BASTY Lisa CHENU Elise COQUERY Clément DA COSTA Nathan SADAILLAN Gabriel « L’économie collaborative, un effet de mode ? » M1 Economie Appliquée – Développement économique territorial 1 SOMMAIRE Introduction ................................................................................................................................................. 3 I. De l’utilité sociale à l’économie collaborative ................................. 5 A. L’utilité sociale ....................................................................................................................................... 5 B. L’économie sociale et solidaire, un secteur ancien ................................................................ 9 C. L’économie sociale et solidaire aujourd’hui ........................................................................... 11 II. Le renouveau .............................................................................................. 15 A. Emergence de l’économie collaborative .................................................................................. 15 B. Les nouveaux outils de l’économie collaborative ................................................................ 21 A. Etat des lieux : le marché français de l’économie collaborative .................................... 25 III. Quel avenir pour l’économie collaborative ? ............................. 28 A. L’évolution du cadre juridique en France : enjeux et perspectives ............................. 28 B. Les dérives des leaders de l’économie collaborative ......................................................... 32 C. Les perspectives de l’économie collaborative ....................................................................... 35 CONCLUSION ............................................................................................................................... 38 BIBLIOGRAPHIE ....................................................................................................................... 39 WEBOGRAPHIE ......................................................................................................................... 42 2 Introduction «Ce n'est pas une crise, c'est un changement de monde» déclarait le philosophe Michel Serres en décembre 2012 avant d'ajouter que cela fait plus de cinq ans que dure la crise sans que l'économie française ne semble montrer de signe d'amélioration1. C'est dans ce contexte que nombre d'acteurs se sont questionnés sur les modes de production, de consommation et de financement actuels. Ces interrogations ont mené à une certaine réflexion sur l'invention de nouveaux systèmes alternatifs ou en substitution du système capitaliste remis en cause avec la chute de Lehman Brothers et la crise économique mondiale de 2008. C'est de cet affaiblissement du courant orthodoxe que découle l'économie collaborative, d’autres formes de production et de consommation ont émergé dans les pays développés. Au départ présenté comme une façon de faire face à la crise ou encore comme un modèle de «débrouille», l'économie collaborative n'est plus ce système D qu'elle représentait initialement. En effet, ce sont de nombreux emplois qui sont et pourraient être crées à l'avenir grâce à ce modèle qui traduit également un choix de société. Le concept d'économie collaborative à une définition très large. Selon l'institut du développement durable et des relations internationales (IDDRI) l'économie collaborative désigne des «réseaux d’individus et de communautés connectées, par opposition à des institutions centralisées, et qui transforment la manière dont nous produisons, consommons, finançons et apprenons». Cela regroupe la consommation collaborative (partage, circuits courts...), la production collaborative (FabLabs...) mais également le financement collaboratif (crowdfunding) ou encore les savoirs ouverts. Nous détaillerons les différents outils dans la suite de ce dossier. En bref, ce sont tous les comportements consistant à échanger, partager, se financer, tout en favorisant les circuits courts afin de limiter le nombre d'intermédiaire, qui se sont développés et forment l'économie collaborative. Si le terme d'économie collaborative semble donc s'être diffusé depuis la crise économique dans les années 2010, cette notion n'est pas nouvelle. En effet c'est en 1978 aux États-Unis que ce terme est pour la première fois utilisé par Marcus Felson et Joe Spaeth. L'économie collaborative désigne alors les « événements dans lesquels une ou plusieurs personnes consomment des biens ou des services économiques dans un processus qui consiste à se livrer à des activités communes »2. Si l'idée de partage est donc présente dès le début de sa création, la notion d'économie collaborative a été profondément bouleversée par la « révolution technologique » au point de parler parfois de réinvention ou de renouvellement de l'économie collaborative.3 Les nouvelles technologies ont en effet un rôle essentiel dans l'économie collaborative. 1 Collectif d'acteurs de l'économie collaborative (06/03/2014) L’économie collaborative s’invente en France, gardons notre avance (consulté le 16/10/2015) www.lemonde.fr http://www.lemonde.fr/idees/article/2014/03/06/l-economie-collaborative-s-invente-en-france-gardons-notreavance_4378867_3232.html 2 NOBIS P (16/05/2014) Comprendre l'économie collaborative (consulté le 16/10/2015) http://cursus.edu/article/22050/comprendre-economie-collaborative/#.Vlhj4fkvfIX 3 Institut du développement durable et des relations internationales = IDDRI 3 En permettant la création et le développement des plateformes internet, elles ont facilité la mise en relation entre particuliers (pair-à-pair) ou entre entreprises et particuliers (Bussiness to Consummer). Ainsi, dans sa définition de l'économie collaborative en 2010, Antonin Léonard le co-fondateur de OuiShare (à l'origine du plus grand rassemblement mondial des acteurs de l'économie collaborative: le OuiShare Fest) évoquait l'importance des Nouvelles Technologies de L'information et de la Communication (NTIC): « la récente explosions des formes traditionnelles de partage, troc échange, location ou de don rendue possible par les nouvelles technologies et le web collaboratif ou 2.0. Elle ouvre la voie à de nouvelles possibilités de consommation moins consuméristes et plus consom'actrices»4.Enfin ce dernier terme de consom’acteur est également fondamentale lorsqu’on s’intéresse à l’économie collaborative. De fait, dans ce système, les citoyens s’organisent « en réseau » et chaque individu peut être simultanément producteur et consommateur. Par leurs choix, les personnes investies dans le collaboratif cherchent une certaine utilité sociale. En matière d'économie collaborative, la France, avec les États-Unis, est le pays leader au niveau mondial. Bien loin du système de débrouille comme décrit à ses débuts, l'économie collaborative, présenté tantôt comme un modèle de transition, tantôt comme un modèle alternatif est un secteur dynamique qui représente des dizaines de milliers de dollars. Plus précisément, le marché mondial, composé de près de 9000 start-up, pèserait 15 milliards de dollars et devrait atteindre 335 milliards de dollars en 2025 5 .Ce changement d'échelle rapide induit de nouvelles problématiques pour l'économie collaborative, de nouveaux enjeux que nous seront amenés à évoquer dans le rapport. En effet, le très fort potentiel de ce marché attire en effet les grandes entreprises du secteur traditionnel davantage motivées par le profit que par la recherche d'utilité sociale. L’économie collaborative a en effet une dimension sociale au-delà de la recherche de création de valeur. Elle est créatrice de liens sociaux entre individus, favorise l’économie locale et la diminution de l’empreinte écologique et encourage une consommation responsable (consom’acteur)6. Cette notion d’utilité sociale est essentielle car contribue fortement à fixer le périmètre de l’économie collaborative. Aujourd'hui, ce terme éclipse quelque peu le terme plus anciennement connu d’Économie Sociale et Solidaire (ESS) et tend à le remplacer. Alors que l'ESS avait une connotation sociale très forte, l'économie collaborative répond sans doute davantage aux défis et problématiques actuels. Dans cette synthèse et plus largement dans le rapport final, nous essayons de mettre en perspective ces deux notions en les analysant, les comparant, et surtout en essayant d'identifier les enjeux et défis que l'économie collaborative va devoir surmonter dans le futur, notamment son adaptation à l’intérêt des entreprises capitalistes au sens traditionnel (recherche de profits). Le tout dans l'objectif de répondre à la question: «l'économie collaborative: un effet de mode?» 4 Economie Solidaire et Sociale du Pays de Brest http://www.eco-sol-brest.net/Quelles-definitions-de-la.html du gouvernement : Enjeux et perspectives de la consommation collaborative (consulté le 18/10/2015) http://www.entreprises.gouv.fr/files/files/directions_services/etudes-et-statistiques/prospective/Numerique/2015-07Consommation-collaborative-Rapport-final.pdf 6 econosoc (avril 2014) Nouvelles tendances économiques et économie sociale (consulté le 18/10/2015) http://econosoc.be/?rub=actualite&page=tendances_economiques 5 Rapport 4 I. De l’utilité sociale à l’économie collaborative A. L’utilité sociale Si nous devions donner une définition de l'utilité sociale, cette dernière pourrait être vue comme un concept fondamental dans l'approche de l'économie sociale et solidaire, qui regroupe l'ensemble des activités d'une organisation, générant de la cohésion sociale de manière explicite. L'utilité sociale doit donc être comprise dans le sens où elle est «utile à la société»7. Les travaux de Jean Gadrey sont les plus complets en ce qui concerne l'étude et la mesure de l'utilité sociale. D'après la synthèse d'une quarantaine de rapports, il en propose la définition suivante: «est d’utilité sociale l’activité d’une organisation de l’économie sociale qui a pour résultat constatable et, en général, pour objectif explicite, au-delà d’autres objectifs éventuels de production de biens et de services destinés à des usagers individuels, de contribuer à la cohésion sociale (notamment par la réduction des inégalités), à la solidarité (nationale, internationale, ou locale : le lien social de proximité), à la sociabilité, et à l’amélioration des conditions collectives du développement humain durable (dont font partie l’éducation, la santé, l’environnement et la démocratie)» 8 Le terme d'utilité sociale a été pour la première fois employé en 1973 lors d'un Conseil d’État. Le statut des associations a été redéfini: elles pouvaient désormais bénéficier d’exonérations fiscales car elles sont créatrices d’utilité sociale. L’Etat a justifié cette exonération par le fait que le coût des biens et services que les associations proposent est moindre par rapport à celui du marché et qu’il n’existe pas de structure semblable à celle-ci. L'utilité sociale a donc revêtit dans un premier temps un caractère fiscal important autour duquel elle s'est progressivement développée.9 Il est possible de retrouver des entreprises qui mettent en valeur leur utilité sociale à travers leurs objectifs à travers 3 grands groupes: • l'aide aux personnes en situation de fragilité sociale • la lutte contre les différentes inégalités • l'encouragement dans la prise en compte de l'importance du développement des territoires Les piliers historiques de l'ESS que sont les associations, les mutuelles, les coopératives et les fondations sont les grands prêcheurs de cette utilité sociale dans lesquels elle est omniprésente. 