurologique la plus répan-
due dans la STB est l’épilepsie ; elle est
développée par 60 à 93 % des patients.
Les premières crises débutent pour la
majorité des patients dans l’enfance et
pour 63 % durant la première année de
vie, sous la forme de crises partielles ou
de spasmes infantiles (38 % des cas). La
forme clinique à retenir est la survenue
chez un nourrisson de moins de un an
de spasmes infantiles, ou syndrome de
West. Le syndrome de West est défini
par une triade caractéristique : spasmes
en flexion ou extension, hypsarythmie
sur l’électroencéphalogramme intercri-
tique, régression psychomotrice. 20 à
50 % des patients atteints de STB pré-
sentent un syndrome de West, et, dans
plus de la moitié des cas, il révèle la
STB. L’IRM cérébrale réalisée dans le
cadre de cette épilepsie du nourrisson
permet de repérer des tubers corticaux
et/ou des nodules sous-épendymaires
très évocateurs du diagnostic.
La prise en charge doit être précoce afin
d’instaurer un traitement antiépilep-
tique par Sabril®(vigabatrine), le délai
d’instauration d’un traitement antiépi-
leptique semblant conditionner le pro-
nostic neurologique.
Un examen dermatologique à l’aide
d’une lampe de Wood sera réalisé afin
de rechercher des taches achromiques,
seules lésions cutanées présentes à cet
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Critères diagnostiques de la sclérose
tubéreuse de Bourneville
Le diagnostic de STB est certain si 2 critères
majeurs ou 1 critère majeur et 2 critères
mineurs sont présents
Le diagnostic est probable si l’on trouve
1 critère majeur et 1 critère mineur
Critères majeurs
angiofibromes faciaux ou plaques fibreuses
frontales
fibromes unguéaux ou péri-unguéaux
(tumeurs de Koenen)
taches achromiques (3 ou plus)
plaque « peau de chagrin »
phacomes rétiniens multiples
tubers corticaux
nodule sous-épendymaire
astrocytome à cellules géantes sous-
épendymaire
rhabdomyome cardiaque, unique ou
multiple
lymphangioleiomyomatose
angiomyolipomes rénaux
Critères mineurs
kystes rénaux multiples
polype rectal hamartomateux
kystes osseux
anomalies de migration du système nerveux
central
fibromes gingivaux
hamartomes non rénaux
taches rétiniennes achromiques
lésions cutanées « en confetti » ou « puits »
de l’émail dentaire
Figure 1
Manifestations cliniques de la STB en fonction de l’âge (d’après Curatolo P. et al.)
0
anténatal
naissance
1 an
5 ans
10 ans
15 ans
25 ans
40 ans
20
40
60
80
100
expression clinique (%) rhabdomyomes cardiaques
taches achromiques
nodules sous-épendymaires
épilepsie
angiofibromes faciaux
angiomyolipomes rénaux
hamartomes rétiniens
hamartomes hépatiques
fibromes unguéaux
Figure 2
Astrocytomes ou SEGA chez un enfant de trois ans. IRM cérébrale séquences T1 avec
injection de gadolinium et T2 coupes axiales : astrocytome prenant le contraste situé à
proximité du trou de Monro gauche et plongeant dans la corne antérieure du ventricule
latéral gauche sans hydrocéphalie.
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âge. L’existence de ces éléments cutanés
permettra de confirmer le diagnostic
(critère majeur). On réalisera également
un bilan à la recherche d’une atteinte
sur d’autres organes : une échographie
cardiaque afin de mettre en évidence un
éventuel rhabdomyome intracardiaque,
une échographie rénale recherchant des
kystes rénaux. Une analyse génétique
cherchant une mutation du gène TSC1
ou TSC2 sera également réalisée.
L’évolution des nourrissons dévelop-
pant un syndrome de West et répondant
bien à une monothérapie par Sabril®
peut être favorable, avec un développe-
ment psychomoteur normal. Seuls 30 %
des nourrissons présentant des spasmes
infantiles sont indemnes de crises à
long terme, les autres évoluent vers une
épilepsie pharmacorésistante avec
crises partielles motrices secondaire-
ment généralisées ou un syndrome de
Lennox-Gastaut. Dans ce dernier cas,
l’épilepsie s’accompagne d’anomalies
du développement psychomoteur et de
troubles autistiques.
