11 Journées européennes de la Société française de cardiologie I

INFORMATIONS
La Lettre du Cardiologue - n° 345 - mai 2001
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HYPERTROPHIE MYOCARDIQUE : PHYSIOPATHOLOGIE ET
PRISE EN CHARGE
L’hypertrophie myocardique, cause d’insuffisance cardiaque.
J.J. Mercadier (Paris) a exposé les principes régissant la réponse
hypertrophique du myocarde à une surcharge hémodynamique,
et a souligné les nombreux remodelages associés à cette hyper-
trophie, à l’échelon du myocyte (perturbation de l’homéostasie
calcique notamment) et du tissu myocardique (fibrose intersti-
tielle, apoptose...), qui, progressivement, favorisent la dysfonc-
tion VG et l’insuffisance cardiaque. C’est directement sur les
mécanismes moléculaires de ces remodelages que pourraient se
situer les développements thérapeutiques futurs de l’hypertrophie
et de l’insuffisance cardiaque.
Rôle de l’apoptose dans l’insuffisance cardiaque. Des argu-
ments expérimentaux de plus en plus nombreux confirment
l’existence de processus apoptotiques (mort cellulaire program-
mée) dans l’histoire naturelle des pathologies myocardiques
dégénératives, mais leur importance quantitative reste contro-
versée. S. Hatem (Paris) a exposé des résultats expérimentaux
montrant :
– d’une part, la complexité croissante des voies de signalisation
moléculaire convergeant vers l’apoptose,
d’autre part, l’existence d’équilibres entre processus de “sur-
vie” (ou croissance) et processus de “mort” cellulaire à l’état nor-
mal, qui peuvent ainsi basculer soit vers l’hypertrophie, soit vers
l’apoptose, au cours de pathologies et de stress divers. Un exemple
est celui des catécholamines qui, à fortes doses, peuvent déclen-
cher l’apoptose des myocytes, mais qui, à faibles doses, pour-
raient avoir un rôle protecteur contre ces mêmes processus.
Anomalies de la perfusion myocardique dans l’hypertension
artérielle et l’hypertrophie VG secondaire. A. Nitenberg
(Colombes) a exposé les anomalies structurelles et fonctionnelles
de la circulation coronaire dans l’HTA et l’hypertrophie ventri-
culaire gauche, indépendamment de l’existence d’athérosclérose.
Comme le diamètre des artères coronaires n’est pas augmenté à
l’état basal ou après vasodilatation, il persiste une augmentation
des vitesses d’écoulement intraluminal, due à l’HTA, qui accroît
le stress imposé à l’endothélium, favorise l’athérosclérose et pro-
voque une dysfonction endothéliale. Celle-ci se manifeste, par
exemple, par une réponse vasoconstrictrice et non pas vasodila-
tatrice lors d’un test au froid ou lors de toute augmentation de la
demande métabolique. Il existe également des anomalies de la
microcirculation se traduisant par une diminution de la réserve
coronaire. Ces anomalies ne sont pas directement liées à l’hy-
pertrophie VG, que d’ailleurs elles précèdent, mais plutôt à l’HTA
elle-même. Les mécanismes invoqués impliquent d’une part la
synthèse locale d’angiotensine II puis la formation de radicaux
libres, qui inhibent le NO et donc la vasodilatation NO-dépen-
dante, et, d’autre part, l’hypertrophie de la paroi des vaisseaux et
la fibrose vasculaire, mais aussi un défaut d’angiogenèse (insuf-
fisance du nombre de vaisseaux par rapport à la masse)... Ces
anomalies sont responsables notamment d’ischémie des couches
sous-endocardiques, qui aggrave l’insuffisance cardiaque. Un cer-
tain nombre de molécules, dont les IEC et les inhibiteurs cal-
ciques, agissent favorablement sur ces anomalies.