10 7 L'utilité sociale, page 1, sans date, (consulté le 9 décembre 2015) http://docs.eclm.fr/pdf_annexe/AssociationsCitoyennesPourDemain-UtiliteSociale.pdf 8 L'utilité sociale, pages 2-3, sans date, article (consulté le 9 décembre 2015) http://docs.eclm.fr/pdf_annexe/AssociationsCitoyennesPourDemain-UtiliteSociale.pdf 9 GEZE, Patrick, Evaluer l'utilité sociale de son activité, page 6, (consulté le 10 décembre 2015) http://www.avise.org/sites/default/files/atoms/files/200711_avise_cahier_evaluationutilitesociale.pdf 10 SIDEL, Juliette, Economie sociale et solidaire, La loi ESS donne une définition de l’utilité sociale , (consulté le 10 décembre 2015) http://www.gazette-sante-social.fr/13409/la-loi-ess-reconnait-et-promeut-le-secteur 5 Cependant, une des limites de l'utilité sociale se retrouve dans le fait qu'elle est assez difficile à mesurer. En effet, il n'existe pas à ce jour d'indicateur capable de la quantifier de manière exacte même si l'INSEE a estimé qu'en 2008 les associations représenteraient 1,4% du PIB français. Pour Jean Gadrey, il s'agit de «repérer, qualifier et quantifier trois réalités observables »: • le projet en question et ses missions d'utilité sociale • les publics bénéficiaires • ses actions et ses impacts Il classera l'utilité sociale selon 5 thèmes qu'il divisera selon 11 critères globaux. Il affinera ces 11 critères globaux sous la forme de 35 critères élémentaires11 : Source : http://www.eval.fr/Pages/utilitesociale.aspx 11 Dauphin, Sandrine, Focus-Mesurer l’utilité sociale des associations, page 54-57, (consulté le 10 décembre 2015) http://www.cairn.info/revue-informations-sociales-2012-4-page-54.htm 6 Thème Critères globaux Richesse économique créée ou économisée Thème 1 : Utilité sociale à forte composante économique Territoire Égalité, développement des capabilités Thème 2 : Egalité, développement humain et développement durable Solidarité internationale, développement humain Développement durable Lien social Thème 3 : Lien social et démocratie locale Démocratie locale Thème 4 : Contributions à l'innovation sociale, économique, institutionnelle Innovation Valeur du monde de la création Désintéressement, dons et bénévolats Thème 5 : Utilité sociale « interne », avec des effets possibles de contagion « externe » Gouvernance alternative et plus démocratique Professionnalisme associatif Critères élémentaires Moindre coût collectif Réduction indirecte de coûts Contribution au taux d'activité Contribution au dynamisme économique Animation du territoire, du quartier Réduction des inégalités sociales Actions vers publics défavorisés Insertion de désaffiliés de l'emploi Egalité professionnelle hommefemme Tarification modulée des services Droit au logement Soutien scolaire pour les enfants en difficulté Actions pour le développement et lutte contre la pauvreté Défense des droits de l’homme Améliorer la qualité de l'environnement naturel Préserver les ressources naturelles Création de liens sociaux Entraide, échange locaux de savoirs Impact positif du capital social Dialogue participatif, processus de décision pluraliste Prise de parole des citoyens Découvertes de besoins émergents Réponse à des besoins noncouverts Innovations institutionnelles Innovation organisationnelles Distinction des innovations internes et externes Non lucrativité Gestion désintéressée Action bénévole Règles de démocratie interne et participation conjointe Libre adhésion: libre entrée et libre sortie Formation interne coopérative Reconnaissance sociale et salariale Formations internes et externes Source : L'utilité sociale, page 3-4 http://docs.eclm.fr/pdf_annexe/AssociationsCitoyennesPourDemain-UtiliteSociale.pdf 7 Cette vision très décomposée de l'utilité sociale est intéressante car elle permet d'avoir un regard complet sur l'ensemble de ses « sous-parties ». On peut ainsi mesurer l'envergure de chaque critère en fonction du thème auquel il est rattaché. Ce tableau a d'ailleurs était repris par le Centre National de l'Information Statistique lors de sa publication sur la « Connaissance des Associations » paru en décembre 2010. 8 B. L’économie sociale et solidaire, un secteur ancien L’économie sociale et solidaire comprend un ensemble d’entreprises organisées sous forme de coopératives, mutuelles, associations ou fondations dont le fonctionnement interne est fondé sur un principe de solidarité et d’utilité sociale : l’utilisation des bénéfices engendré est alors contrôlé, le profit individuel est proscrit, les résultats sont réinvestis. Pour comprendre le statut et le rôle de ces 4 acteurs de l’économie sociale et solidaire nous avons repris les définitions de la Chambre Régionale économie sociale et solidaire Provence-Alpes-Côte d’Azur12. - La coopérative : c’est une « association de personnes volontairement réunies pour satisfaire leurs aspirations et besoins économiques, sociaux et culturels communs au moyen d'une entreprise dont la propriété est collective et où le pouvoir est exercé démocratiquement. ». - La mutuelle : c’est un regroupement de « personnes morales de droit privé à but non lucratif, qui mènent des actions de prévoyance, de solidarité et d'entraide pour contribuer au développement culturel, moral, intellectuel et physique de leurs membres, et à l'amélioration de leurs conditions de vie. » - L’association : c’est « une convention par laquelle deux ou plusieurs personnes mettent en commun d'une façon permanente leurs connaissances ou leurs activités dans un but autre que de partager des bénéfices. L'objet des associations est la mise en œuvre collective d'un projet destiné à satisfaire les besoins de ses membres et/ou d'usagers non adhérents. Les associations évoluent à l'articulation de la production de lien social et de la production de services. » - La fondation : c’est « l'acte par lequel une ou plusieurs personnes physiques ou morales décident l'affectation irrévocable de biens, droits ou ressources à la réalisation d'une œuvre d'intérêt général à but non lucratif. Les entreprises qui souhaitent structurer sur le long terme leurs actions de mécénat, peuvent recourir à trois types de fondations : la fondation reconnue d'utilité publique, la fondation d'entreprise et la fondation sous égide. » Le poids des 4 acteurs de l’économie sociale et solidaire aujourd’hui : Source : lafinancepourtous.com d’après la CNES et la CRES, 2012 12 http://www.cresspaca.org/ 9 Conjointement au contexte actuel, le terme d’économie sociale est aujourd’hui très présent dans nos sociétés mais n’est pas nouveau13. On trouve les premiers signes d’un travail coopératif lors de la construction du Temple de Salomon à Jérusalem où les ouvriers avaient mis en place un système d’entraide destiné à ceux qui étaient victimes d’accidents ou de maladie ou encore au XIIIème siècle avec les premières coopératives laitières en Franche Comté. Les systèmes coopératifs ont toujours existé même si leur activité n’était pas juridiquement reconnue et de fait, non encadrée. Le 17 juin 1791, la loi Le Chapelier interdit les assemblées et coalitions ouvrières et patronales en supprimant ainsi les corporations, les jurandes (les corps de métier sous l’Ancien Régime) et le compagnonnage. Il faudra attendre 1884 pour que cette loi soit abrogée. Le XIXème siècle marque alors un tournant dans l’affirmation des mouvements coopératifs. Après la déclaration de l’identité coopérative en 1895, la liberté d’association est définie en France par la loi de 1901, la définition du statut juridique de la coopérative en 1947 et celle des fondations en 1987. L’économie sociale et solidaire est un secteur d’utilité sociale. Il vise à offrir des emplois à des individus victimes du chômage de masse, prône des formes d’échanges et de coopération plus équitable par le biais du commerce équitable, des systèmes d’échange locaux et appuie des formes de production plus soutenables avec par exemple les énergies renouvelable ou encore l’agriculture biologique. Ces organisations sont variées : certaines travaillent avec un modèle économique proche de celui des structures capitalistiques (mutuelles) et d’autres avec la sphère publique dans des secteurs d’activité tels que l’action sociale, la santé, l’éducation, la culture, le sport, les transports, le tourisme ou encore l’éducation populaire. Toutes ces organisations se retrouvent cependant dans leur objectif commun de voir l’économie d’une nouvelle manière en rendant ce secteur plus démocratique et en montrant qu’il existe des alternatives au modèle capitalistique de base. En effet, la forme de production capitalistique dans l’unique but de l’enrichissement personnel n’est pas la seule option. L’humain est replacé au cœur du débat. En cela, on retrouve les idées des socialistes utopistes14 du XIXème siècle comme Robert Owen, Saint-Simon ou encore Charles Fourier qui disait: « on devrait, pour premier problème d’économie politique, s’intéresser à transformer tous les salariés en propriétaires cointéressés » et qui condamnait « la fausse industrie morcelée et répugnante » et le « commerce mensonger des intermédiaires parasites »15. Finalement, toutes ces formes d’économies qui étaient auparavant utilisées, se retrouveraient aujourd’hui dans ce que nous considérons comme étant de l’ « économie collaborative ». 13 https://fr.wikipedia.org/wiki/Mutualisme_en_France LICHTENBERGER (1898) Le socialisme utopique: études sur quelques précurseurs inconnu du socialisme 15 PELLARIN (1843) Charles Fourier: sa vie et sa théorie 14 10 C. • L’économie sociale et solidaire aujourd’hui Un secteur à part entière L’économie sociale et solidaire a souvent été considérée comme étant une alternative au modèle classique capitaliste se tournant vers les acteurs économiques qui ne se retrouvaient pas dans ce modèle. Aujourd’hui, d’après le Panorama de l’Economie Sociale et Solidaire en France – Edition 201516, l’ESS est devenu un secteur à part entière, elle représente 10,5% de l’emploi salarié en France et son statut a été juridiquement encadré par la loi du 31 juillet 201417. En effet, elle désigne les grands principes de ce secteur : le but social autre que le seul partage des bénéfices, la lucrativité encadrée et la gouvernance démocratique et participative en incluant les entreprises de l’ESS dans les acteurs du secteur à côté de ceux qui s’y trouvent de par leur régime juridique (associations, fondations, coopératives, mutuelles). Ainsi, ces entreprises pourront avoir accès par exemple à l’épargne salariale solidaire. La loi met aussi en place des leviers pour faciliter le développement de l’ESS dans le développement territorial via les pôles territoriaux de coopération économique, les contrats de développement territorial pour les collectivités du Grand Paris et la participation des collectivités locales dans le capital des sociétés coopératives d’intérêt collectif. Ce nouveau cadre légal permet ainsi le développement du secteur de l’économie sociale et solidaire. D’après les chiffres fournis par le Panorama de l’Economie Sociale et Solidaire – Edition 2015, le secteur comporte aujourd’hui 221 325 établissements employeurs et 2 370 301 salariés. Plus de 75% des structures de l’ESS ont moins de 10 salariés, les établissements de proximité sont prônés. De plus, pour la première fois en 2013 l’INSEE a estimé la contribution de l’ESS au PIB à 6% avec une valeur ajoutée brute créée de 100 milliards d’euros. Source : Observatoire national de l’ESS – CNCRES d’après INSEE Clap 2013 16 17 http://www.cncres.org/upload/gedit/12/file/observatoire/Panorama%20de%20l'ESS%202015-CNCRES.pdf LOI n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire 11 • Deux principaux outils : Les CRESS et les CNCRES En 2001, chaque région est encouragée à créer sa chambre d'économie sociale et solidaire (CRESS) pour représenter ce secteur auprès des collectivités locales. En 1976, est crée le Comité national de liaison des activités mutualistes, coopératives et associatives (CNLAMCA) qui est le premier outil de reconnaissance officielle et qui est, l’ancêtre de la CRESS. Il se divise en trois familles : celle des associations pour la santé, l'environnement, la formation, l'éducation, la culture, le sport et le tourisme, celle des coopératives concernant le commerce, l'artisanat, l'industrie, la banque... et celle des mutuelles, se chargeant de la santé et des assurances. Le CRESS a trois grandes missions aujourd’hui18 : - structurer et représenter l’ESS - Accompagner le développement des entreprises et filières de l'ESS - Faire connaître l’ESS Ces chambres sont devenues indispensables pour le développement du secteur de l’ESS. Elles sont accompagnées du Conseil National des Chambres Régionales de l’Economie Sociale (CNCRES)19 qui a été crée en juin 2004 dans le but de représenter les CRES au niveau national. Ces activités répondent à 5 objectifs « Consolider la représentation des CRES(S) au niveau national, contribuer à la structuration de l'ESS, soutenir la structuration des CRES(S) et la mutualisation inter CRES(S), connaître, faire connaître et reconnaître l'ESS en région, Favoriser le développement de l’action au service de l’innovation sociale. » Pour mieux faire connaître le secteur, le CNCRES a fondé l’Observatoire National de l’ESS qui produit des données statistiques et des études en favorisant le développement des observatoires régionaux. • L’Economie Sociale et Solidaire et le développement local Nombre d’articles et de théories existent sur le lien entre l’économie sociale et solidaire et le développement local. Nous avons préféré opérer ici à une étude de cas pour mieux comprendre ce lien plutôt que de faire une énumération de tous ces travaux. Pour ce faire, nous avons pu rencontrer le pôle d’économie sociale et solidaire de Châteauroux (36)20. Nous avons voulu mieux comprendre le rôle que joue ce type de structure dans l’Economie Sociale et Solidaire et quels sont les enjeux auxquels elles sont confrontées. « Madame Tisseur, présidente du PLES depuis 2007, a bien voulu répondre à nos questions ». Le PLES est une structure associative composée de 4 salariés et de multiples bénévoles et qui reçoit environ 200 personnes à l’année. Il a été crée en 1996 par des citoyens bénévoles dans le but de créer une association d’utilité sociale : créer des territoire de l’Indre avec des valeurs solidaires et humaines. Leur objectif est donc de 18 http://www.cressidf.org/la-cress/missions.html http://www.cncres.org/ 20 http://www.economiesolidaire36.fr/ 19 12 supprimer les barrières – administratives, légales, financières etc.