Une surveillance annuelle du champ vi-
suel est indispensable lors de l’instaura-
tion d’un traitement par Sabril®. En ef-
fet, on peut observer une réduction
concentrique asymptomatique du
champ visuel dépendant de la durée du
traitement.
FORMES CLINIQUES
DE L’ENFANT : ÉPILEPSIE,
DÉFICIENCE
INTELLECTUELLE ET
TROUBLES AUTISTIQUES
MANIFESTATIONS
NEUROLOGIQUES
Les manifestations cliniques prédomi-
nantes chez l’enfant sont l’épilepsie, le
développement d’astrocytomes intra-
ventriculaires, la déficience intellectuel-
le et les troubles du comportement de
type autistique.
L’épilepsie débute le plus souvent avant
l’âge de un an par des spasmes infan-
tiles, mais elle peut également appa-
raître chez le jeune enfant ou l’enfant
plus grand sous la forme d’une épilepsie
focale (ou multifocale) symptomatique.
Les manifestations cliniques sont alors
assez fréquemment des crises partielles
motrices secondairement généralisées.
La relation entre le point de départ des
crises et la présence de tubers n’est pas
complètement établie. Certains tubers
peuvent être silencieux et ne donner au-
cun symptôme. En effet, les crises épi-
leptiques auraient comme point de dé-
part le cortex en périphérie du tuber
plutôt que le centre du tuber lui-même.
Ces épilepsies sont très souvent pharma-
corésistantes. Les crises ne sont contrô-
lées que dans 31 à 47 % des cas après la
mise en place d’un premier traitement.
La pharmacorésistance atteint 75 % en
cas d’antécédents de spasmes infantiles,
versus 39 % chez les patients dont l’épi-
lepsie n’a pas débuté par un syndrome
de West. Malheureusement, les rechutes
après rémission prolongée sont fré-
quentes. Une prise en charge chirurgica-
le peut être envisagée en cas de pharma-
corésistance. Les indications sont les sui-
vantes : présence de crises stéréotypées
pharmacorésistantes issues du cortex
non éloquent. Seule une exploration par
une équipe spécialisée permettra de re-
tenir une indication chirurgicale. En cas
de contre-indication chirurgicale, la sti-
mulation du nerf vague peut être une al-
ternative thérapeutique.
Dans moins de 10 % des cas, les nodules
sous-épendymaires peuvent se transfor-
mer en astrocytomes à cellules géantes
(subependymal giant cell astocytoma :
SEGA) ; cette évolution est alors mise en
évidence par l’IRM cérébrale. Ces tu-
meurs bénignes, de croissance rapide,
apparaissent typiquement entre cinq et
dix ans ; elles peuvent entraîner une hy-
drocéphalie avec hypertension intracrâ-
nienne (HTIC) en bloquant l’écoulement
du LCR lorsqu’elles sont situées à proxi-
mité des trous de Monro. Les nodules
sous-épendymaires situés à proximité
des trous de Monro doivent donc être
surveillés. S’ils grossissent, prennent le
contraste après injection de gadolinium
et ne sont pas calcifiés, une IRM cérébra-
le doit être réalisée tous les six mois ini-
tialement puis annuellement. En cas
d’évolutivité, de taille supérieure à 3 cm
ou d’installation de signes d’HTIC, à sa-
voir survenue d’une fatigue inhabituelle,
de céphalées, de vomissements, d’ampu-
tation du champ visuel, une nouvelle
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Figure 3
Tubers corticaux et nodules sous-épendymaires chez une patiente de cinq ans. IRM
cérébrale séquences T2 et T1 coupes axiales. Flèches noires : tubers corticaux. Flèches
blanches : nodules sous-épendymaires.
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IRM cérébrale doit être immédiatement
réalisée et le patient doit bénéficier d’un
traitement neurochirurgical.