Arythmies et hypertrophie VG (M. Galinier,Toulouse). Dans
l’hypertension artérielle, l’hypertrophie VG secondaire est asso-
ciée à une augmentation importante du risque de mort subite d’une
part, et l’HTA est devenue la première cause de fibrillation auri-
culaire, d’autre part. Actuellement, l’intérêt reste focalisé sur la
détection de facteurs prédictifs d’arythmies, notamment ventri-
culaires. Ainsi, l’analyse holter-ECG montre qu’il existe une
hyperexcitabilité ventriculaire corrélée à la présence d’une hyper-
trophie VG, et également corrélée au risque de mort subite. Il
11es Journées européennes
de la Société française de cardiologie
Les 11es Journées européennes de la Société fran-
çaise de cardiologie ont eu lieu en janvier 2001 à
Paris. Le programme, très attrayant, a couvert l’en-
semble de la physiopathologie cardiovasculaire, avec
des conférences, des controverses, des flashes d’ac-
tualité, des sessions de communications et de pos-
ters. Il y a eu également des sessions communes
avec des groupes de travail de la Société européenne
de cardiologie et d’autres sociétés savantes fran-
çaises. La qualité du programme et des orateurs
choisis a été d’excellent niveau, faisant de cette
manifestation la réunion phare de la Société fran-
çaise de cardiologie. Certains thèmes ont particu-
lièrement retenu notre attention.
La Lettre du Cardiologue - n° 345 - mai 2001
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NFORMATIONS
n’existe pas de recommandations par rapport à ce risque. La détec-
tion d’une arythmie ventriculaire pourrait inciter à un traitement
antihypertenseur plus agressif et éventuellement supposé plus
efficace sur la régression de l’hypertrophie VG.
Stratégie thérapeutique dans la cardiomyopathie hypertro-
phique primitive. Pour M. Desnos (Paris), l’objectif thérapeu-
tique idéal dans cette maladie génétique rare est triple : amélio-
rer la qualité de vie, prévenir la mort subite et prévenir la
progression de la maladie. Seuls les deux premiers objectifs sont
actuellement accessibles.
Améliorer la qualité de vie : les moyens sont le traitement médi-
camenteux (bêtabloquants, vérapamil et diltiazem), la stimula-
tion DDD, la myomectomie chirurgicale et l’occlusion de l’artère
septale par alcoolisation percutanée. Le choix parmi ces procé-
dures instrumentales dépend essentiellement de l’expertise mise
à disposition du praticien (en France, il s’agit surtout de la sti-
mulation). Les essais publiés sont peu nombreux, avec des résul-
tats assez modestes sur la symptomatologie. Certaines règles dans
les indications peuvent éviter de mauvais résultats : septum de
plus de 18 mm pour la myomectomie, rythme sinusal avec
désordres conductifs pour la stimulation, FEVG conservée et
absence de bloc de branche droit pour l’alcoolisation septale. En
cas d’obstruction, l’analyse doppler du gradient intra-VG est sou-
vent utilisée comme référence pour juger de la réponse au traite-
ment, mais sa grande variabilité dans le temps a été rappelée
(variations moyennes de 32 mmHg à l’état basal et de 50 mmHg
après stimulation), d’où la nécessité de répéter les mesures et de
les interpréter avec réserves.
Prévenir le risque de mort subite : le premier problème est la
stratification du risque. À côté des facteurs prédictifs classiques
(antécédent de mort subite personnel ou familial, de syncope,TV
non soutenues...), d’autres sont plus discutés : le test d’effort, à
la recherche notamment d’une hypotension, semble surtout avoir
une bonne valeur prédictive négative ; un niveau d’hypertrophie
très important (épaisseur > 30 mm) serait un facteur de mauvais
pronostic, de même que l’existence d’un pont musculaire sur les
artères coronaires. Ensuite, que proposer ? Éviter tout sport est
une mesure à toujours respecter. Les bêtabloquants à fortes doses
sont à proposer systématiquement chez les patients symptoma-
tiques. En cas de risque jugé élevé, l’amiodarone, voire un défi-
brillateur automatique, sont proposés au cas par cas.