- qui freinent la création d’entreprise pour les demandeurs d’emploi. L’objectif est donc d’accompagner ces personnes en leur apprenant le métier de chef d’entreprise par le biais de plusieurs outils. Le principal est la couveuse d’entreprise qui donne le droit aux personnes de pouvoir tester leur activité avant de se lancer seul sur le marché du travail. Cette dernière donne droit à un hébergement juridique via les contrats CAP (Contrats d’Appui aux Projets d’Entreprise, crée par la loi sur l’initiative économique de 2003). Cela permet à la fois à des personnes de tester leur activité et de commencer à produire et à vendre leur produits/service sans s’immatriculer tout en conservant leur allocation dans la limite de leur droit. De plus, tout le chiffre d’affaire généré dans l’entreprise quand elle est en couveuse est réinvesti dans cette dernière ce qui fait un effet tremplin. Cette couveuse est donc une réelle base pour les créateurs d’entreprise. L’autre outil important est la Cagnotte Solidarité Emploi : c’est un fond citoyen alimenté par des dons qui est destiné aux entrepreneurs qui n’ont pas assez d’apport personnel et qui de fait n’ont pas accès au prêt bancaire de bénéficier d’un prêt pouvant aller jusqu’à 3000 euros à taux 0 et ce permettant, de faire effet de levier. Pour palier à ses objectifs le PLES est entouré de partenaires techniques qui comprend tout le réseau lié à la création d’entreprise : la chambre de commerce et d’industrie, la chambre des métiers, les plateformes d’initiatives, les bénévoles etc. Ils travaillent conjointement dans le processus d’accompagnement. Le PLES a aussi crée une coopérative de service à la personne : la COP service 36. Le secteur de service à la personne a été redéfini par la loi Borloo de 2005 qui a permis de défiscaliser les clients à hauteur de 50% avec une TVA à taux réduite. C’est pour cela que la coopérative a été créée : pouvoir faire bénéficier de ces avantages aux entrepreneurs (qui peuvent par la suite devenir associé coopérateur par le principe d’un homme-une voix). La majorité des fonds du PLES sont des subventions publiques : la plus grande est celle du FEDER à hauteur de 30%, l’Etat via la DIRECCTE, des subventions de Châteauroux Métropole, etc. Cependant, ces subventions ont particulièrement diminué depuis l’année dernière, l’Etat apparaît comme étant totalement désengagé : - 25 000 euros pour 2015 par rapport à 2014. Ces partenaires financiers demandent donc en retour de ces subventions la mise en place d’indicateurs permettant de mesurer l’efficacité des actions qu’ils mènent en terme de création d’entreprise, de retour à l’emploi salarié, de pérennité etc. Environ 200 personnes se présentent à l’année en premier accueil, 85 personnes en moyenne créent leur entreprise dans l’année contre 40 environ qui rentrent en couveuse. Pour ces dernières, le taux de pérennité sur les 5 ans est de 75% c’est-à-dire 5 ans après les entreprises sont encore en activité sachant qu’au niveau national on approche des 50%. Depuis 2007, 130 entreprises sont rentrées en couveuse, 80% ont crée leur entreprise et 10% sont retournées à l’emploi salarial. 13 Le PLES est finalement un pôle d’Economie Social et Solidaire développé dans le sens où il a à la fois un réseau de bénévoles conséquent, la cagnotte, la couveuse, la COP service etc. En revanche, ils sont confrontés à quelques problèmes qui freineraient leur champ d’action. En effet, le pôle est aujourd’hui très dépendant des subventions publiques, il doit trouver d’autres moyens de financement ; on leur demande de s’autofinancer et être plus autonome par rapport aux subventions (prestations de service, répondre à des appels à projet, des appels d’offre). De plus, ils n’ont les moyens de communiquer qu’à travers leurs prescripteurs, le pôle gagnerait évidemment à se faire connaître. Pour Mme Tisseur, l’Economie Sociale et Solidaire est un secteur qui manque de reconnaissance même si la loi de l’ESS (Hamont 2014) a permis à beaucoup de gens de connaître ce terme. L’économie classique devrait plus s’inspirer de l’ESS et inversement. L’avantage de ce dernier secteur est qu’il est innovant et il est possible de faire beaucoup de choses : il est en mouvement, en mutation perpétuelle ce qui rend difficile l’encadrement juridique, économique précis de ce secteur. L’économie tend de plus en plus vers la création d’entreprises sociales et la construction de structures hybrides qui restent d’utilité sociale et qui permettent entièrement de s’autofinancer (projet dans le commerce équitable, dans la transition énergétique etc.). Le PLES est donc face à de réelles problématiques qui l’empêche de pouvoir se projeter à plus de 1 ou 2 ans tant que le pôle sera aussi dépendant des subventions publiques, puisque l’Etat a choisi de se désengager sur ce sujet, le rôle que joue le pôle dans le département de l’Indre est pourtant indéniable. Cependant, le PLES est une structure qui fait parti de l’ESS et non de l’économie collaborative. L’économie sociale et solidaire est aujourd’hui devenu un secteur de l’économie à part entière dans nos sociétés de par sa reconnaissance juridique, les outils qui ont été mis en place au niveau national/régional/local pour veiller à son encadrement et à sa bonne application au sein d’un territoire. Les structures d’économie sociale et solidaire sont devenues un outil essentiel dans les dynamiques économiques territoriales. Cependant, l’économie sociale et solidaire n’est plus celle d’autrefois, elle se distingue désormais de l’économie collaborative qui n’est finalement qu’une branche de l’économie sociale et solidaire. 14 II. Le renouveau A. Emergence de l’économie collaborative 1-­‐ Un contexte de crise Les crises financière et économique, qui ont eu lieu respectivement en 2007 et 2008, ont eu un impact structurel sur la société française. La confiance qu’accordaient les ménages au système économique (capitaliste) et au gouvernement s’est effondrée. Au niveau économique, depuis 2008, la croissance est en berne et le chômage s’aggrave chaque année et touche notamment les jeunes générations. De plus, le pouvoir d’achat s’est dégradé, tandis que les prix se sont envolés. En effet, les trois quarts des français déclarent être affectés par les effets de la crise et plus de la moitié d’entre eux sont pessimistes pour leur avenir. Selon eux, l’intérêt collectif de la France passe toujours après l’intérêt de nos politiciens. Le modèle économique actuel a engendré de nombreuses dérives comme par exemple, les crises économiques, des tensions sociales, la montée de l’individualisme etc... La massification de l’économie va à l’encontre des valeurs humaines, c’est pour cela qu’il faut réussir à percevoir la société différemment en s’appuyant sur l’intelligence collective afin de construire un monde plus durable pour demain. Il y a alors eu une prise de conscience de la dégradation environnementale et de la transformation de notre modèle actuel. L’économie collaborative constitue une véritable innovation sociale 21 dans le sens où le citoyen devient acteur de son développement. De ce fait, l’économie sociale et solidaire a connu un nouvel essor depuis la crise ce qui a contribué à l’accélération de la consommation collaborative. Cette dernière a pour but principal de maintenir ou augmenter le pouvoir d’achat des ménages français. Ces derniers peuvent y avoir accès de 3 manières différentes : - En créant des revenus complémentaires : Les particuliers peuvent être offreurs d’équipements. Par exemple, un particulier peut louer son bateau quand il n’en a pas besoin, et en dégager un revenu, ce qui lui permet d’amortir ses coûts annuels d’entretien. Les gains issus de la consommation collaborative représentent 30% des revenus de 21% des ménages français.22 Les particuliers peuvent alors aussi être demandeurs, ce qui leur permet de diminuer le prix d’acquisition des biens dont ils ont besoin. - En réalisant des économies : La consommation collaborative est un phénomène particulièrement présent dans le secteur non marchand tel que le troc ou les dons. En effet il y a de nombreuses démarches dans le domaine associatif, comme par exemple le réseau associatif solidaire « l’Accorderie »23. C’est une communauté au sein de laquelle les 21 KLEIN Juan-Luis, L’innovation sociale (consulté le 10 décembre 2015) http://www.franceculture.fr/oeuvre-l-innovation-sociale-de-juan-luis-klein 22 Enjeux et perspectives de l’économie collaborative, page 209, (consulté le 10 décembre 2015) http://www.entreprises.gouv.fr/files/files/directions_services/etudes-et-statistiques/prospective/Numerique/2015-07Consommation-collaborative-Rapport-final.pdf 23 http://www.accorderie.fr/ 15 membres échangent leurs savoir-faire gratuitement grâce à un système de « banque de temps » (1 heure de service rendu = 1 heure de service perçu). Ce système permet d’avoir une égalité des compétences, et donc de favoriser l’utilité sociale. Les dépenses de consommation collaborative représentent 30% des dépenses de 25% des ménages français.24 - En accédant à de nouveaux bien et services : La consommation collaborative permet de répondre à une demande non satisfaite auparavant. Par exemple, avant la création d’UBER25, les clients ne pouvaient faire appel à un taxi que pour un trajet minimal, alors qu’aujourd’hui avec UBER, n’importe quel trajet est accepté. Cela permet alors de répondre à des besoins mais aussi d’élargir la demande. La crise économique a donc entrainé une multiplication des démarches collaboratives, pas seulement pour préserver le pouvoir d’achat des français, mais aussi pour favoriser la mixité sociale. On peut d’ailleurs voir ci-dessous les principales motivations de la consommation collaborative : Motivations de la consommation collaborative Le pouvoir d'achat 65 Choix sociétaux 55 43 Lien social EfYicacité / Pédagogie 38 Originalité Autres raisons 32 12 Source : Pipame, Enjeux et perspectives de la consommation collaborative Selon une étude « Enjeux et perspectives de la consommation collaborative » du Pôle interministériel de prospective et d’anticipation des mutations économiques, basée sur une enquête auprès des consommateurs, voici les différentes motivations de la consommation collaborative (plusieurs réponses possibles). Pour 65 % d’entre eux, la consommation collaborative permet de faire des économies (ex : bonnes affaires). Cela renvoie au constat que l’économie collaborative a pour principal objectif de préserver le 24 Enjeux et perspectives de l’économie collaborative, page 210, (consulté le 10 décembre 2015) http://www.entreprises.gouv.fr/files/files/directions_services/etudes-et-statistiques/prospective/Numerique/2015-07Consommation-collaborative-Rapport-final.pdf 25 https://www.uber.com/ 16 pouvoir d’achat des français. Mais on peut aussi remarquer d’autres motivations, notamment des valeurs sociales, à 55 %, telles que limiter le gaspillage et donner une seconde vie aux objets. Le lien social est aussi cité comme une motivation majeure (43%), car en effet, la consommation collaborative permet de faire des rencontres, aider des personnes dans le besoin ou encore avoir une certaine proximité entre l’acheteur et le vendeur. Pour finir, l’efficacité et l’originalité de ce nouveau mode de consommation entre aussi en considération. Malgré que la principale motivation soit d’intérêt personnel (préserver son pouvoir d’achat), on constate que les autres motivations sont d’intérêt collectif, car en effet elles permettent de favoriser l’utilité sociale. 