Gastro 1/98 13/05/04 15:22 Page 28 Vie professionnelle L a rubrique "Vie professionnelle" est aussi la vôtre. En dehors des articles de fond, nous souhaitons qu’elle puisse aussi laisser la place à une tribune libre dans laquelle chacun des acteurs de notre spécialité s’exprime. Si donc vous voulez faire connaître vos idées, vos réflexions, si vous souhaitez communiquer des informations qui vous paraissent utiles pour nos collègues, n’hésitez pas à nous écrire : Thierry Vallot, rédacteur en chef, revue Gastroentérologie , Médica-Press, 62-64, rue Jean-Jaurès, 92800 Puteaux. Vous avez dit réseaux ? A propos des réseaux communautaires d’exercice professionnel Le terme de réseau mis en vedette par le dernier plan Juppé revêt des significations différentes selon l’utilisation que l’on en fait. Si tout le monde devine ce qui peut apparaître derrière un réseau monopathologie comme celui du SIDA ou de l’hépatite C, il existe d’autres formes de réseau qui font l’objet d’une intense agitation, certains y voyant un recours économique en cas d’échec de la réforme actuelle et la seule possibilité à terme de gérer efficacemcnt une enveloppe régionale de santé. Il est clair en effet qu’à plus ou moins long terme, la séparation des enveloppes financières en différents secteurs (ambulatoires, médica- ments, généralistes, spécialistes, infirmières...) perd de son intérêt car elle fige les choses et l’on voit ce qu’il advient du budget global à l’hôpital qui pérennise des situations totalement aberrantes. Dans le dernier numéro de Regards publié par les Laboratoires SB, Aissa Khalifa, grand argentier bien connu de la santé, et maintenant responsable de l’activité services de santé du groupe SB, nous fait part de ses réflexions à propos des réseaux communautaires, dont tout le monde n’ose pas parler mais sur lesquels tout le monde réfléchit ; il suffit pour s’en convaincre de lire les dernières réflexions concernant le projet de la CSMF, ou le projet d’AXA. Principes généraux Les réseaux communautaires d’exercice professionnel ont pour objet de fédérer, au sein d’un secteur géographique, un ensemble de professionnels de santé dans le but d’organiser de manière plus rationnelle la distribution des soins. Il s’agit d’une démarche ascendante, d’organisation des professionnels, pour contracter Act. Méd. Int. - Gastroentérologie (12), n°1, janvier 1998 28 avec des organismes autour d’une approche globale, centrée autour du patient, au sein de laquelle peuvent apparaître des solutions plus spécifiques de prise en charge de telle ou telle pathologie. Un réseau communautaire repose sur au moins trois principes : – assurer une meilleure gestion de l’interface du lien entre tous les acteurs assurant la prise en charge des 5 % de patients qui consomment plus de 50 % des ressources, pour améliorer le résultat médical et le résultat économique ; – permettre aux professionnels de se fédérer autour du principe de qualité des soins, tant au niveau individuel qu’au niveau collectif. L’appartenance à un réseau communautaire suppose donc le respect des engagements de qualité et les moyens de mesurer ce respect. Il est indispensable de disposer d’un système d’information performant, qui est par nature indépendant de celui des payeurs ; – réfléchir à la gestion des incitations financières micro-économiques de chacun des acteurs, à leur interaction et à leur cohérence globale. Gastro 1/98 13/05/04 15:22 Page 29 Les outils nécessaires à la mise en place du réseau Un réseau d’exercice professionnel se caractérise par une série d’outils : • un engagement individuel de ses membres autour d’une charte d’assurance qualité ; • un système d’information performant ; • des protocoles communs de prise en charge. L’engagement individuel par la signature d’une charte d’assurance qualité est au cœur du réseau communautaire. Il signifie l’acceptation par tous les professionnels de santé, membres de ce réseau, des règles du jeu collectif du réseau. Cet engagement peut être opposé à chacun des membres du réseau et le respect par ces membres peut être opposé au réseau lui-même par un de ses partenaires tels que caisse