OBJECTIFS THÉRAPEUTIQUES
dans la cardiomyopathie hypertrophique primitive
Améliorer
la qualité de vie
Prévenir la progression
de la maladie
Prévenir
la mort subite
Si
symptômes
Bêtabloquants
± calcium-bloqueurs
Si persistance
des
symptômes
– stimulateur DDD
ou
– myomectomie
ou
– alcoolisation septale
– bêtabloquants
± amiodarone
– voire DAI
Haut risque
Stratification du risque
– antécédent mort subite, TV...
– antécédent familial
– épaisseur septale > 30 mm
– pont musculaire sur artère coronaire
...
?
ÉCHAPPEMENT AUX IEC, INTÉRÊT DES ANTAGONISTES AII
M.C. Aumont (Paris)a exposé les éléments sur lesquels est fondé
le concept d’échappement aux IEC. Il existe une réaugmenta-
tion de l’aldostéronémie sous traitement IEC. Il a aussi été mon-
tré que la perfusion d’angiotensine (Ag) I chez des patients trai-
tés par IEC à doses optimales depuis plusieurs mois provoquait
une réponse vasopressive, confirmant un blocage incomplet de
l’AgII par le traitement IEC. Il existe d’autres voies que l’enzyme
de conversion qui permettent la transformation d’AgI en AgII
(chymase...), et il existerait aussi un système rénine-angiotensine
intracellulaire (notamment intramyocardique) non accessible aux
doses usuelles d’IEC. Les essais associant IEC et AAII sont donc
très attendus pour valider la pertinence clinique de ce concept
d’échappement aux IEC.
Une controverse fut ainsi consacrée à l’intérêt des AAII dans
le traitement de l’insuffisance cardiaque. Pour G. Jondeau
(Boulogne), les AAII sont très intéressants dans l’insuffisance
cardiaque, car ils peuvent bloquer de façon complète les récep-
teurs AT1 à l’AgII. De plus, leur tolérance est bonne, avec notam-
ment l’absence de toux, contrairement aux IEC. Enfin, les résul-
tats de l’étude Val-HeFT (valsartan à fortes doses ajouté à un
IEC à dose optimale dans l’insuffisance cardiaque avec dys-
fonction systolique), présentés à l’AHA 2000, montrent que
l’adjonction d’un AAII au traitement IEC conventionnel permet
un bénéfice clinique, au moins sur le nombre de réhospitalisa-
tions. Pour Y. Jullière (Nancy), les AAII n’ont actuellement
démontré aucun bénéfice clinique tangible dans l’insuffisance
cardiaque (essais ELITE II et RESOLVD), et il faut attendre la
publication des essais Val-HeFT puis CHARM pour se faire une
idée précise. Après une période d’enthousiasme, il semblerait
que l’idée d’additionner et multiplier différents antagonistes
neurohormonaux, à fortes doses, soit à nuancer. Ainsi, toujours
dans l’essai Val-HeFT, l’association AAII-IEC n’apportait pas
de bénéfice, et même serait délétère en cas de coprescription
aux bêtabloquants. À noter aussi que, dans l’essai RALES, la
spironolactone était bénéfique, mais que les coprescriptions
d’IEC étaient à doses modérées et que peu de patients étaient
sous bêtabloquants...