2- Nouvelles formes Aujourd’hui, l’économie collaborative s’inspire fortement de l’économie circulaire. L'économie circulaire est une expression qualifiant un modèle économique qui s'intègre dans le cadre du développement durable. Ce concept s'inspire notamment des notions d’économie verte, d’économie de l’usage ou de l’économie de la fonctionnalité, de l’économie de la performance et de l’écologie industrielle. La notion d’économie circulaire émerge peu de temps après la publication du rapport du Club de Rome en 1972 « The Limits to Growth »26, concept qui se théorise au début du XXIème siècle. L’économie circulaire apparait donc comme un modèle opérationnel et mobilisateur de développement durable dans un contexte économique en pleine mutation27. Elle s’oppose au modèle classique basé sur l’exploitation de ressources limitées. Elle constitue une formidable opportunité d’économie, de création d’activités et d’emplois. Elle se veut partenariale et collaborative (maximise l’utilité sociale). Source : Source :GELDRON Alain, octobre 2014, Economie circulaire : notions 26 27 GELDRON Alain, octobre 2014, Economie circulaire : notions, page 2 L’économie circulaire dans votre région, novembre 2014, page 1, www.ademe.fr 17 L’économie circulaire s’articule autour de trois pôles28 : Tout d’abord la production et offre de biens/services qui concerne l’approvisionnement durable en ressources. Puis la consommation collaborative qui concerne la demande et le comportement, on s’intéresse à l’achat et à la consommation responsable, à la bonne utilisation des produits, recours au réemploi et à la réparation. Enfin la gestion des déchets qui concerne essentiellement le recyclage et la valorisation énergétique. Ces piliers de l’économie circulaire reposent sur différentes sphères, tels que les politiques de l’emploi, de l’insertion sociale, mais également la notion du développement durable. Ainsi l’économie circulaire vise à bâtir un nouveau modèle économique ayant pour intérêt de créer des emplois.29 Mais également pour les collectivités comme pour les entreprises cela engendre une réduction des couts et une meilleure maitrise des risques. Chacun de ses pôles repose sur différents piliers qui peuvent avoir un lien direct avec l’économie collaborative. Economie Circulaire Pôles Economie Collaborative Production et offre de B/S Ecologie Industrielle / Territoriale Economie de la fonctionnalité Consommation, demande et comportement Consommation responsable Allongement de la durée d’usage Hors Economie collaborative Approvisionnement durable Recyclage / Gestion des déchets Ecoconception Recyclage Tableau récapitulatif fait par le groupe 28 29 L’économie circulaire dans votre région, novembre 2014, page 2, www.ademe.fr GELDRON Alain, octobre 2014, Economie circulaire : notions, page 5 18 Par exemple l’écologie Industrielle et Territoriale, est un mode d’organisations interentreprises par des échanges de flux ou une mutualisation de besoins. Mais également ce que l’on appelle l’économie de la fonctionnalité, favorise l’usage à la possession (on vend des services liés aux produits plutôt que les produits eux-mêmes). Ou encore la consommation responsable, qui amène l’acheteur, à favoriser la consommation collaborative (location, prêt, achat collectif). Puis l’allongement de la durée d’usage, conduit au recours à la réparation, à la vente d’occasion ou au don, ou à l’achat d’occasion dans le cadre du réemploi ou de la réutilisation. L'économie collaborative peut être divisée en 9 secteurs que sont : le déplacement, le transport des biens, le logement, les divertissements, la nourriture, l'équipement, l'habillement, les services entres particuliers et le financement. Les voici ci-dessous : Les 9 secteurs de l’économie collaborative Source : Rapport gouvernemental - Enjeux et perspectives de l’économie collaborative On a choisi quelques exemples d’application concrète d’économie collaborative afin de décrire certains de ces 9 secteurs : 1 Le covoiturage est un exemple phare du développement de l'esprit collaboratif, dans le domaine des transports. En effet l'utilisation d'un véhicule commun pour plusieurs passagers n'a fait qu'augmenter depuis les années 1990, où le nombre d'inscription à désormais dépassé les 20 millions depuis janvier 2015 sur une plateforme telle que Blablacar.30 30 Source Euters, BlaBlaCar signe une nouvelle levée de fonds de 200 millions de dollars, (consulté le 20 novembre 2015), Les Echos http://www.lesechos.fr/16/09/2015/lesechos.fr/021333117685_blablacar-signe-une-nouvelle-levee-de-fonds-de-200millions-de-dollars.htm 19 2 Au niveau de la livraison, les attentes des consommateurs ont elles aussi bien évoluées. Les distributeurs qui disposent traditionnellement d'un réseau conséquent de points de vente, ne permettent plus de satisfaire efficacement les demandes des consommateurs en raison de l'absence de diversité des implantations géographiques de ces points de vente, et d'un manque d'effectif proposés par ces entreprises. Ainsi, de nombreux services de livraison ont récemment vu le jour. Certaines entreprises comme TokTokTok31 confient à ses « runners » la tâche d'aller chercher des biens ou produits en magasin et de les acheminer directement chez le client. D'autres start-up françaises s'essaient aussi au covoiturage de colis, tels que le colis-voiturage.fr.32 3 L’habitat collaboratif se définit comme le fait « d'acheter un logement à plusieurs et d'y vivre tous ensemble »33.Ce phénomène récent est en vogue depuis une dizaine d'années et constitue plusieurs avantages par rapport à l'achat privatif d'un logement classique : hormis les économies réalisées sur les charges et les prix des services, les logements collaboratifs permettent de «mutualiser les ressources», c’est-à-dire de réduire les coûts et d'accéder à des logements avec une plus grande superficie ou une meilleure situation géographique. De plus, le lien social peut ainsi être entretenu et même redécouvert grâce à des valeurs mises en avant comme la convivialité, la solidarité, la confiance ou encore l'échange. 4 Le tourisme collaboratif à lui aussi connu un véritable essor depuis quelques années : des sites comme couchsurfing34 propose un service d'hébergement via le web ou chacun peut « partager son canapé », comprenez son chez soi. Les adhérents peuvent librement discuter des conditions d’hébergements, de leurs préférences, de leurs goûts, intérêts etc. Le but de ce genre de surface est donc de rapprocher les personnes et ainsi de favoriser les rencontres culturelles de manière ludique. 9 Enfin, le financement aussi peut revêtir un aspect collaboratif avec la création de plus en plus courante par des tiers de plateforme de « crowdfunding », c’est-à-dire de financement participatif. Cet outil met en relation tout porteur de projets en besoin de financement avec des investisseurs, capables d'y répondre. En 2013, l'ensemble des plateformes de crowdfunding ont permis de collecter près de 80 millions d'Euros, soit 3 fois plus qu'en 2012. 35 Le micro financement, permet lui d'apporter des solutions économiques pour des personnes à faible revenu, ou exclu du système financier classique36. Généralement utilisé dans les pays en voie de développement, ce financement pour tous se repend de manière exponentielle dans les pays européens, et constitue aujourd'hui une réelle solution pour les personnes démunies. 31 https://toktoktok.com/ FAUCONNIER Flore (juillet 2014) ,L’économie collaborative au service de la livraison (consulté le 20 novembre 2015) http://www.journaldunet.com/ebusiness/commerce/avenir-livraison-e-commerce/les-start-up.shtml 33 http://coloc-senior.fr/lhabitat-collaboratif-acheter-un-logement-a-plusieurs-et-y-vivre-tous-ensemble/ 34 https://www.couchsurfing.com/ 35 21 sites web de crowdfunding en France, (consulté le 20 novembre 2015) http://www.dynamiquemag.com/article/sites-web-crowdfunding-france.5237 36 FAQ : microfinance, (consulté le 20 novembre 2015) http://www.microfinancegateway.org/fr/what-is-microfinance 32 20 B. Les nouveaux outils de l’économie collaborative 1- L’ ubérisation de l’économie Selon Jérome Ballet, maître de conférences en sciences économique à l’Université de Bordeaux, l’ubérisation de l’économie est la mise en relation d’individus par internet (notamment des applications) pour l’échange de biens et services.37 L’essor des technologies, et notamment l’ubérisation de l’économie, a eu un impact important sur le mode de consommation des individus. En effet, l’accès à internet a permis une certaine démocratisation de l’expertise. Les consommateurs peuvent évaluer les hôtels, les restaurants… Ce qui permet pour eux de comparer les offres et de faire jouer la concurrence. Ces évolutions ont obligé les entreprises à optimiser leurs coûts afin d’être plus compétitifs et de répondre à des demandes insatisfaites. Elles sont aujourd’hui plus réactives et plus flexibles notamment grâce aux nouveaux moyens de communication et de distribution : les plateformes internet. Les acteurs de l’économie collaborative sont très habiles en matière de nouveaux outils numériques. Ils créent des « solutions ergonomiques, rapides et sécurisées » 38 qui permettent de favoriser les pratiques de consommation collaborative. Ces solutions, les plateformes, sont caractérisées par 3 fonctionnalités importantes (selon Olivier Marchesson, fondateur de Jobapic)39 : - La facilité de navigation et l’intuitivité du site - La rapidité de service et la transparence de l’information (ex : l’application Uber qui permet de trouver un chauffeur en moins de 5 minutes pour réaliser un trajet souhaité, tout en disposant des informations sur ce chauffeur) - La mise en œuvre d’un système de paiement automatisé, performant, crédible et sécurisé. De plus, les plus gros acteurs de la consommation collaborative, tels que Airbnb40 ou Blablacar par exemples, sont très performants dans le référencement de leur offre sur les moteurs de recherche. Internet est un outil logistique car il permet de faire le lien entre les besoins des individus et les solutions à ces demandes, facilement et rapidement, sans en supporter les coûts d’infrastructures ou de ressources humaines. L’économie collaborative s’appuie donc largement sur cette mise en réseau permise par internet. La clef de cette mise en relation est la confiance et l’évaluation du risque. C’est pourquoi les plateformes collaboratives ont mis en place des systèmes de notations. Cela permet aux particuliers d’être rassurés et d’avoir des critères de choix. 37 Conférence L’ubérisation de l’économie : solidarité ou business ? , le 4 novembre 2015 au Pôle juridique et judiciaire de Bordeaux 38 Enjeux et perspectives de l’économie collaborative, page 211, (consulté le 10 décembre 2015) http://www.entreprises.gouv.fr/files/files/directions_services/etudes-et-statistiques/prospective/Numerique/2015-07Consommation-collaborative-Rapport-final.pdf 39 Enjeux et perspectives de l’économie collaborative, page 211, (consulté le 10 décembre 2015) http://www.entreprises.gouv.fr/files/files/directions_services/etudes-et-statistiques/prospective/Numerique/2015-07Consommation-collaborative-Rapport-final.pdf 40 https://fr.airbnb.com/ 21 Ces plateformes permettent de faire de l’économie du partage locale à grande échelle. En effet, elles permettent de relier des individus à distance et d’organiser des communautés connectées. Selon Rachel Botsman (professeur en économie collaborative à l’Université d’Oxford)41, ces communautés connectées sans autorité centrale auront de plus en plus de pouvoir dans le futur. Pour Bertrand Duperrin (chroniqueur sur les nouvelles technologies et responsable du pôle transformation digitale chez Emakina France) 42 , ce n’est pas internet qui a révolutionné notre façon de consommer. Pour lui, l’apport d’internet à l’économie du partage n’est rien d’autre que la globalisation et la scalabilité. « La scalabilité se dit d’un système informatique apte à s’adapter d’un point de vue dimensionnel, tant vers des tailles inférieures que vers des tailles supérieures ».43 Internet n’est pas à la base de la création de ce nouveau mode de consommation, qu’il estime indépendant et antérieur à l’économie digitale. Mais il estime tout de même qu’internet a permis à ce modèle une diffusion massive en apportant ainsi « visibilité, viabilité et pérennité ». Sa conclusion consiste à dire que les modèles collaboratifs ne sont pas digitaux par nature mais par nécessité, car en effet l’économie collaborative a besoin d’internet pour prospérer. 