Soins Libéraux 43 Syndrome du canal carpien Quand le nerf médian est comprimé Dû à la compression du nerf médian dans le canal carpien, le syndrome touche de plus en plus de patients avec des contraintes douloureuses et professionnelles parfois handicapantes. Son étiologie mérite d’être recherchée pour éviter la chronicité. E ntre 0,1 et 1 % de la population ressentirait les effets de la compression du nerf médian au niveau du canal carpien, et en majorité les femmes de plus de 50 ans. Ces effets sont principalement des douleurs ou plus exactement des sensations de paresthésies de la main prédominantes la nuit. Le nerf médian est le grand nerf qui descend le long du bras et traverse la peau du pouce, de l'index, du majeur et de la moitié de l'annulaire. Il actionne aussi les muscles de la base du pouce. Description clinique Des impressions de picotements, de brûlures, de fourmillements surviennent préférentiellement chez la femme, entraînant souvent un réveil nocturne. La zone touchée est celle des quatre premiers doigts, avec un renforcement au niveau de l’index et du médius. Il arrive que le syndrome du canal carpien frappe soudainement, mais en général il est progressif. La description clinique que fait le malade de son état n’est pas toujours simple et complète, si bien que le diagnostic n’est quelquefois pas évident dès l’interrogatoire. Cependant quelques manœuvres trouvent ici leur intérêt. Le test de Tinel est considéré comme positif si la percussion au marteau à réflexe de la face antérieure du poignet au niveau du nerf médian déclenche une douleur. Autre test, celui de Phalen : l’hyperflexion du poignet provoque au bout de quelques secondes (30 en moyenne) des paresthésies dans la main. Une hypoesthésie est aussi fréquemment retrouvée sur le territoire palmaire du nerf médian. Si le trouble est un peu plus évolué, il est difficile pour le patient de résister à l’ouverture, par le praticien, de la pince réalisée par le pouce et l’index. Il faut que la lésion soit déjà ancienne pour que l’on puisse observer une amyotrophie de la loge musculaire thénar. Les examens Lorsque l’ensemble de ces signes est présent, l’électromyographie (EMG) est essentiellement utilisée dans le cadre du bilan d’évaluation ; parfois, en cas de doute, elle est utile comme examen diagnostique. Le médecin retrouve en détection une dénervation de l’éminence thénar. En stimulation, est noté un ralentissement de la vitesse de conduction nerveuse motrice et/ou sensitive. L’examen permet ainsi de faire la différence avec une névralgie cervicobrachiale où les réflexes ostéotendineux du membre supérieur sont globalement diminués. C’est là le principal diagnostic différentiel. Le diagnostic établi, il faut retrouver la cause ou plutôt les causes, qui peuvent être multiples. Ce sont les micro-traumatismes répétés : celui du marteau piqueur certes, mais aussi des gestes plus fins comme le maniement d’engins vibrants (une compteuse de billets par exemple), enfin la saisie sur clavier d’ordinateur ou le maniement de souris non ergonomiques. Parfois un reclassement professionnel est nécessaire. Le cas où la répétition d’actes ménagers est en cause est plus difficile, mais une adaptation des mouvements est toujours possible. Sont aussi responsables des traumatismes comme des luxations du carpe, mais aussi des affections inflammatoires rhumatismales telles que la polyarthrite rhumatoïde, des maladies endocriniennes comme l’hypothyroïdie, l’acromégalie. La liste n’est pas close puisque la grossesse est même un facteur déclenchant au même titre que les dépôts intracanalaires métaboliques. Quand aucune cause réelle n’est retrouvée, le syndrome du canal carpien est alors considéré comme idiopathique, et c’est souvent le cas. Le traitement Le traitement, pour être efficace, se doit d’être définitif, mais il est d’autant plus difficile à obtenir. L’éradication de la cause est la meilleure solution, la plus radicale, encore faut-il l’avoir repérée. Sinon un geste palliatif tel qu’une infiltration intracanalaire est possible. Celleci est efficace dans la moitié des cas, et durable pour un tiers d’entre eux. Trois infiltrations sont tentées au maximum. En cas d’échec, c’est la chirurgie à ciel ouvert qui s’impose pour libérer le nerf en coupant le ligament annulaire du poignet. Un progrès a cependant été réalisé ces dernières années, grâce à l’emploi de l’endoscopie. Les suites opératoires sont alors plus simples et raccourcies. Tous les chirurgiens orthopédiques ne sont cependant pas entraînés à la méthode. JB Quelques précautions – Après des travaux exigeants ou à la suite d’une tâche répétitive, il est bon de faire une pause. – Quand une activité est susceptible d'avoir causé le syndrome du canal carpien, il faut changer sa façon de la faire. – Il faut utiliser des outils adaptés. – Il vaut mieux utiliser le dos, les bras et les jambes et éviter de forcer les poignets et les mains. – Il faut éviter de porter des charges lourdes. – Il faut songer à utiliser une attelle pour garder les articulations dans une position confortable la nuit. Infos ... Une maladie professionnelle Le syndrome du canal carpien (SCC) est la pathologie la plus connue et la plus répandue des troubles musculosquelettiques (TMC). En France, la plupart des TMC sont reconnus comme maladies professionnelles, avec une progression de 20 % par an. Ces troubles, associés principalement aux mouvements répétitifs de la main, représentent 70 % du total des maladies professionnelles reconnues. Professions Santé Infirmier Infirmière N° 62 • mars-avril 2005