La Lettre du Cardiologue - n° 387 - septembre 2005
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MISE AU POINT
rénales par une injection de 7 cc à 30 cc/s. Après injection intra-
veineuse de 0,5 mg/kg d’héparine, l’endoprothèse et son système
de largage sont ensuite positionnés dans l’aorte abdominale sur
le guide rigide. La gaine externe du système de largage est reti-
rée, permettant à l’endoprothèse de se déployer. La partie proxi-
male de la portion couverte de l’endoprothèse est implantée juste
en aval de la naissance de l’artère rénale la plus distale (figure 1b).
Le moignon controlatéral est ensuite cathétérisé à partir de l’autre
axe iliaque après avoir remplacé la sonde d’angiographie par une
sonde angulée (vertébrale, cobra, etc.). Le jambage controlaté-
ral doit chevaucher significativement le moignon du corps pro-
thétique afin de réduire le risque de disjonction au cours du suivi.
Son extrémité distale est positionnée juste en amont de la nais-
sance de l’artère iliaque interne (figure 1b). La bonne apposition
de l’endoprothèse contre la paroi artérielle au niveau des zones
d’étanchéité (collet aortique proximal, collets iliaques distaux)
est réalisée par angioplastie à l’aide d’un ballon compliant en
latex. Un cathéter d’angiographie est ensuite repositionné dans
l’aorte céliaque, et une angiographie de contrôle est réalisée. Le
temps d’acquisition doit être long pour visualiser une éventuelle
fuite rétrograde de type 2 alimentée par l’artère mésentérique
supérieure ou une artère ilio-lombaire. À ce stade, aucun traite-
ment ne doit être réalisé en cas de fuite de type 2. Par contre, une
fuite de type 1 ou 3 doit obligatoirement conduire à un geste com-
plémentaire (angioplastie, implantation de rallonge proximale ou
distale) pour exclure le sac anévrismal du flux aortique.
Les guides et les introducteurs sont ensuite retirés et les artérioto-
mies refermées transversalement par un surjet de polypropylène.
SUIVI ET COMPLICATIONS
La surveillance régulière repose exclusivement sur l’étude mor-
phologique par imagerie de l’anévrisme et de l’endoprothèse. Il
est actuellement recommandé d’effectuer un angioscanner de
contrôle dans le mois qui suit l’implantation de l’endoprothèse,
puis à 6, 12, 18 et 24 mois en cas d’absence de complication. Le
suivi est ensuite annuel à vie. Une consultation de chirurgie doit
être effectuée après chaque angioscanner.
Les fuites sont les complications les plus fréquentes, diagnosti-
quées chez 7 à 50 % des patients au cours du suivi (7). White et
al. (8) définissent précisément les différents flux artériels retrou-
vés dans le sac anévrismal, mais à l’extérieur de l’endoprothèse
aortique.
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Fuites de type 1 : persistance d’un flux artériel par défaut d’ap-
plication entre l’endoprothèse et l’aorte au niveau des zones
d’étanchéité proximale ou distale. Ces fuites sont aussi appelées
“fuites périprothétiques”.
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Fuites de type 2 : flux artériel rétrograde, sans rapport avec
l’endoprothèse, par réinjection du sac anévrismal par les artères
lombaires, par l’artère mésentérique inférieure, ou par toute autre
artère collatérale du sac anévrismal.
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Fuites de type 3 : fuites localisées au sein de l’endoprothèse
aortique par déchirure de celle-ci ou par disjonction entre les dif-
férents segments d’une prothèse modulaire. Ces fuites résultent
d’une altération de l’endoprothèse secondaire aux contraintes
mécaniques et/ou à l’usure.
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Fuites de type 4 : fuites au travers de l’endoprothèse aortique
dues à l’importante porosité de certaines prothèses ultrafines, ou
au travers des trous d’aiguille des sutures fixant les stents à la
prothèse.
Le caractère pathologique de ces fuites n’est pas toujours évi-
dent. Le diamètre maximal transverse (DMT) du sac anévrismal
peut augmenter, rester stable ou diminuer en fonction de l’étio-
logie de la fuite. Les fuites périprothétiques (type 1) ou par alté-
ration de l’endoprothèse aortique (type 3), à haut débit, sont sou-
vent associées à une augmentation du DMT. Le risque de rupture
est alors évident. Par contre, les fuites rétrogrades (type 2) ou par
porosité de l’endoprothèse aortique (type 4), à plus faible débit,
sont le plus souvent associées à une stabilité, voire à une dimi-
nution du DMT. Le risque de rupture n’est alors pas évident.
Les fuites de type 3 résultent principalement des contraintes
mécaniques transmises à l’endoprothèse aortique par la rétrac-
tion du sac anévrismal exclu (9). Il s’agit d’un paradoxe du trai-
tement endovasculaire des AAA, car cette rétraction survient chez
les patients dont le sac anévrismal est parfaitement exclu. Cette
rétraction s’effectue principalement dans le sens longitudinal et
va entraîner des variations morphologiques de l’endoprothèse
aortique, avec variation des angulations de l’endoprothèse. La
jonction corps prothétique/jambage controlatéral est la plus sen-
sible à ces variations d’angulation, avec pour conséquence des
plicatures de jambages, et le risque de disjonction.
Lorsqu’un traitement secondaire est nécessaire pour traiter l’une
des complications ci-dessus, il est quasi systématiquement effec-
tué par voie endovasculaire (implantation d’un jambage iliaque
supplémentaire, occlusion d’une artère par coil ou colle biolo-
gique). Contrairement à la chirurgie conventionnelle, la durabi-
lité du traitement endovasculaire des AAA est mise en cause,
notamment en ce qui concerne la stabilité de l’endoprothèse sou-
mise aux contraintes du flux et de l’architecture artérielle, et la
solidité de l’association d’un stent métallique à une prothèse en
polyester. La conception des endoprothèses aortiques a cependant
évolué. La nouvelle génération d’endoprothèses s’adapte mieux
à la morphologie de l’aorte (plus souple) ; elle a un système de
fixation plus efficace (voir, supra, “Mécanismes de fixation proxi-
male”) et elle est confectionnée à partir de matériaux plus robustes.
Le taux de complications et de gestes secondaires rapportés dans
les récentes publications est nettement inférieur à celui constaté
avec les premières générations d’endoprothèses (10).
TRAITEMENT ENDOVASCULAIRE
DES ANÉVRISMES JUXTA-RÉNAUX,
AORTO-BI-ILIAQUES ET ROMPUS
Parmi les patients contre-indiqués pour une chirurgie conven-
tionnelle en raison de leur état physiologique, seulement 20 à
60 % peuvent bénéficier d’un traitement endovasculaire (voir,
supra, les critères anatomiques définis dans “Bilan préopératoire –
Conception de l’endoprothèse”). Les autres patients ont des AAA
dont la morphologie ne permet pas l’exclusion endovasculaire
par une endoprothèse “classique”. Il s’agit, dans deux tiers des
cas, d’AAA dont le collet supérieur est soit trop court, soit non
rectiligne, et dans un tiers des cas, d’artères iliaques anévrismales