2- Les nouvelles formes de financement Aujourd’hui, l’argent reste un moyen incontournable pour monter un projet. Il est essentiel de bien comprendre les différents termes financiers. Tout d'abord, il ne faut pas confondre la finance solidaire avec la finance éthique ou l'investissement socialement responsable. La finance solidaire est investie dans l'économie sociale et solidaire. Elle permet aux épargnants de soutenir des activités à forte utilité sociale. Elle recouvre deux types d’investissement D’une part la prise de parts sociales d’entreprises spécialisées dans le financement d’activité solidaires et d’autre part la souscription de produits d’épargne solidaire44. Tandis que la finance éthique ou l’investissement socialement responsable excluent certains secteurs de leur action pour des raisons éthiques et incluent des critères environnementaux45 41 BAZIN Chrystèle, Les 7 clefs de l’économie collaborative, (consulté le 10 décembre 2015) http://www.culturemobile.net/nouveau-monde-telecoms/7-cles-economie-collaborative 42 DUPERRIN Bertrand, L’économie collaborative est-elle digitale par nature ?, (consulté le 10 décembre 2015) http://www.duperrin.com/2015/02/25/leconomie-collaborative-est-elle-digitale-par-nature/ 43 http://www.linternaute.com/dictionnaire/fr/definition/scalabilite/ 44 Novethic, 2015, 13ème baromètre de la finance solidaire : l’épargne bancaire en forte hausse, (consultation le 10 décembre 2015) http://www.novethic.fr/empreinte-sociale/economie-sociale-et-solidaire/isr-rse/13e-barometre-de-lafinance-solidaire-l-epargne-bancaire-en-forte-hausse-143297.html 45 Novethic, Les chiffres de l’ISR, (consultation le 10 décembre 2015) http://www.novethic.fr/isr-et-rse/les-chiffres-delisr.html 22 • La NEF : Unique en France la NEF est une coopérative qui propose des solutions d’épargne et de crédit pour des projets ayant une utilité sociale, écologique et culturelle46. Elle a un objectif de transformation de la société et une vision d’un “monde idéal”. Elle n’est pas un organisme de crédit classique en effet, elle choisit de prêter à des projets qui placent l’Homme et l’environnement au cœur des préoccupations. A la création de la NEF, beaucoup de projets ne parvenaient pas à se faire financer car trop peu rentables, c’est pourquoi la NEF a voulu y apporter une solution en se constituant en établissement éthique et solidaire. Fidèle à son principe fondateur «Pour que l’argent relie les hommes» la Nef accompagne des nouvelles façons de produire, de consommer, d’entreprendre, d’habiter. Elle pose ainsi la question de la responsabilité vis à vis de l’argent et de son utilisation. La NEF a un statut de société financière et propose des comptes à terme sur lesquels l’argent est immobilisé pour une durée de 12 mois à 7 ans avec des taux de rémunération. Elle propose à ses épargnants de choisir le domaine d’utilisation de son argent (secteur social, écologique, culturel). Aujourd’hui elle compte 118 millions d’euros d’encours total. La NEF est présente sur le territoire à travers 4 délégations à Paris, Nantes, Toulouse et Lyon et comte 6 banquiers itinérants. Les sociétaires occupent une place centrale dans la vie de la coopérative et l’animent toute l’année à travers des évènements nationaux et des rencontres locales (stands, salons, AG). Ils favorisent la circulation de l’information et participent aux différents conseils de coordinateurs locaux. La NEF opère donc un fonctionnement qui favorise la démocratie participative (la prise de décision est partagée). De plus, les sociétaires sont propriétaires du capital et élisent en assemblée générale un conseil de surveillance qui veille à la cohérence de l’activité et au choix des projets. • Babyloan : Babyloan est la première plateforme française de financement participatif au service de la microfinance. Depuis sa création, Babyloan défend une microfinance sociale et inclusive47. Cette entreprise fait le lien entre les ressources de milliers d’internautes et de plusieurs institutions de microfinance (IMF). La plateforme rassemble les projets de micro entrepreneurs (qui sont exclues du système bancaire) sélectionnés par les IMF et propose aux internautes de leur prêter une certaine somme à taux d’intérêt nul. Babyloan prélève une commission sur ces sommes afin de payer le coût de fonctionnement de l’entreprise, puis prête aux IMF à taux zéro. Ces IMF prêtent ensuite au micro entrepreneur à leur taux réglementaire. Ce prêt à taux zéro de la part de Babyloan permet aux IMF de faire baisser leurs taux à l’égard des micro-entrepreneurs car cette ressource financière est bien moins coûteuse 46 47 http://www.lanef.com/la-nef/introduction/ http://www.babyloan.org/fr/pour-une-microfinance-sociale 23 que les banques traditionnelles. L’entreprise sélectionne les IMF selon un cahier des charges bien précis (impact social, équilibre financier) et les auditionne régulièrement. L’activité de Babyloan n’est pas encore rentable (l’entreprise a connu un résultat net de 545 000 en 2014), mais elle peut continuer d’agir grâce au soutien de ses actionnaires (ACTED, le crédit coopératif, la fondation du crédit agricole) qui apportent régulièrement des capitaux. L’ensemble des micro-prêts effectués à travers la plateforme sont labélisés par Finansol, qui garantit la transparence et le caractère solidaire de ces derniers. Si l’utilité sociale de l’entreprise est bien réelle, son mode de fonctionnement ne respecte pas la totalité des principes que l’on peut retrouver habituellement dans le monde de l’économie sociale et solidaire. • Les CIGALES Les CIGALES (clubs d’investisseurs pour une Gestion Alternative et locale de l’épargne) sont des clubs d’investisseurs spécialisés dans l’autogestion de ses membres et le financement de projets de l’économie sociale et solidaire. Elles se basent sur l’épargne de leurs membres pour financer des projets de solidarité avec des acteurs locaux (développement de petites entreprises locales et collectives)48. Un club est formé de 5 à 20 personnes qui placent une partie de leur épargne en commun et choisissent eux-mêmes les entreprises qu’ils vont soutenir. Elles se différencient d’un club d’investisseur classique du fait du suivi des entreprises qu’elles veulent accompagner. En effet une fois qu’elle a choisi à l’unanimité de choisir un projet, une CIGALE accompagne l’entreprise sur 5 ans. Chaque CIGALE a une durée de vie de 5 ans, (renouvelable seulement une fois), suivi de 5 ans de gérance. C’est à dire que pendant les 5 première années, les Cigaliers financent des projets, or le club s’engage pendant une durée de cinq ans d’accompagner l’entreprise, de ce fait l’accompagnement du dernier projet choisi la dernière année, induit de s’engager encore 5 ans et d’attendre cette échéance pour récupérer les fonds investis.49 Les acteurs mettent en commun leur épargne et choisissent ensemble ce qu’ils souhaitent en faire, quel que soit le montant qu’ils apportent chaque mois, qui peut varier selon chacun. Elles ont une véritable utilité sociale dans la mesure où elles aident les individus à trouver des financements complémentaires. De plus, les entreprises soutenues par des CIGALES bénéficient de leur soutien au niveau logistique, technique et aussi en terme de réseau et de visibilité, ce qui aide ces dernières dans leur phase de lancement ou de développement. La finance solidaire est un mode de financement complémentaire à la finance classique, ayant auprès des acteurs qui en bénéficient un impact positif. La finance solidaire facilite l’accès aux financements pour les entreprises sociales (respectueux de l’homme et de l’environnement). En effet les dispositifs de l'Etat et du marché ne répondent que partiellement aux besoins de ces acteurs, ce qui rend l’accès à des financements beaucoup plus compliqué. 48 49 http://cigales.asso.fr/spip.php?rubrique06 http://miramap.org/Les-Cigales-reseau-d-investisseurs.html 24 A. Etat des lieux : le marché français de l’économie collaborative L’économie collaborative est devenue aujourd’hui un véritable marché, qui pèse 15 milliards de dollars dans le monde aujourd’hui et devrait représenter 335 milliards de dollars en 2025, soit un taux de croissance annuel moyen de 36,4%.50 Sur ce marché, qui devrait donc être multiplié par 20 en 10 ans, la France est un pays leader. En effet, dans un environnement favorable au développement de la consommation collaborative, le pays dispose de nombreuses startups dans presque tous les secteurs de l'économie collaborative. Certaines d'entre elles sont même devenues de véritables firmes internationales, redoutées voire leader dans leur secteur comme Ulule51, premier site de financement participatif européen ou Blablacar, leader mondial du covoiturage. La France est donc un leader mondial sur le marché de l'économie collaborative. Elle est en effet le pays le plus dynamique, en compagnie des États-Unis d'où sont originaires les plateformes Lyft52 ou Airbnb. Tout d'abord, l'environnement est particulièrement favorable aux pratiques collaboratives. En effet, depuis la crise économique de 2008 et l'effondrement du système capitaliste, les français semblent avoir trouvé une alternative avec la consommation collaborative. Ils sont désormais plus enclins à partager, à se financer, à consommer collaboratif. La France est même devenue le premier pays d'Europe en matière d'achats d'occasion. Les français dans l'ensemble ont une opinion très favorable de ce nouveau modèle comme le montre les différentes études. De plus, le rapport à la possession semble basculer en faveur de l'usage. En effet un français sur deux affirme « acheter d'occasion à chaque fois c'est possible ».53 Les pratiques de consommation collaborative semblent donc déjà bien ancrées dans le quotidien des français. C'est ce que révèle une étude une étude menée en 2013 par Nomadis et la TNS Sofres qui indique que 89% de la population indique avoir réalisé au moins une fois une pratique de consommation collaborative.54 Ces pratiques ne sont pas également réparties entre les différents secteurs et si elles sont encore faibles pour le financement ou le transport, dans d'autres secteurs comme l'équipement, le collaboratif fait partit des habitudes de consommation des français. 50 Enjeux et perspectives de l’économie collaborative, page 16, (consulté le 10 décembre 2015) http://www.entreprises.gouv.fr/files/files/directions_services/etudes-et-statistiques/prospective/Numerique/2015-07Consommation-collaborative-Rapport-final.pdf 51 https://www.ulule.com/ 52 https://www.lyft.com/ 53 Enjeux et perspectives de l’économie collaborative, page 27, (consulté le 10 décembre 2015) http://www.entreprises.gouv.fr/files/files/directions_services/etudes-et-statistiques/prospective/Numerique/2015-07Consommation-collaborative-Rapport-final.pdf 54 Enjeux et perspectives de l’économie collaborative, page 28, (consulté le 10 décembre 2015) http://www.entreprises.gouv.fr/files/files/directions_services/etudes-et-statistiques/prospective/Numerique/2015-07Consommation-collaborative-Rapport-final.pdf 25 Un français sur deux est adepte de la consommation collaborative. En effet, cette dernière n’est plus un micro-phénomène puisque 48% des français la pratique régulièrement55, et un tiers des français ont l’intention de la pratiquer. Donc, seulement 20% de la population est réfractaire, dont principalement des personnes âgées, des inactifs, des ménages constitués d’une ou deux personnes, des personnes peu présentes sur les réseaux sociaux et des non-associatifs. On remarque que les femmes sont plus actives dans ce nouveau type de consommation puisque 51% d’entre elles y participent, contre seulement 45% des hommes. Par ailleurs, les plus jeunes se sentent plus concernés par la consommation collaborative. La pratique de la consommation collaborative par secteur S'équiper 55 Se faire aider/aider Se nourrir 47 Se déplacer 42 S'habiller 42 Se loger 32 24 Se divertir Transporter/ Se Yinancer 74 13 12 Source : Pipame, Enjeux et perspectives de la consommation collaborative Selon cette étude, on remarque que 74 % des personnes interrogées ayant déjà réalisé au moins une fois de la consommation collaborative, l’ont fait dans le secteur de l’équipement.56 On entend ici, de la transaction de biens tels que location, prêt, don ou partage par exemples. Le deuxième secteur le plus répandu est celui de l’«entraide » puisque celui-ci regroupe 55 % des personnes interrogées. Il s’est développé grâce notamment à des plateformes internet ou l’on peut s’échanger des services sans transaction monétaire, on peut parler de troc de services. A notre étonnement, le secteur de l’alimentation arrive en troisième position avec 47 % des consommateurs collaboratifs interrogés qui déclarent l’avoir déjà pratiqué dans ce domaine (ex :repas participatifs). Le covoiturage est un exemple phare de la consommation collaborative, et pourtant seulement 42 % des sondés utilisent les moyens de déplacement collaboratifs (à égalité avec l’habillement). 