d’assurance maladie ou assureur complémentaire. Le système d’information repose sur trois couches d’informations successives : – La première est celle du dossier médical du patient chez le professionnel de santé ; pour ce, il faut imposer l’harmonisation de la collecte d’informations. Il est aussi nécessaire de développer le système d’information des caisses, qui est actuellement extrêmement pauvre, et qui ne permet aucun chaînage, aucune imputabilité, non plus que l’imputation d’une hospitalisation à un médecin traitant ou le codage des pathologies. – La deuxième couche informationnelle concerne les modalités de la communication et le partage d’informations médicales au sein d’un réseau communautaire, qui posent encore des problèmes, notamment pour ce qui concerne la fonction de circulation de l’information dans le futur intranet qui reliera l’ensemble des acteurs de santé. – La troisième couche informationnelle concerne la constitution d’une base de données relatives au fonctionnement du réseau. Il est en effet indispensable de disposer d’une base miroir qui soit le reflet de l’activité de chacun des professionnels membres du réseau. Les difficultés de mise en œuvre La mise en œuvre de ces réseaux se heurte, pour A. Khalifa, à trois types d’obstacles, qui sont réglementaires, financiers et culturels : – Les obstacles réglementaires sont sans doute paradoxalement les plus faciles à résoudre. Les ordonnances de 1996 ont créé un cadre expérimental dérogatoire, original, mais celui-ci est pour l’instant exclusif aux médecins. Il faut donc établir des dérogations pour les autres catégories d’acteurs de santé : pharmaciens, infirmières, kinésithérapeutes, ou tout autre professionnel de santé. Le système d’informations pose également un certain nombre de problèmes juridiques ; le réseau doit, en premier lieu, assurer une étanchéité complète du système d’informations à l’écart des tiers, même quand les professionnels de santé font appel à un partenaire spécialisé. L’avis de la CNIL sur les dossiers qui lui seront présentés sera, de ce point de vue, déterminant. Enfin, il peut exister dans certains cas des risques d’entrave à la concurrence, notamment dans le cas de listes limitatives de médicaments élaborées par les médecins et les pharmaciens. – Les obstacles financiers. Un réseau d’exercice professionnel rencontre trois types d’obstacles financiers : la création d’une masse de manœuvres financières, son partage et la gestion des incitations micro-économiques. Pour que les professionnels de santé acceptent les contraintes que représente un réseau, il est nécessaire qu’ils en tirent un 29 bénéfice ; celui-ci peut être professionnel, il doit à un moment ou un autre avoir une traduction financière. Les sources d’économies dégagées par un réseau sont multiples : • diminution des hospitalisations, mais son effet économique est décalé, limité et potentiel ; • diminution de l’activité redondante, la communicabilité du dossier médical dans un réseau communautaire et l’engagement personnel des professionnels doivent permettre de diminuer de manière sensible le nombre d’actes redondants ; • optimisation de soins infirmiers et de kinésithérapie ; il est aussi absurde de laisser toute liberté aux auxiliaires médicaux que de leur interdire la modulation des soins à délivrer ; • diminution de la facture médicamenteuse ; il est aisé, dans des conditions qui ne nuisent absolument pas à la santé publique de diminuer la facture médicamenteuse dans des proportions considérables, de l’ordre de 10 à 15 %, ce qui représente une marge de manœuvres considérable. Ceci nécessite une coordination étroite entre médecins et pharmaciens, et une telle démarche dépasse très largement la simple prescription de médicaments génériques. Des mécanismes intelligents, dissociant notamment marges et chiffres d’affaires, doivent être trouvés pour qu’une telle baisse ne lèse pas les pharmaciens d’officine ; • diminution des indemnités journalières ; la moindre concurrence pesant sur les médecins devrait permettre une diminution des arrêts de travail, tant en valeur absolue qu’en durée moyenne. Souvent ce poste représente