APPORT DU BNP DANS LE DIAGNOSTIC ET LE TRAITE-
MENT DE L’INSUFFISANCE CARDIAQUE
(R. Isnard, Paris)
Le Brain Natriuretic Peptide (BNP) est actuellement une des hor-
mones en vogue dans l’insuffisance cardiaque. Le BNP est syn-
thétisé et sécrété par les myocytes VG sous l’effet d’une aug-
mentation de l’étirement du VG (et, dans une moindre mesure,
des autres cavités). Son intérêt dans la stratification pronostique
de l’insuffisance cardiaque sévère est clairement reconnu. Par
ailleurs, il a été montré que le taux de BNP permettait de détec-
ter l’existence d’une dysfonction VG systolique, mais aussi d’ai-
der à distinguer, parmi des patients dyspnéiques, ceux souffrant
d’IVG congestive. Enfin, très récemment, une étude suggérait
que les taux de BNP aidaient à mieux titrer le traitement de l’in-
suffisance cardiaque. En France, où l’accès à l’écho-doppler car-
diaque est très aisé, l’intérêt pour ces applications du dosage du
BNP est peut-être moins évident. En fait, l’engouement actuel
pour le BNP vient de la mise sur le marché d’un kit de dosage
“rapide” (en quelques minutes et à partir de sang total) du BNP,
c’est-à-dire d’un dosage au lit du patient, qui pourrait ainsi appor-
ter en temps réel les renseignements précédemment cités. Néan-
moins, la fiabilité de ce kit, les valeurs seuils, sa pertinence en
pratique clinique quotidienne, notamment dans la dyspnée aiguë
et l’insuffisance cardiaque diastolique, et le surcoût de ces dosages
restent à étudier, et cela de préférence avant une exploitation
“grand public” et “tous azimuts”.
LA GREFFE CARDIAQUE À L’AUBE DU XXIESIÈCLE
Le point sur la greffe en 2001 vu par l’Établissement des
greffes (C. Jacquelinet, Paris). Le problème de la pénurie des
greffons fut rappelé avec, par exemple, un nombre de candidats
par greffon augmentant de 2,29 en 1994 à 2,40 en 1999, alors
même que le nombre de nouveaux inscrits sur la liste d’attente a
chuté (595 en 1994 contre seulement 474 en 2000). Ce dernier
point n’a pas d’explication univoque. Les traitements de l’insuf-
fisance cardiaque sévère s’améliorent, mais il est aussi probable
que les cardiologues sont devenus plus restrictifs (ou frileux ?)
dans leurs indications, étant au courant de la pénurie de greffons.
Des problèmes d’organisation existent aussi, dès le prélèvement :
ainsi, seuls 318 greffons ont été utilisés parmi les 421 greffons
prélevés (en 1999), et, par ailleurs, deux tiers environ des don-
neurs sont prélevés pour différents organes mais pas pour le cœur,
sans raison précise.
Quels critères retenir pour la greffe ? (J.B. Bouhour, Nantes).
La principale difficulté pour le cardiologue est de prédire l’ave-
nir d’un insuffisant cardiaque sévère, notamment quand celui-ci
est ambulatoire.
La Lettre du Cardiologue - n° 345 - mai 2001
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NFORMATIONS
Intérêt du dosage du BNP
Stratification
pronostique
dans l'insuffisance
cardiaque sévère
Aide au diagnostic
de l'insuffisance cardiaque
aiguë ou au dépistage
des dysfonctions systoliques VG
Aide à la titration
thérapeutique dans
l'insuffisance cardiaque
Indications de transplantation cardiaque (critères)
Traitement médicamenteux optimal
Attendre une éventuelle réversibilité (post-partum, myocardite
aiguë, éthylisme...)
Classes NYHA III et IV
Durée de l’insuffisance cardiaque
FEVG < 25 %
PCAP > 15 mmHg
Pic de VO2< 14 ml/kg/mn
Natrémie < 138 mM
Taux plasmatique de norépinéphrine > 700 pg/ml
Rapport E/A > 2 et TD de E < 125 ms (doppler mitral)
FEVD < 25 %
Perte de variabilité sinusale (SDNN > 165 ms)
Taux plasmatiques d’ANP et BNP > 125 et 75 pg/ml respectivement
Taux plasmatiques d’endothéline > 5 pg/ml
La Lettre du Cardiologue - n° 345 - mai 2001
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I
NFORMATIONS
Du fait de leur multiplicité, des algorithmes ont été proposés et
attribuent un risque plus ou moins important en fonction de l’as-
sociation de plusieurs critères.