55 Les français et la consommation collaborative, 2013, (consulté le 10 décembre 2015) http://www.tnssofres.com/etudes-et-points-de-vue/observatoire-de-la-confiance-de-la-poste-nov-2013-les-francais-et 56 Enjeux et perspectives de l’économie collaborative, page 44 (consulté le 10 décembre 2015) http://www.entreprises.gouv.fr/files/files/directions_services/etudes-et-statistiques/prospective/Numerique/2015-07Consommation-collaborative-Enquete.pdf 26 Ces pratiques sont favorisées par l'important potentiel dont dispose chaque foyer. On estime en effet à 70 le nombre d'objets inutilisés par ménage. Par ailleurs, il y a 31 millions de véhicules en France qui ne sont utilisés en moyenne que 8% du temps.57 Ce contexte favorable est exploité par de nombreuses startups françaises présentes dans divers secteurs de l'économie collaborative et parfois dans le monde entier. C'est le cas du géant Blablacar, leader mondial du covoiturage qui compte aujourd'hui 20 millions de membres répartis sur 19 pays et 3 continents.58 La société, dont le fondateur Frédéric Mazella a dû attendre 5 ans avant de se verser un salaire, réalise aujourd'hui des levés de fonds toujours plus importants chaque année et s'élevait à 177 millions d'euros en septembre 2015. Le fleuron de l'économie collaborative française souhaite ainsi s'installer le plus rapidement possible dans les pays émergents comme l'Inde ou le Brésil, lui qui possède déjà 90% du marché en France, Allemagne, Italie ou Espagne. Si Blablacar est devenu le symbole et le représentant français de ce nouveau modèle dans le monde, il existe de nombreuses autres startups témoignant du dynamisme français dans ce secteur. Ulule par exemple, est la première plateforme européenne de financement collaboratif. La France est d'ailleurs l'un des pays ou ce secteur croît le plus : 100% entre le premier trimestre 2014 et le 1er trimestre 2015.59 57 Enjeux et perspectives de l’économie collaborative, page 27, (consulté le 10 décembre 2015) http://www.entreprises.gouv.fr/files/files/directions_services/etudes-et-statistiques/prospective/Numerique/2015-07Consommation-collaborative-Rapport-final.pdf 58 HADDAD Marie-Pierre, Blablacar : les chiffres qu’il faut connaître à propos de l’entreprise française, (consulté le 10 décembre 2015) http://www.rtl.fr/actu/economie/blablacar-les-chiffres-qu-il-faut-connaitre-a-propos-de-l-entreprisefrancaise-7779752545 59 Enjeux et perspectives de l’économie collaborative, page 38, (consulté le 10 décembre 2015) http://www.entreprises.gouv.fr/files/files/directions_services/etudes-et-statistiques/prospective/Numerique/2015-07Consommation-collaborative-Rapport-final.pdf 27 III. Quel avenir pour l’économie collaborative ? Cette croissance extrêmement rapide du marché de l’économie collaborative n’est pas sans entrainer un certain nombre de problèmes et de dérives. Le changement d’échelle de cette économie est en effet un processus qui doit faire l’objet de beaucoup de surveillance et de nouvelles règlementations de la part des pouvoirs publics. On constate pourtant aujourd’hui un retard du droit sur l’extrême rapidité de l’évolution de cette économie, causant de nombreuses dérives de la part des principaux acteurs de l’économie collaborative et des plaintes de la part des entreprises du secteur traditionnel qui accusent souvent les plateformes collaboratives de concurrence déloyale. A. L’évolution du cadre juridique en France : enjeux et perspectives Les entreprises capitalistes traditionnelles ont de plus en plus recours à la justice pour faire face à la concurrence des grandes plateformes collaboratives, une concurrence que celles-ci jugent déloyale. Elles appellent donc les pouvoirs publics à réagir très rapidement afin d’encadrer ce marché dont la croissance rapide n’a pas toujours été suivie d’une législation adaptée60. Les exemples sont nombreux et de plus en plus fréquents, le plus connu étant sans doute les chauffeurs de taxis contre Uber et plus précisément son service UberPop qui propose un service de taxis entre particuliers. On peut également citer le secteur hôtelier contre la plateforme Airbnb permettant à des particuliers de louer leur logement à des voyageurs. Un exemple pleinement dans l’actualité du fait du projet d’accord entre la SNCF et Airbnb : un accord sur lequel la SNCF a dû revenir face à la pression et à la colère du secteur hôtelier61. Cette opération devait inciter les voyageurs de la SNCF à louer leur résidence sur la plateforme le temps de leur absence. Un partenariat jugé inacceptable par les professionnels du secteur hôtelier dont le président du principal syndicat Didier Chenet s’est dit « choqué et en colère »62. Pour mieux comprendre les tensions actuelles entre secteurs de l’économie conventionnelle et ceux de l’économie collaborative, il faut savoir que les plateformes ne sont pas soumises aux mêmes obligations réglementaires et fiscales que les autres entreprises. Cela leur permet de baisser le coût de leurs prestations, ce qui constitue pour certains acteurs traditionnels une concurrence déloyale. Par exemple, les plateformes ne sont pas soumises à la même législation du travail, n’ont pas l’obligation de respecter les règles d’hygiènes (pour le secteur « se nourrir ») ni de sécurité (pour le logement et le divertissement). Elles n’ont pas non plus à verser de charges sociales ni certaines taxes 60 Rapport du gouvernement : Enjeux et perspectives de la consommation collaborative (consulté le 18/10/2015) http://www.entreprises.gouv.fr/files/files/directions_services/etudes-et-statistiques/prospective/Numerique/2015-07Consommation-collaborative-Rapport-final.pdf 61 Vidéo LCI http://lci.tf1.fr/economie/entreprise/la-sncf-arrete-un-partenariat-controverse-avec-airbnb-8696157.html (consulté le 15/12/2015) 62 TABOOLA, La SNCF s'allie avec AirBnB et met les hôteliers en colère (consulté le 15/12/2015) http://lexpansion.lexpress.fr/entreprises/la-sncf-s-allie-avec-airbnb-et-met-les-hoteliers-en-colere_1745863.html 28 professionnelles comme la licence pour les taxis (contribuant au conflit entre UberPop et les chauffeurs de taxis) ou la taxe de séjour pour le tourisme63. Ce statut particulier sous lequel est placé l’économie collaborative a fortement contribué à son développement et à faire de la France un pays leader sur cette nouvelle économie. Cependant aujourd’hui, devant l’ampleur que certaines plateformes collaboratives ont prise (la valorisation d’Airbnb est par exemple deux fois supérieure à celle du groupe hôtelier Accor64), les firmes conventionnelles dénoncent une distorsion de concurrence et exige l’intervention du législateur. Le développement de l’économie collaborative entraine donc une concurrence sur le marché et donc une multiplication des conflits, rendant une intervention publique nécessaire. Les nouveaux entrants sur le marché eux, se défendent de toute concurrence déloyale en présentant leur offre comme « complémentaire plutôt que concurrentielle ». En d’autres termes, leur offre répondrait à de nouveaux besoins, non satisfaits par le marché actuellement65. Ce retard de la réglementation du marché de l’économie collaborative dans certains secteurs (d’autres secteurs comme celui du financement participatif sont bien réglementés par la loi, ici notamment par l’ordonnance n°2014-559 du 30 mai 2014) visà-vis de son évolution dépasse parfois le simple cadre de la concurrence entre firmes. Airbnb est par exemple accusé de faire pression à la hausse sur les prix de l’immobilier dans les grandes villes de part le comportement de certains de ces utilisateurs. On constate de plus en plus de propriétaire et de promoteurs qui consacre des logements exclusivement à l’accueil de voyageur via la plateforme. Ce phénomène qui va à l’encontre de l’idée de départ d’Airbnb est très lucratif pour les acteurs (de 600 à 1500 euros la semaine selon les quartiers) mais la plupart du temps illégal. En effet, si un propriétaire décide de consacrer son logement à l’accueil de voyageurs, il le requalifie donc en « meublé touristique » et doit obligatoirement compenser ce logement en mettant sur le marché un même type de logement pour les habitants de la ville. En cas de non respect de ce règlement le propriétaire ou promoteur risque une amende et une peine d’emprisonnement, mais ici encore, la loi ne semble pas adaptée à l’ampleur qu’ont pris les plateformes collaboratives dans la société et les contrôles sont très faibles : une dizaine d’inspecteurs pour la ville de Paris, chargé de contrôler les 40 000 logements proposés. Les conséquences sont parfois importantes entre augmentation du prix des loyers, immeubles fantômes et faillites des petits commerces66. On sort ici totalement du cadre de l’économie collaborative et de l’idée de base de locations de logements entre particuliers. La pression des prix à la hausse peut être même vue comme contraire au fondement de l’économie collaborative. 63 Rapport du gouvernement : Enjeux et perspectives de la consommation collaborative, Page 273 http://www.entreprises.gouv.fr/files/files/directions_services/etudes-et-statistiques/prospective/Numerique/2015-07Consommation-collaborative-Rapport-final.pdf 64 VEDRENNE G, Quand Airbnb dépasse les poids lourds de l’hôtellerie (2015), http://www.europe1.fr/economie/quand-airbnb-depasse-les-poids-lourds-de-lhotellerie-1358158, (consulté le 03/12/2015) 65 Rapport du gouvernement : Enjeux et perspectives de la consommation collaborative, (2015), Page 273 http://www.entreprises.gouv.fr/files/files/directions_services/etudes-et-statistiques/prospective/Numerique/2015-07Consommation-collaborative-Rapport-final.pdf 66 TABOOLA, La SNCF s'allie avec AirBnB et met les hôteliers en colère (consulté le 15/12/2015) LEXPRESS.fr http://lexpansion.lexpress.fr/entreprises/la-sncf-s-allie-avec-airbnb-et-met-les-hoteliers-en-colere_1745863.html 29 Face au retard de la législation sur la croissance de ce marché, les pouvoirs publics réagissent petit à petit, par diverses sortes de mesures visant à freiner les excès du modèle alternatif. La réglementation et la fiscalité française ont donc à la fois des effets favorables et des effets bloquant l’essor de l’économie collaborative. Un exemple où les pouvoirs publics légifèrent en opposition à l’essor d’un acteur de l’économie collaborative est évidemment celui d’UberPop, très médiatisé il y a un an. Ainsi, la loi Thévenoud du 1er octobre 2014, condamne explicitement l’entreprise Uber pour son service UberPop en le rendant illégal. Cette loi prévoit en effet une peine de deux ans d’emprisonnement et 300 000 euros d’amendes pour les structures « organisant un système de mise en relation de clients avec des personnes qui(…), sans être des entreprises de transport routier, des taxis, ou des VTC, se livrent au transport de personnes à titre onéreux »67. C’est ici une prise de décision forte, et une prise de conscience des tensions que l’absence de règles clairement définies engendrent, de la part des pouvoirs publics qui jusque là favorisait le plus possible le développement de ce modèle alternatif. Les dirigeants d’UberPop ont d’ailleurs été appelés à comparaitre le 30 septembre dernier sur la base de six chefs de prévention. Une voie juridique que le géant américain du logement Airbnb a préféré ne pas emprunter en passant un accord avec la ville de Paris pour le paiement d’une taxe professionnelle directement aux collectivités68. Cette coopération fait face aux critiques des hôteliers à cause d’une « concurrence déloyale ». Il semblerait finalement que les acteurs de l’économie collaborative, comme les acteurs traditionnels demandent une position claire des pouvoirs publics, afin d’éviter les conflits et de faciliter le dialogue entre les différents acteurs. Cette prise de position et un encadrement juridique de ce modèle par les pouvoirs publics semblent inévitables dans les mois et les années afin de d’apaiser les frictions sur le marché et permettre à l’économie collaborative de garder ses fondements qui ont fait son succès initial. Enfin, selon certains acteurs de l’économie traditionnelle, les plateformes collaboratives encourageraient la « déprofessionnalisation » et « l’amateurisme »69 en incitant les individus à aller vers des particuliers plutôt que vers des professionnels, avec tous les risques que cela comporte notamment en matière de sécurité des différentes parties prenantes. Cette dernière idée pointe un autre problème sur lequel le droit est en retard : les transactions entre particuliers. En effet, le contrat de l’acte de vente entre un professionnel et un particulier ne peut s’appliquer dans le cas d’une transaction entre particuliers posant des problèmes de garanties, de responsabilités pour l’une ou l’autre des parties prenantes. Il faut donc que le développement de l’économie collaborative 67 Rapport du gouvernement : Enjeux et perspectives de la consommation collaborative (2015), Page 274 (consulté le 15/12/2015) http://www.entreprises.gouv.fr/files/files/directions_services/etudes-et-statistiques/prospective/Numerique/2015-07Consommation-collaborative-Rapport-final.pdf 68 Laurent S Paris tente de réguler le phénomène Airbnb : est-ce possible ? (Consulté le 03/12/2015) http://www.metronews.fr/paris/paris-tente-de-reguler-le-phenomene-airbnb-est-ce-possible/mobz!Kly29zPX45mIA/ 69 Rapport du gouvernement : Enjeux et perspectives de la consommation collaborativ (2015), Page 273 (consulté le 15/12/2015) http://www.entreprises.gouv.fr/files/files/directions_services/etudes-et-statistiques/prospective/Numerique/2015-07Consommation-collaborative-Rapport-final.pdf 30 s’accompagne d’une clarification de l’information pour chacun des acteurs sur ses droits ou son absence de droit. Ce manque d’informations et de garanties est d’ailleurs à l’origine de la crainte d’un certains nombres d’individus quant à la consommation collaborative. On a donc ici un frein important à son développement. En effet, plus de 60% des français évoquent la sécurité comme principale raison les dissuadant à pratiquer la consommation collaborative. Source : Pipame, Enjeux et perspectives de la consommation collaborative Pourtant, la sécurité des individus et la confiance envers les plateformes sont des enjeux majeurs pour le développement de la consommation collaborative. La confiance joue un rôle important dans les relations humaines et les transactions humaines. Aujourd’hui, avec la montée de l’individualisation dans notre société, il est souvent plus difficile de faire confiance à des individus que l’on ne connait pas. C’est pourquoi les individus ont tendance à faire confiance à des personnes proches. Or pour consommer collaboratif, il faut que les individus s’ouvrent aux autres et si l’individu n’arrive pas à accorder sa confiance, cela constitue un réel frein à la consommation collaborative. Le deuxième frein mentionné dans cette étude est un frein qui touche au fondement même de l’économie collaborative : 59% des personnes interrogées répondent en effet que la compatibilité avec leur mode de vie les dissuade ou pourrait les dissuader de pratiquer la consommation collaborative. Si les français semblent très largement favorables à ce nouveau modèle, il semble donc que le partage et la coopération, les valeurs fondatrices de ce courant alternatif ne soient pas devenues une référence pour tout le monde, dans une société où les biens matériels permettent de nous construire une identité propre. La méfiance quant à la qualité des services et la méconnaissance de cette économie sont également deux freins non négligeables au développement de l’économie collaborative. 