l’équivalent des actes de médecine générale. L’économie dégagée doit être partagée avec les organismes de financement, ce qui ne peut aujourd’hui s’envisager que dans un cadre expérimental. La redistribution de cette masse financière ne peut être réalisée au prorata ni des honoraires, ni Gastro 1/98 13/05/04 15:22 Page 30 Vie professionnelle des économies réalisées, tant il est difficile d’attribuer une économie à quelqu’un dans un réseau. Il est donc indispensable de régler a priori entre les professionnels la question de la redistribution. – Les obstacles culturels sont nombreux et extrêmement redoutables. Le plus facile à résoudre est probablement le refus de l’informatique ; encore faut-il créer les conditions d’une utilisation épanouie de l’outil informatique et dégager celui-ci de la télétransmission des feuilles de soins. Des interphases conviviales, une structure informatique de dossiers médicaux reprenant le mode de pensée d’un dossier médical papier sont autant de facteurs positifs. Le plus complexe des blocages culturels est sans doute le fait de passer d’une médecine individuelle fondée sur un engagement de moyens (“Je fais de mon mieux pour mon patient”), à un exercice plus collectif, fondé sur des échanges permanents d’informations, l’application de règles communes, le retour d’informations et l’échange avec d’autres professionnels de santé comme les pharmaciens, les auxiliaires et enfin l’évaluation des pratiques. A lire ces réflexions, on peut penser que le temps pour qu’on en arrive là est encore long. Cela n’est pas si sûr. Des systèmes voisins existent un peu partout dans le monde. En clair, cela revient à confier la gestion des ressources attribuées forfaitairement pour la santé d’un groupe d’individus à un organisme de professionnels qui ne serait plus la Sécurité sociale. Aux gestionnaires de se débrouiller pour rester dans l’enveloppe qui leur a été attribuée. Toute la question est de savoir quelle somme l’on va confier à cet organisme par individu. Le calcul est en fait assez simple à condition d’atteindre une certaine masse critique d’individus. On ne sait pas trop si les médecins très attachés au libéralisme ou très attachés à la médecine hospitalière doivent se réjouir d’une telle évolution. Il est fort probable que les gestionnaires seront beaucoup plus rigoureux, que les contrôles seront beaucoup plus pertinents et que la mise en concurrence des prestataires de service obligera ceux-ci à être les meilleurs possible en termes d’efficience. En tous les cas, si ce système a des avantages, il ne doit pas se construire aux dépens de la qualité. Il est donc fondamental de prévoir un cahier des charges précis sans lequel on risquerait d’assister à une dégradation de la qualité des soins, comme c’est le cas dans certains pays. ☛ Désaccord sur un accord ! Le syndicat des médecins de l’hospitalisation privée (SYMIIOP) et le Dr Maffioli s’insurgent contre un accord passé entre une fédération de l’hospitalisation privée (UHP) et la mutuelle de la fonction publique, qui obligerait les médecins travaillant dans les établissements qui auront signé cet accord à renoncer à la possibilité de dépassement d’honoraires 10 % au-dessus du niveau de la Sécurité sociale. On conçoit aisément que cela pose quelques difficultés aux médecins du secteur II exerçant dans les établissements privés. On peut simplement remarquer qu’une fois de plus, les médecins, cheville ouvrière des établissements de soins, qu’ils soient publics ou privés, sont exclus des discussions concernant leur outil de travail. Nouvelles de l’Industrie Pharmaceutique Janssen-Cilag Les Laboratoires Janssen-Cilag ont organisé, le 7 octobre 1997, une conférence de presse pour le lancement d’Arestal® (comprimés à 1 mg). La diarrhée aiguë, définie comme l’émission de selles trop fréquentes et/ou trop liquides durant 48 heures ou plus, est un Act. Méd. Int. - Gastroentérologie (12), n° 1, janvier 1998 30 symptôme fréquent. Selon les statistiques de l’OMS, on estime à environ 3 à 5 milliards le nombre de diarrhées aiguës rapportées chaque année dans le monde. Cette pathologie survient aussi bien dans