Un certain nombre d’autres problèmes, non pris en compte dans
ces critères, peuvent encore compliquer la tâche du cardiologue
chargé de retenir l’indication de greffe.
Le problème des résistances vasculaires pulmonaires reste impor-
tant, car elles sont la cause d’une mortalité post-transplantation
précoce ; le seuil est habituellement placé à trois unités Wood,
seuil à partir duquel une réversibilité doit être recherchée par test
pharmacologique.
Le problème de l’âge ne peut être éludé : 9 % des candidats amé-
ricains, par exemple, ont plus de 65 ans, et dans l’expérience du
CHU de Nantes, la mortalité à moyen et long terme n’était pas
altérée chez les sujets de plus de 60 ans ; les indications doivent
donc être prises au cas par cas.
Enfin, le risque de mort subite (environ un tiers de la mortalité
chez l’insuffisant cardiaque) reste très mal appréhendé et, actuel-
lement, n’est pas ou est peu pris en compte dans l’indication.
Le devenir des greffés et les facteurs de risque d’échec furent
précisés par J.P. Villemot (Nantes). Le taux de survie à moyen
et long terme est assez bon ; en fait, l’essentiel des échecs sur-
vient précocement, pendant le premier mois, avec un taux de décès
proche de 20 %. Les trois principales complications sont alors :
les infections périopératoires, liées notamment à la colonisa-
tion du receveur ;
– la dysfonction cardiaque, liée à une HTAP du receveur provo-
quant une dysfonction VD aiguë ;
– la défaillance polyviscérale, liée essentiellement à l’état du rece-
veur, notamment à sa fonction rénale. Les problèmes à terme sont
plus aisément contrôlables : rejet chronique, infection, néopla-
sies secondaires (surtout carcinomes cutanés) et effets secondaires
de l’immunosuppression prolongée.
Les alternatives chirurgicales dans l’insuffisance cardiaque
sévère furent abordées par les chirurgiens A. Pavie (Paris) et
D. Duveau (Nantes). Si la ventriculotomie de Battista et la car-
diomyoplastie semblent actuellement en retrait, l’annuloplastie
mitrale suscite de l’intérêt. Néanmoins, la prévalence des fuites
mitrales fonctionnelles importantes après traitement optimal et
ses mécanismes exacts (outre la dilatation de l’anneau) sont mal
connus. De plus, les expériences sont encore assez disparates pour
se faire une idée précise sur la place de cette technique chirurgi-
cale dans le traitement de l’insuffisance cardiaque. Enfin, de nom-
breux espoirs sont placés dans l’assistance circulatoire mécanique
autonome, avec les nouveaux systèmes qui permettent une réelle
autonomie (Jarvik 2000...). Il pourrait alors s’agir d’une véritable
alternative à la greffe, au moins chez les patients ne pouvant pas
en bénéficier (contre-indication, âge...). Là encore, les expériences
sont disparates, et surtout très récentes. En outre, l’analyse des
résultats pourrait être difficile, car il s’agit souvent de patients
opérés tardivement, dans de très mauvaises conditions.
D. Logeart, service de cardiologie,
hôpital Beaujon, Clichy
Le point de vue de jeunes spécialistes
vant d’exposer les données et
les impressions qui émergent de
ces 11es Journées de la SFC, je tiens
tout particulièrement à remercier les
Laboratoires Servier. En effet, grâce à
leur volonté unique de promouvoir la
participation de jeunes spécialistes à
de telles manifestations, ils ont éveillé
la curiosité et la motivation de l’en-
semble des participants de notre
groupe.
Des thèmes très variés ont été abordés
lors des différentes sessions de travail.
À défaut de faire une revue exhaustive,
voici quelques éléments qui ont parti-
culièrement retenu notre attention.
Comment suivre les valvulopathies
asymptomatiques ?