Dans la STB, les manifestations neuroco-
gnitives et psychiatriques sont très va-
riables d’un patient à l’autre. Y compris
au sein d’une même famille, certains in-
dividus peuvent présenter un autisme
déficitaire sévère et d’autres mener une
vie normale. Le nombre et la localisation
des tubers corticaux sont des facteurs de
variabilité du phénotype neurologique.
La déficience intellectuelle touche 40 à
50 % des enfants atteints de STB ; elle
est quasi constamment associée à une
épilepsie. Le pronostic cognitif est étroi-
tement lié à l’âge du début de l’épilepsie
(mauvais pronostic en cas de début
avant un an), à la sévérité de celle-ci
(meilleur pronostic en cas de bon
contrôle de l’épilepsie), au type d’épilep-
sie (mauvais pronostic si antécédent de
spasmes et d’état de mal épileptique).
D’autres facteurs de risque de retard in-
tellectuel ont également été identifiés :
la mutation de TSC2, la localisation et le
nombre de tubers corticaux.
Chez l’enfant d’âge scolaire (six ans), il
est nécessaire d’évaluer systématique-
ment les fonctions cognitives à la re-
cherche d’une déficience intellectuelle
ou de troubles neuropsychologiques
spécifiques. Ces derniers peuvent être
présents même en l’absence de crises
épileptiques. Les enfants présentant un
retard intellectuel sont plus susceptibles
de présenter des troubles autistiques ou
des déficits de l’attention avec hyperac-
tivité. Concernant la présence de
troubles autistiques, il n’est pas encore
clairement établi si la neurobiologie de
la STB est en cause ou si cela est en lien
avec la déficience intellectuelle.
MANIFESTATIONS
EXTRA-NEUROLOGIQUES
Comme nous l’avons déjà évoqué, les
taches achromiques sont la première des
manifestations observables. L’intérêt de
les rechercher par un examen soigneux
à la lampe de Wood est surtout lié au
diagnostic. Les angiofibromes faciaux ap-
paraissent à partir de l’âge de six ans et
sont présents chez 75 % des adultes. Il
s’agit de nodules charnus, arrondis et
roses, siégeant sur le nez et les joues
avec une topographie en ailes de pa-
pillon. Ils posent surtout un problème
esthétique.
Les atteintes rénales mises en évidence
dans l’enfance peuvent nécessiter un
traitement. Dans 75 % des cas, il s’agit
d’angiomyolipomes, volontiers mul-
tiples et bilatéraux. Les angiomyoli-
pomes sont des tumeurs bénignes dont
l’évolutivité justifie une surveillance ré-
gulière dès la deuxième décennie (voir
infra). Dans 25 % des cas, les atteintes
rénales sont des kystes rénaux. Ils appa-
raissent généralement dans l’enfance et
n’ont pas de potentiel évolutif. Dans de
rares cas, des kystes rénaux multiples
peuvent être responsables d’hyperten-
sion artérielle ou d’insuffisance rénale
chronique. Enfin, le développement de
lésions rénales néoplasiques est pos-
sible chez l’enfant mais exceptionnelle.
Dès l’enfance, l’examen ophtalmolo-
gique peut être une aide au diagnostic
en mettant en évidence des hamartomes
rétiniens.
FORMES CLINIQUES
DE LADOLESCENT :
PROCHES DES FORMES
ADULTE
MANIFESTATIONS
NEUROLOGIQUES
La surveillance neurologique doit se
poursuivre chez l’adolescent. Elle
consiste en une surveillance régulière
de l’épilepsie, même si cette dernière a
débuté à l’adolescence et est équilibrée.
Une évaluation régulière des fonctions
cognitives à la recherche de déficits
neuropsychologiques spécifiques et de
troubles neuropsychiatriques permet de
réaliser les adaptations nécessaires
dans la scolarisation et les apprentis-
sages professionnels. En effet, des
troubles de l’attention et de la concen-
tration sont retrouvés chez 50 % des pa-
tients. Ces troubles prédominent le plus
souvent sur l’attention partagée, ce qui
se traduit dans la vie quotidienne par le
sentiment d’être dépassé, de ne pas
pouvoir faire face. Les mémoires visuel-
le et verbale semblent être également
fréquemment altérées.