31 Pour finir, il y a une part de consommateurs réfractaires à cette forme de consommation, qualifié d’ « égocentrique consommatoire »70 par Robert Rochefort. Ce dernier les caractérise comme n’ayant pas de conscience morale de leur consommation. Ce sont des personnes se sentant désengagées des problèmes environnementaux et de l’utilité sociale. Il est possible selon lui de distinguer trois types de consommateurs réfractaires : ceux qui ont l’habitude de la consommation de masse ; ceux qui ont du mal à changer leurs habitudes de consommation ; et ceux qui n’ont pas les moyens nécessaires pour devenir un consommateur citoyen. B. Les dérives des leaders de l’économie collaborative Malgré ces quelques freins, le marché de l’économie collaborative a donc connu une croissance très rapide en France et dans le monde, bien aidé par une réglementation très souple au début. Ce modèle, présenté comme un modèle alternatif au capitalisme connait rappelons-le une croissance annelle moyenne de 36,4% et jusqu’à 100% dans certains secteurs. Les représentants de l’économie collaborative dans le monde tels qu’Airbnb, Uber ou Blablacar sont aujourd’hui des sociétés implantées dans le monde entier et capables de lever des fonds toujours plus importants pour leur développement. Ce changement d’échelle de l’économie collaborative, n’est pas sans entrainer certaines dérives de ce marché de l’économie collaborative. En effet, dès lors qu’il y a croissance, ce marché est investi par les entreprises capitalistes traditionnelles au sens de la recherche du profit comme objectif premier : un problème pour un modèle alternatif construit en opposition au marché capitaliste et à l’économie traditionnelle. Avec l’économie collaborative, « la durabilité l’emporte sur le consumérisme (…), la coopération subsumerait la concurrence » comme l’expliquait J.M Servet71. En théorie ce modèle s’attaque donc aux fondements du capitalisme qui est davantage axé autour de l’acquisition et de la possession. Dans les faits pourtant, si le marché de l’économie collaborative est un véritable marché estimé à 335 milliards de dollars d’ici à 2025, les fondements du collaboratif sont parfois remis en cause. Ainsi, nombre de plateformes collaboratives suscitent l’intérêt d’entreprises capitalistes traditionnelles qui y voient un levier de croissance important. Depuis 2012 ce sont donc plus de 2 milliards d’euros qui ont été investi par les entreprises conventionnelles dans plus de 500 startups collaboratives 72 dans le monde. La frontière entre économie traditionnelle et économie collaborative qui se définit pourtant en opposition à celle-ci peut donc sembler moins évidente qu’il n’y paraitrait. 70 JACOB, Le bon consommateur et le mauvais citoyen par Robert Rochefort, (consulté le 03/12/2015) http://www.alternatives-economiques.fr/le-bon-consommateur-et-le-mauvais-citoyen-par-robertrochefort_fr_art_345_27235.html 71 DE VAUPLANE, Quel est le vrai visage de l’économie collaborative ? (consulté le 14/12/2015) http://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/cercle-136200-quel-est-le-vrai-visage-de-leconomie-collaborative1139578.php?OtmzHfODGjqU3PUb.99 72 Rapport du gouvernement : Enjeux et perspectives de la consommation collaborative, Page 16 (consulté le 14/12/2015) http://www.entreprises.gouv.fr/files/files/directions_services/etudes-et-statistiques/prospective/Numerique/2015-07Consommation-collaborative-Rapport-final.pdf 32 Les fleurons de l’économie collaborative, ces startups devenues des géants dans leur secteur respectif tel qu’Airbnb, Uber ou Blablacar et qui représentent l’économie collaborative à travers le monde, sont eux-mêmes de plus en plus pointés du doigt pour leurs choix de développement. En effet, entre optimisation fiscale, politiques favorisant les actionnaires ou visant à limiter la concurrence, le comportement de ces entreprises s’apparente parfois à celui des grandes firmes capitalistes traditionnelles. Brian Chesky, le cofondateur d’Airbnb résume l’idée de l’économie collaborative, son moteur principal par cette phrase « La confiance est la monnaie d’échange qui fait la valeur73 ». Pourtant, dans les faits, la plateforme fait l’objet de beaucoup de controverses outre les accusations de concurrence déloyale. Il est donc intéressant de s’interroger ici sur le terme de « confiance » et de se demander de quelle confiance parle-t-on. Premier sur la liste des controverses donc, le géant américain Airbnb est très régulièrement pointé du doigt. Tout d’abord en raison de sa politique d’optimisation fiscale. La start-up fondée en 2008 a en effet payé seulement 97 000 euros d’impôt en France en 2013, alors que Paris est la ville européenne où la plateforme est la plus utilisée (environ 40 000 logements) et qu’elle réalise en France un chiffre d’affaire bien supérieur à 100 millions d’euros. Ce faible montant d’impôt s’explique en fait par l’implantation de son siège européen en Irlande, pays très avantageux sur le plan fiscal. Une façon de rechercher le profit donc, fréquemment utilisé par les entreprises capitalistes traditionnelles qui pose une première interrogation sur ces startups symboles de l’économie collaborative dans le monde. Airbnb utilise systématique ce procédé pour échapper aux impôts. Ainsi, son siège social est immatriculé au Delaware, un état américain très avantageux au niveau de la fiscalité et selon BFM business, la société aurait ouvert trois filiales dans le paradis fiscal de Jersey. Si ce genre de stratégie n’est pas rare, surtout chez les géants du numérique (Google, Facebook…) 74 , cela va à l’encontre des valeurs initialement inculquées par l’économie collaborative et voient dans le comportement de ces firmes une remise en cause des fondements du modèle collaboratif. Cette idée est d’ailleurs confortée par le comportement des individus, y compris des français. En effet, si l’économie collaborative est dans l’ensemble bien accueillie et que dans la grande majorité des individus souhaitent son développement, selon une étude du gouvernement, 77% des français voient l’économie collaborative comme un moyen de faire des économies ou d’augmenter leurs revenus et seuls 36% sont motivés par la volonté de recréer du lien social, ou par la sauvegarde de l’environnement75. En ce sens, l’économie collaborative n’est plus forcément un rejet du système capitaliste comme souvent évoqué et elle peut être vue comme complémentaire à l’économie traditionnelle plus qu’en opposition à cette dernière. Si certains définissent l’économie collaborative en 73 DE VAUPLANE, Quel est le vrai visage de l’économie collaborative ? (consulté le 14/12/2015) http://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/cercle-136200-quel-est-le-vrai-visage-de-leconomie-collaborative1139578.php?OtmzHfODGjqU3PUb.99 74 TABOOLA, Airbnb pointé du doigt pour son optimisation fiscale, LEXPRESS.fr (consulté le 28/11/2015) http://lexpansion.lexpress.fr/entreprises/airbnb-pointe-du-doigt-pour-son-optimisation-fiscale_1560493.html 75 Rapport du gouvernement : Enjeux et perspectives de la consommation collaborative (2015), Page 17 http://www.entreprises.gouv.fr/files/files/directions_services/etudes-et-statistiques/prospective/Numerique/2015-07Consommation-collaborative-Rapport-final.pdf 33 rupture avec le système capitaliste, certains faits et comportements montrent que la frontière n’est pas toujours si évidente. Il est donc possible de considérer qu’Airbnb n’est pas l’entreprise la mieux placée pour représenter l’esprit de l’économie collaborative. Cette réflexion est valable pour d’autres géants de la consommation collaborative comme Uber. La société, liée contractuellement à des milliers d’individus pour qui l’activité de chauffeur est leur source principale de revenus, voire l’unique source, est souvent pointée du doigt pour son non respect du droit du travail. Entre manque de formation, heures nombreuses, rémunérations faibles et absence quasi-totale de protection sociale, la plateforme a pendant longtemps profité du retard de la législation sur le développement de l’économie collaborative. Bien qu’aujourd’hui, le droit semble rattraper les dérives de l’entreprise, ce dernier ne peut sanctionner le comportement de la plateforme, qui n’a rien d’illégal, et qui semble pourtant s’éloigner de plus en plus des valeurs prônées par l’économie collaborative. Ainsi, cet état d’esprit capitaliste plus que collaboratif, de recherche de profit plus que de partage a été assumé par Brent Callinicos, le directeur financier d’Uber lors d’un débat télévisé avec Mike Novogratz le président du fond d’investissement Fortress Investments. Celui qui était alors directeur financier (n’est plus en poste depuis mars 2015) avait alors révélé que la valorisation de 40 milliards de dollars d’Uber s’expliquait par le fait que la société voulait pouvoir augmenter la redevance des chauffeurs lorsque les actionnaires en afficheraient le souhait, sans avoir à faire face à une baisse d’activité. Cette décision va à l’encontre des principes de l’économie collaborative. En effet, par cette déclaration Brent Callinicos affiche à la fois la suprématie de la plateforme sur ses membres, ce qui est contraire à l’esprit collaboratif, et la soumission d’Uber à ses actionnaires et au système capitaliste qu’il représente76. Ces dérives n’existent pas seulement chez Airbnb et Uber. Le géant français du covoiturage Blablacar, leader mondial dans son secteur et qui contribue beaucoup à faire de la France un pays leader en matière d’économie collaborative, est de plus en plus critiqué pour ses choix de politiques, qui s’écartent toujours un peu plus du but premier de l’économie collaborative telle qu’elle a été imaginée. Pour de nombreux utilisateurs de la plateforme d’ailleurs, le covoiturage n’est plus un état d’esprit communautaire et humaniste comme il l’était à ses débuts77. La start up française, accusée de concurrence déloyale, comme beaucoup d’autres plateformes collaboratives, par les professionnels de son secteur (ici les sociétés d’autocar) est aussi accusée d’utiliser sa position de leader sur le marché pour tuer toute velléité de concurrence. Une accusation dont se défend le géant du covoiturage 78 . L’idée de base de la plateforme est l’idée même qui pionnière de l’économie collaborative : mettre en relation les individus pour partager un voyage en alliant ainsi un volet social, économique et écologique. Mais en passant en mode payant, c'est-à-dire en taxant systématique chaque voyage, la plateforme a réalisé un choix 76 DE VAUPLANE, Quel est le vrai visage de l’économie collaborative ? (consulté le 14/12/2015) http://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/cercle-136200-quel-est-le-vrai-visage-de-leconomie-collaborative1139578.php?OtmzHfODGjqU3PUb.99 77 LORPHELIN V, Abus de l’économie collaborative : où est le problème ? (consulté le 14/12/2015) http://www.journaldunet.com/management/expert/60567/abus-de-l-economie-collaborative---ou-est-le-probleme.shtml 