Outre les paramètres classiques tenant
compte du degré de sévérité de la fuite ou
de la sténose, du retentissement sur les
paramètres de fonction et de taille du ven-
tricule gauche, et enfin de l’évolutivité de
ces paramètres, les guidelines américains
reposent, pour l’indication de la chirurgie
cardiaque, sur une définition précise du
caractère asymptomatique (tolérance nor-
male à l’effort) de la valvulopathie.
D’après le Dr Gohlke-Barwolf, la pratique
de l’épreuve d’effort chez les patients por-
teurs d’une sténose aortique serrée mais
asymptomatique au repos permettrait
d’écarter de la chirurgie une minorité de
patients réellement asymptomatiques au
repos et à l’effort. Contrairement à l’idée
reçue, la pratique de cet examen ne pré-
senterait pas de risques sévères dans cette
indication.
Symposium Servier : insuffisance car-
diaque, pratique et recommandations
actuelles
Plusieurs faits ont marqué ce symposium :
Une proportion étonnante de patients
sont traités par IEC (entre 60 et 80 %), que
ce soit en ville par les médecins généralistes,
les cardiologues ou en pratique hospitalière.
Malgré un biais évident de sélection des
médecins ayant participé à l’étude, il s’agit
du seul point positif de cette session.
L’absence d’interface entre le suivi et
l’éducation des patients en ville et le ser-
vice hospitalier lors des décompensations
cardiaques a été notée. Cette interface per-
A
La Lettre du Cardiologue - n° 345 - mai 2001
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I
NFORMATIONS
mettrait de prendre en charge ces malades
plus précocement et d’éviter nombre
d’hospitalisations. Faut-il avoir recours
aux services de réadaptation cardiaque,
envisager des équipes paramédicales de
proximité, développer des hôpitaux de
jour ?
M. Komajda a clairement rappelé les
posologies médicamenteuses optimales
recommandées dans l’insuffisance car-
diaque, effectivement atteintes dans une
minorité de cas.
Discordance perfusion-contraction : un
nouveau concept dans la physiopatho-
logie de la maladie coronaire, faisant
intervenir des micro-embolies
Le Dr Erbel a exposé un intéressant tra-
vail confrontant des données cliniques,
biologiques, angiographiques et anato-
mopathologiques concernant la physio-
logie de la plaque. Il propose une rela-
tion de cause à effet entre la rupture de
plaque, la présence de micro-emboles
distaux, l’inflammation locale respon-
sable d’une diminution locale de la
réserve coronaire et de la contractilité
myocardique. De plus, les micro-
emboles semblent favorisés par les gestes
invasifs intracoronaires.
Analyse comparative des indications de
l’échocardiographie dans les recom-
mandations AHA-ACC et SFC
En résumé, les Américains proposent un
suivi extrêmement codifié laissant peu de
place aux variantes personnelles en termes
de patients, de pathologies, de médecins et
de structure médicale, la première préoc-
cupation étant avant tout le rapport
coût/efficacité. Les Européens, notamment
les Français, appliquent plus volontiers le
principe de précaution.
Coronaropathies et valvulopathies :
dépistage non invasif des lésions coro-
naires
P. Guéret a proposé quatre techniques
d’imagerie non invasive, afin d’éviter le
recours systématique à la coronarographie
préopératoire.
Ces quatre méthodes sont la recherche de
calcifications coronaires au scanner ultra-
rapide, la reconstruction angiographique
coronaire en IRM, la recherche d’athérome
aortique en ETO et la mesure de l’épais-
seur intima-média sur la carotide en écho-
graphie. Les deux dernières se distinguent
par leur haute faisabilité, leur facilité d’in-
terprétation, leur rapidité et reproductibi-
lité, et surtout leurs excellents résultats,
permettant, grâce à une VPN individuelle
de 99 % (valeurs seuil de l’épaisseur de la
plaque en ETO < 3 mm, et de l’épaisseur
intima-média < 0,6 mm), d’éviter pour les
patients négatifs le recours à la coronaro-
graphie.
