chez l’animal avec un médicament
neuroleptique typique ou atypique.
Voy ons les divers moyens de perturber
ces propriétés, en les assortissant de
quelques commentaires.
Utilisation de substances psycho-
tropes (5, 6)
Des agents psychotropes connus pour
exacerber un aspect de la maladie,
voire provoquer son apparition chez le
sujet sain (amphétamine ou cocaïne),
produisent de l’hyperlocomotion et
atténuent l’inhibition latente. Ils sti-
mulent la neurotransmission dopami-
nergique. Il n’est donc pas surprenant
que l’halopéridol, antagoniste de
récepteurs de la dopamine, contrecarre
ces effets. La kétamine, la phencycli-
dine ou le MK801, qui bloquent la
transmission glutamatergique, aug-
mentent aussi la locomotion et rédui-
sent l’inhibition du sursaut. Là, c’est
la clozapine qui en contrecarre les
effets. On peut aussi restituer l’inhibi-
tion du sursaut par l’halopéridol, mais
ce médicament n’a d’effet que si l’in-
hibition du sursaut a été induite par un
agent antagoniste des récepteurs 5HT2
de la sérotonine. Ces exemples mon-
trent la complexité des résultats de
cette démarche, puisque ce ne sont pas
les mêmes propriétés comportemen-
tales qui sont sensibles aux divers
agents pharmacologiques ni les mêmes
groupes de substances médicamen-
teuses qui s’opposent à l’effet de
chaque agent psychotrope.
Modification des paramètres expé-
rimentaux (7)
Les psychologues modulent le com-
portement servant de modèle en en
modifiant les paramètres critiques. Un
changement du contexte expérimental
réduit l’effet de la familiarisation sur
l’inhibition latente. Le fait de s’inté-
resser à un paramètre plutôt qu’à un
autre se réfère implicitement, plus
rarement explicitement, à une hypo-
thèse sur la nature de la perturbation
pathologique que cette modification
simule.
Blocage du fonctionnement d’une
région cérébrale (8)
Les neurobiologistes bloquent le fonc-
tionnement d’une région cérébrale de
façon temporaire ou définitive. Dans
une telle approche expérimentale, le
fait que la schizophrénie ne comporte
pas de lésion focale pose problème. Il
y a diverses manières de contourner
cette objection. La première met l’ac-
cent sur le processus modélisé. Le fait
de le perturber à l’aide d’une lésion est
justifié par les connaissances que l’on
a des relations structure-fonction chez
l’animal. Ainsi, la lésion frontale pro-
duira des déficits caractéristiques de la
“frontalité” des patients schizophrènes
et la lésion de l’hippocampe désorga-
nisera la construction mnésique,
comme c’est le cas dans la schizo-
phrénie. Le fait de voir l’inhibition
latente perturbée, et cette perturbation
amoindrie par des neuroleptiques,
valorise cette approche. Les lésions
néonatales de l’hippocampe ventral ou
le blocage transitoire de son fonction-
nement par injection locale de tétro-
dontoxine occupent une place originale
dans ce contexte, d’autant que le défi-
cit n’apparaît qu’après la puberté.
Des démarches étiologiquement
plausibles (9, 10)
Actuellement, on préconise les
démarches étiologiquement plau-
sibles. Les handicaps des patients et
les désordres neuro-anatomiques mineurs
et diffus que l’on a identifiés ces dix
dernières années nous incitent à agir
sur l’embryon ou l’animal nouveau-né
pour occasionner un trouble minime
du développement cérébral. La diver-
sité des moyens mis en œuvre se justi-
fie par la diversité des causes pos-
sibles de la maladie : prédisposition
génétique, fœtopathie carentielle,
toxique ou virale complétée, dans
l’enfance ou à l’âge adulte, par l’envi-
ronnement qui suscite une réponse de
stress ou un facteur hormonal déstabi-
lisant le cerveau fragilisé. Des admi-
nistrations itératives d’amphétamine
ou de cocaïne se traduisent par des
perturbations de la réactivité locomo-
trice et de l’inhibition du sursaut.
L’administration de méthylazoxymé-
thanol (MAM) entre le 9eet le
12ejour de la gestation empêche la
migration de certaines cellules dans le
cortex, ce qui se traduit par des modi-
fications de l’inhibition du sursaut.
Chez le rat nouveau-né – dont le cer-
veau est encore immature –, on peut
perturber l’achèvement de l’évolution
cérébrale à l’aide d’agents infectieux
(virus de l’herpès, de la chorioménin-
gite lymphocytaire). Dans ce cas, il
semble que ce soit la réponse de l’orga-
nisme à l’infection, l’effet des cyto-
kines, par exemple, qui serait respon-
sable d’un dysfonctionnement céré-
bral auto-entretenu et spontanément
évolutif. Toutes ces modifications du
cerveau produisent de l’hyperlocomo-
tion en réponse à une injection d’am-
phétamine et, souvent aussi, une sup-
pression de l’inhibition du sursaut, ce
qui pose la question de la spécificité
de ces réponses comportementales. Ne
seraient-elles que des indicateurs d’in-
adaptation de l’animal – rendu stupide –
à son environnement ?
L’approche génétique (1, 11, 12)
Les diverses souches de rats dispo-
nibles montrent une différence de
réactivité vis-à-vis des divers tests
évoqués ci-dessus. Mais c’est la souris
qui est l’animal de choix pour les
études mettant en œuvre une approche
génétique interventionniste. L’hypothèse
d’une surproduction de dopamine
dans la schizophrénie a pu être testée à
l’aide de souris qui ont eu la chance de
survivre à une réduction d’expression
du transporteur transmembranaire de
la dopamine. L’hypothèse glutamater-
gique de cette maladie a été testée à
l’aide de souris présentant une réduc-
tion de taux du récepteur NMDA du
glutamate. Il existe des anomalies
génétiques humaines productibles
chez la souris et qui se traduisent par
des manifestations psychotiques chez
l’homme, comme la maladie de Di
Georges.
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Act. Méd. Int. - Psychiatrie (20), n° 4, mai 2003
Mise au point
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