78 Economie collaborative : les dérives d’un modèle non régulé (2015), http://www.agoravox.fr/tribunelibre/article/economie-collaborative-les-derives-171541 (consulté le 03/12/2015 34 stratégique clair qui peut s’apparenter à un comportement de firmes capitalistes traditionnelles. L’entreprise française a ainsi vu exploser son chiffre d’affaire et le nombre d’inscrits mais a perdu les fondements du covoiturage tel qu’il a été pensé initialement. Nombre d’utilisateurs reprochent donc à la plateforme d’avoir peu à peu fait disparaitre le volet social au profit du volet économique. Un virage stratégique qui permet à la plateforme d’augmenter son chiffre d’affaires mais qui entraine certaines dérives. Celles-ci sont de plus en plus nombreuses de la part des utilisateurs, dont certains cherchent le profit en remplissant au maximum une voiture ou adoptent un comportement de « taxis » en faisant plusieurs voyages dans une même journée. Pour finir, le fait qu’un fond d’investissement (le fond d’investissement ISAI dédié au marché de l’innovation sur internet) soit devenu actionnaire majoritaire fait craindre aux utilisateurs que le volet économique soit toujours plus privilégié dans le but de réaliser un retour sur investissement79. Dans ce contexte, d’autres plateformes, qui reprennent les fondements du covoiturage voient le jour telle que covoiturage-libre.fr qui se revendique étant du « pur collaboratif » : un site gratuit qui fonctionne par l’intermédiaire de bénévoles et d’appels aux dons 80 . Avec la croissance exponentielle du marché de l’économie collaborative et l’appropriation de celui-ci par l’économie traditionnelle, les grands noms de l’économie collaborative seraient donc devenus des entreprises ordinaires, motivées avant tout par la recherche du profit. Pour certains acteurs, les fleurons de cette économie ont donc trahi leurs fondements, leurs valeurs qui faisaient d’elles un modèle alternatif, un modèle présenté comme l’une des dix idées qui va changer le monde par le Times. C. Les perspectives de l’économie collaborative Force est de constater que l'économie collaborative a pris une forte ampleur et s'inscrit désormais dans les pratiques courantes des individus. Cet essor est notamment du à l'émergence des nouvelles plateformes sur Internet qui facilite la mise en relation de particuliers. On distingue deux tendances au niveau de l'offre de biens/services collaboratifs. Tout d'abord ce sont les acteurs agissant sous le principe d'économie de marché dont le fonctionnement se rapproche de celui des start-ups du web avec des coûts fixes faible et un développement exponentiel. Ensuite, ce sont les acteurs de l'économie sociale et militante où l'on retrouve les acteurs principaux de l'économie sociale et solidaire. L'association de ces deux tendances tend à se consolider, les deux secteurs devront de plus en plus agir de manière complémentaire au sein des marchés collaboratifs. L'autre enjeu auquel est confronté l'offre de biens/services collaboratifs est l'accentuation de l' « empowerment » du consommateur. Désormais le consommateur redéfinit le rapport de force traditionnel avec l'offreur en s'immisçant au sein de l'offre et inversement. En effet, les deux pairs participent au processus d'évaluation mutuel comme c'est le cas pour Uber ou Blablacar. Le consommateur devient de plus en plus acteur de 79 EVENSTROOD, Blablacar, le covoiturage tué par la finance et l’appât du gain (consulté le 14/12/2015) https://blogs.mediapart.fr/evenstrood/blog/200614/blablacar-le-covoiturage-tue-par-la-finance-et-l-appat-du-gain 80 PIERRE, Covoiturage, quelles alternatives au géant Blablacar ? (consulté le 15/12/2015) http://www.consopartage.fr/actualites/covoiturage-quelles-alternatives-au-geant-blablacar/ 35 sa consommation et de fait de la vie économique qui l'entoure. Jeremy Rifkin, dans une interview donnée par www.challenges.fr, insiste sur l'importance de l'émergence des plateformes : « (…) Cette plateforme sera formidable car chacun d'entre nous pourra avoir un impact sur l'activité économique en faisant partie intégrante de la chaîne de valeur. Un individu pourra stocker de l'énergie, produire des biens et services, les consommer et jusqu'à les recycler. Il pourra par exemple créer facilement sa propre application.»81 L'achat groupé de clients auprès des fournisseurs locaux serait aussi une alternative pour limiter le nombre d'intermédiaires sur le modèle de La Ruche qui dit Oui82.Ce système représenterait un double avantage : cela assurerait des débouchés aux producteurs locaux n'ayant pas les moyens de distribuer à grande échelle et pour les consommateurs qui pourraient désormais consommer localement à un prix avantageux sans devoir passer par les intermédiaires de consommation traditionnels. La question de la cyber-sécurité se pose donc indéniablement ici. Les consommateurs doivent avoir confiance vis-à-vis des plateformes collaborative autant ou voire plus que dans le secteur économique traditionnel. De plus, les risques de cybercriminalité et de cyber-terrorisme devront être évincés si les plateformes veulent continuer à se développer. Le Code Civil devra s'adapter car cela ne relève pas du code de la consommation. Pour cela, le gouvernement français a missionner Pascal Terrasse, un député de l'Ardèche sur trois éléments : la protection des consommateurs, le problème de la fiscalité et le soutient à l'innovation. Il s'agit ici de protéger le « nouveau salariat » en évitant les dérives fiscales de certaines entreprises. Si l'économie collaborative tend à se développer, le rôle des assureurs va alors devenir indéniable, la confiance étant un moteur clé dans ce secteur. Certaines assurances ne sont pas réticentes à créer des partenariats avec les acteurs de la consommation collaborative : Source : Tableau des partenariats réalisés par les acteurs de la consommation collaborative avec des compagnies d’assurance (Nomadéis, 2015) 81 RIFKIN J (20/07/2015) Le capitalisme va devoir vivre avec l'économie collaborative (consulté le 1/12/2015) sur www.challenges.fr http://www.challenges.fr/economie/conjoncture/20150629.CHA7377/jeremy-rifkin-le-capitalisme-va-devoir-vivreavec-l-economie-collaborative.html 82 https://laruchequiditoui.fr/fr 36 Dans la plupart des cas, les compagnies d'assurance ont adapté des contrats qu'ils avaient auparavant développer ou utiliser des contrats existant qui peuvent désormais s'appliquer à des usages collaboratifs. Tanguy Le Maire, chargé de la clientèle des particuliers chez Generali France explique : « Les pratiques de consommation collaborative bousculent notre modèle car la voiture peut être conduite par n'importe qui. L'originalité tient notamment à ce que le véhicule est assuré alternativement par deux contrats d'assurance: le contrat du propriétaire quand le véhicule n'est pas loué et le contrat de la plateforme quand il est loué. Si le locataire a un accident, lorsqu'il conduit le véhicule, le bonus du propriétaire n'est pas impacté. » 83 Certaines compagnies, comme la MAIF renforcent ces partenariats en faisant la clé de voute de leur stratégie de développement : « Nous revendiquons de devenir le partenaire de l'économie collaborative » affirme Pascal Demurger, directeur général de la MAIF84. Cependant, même s'il s'agit ici d'une opportunité de développement pour les assureurs, ils sont aussi confrontés une nouvelle forme de concurrence : celle des communautés d'autoassurances comme Friensurance en Allemagne. 85 Chaque particulier verse une somme d'argent sur une plateforme ce qui crée un pot commun qui servira à l'indemnisation de ces individus en cas de dommage. 83 THEVENIN (18/03/2015) Les assureurs s'ancrent dans l'économie du partage (consulté le 7/12/2015) Les Echos http://www.lesechos.fr/journal20150518/lec2_finance_et_marches/02170618316-les-assureurs-sancrent-dansleconomie-du-partage-1120180.php?K34qFzKMY4jpE5ZK.99 84 PIALOT (22/05/2015 La Maif renforce son implication dans l'économie du partage (consulté le 7/12/2015) La tribune.fr http://www.lesechos.fr/journal20150518/lec2_finance_et_marches/02170618316-les-assureurs-sancrentdans-leconomie-du-partage-1120180.php?K34qFzKMY4jpE5ZK.99 85 http://www.friendsurance.com/ 37 CONCLUSION L'économie collaborative n'est pas un concept récent. Il existe depuis tout temps dans nos sociétés en tant que modèle de consommation et de production alternatif au modèle classique que nous connaissons aujourd'hui. Il est né avec les coopératives, les fondations, les associations et les mutuelles. Aujourd'hui l'économie collaborative se retrouve dans l'économie « sociale » et dans une économie dite de « marché ». C'est la somme de ces deux concepts qui définit l'économie collaborative, l'utilité sociale étant au cœur des démarches de production et de consommation. Conjointement au contexte actuel, le terme a pris un tout autre sens avec l'émergence de ses nouvelles formes grâce aux nouvelles technologies de l'information et de communication qui facilitent les échanges entre individus. De nouvelles formes de financement sont aussi apparues telles que les plateformes internet, des coopératives de financement comme la NEF ou encore les clubs d'investisseurs (les CIGALES). La France est le pays leader dans le marché collaboratif : un français sur deux utilise ces nouvelles formes d'économie. Les principaux secteurs de cette économie sont : l’équipement, l'aide, la nourriture et le déplacement. Le pays est particulièrement impliqué dans cette démarche puisque la loi du 31 juillet 2014 définit juridiquement le secteur. Il est devenu un moteur clé du développement des territoires et fait parti des directives des politiques publiques qui sont menées aujourd'hui au niveau local, régional ou encore au niveau national. Cependant, on remarque que le marché mondial de l'économie collaborative est en croissance perpétuelle : ce secteur pèse environ 15 milliards de dollars chiffre d'affaires et pèsera 335 milliards de dollars à l'horizon 2025. Cette croissance devra cependant faire face à certains problèmes comme les consommateurs réfractaires, l'absence d'une réglementation adaptée aux faits qui entraîne les acteurs traditionnels à considérer cette nouvelle offre comme des « concurrents déloyale » ou encore le problème de la cybersécurité qui devra être résolu pour que ce secteur soit producteur de confiance vis-à-vis consommateurs. De plus, des entreprises qui étaient à la base fondée sur une « utilité sociale » ont un comportement qui tend à devenir comme des entreprises capitalistes traditionnelles : le profit est devenu la principale source de motivation au dépend de l'utilité sociale initialement recherchée (ex. BLABLACAR). Les économistes s'accordent sur le fait que ce modèle n'est pas un effet de mode et qu'il tend à se développer dans les années à venir. C’est une véritable alternative au modèle actuel : « Elle est loin d'être un effet de mode car ses ancrages sont solides»86. 86 MOATI, professeur d'économie agrégé à l'Université Paris Diderot et co-fondateur de l'Observatoire Société et Consommation (04/05/2015) L’économie collaborative, nouveau visage du capitalisme (consulté le 27/11/2015) http://www.20minutes.fr/magazine/economie-collaborative/perspectives/leconomie-collaborative-nouveau-visage-ducapitalisme-2272/ 38 BIBLIOGRAPHIE - - - - - - - - - L'utilité sociale, page 1, sans date, http://docs.eclm.fr/pdf_annexe/AssociationsCitoyennesPourDemain-UtiliteSociale.pdf L'utilité sociale, pages 2-3, sans date, article http://docs.eclm.fr/pdf_annexe/AssociationsCitoyennesPourDemain-UtiliteSociale.pdf Les français et la consommation collaborative, 2013, http://www.tns-sofres.com/etudes-et-points-de-vue/observatoire-de-la-confiance-dela-poste-nov-2013-les-francais-et 21 sites web de crowdfunding en France http://www.dynamique-mag.com/article/sites-web-crowdfunding-france.5237 Collectif d'acteurs de l'économie collaborative, L’économie collaborative s’invente en France, gardons notre avance www.lemonde.fr http://www.lemonde.fr/idees/article/2014/03/06/l-economie-collaborative-s-inventeen-france-gardons-notre-avance_4378867_3232.html Enjeux et perspectives de l’économie collaborative http://www.entreprises.gouv.fr/files/files/directions_services/etudes-etstatistiques/prospective/Numerique/2015-07-Consommation-collaborative-Rapportfinal.pdf L’économie circulaire dans votre région, novembre 2014, www.ademe.fr BAZIN Chrystèle, Les 7 clefs de l’économie collaborative, http://www.culturemobile.net/nouveau-monde-telecoms/7-cles-economiecollaborative DAUPHIN, Focus-Mesurer l’utilité sociale des associations, page 54-57 http://www.cairn.info/revue-informations-sociales-2012-4-page-54.htm DE VAUPLANE, Quel est le vrai visage de l’économie collaborative ? 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