MANIFESTATIONS PULMONAIRES
Des manifestations pulmonaires en rap-
port avec une lymphangioléiomyomato-
se pulmonaire peuvent survenir à la pu-
berté. La fréquence de cette atteinte est
identique pour les mutations des gènes
TSC1 et TSC2. L’atteinte pulmonaire
n’est pas limitée au sexe féminin,
contrairement aux idées reçues. La lym-
phangioléiomyomatose pulmonaire est
une maladie interstitielle progressive
liée à la prolifération de cellules muscu-
laires lisses anormales ; elle conduit au
développement de lésions kystiques mul-
tiples dont l’aspect tomodensitométrique
est caractéristique. Les symptômes sont
une dyspnée, une toux, des pneumotho-
rax récidivants, des épanchements chy-
leux. L’évolution peut se faire vers l’in-
suffisance respiratoire terminale et le dé-
cès. Dans les formes sévères, la trans-
plantation pulmonaire s’est montrée effi-
cace. Des traitements spécifiques, com-
me la rapamycine, qui inhibent la voie
mTOR et limitent la croissance et la pro-
lifération cellulaire, sont actuellement
en cours de développement avec des es-
sais cliniques qui semblent prometteurs.
MANIFESTATIONS RÉNALES
Les atteintes rénales sont plus évolu-
tives et plus fréquentes dès la deuxième
décennie et nécessitent donc une sur-
veillance rapprochée.
Les angiomyolipomes rénaux multiples
peuvent être découverts à l’échogra-
phie, au scanner ou à l’IRM. Le risque
de ces lésions est essentiellement hé-
morragique, notamment en cas de taille
supérieure à 3 ou 4 cm. Des douleurs
lombaires doivent faire évoquer un syn-
drome préfissuraire. Le traitement re-
pose sur la chirurgie et l’embolisation.
MANIFESTATIONS
DERMATOLOGIQUES
Fortement présentes à cet âge, les mani-
festations dermatologiques conduisent
parfois au diagnostic. Il s’agit d’angio -
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tubérine, qui sont les deux protéines
mutées dans la STB, inhibent à l’état
normal cette voie métabolique et régu-
lent ainsi la prolifération et la différen-
ciation cellulaire.
Cette découverte a conduit à mener des
essais thérapeutiques avec l’évérolimus,
qui est un inhibiteur connu de la voie
mTOR surexprimée dans la STB. Les es-
sais cliniques ont débuté et portent sur
le traitement des angiomyolipomes et
des SEGA ; leurs résultats sont promet-
teurs et ont conduit à une autorisation
de mise sur le marché. Une efficacité
sur les angiofibromes cutanés a été sug-
gérée dans l’analyse des critères secon-
daires. Les travaux évaluant l’effet de
cette molécule dans l’épilepsie sont en
cours. Il semble qu’à l’arrêt du traite-
ment on observe une recroissance tu-
morale. Les données sont encore insuf-
fisantes pour définir la place de ce trai-
tement médical par rapport à la chirur-
gie des SEGA et l’embolisation ou la chi-
rurgie dans les angiomyolipomes. Mais
les travaux cliniques se poursuivent…
CONCLUSION
La STB est une maladie génétique multi -
systémique dont l’expression est forte-
ment liée à l’âge du patient. Chez le
nourrisson, l’expression est dominée par
l’épilepsie, avec en premier lieu la surve-
nue d’un syndrome de West chez les en-
fants de moins de un an. Chez l’enfant et
l’adolescent, l’apparition de manifesta-
tions multisystémiques justifie une prise
en charge multidisciplinaire.
La compréhension de la voie métabo-
lique sous-jacente à cette maladie est
une avancée majeure, et l’arrivée sur le
marché des inhibiteurs de mTOR pour-
rait représenter le premier traitement
étiologique global de cette maladie.
Pour en savoir plus
CURATOLO P., BOMBARDIERI R., JOZWIAK S. : « Tuberous
sclerosis »,
Lancet,
2008 ;
372 :
657-68.
MOAVERO R., CERMINARA C., CURATOLO P. : « Epilepsy se-
condary to tuberous sclerosis : lessons learned and current chal-
lenges »,
Childs Nerv Syst.,
2010 ;
26 :
1495-504.