Échocardiographie et accident vascu-
laire cérébral
Cette session, très intéressante et très sui-
vie, créant une interface unique cardio-
logie-neurologie, a été animée par des
orateurs convaincus et convaincants.
D’après la méta-analyse (présentation du
Dr Mas), il existe un lien entre la présence
d’un foramen ovale et/ou d’un anévrysme
du septum interauriculaire et les AVC
“idiopathiques” des sujets jeunes. Cepen-
dant, la cause est peu spécifique, et le lien
physiopathologique plausible mais diffi-
cile à mettre en évidence. De plus, le risque
de récidive chez les sujets porteurs de ces
anomalies est très faible. Il n’y a donc pas
de répercussion pour la prise en charge thé-
rapeutique (traitement anticoagulant).
T. Lavergne a proposé une étude fort inté-
ressante sur la mise en évidence d’une vul-
nérabilité auriculaire, dans la recherche
étiologique au décours d’un AVC sans
autre cause objectivée. Sa présence per-
mettrait d’évaluer le risque fibrillatoire de
façon reproductible et fiable. Il reste à
mener une étude fondamentale, visant à
déterminer si le fait de traiter cette vulné-
rabilité entraîne une diminution des AVC,
ce qui demeure la question essentielle.
Enfin, A. Cohen a souligné l’intérêt pri-
mordial de la recherche d’un athérome aor-
tique dans l’évaluation du risque throm-
boembolique en ETO. Si l’aspect quanti
tatif
de la plaque a aujourd’hui un intérêt
démontré (épaisseur seuil > 4 mm), l’as-
pect qualitatif (présence de calcifica
tions,
d’ulcérations, d’un important contraste
spontané et d’éléments mobiles) permet-
trait de caractériser un sous-groupe de
patients à très haut risque (multiplié par 16
à 20). Les implications thérapeutiques sont
encore discutées.
Échocardiographie
D. Pellerin nous a fait part d’un travail
visant à rechercher des indices DopplerTis-
sue Imaging (DTI), qui permettraient de
distinguer les cardiomyopathies dilatées
(CMD) d’origine ischémique de celles non
ischémiques. Les résultats présentés inci-
tent en effet à mener une étude prospective.
Session commune : filiale échocardio-
graphie de la SFC/Groupe de travail de
la Société européenne de cardiologie
Des mises au point ont été faites sur les
nouvelles techniques d’échocardiographie,
utilisées notamment dans l’infarctus. Il n’y
a pas eu pendant ce congrès de réelles nou-
veautés, mais peu de centres peuvent se
targuer d’utiliser au moins une de ces tech-
niques en routine clinique :
Échocardiographie de contraste myo-
cardique (Dr Piérard) : des progrès sont en
cours (mode d’administration intravei-
neuse, caractéristiques des produits injec-
tés, traitement du signal ultrasonore). Elle
permet de mettre en évidence l’intégrité de
la microcirculation, qui est un prérequis à
la viabilité myocardique.
Le DTI et le Strain Rate Imaging qui en
découle (G. Dérumeaux) sont des tech-
niques très prometteuses de quantification
objective, fiable, précoce et reproductible
de la fonction myocardique segmentaire.
Le color kinesis fournit des informa-
tions de phase et d’amplitude de déplace-
ment.
L’échographie de stress (Dr Picano), à
la recherche de viabilité, a d’excellentes
performances, notamment dans le sous-
groupe de patients avec dysfonction VG
sévère (< 30 %), avec une amélioration
majeure du pronostic.
P. Assayag a rappelé l’important éven-
tail des facteurs pronostiques dans l’in-
farctus. Il a souligné deux faits : les fac-
teurs les plus pertinents sont cliniques ; les
facteurs échographiques les plus fiables
(fonction diastolique : temps de décéléra-
tion et rapport E/Vp du flux transmitral)
sont les moins utilisés.
À noter : l’échographie 3D, en plein
essor, se cherche encore des champs d’ap-
plication en routine.
E. Abitbol, service de cardiologie,
hôpital Saint-Antoine, Paris
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