FRANZ D.N. : « Everolimus : an mTOR inhibitor for the treatment
of tuberous sclerosis »,
Expert Rev. Anticancer. Ther.,
2011 ;
11 :
1181-92.
le sera également réalisée devant toute
modification de la symptomatologie
neurologique.
Actuellement, nous ne disposons pas
non plus de recommandations concer-
nant le rythme et les modalités (IRM,
scanner, échographie) de surveillance
des atteintes rénales de la STB.
L’échographie cardiaque est réalisée
uniquement si des signes cardiaques
sont présents.
Un scanner pulmonaire devra être réali-
sé à l’âge adulte et devant la survenue
de symptômes respiratoires.
Le rythme et les modalités de surveillan-
ce ophtalmologique, pulmonaire et car-
diologique sont fonction des signes cli-
niques présentés par le patient.
DIAGNOSTIC PRÉNATAL
ET CONSEIL GÉNÉTIQUE
En anténatal, la découverte d’un (ou de
plusieurs) rhabdomyome(s) car-
diaque(s) doit faire proposer aux pa-
rents la réalisation d’une IRM cérébrale
fœtale.
Une localisation cérébrale de la maladie
confirme le diagnostic mais son absence
ne l’exclut pas. Dans ce contexte, une
consultation génétique est réalisée afin
d’évaluer l’opportunité et la faisabilité
d’une analyse moléculaire anténatale.
La grande variabilité des présentations
cliniques de cette maladie rend souvent
difficile la discussion multidisciplinaire.
Lorsqu’il s’agit d’une forme familiale, la
mise en évidence de la mutation chez le
parent atteint rend théoriquement pos-
sible un diagnostic pré-implantatoire,
mais ces pratiques restent encore très
difficilement organisables. Par contre,
un diagnostic anténatal précoce par
étude moléculaire sur villosités cho-
riales est toujours possible.
PERSPECTIVES
THÉRAPEUTIQUES
La cascade biochimique impliquée dans
la STB est identifiée, elle est liée à la
voie mTOR. En effet, l’hamartine et la
fibromes faciaux, de taches achromi -
ques, de fibromes unguéaux et de
plaques en peau de chagrin. Le préjudice
esthétique doit être pris en compte et des
traitements spécifiques au laser propo-
sés. Les essais cliniques réalisés avec la
rapamycine suggèrent une efficacité de
ce traitement sur les angiofibromes qui
posent le plus de problèmes esthétiques.
Cet effet ne constituait toutefois qu’un
critère d’évaluation secondaire, un essai
clinique spécifique est donc nécessaire.
MANIFESTATIONS
OPHTALMOLOGIQUES
L’examen ophtalmologique met en évi-
dence des hamartomes rétiniens, lé-
sions bénignes pouvant se calcifier,
chez 50 % des patients.
MODALITÉS DE SUIVI
ET DE SURVEILLANCE
L’atteinte multisystémique de la STB
nécessite une prise en charge multidis-
ciplinaire. La surveillance à long terme
d’une STB doit cibler les atteintes les
plus fréquentes, celles qui peuvent être
traitées si elles sont identifiées précoce-
ment et celles qui peuvent menacer le
pronostic vital du patient. La détection
précoce d’angiomyolipomes rénaux,
d’astrocytomes à cellules géantes et de
complications cardiaques doit être le
principal enjeu d’un protocole de sur-
veillance de STB.
Les recommandations actuelles préco-
nisent que, lors du diagnostic, soient
réalisés systématiquement une IRM cé-
rébrale, un électroencéphalogramme,
une évaluation des fonctions cognitives,
une IRM rénale, un examen ophtalmo-
logique.
Même s’il n’y a pas de consensus fondé
sur des données cliniques, l’IRM céré-
brale doit être réalisée avant l’âge de
deux ans et répétée tous les un à trois
ans chez l’enfant et l’adolescent. En cas
de facteur de risque (clinique ou neuro-
radiologique) de développement de
SEGA, l’IRM cérébrale devra être répé-
tée tous les six mois à tous les ans jus-
qu’à l’âge adulte. Une imagerie cérébra-
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