La Lettre du Gynécologue • n°366 - novembre 2011 | 17
DOSSIER
au terme de 36 SA + 0 jour à 41 SA + 0 jour, avec RCIU
suspecté devant une circonférence abdominale infé-
rieure au 10e percentile, ou une estimation de poids
fœtal inférieure au 10
e
percentile, ou une stagnation
de la courbe de croissance, ou les 3 associés. Dans le
bras déclenchement, ce dernier était réalisé 48 heures
après la randomisation : en cas de score de Bishop > 6,
l’amniotomie était couplée si besoin à du l’ocytocine ;
en cas de score de Bishop < 6, l’induction du travail
se faisait grâce à des prostaglandines en intravaginal
ou en intracervical, ou par une sonde de Foley dont
le ballonnet était gonflé à 30 ml. Dans le bras expec-
tative, la surveillance était assurée par 2 rythmes
cardiaques fœtaux hebdomadaires, une échographie
et une surveillance clinique et biologique pour prévenir
l’apparition d’une éventuelle prééclampsie. Il n’y avait
aucune différence entre les 2 bras pour le taux de
circonférence abdominale inférieure au 10
e
percentile
(81,6 %-82,1 %), le taux d’estimation de poids fœtal
inférieur au 10e percentile (92,2 %-93,6 %) et le taux
d’oligoamnios (31,0 %-34,5 %). Le taux de déclenche-
ment était de 95 % dans le groupe déclenchement
versus 50 % dans le groupe expectative.
Aucune différence ne ressortait pour le taux de césa-
riennes, étonnamment faible dans les 2 groupes
(environ 14 %), pour un déclenchement sur col
défavorable par prostaglandines dans un contexte
de RCIU avec environ 30 % d’oligoamnios (94 % des
patientes dans le groupe déclenchement et 97,3 %
des patientes dans le groupe expectative avaient un
score de Bishop ≤ 6).
Il n’y avait pas de différence non plus pour la morbidité
maternelle (notamment pour les taux d’extractions
instrumentales ou de césariennes), ni pour la morbi-
dité néonatale, notamment pour les taux de pH < 7,05
ou d’admission en réanimation néonatale. Enfin, il est
important de noter que l’estimation de poids fœtal
réalisée en anténatal était relativement performante,
car 75 % des nouveau-nés avaient un poids inférieur
au 10e percentile, et 30 % à 50 % des nouveau-nés
avaient un poids inférieur au 5
e
percentile. Finalement,
la seule différence observée entre les 2 groupes était
un nombre significativement plus important d’enfants
avec un poids inférieur au 3e percentile dans le groupe
expectative (40/321 versus 100/329, soit 12,5 %
versus 30,6 % ; p < 0,001). Les auteurs concluent
que les 2 attitudes semblent licites. Une des limites
à l’extrapolation des résultats de cette étude est que
la conduite du travail est très différente de la nôtre,
comme en témoigne le très faible taux de césariennes
observé dans cette étude.
Hypertension artérielle
gravidique et prééclampsie
Koopmans et al. (24) ont mené une étude multi-
centrique randomisée comparant expectative versus
déclenchement pour 756 patientes entre 36 et 41 SA
ayant une hypertension artérielle gravidique ou une
prééclampsie modérée. L’hypertension gravidique
était définie par une pression artérielle diastolique
supérieure ou égale à 95 mmHg à 2 reprises à plus
de 6 heures d’intervalle, et la prééclampsie par
la présence d’une hypertension gravidique asso-
ciée à une protéinurie > 0,3 g/24 heures ou plus
de 2 bandelettes urinaires positives. Après rando-
misation, les patientes du groupe déclenchement
bénéficiaient d’une amniotomie et ocytocine si le
score de Bishop était ≥ 6 ; dans le cas contraire, une
maturation cervicale était réalisée avec des prosta-
glandines intracervicales ou intravaginales ou par
une sonde de Foley.
Aucune différence significative n’a été observée pour
la morbidité maternelle (hospitalisation en réani-
mation, hémorragie du post-partum, éclampsie,
hématome rétroplacentaire, coagulation intravas-
culaire disséminée, complications thromboembo-
liques, œdème aigu pulmonaire, HELLP syndrome)
ou néonatale (Apgar < 7 à 5 min, pH < 7,05, hospi-
talisation en réanimation, mort fœtale in utero)
entre les 2 groupes. Mais les auteurs ont construit
une variable composite maternelle comportant la
progression de l’hypertension (> 16/11) ou de la
protéinurie (≥ 5 g/24 h). Un taux minoré de cette
variable composite est ressorti dans le groupe
déclenchement (RR : 0,71 ; IC95 : 0,59-0,86 ; p <
0,001), ce qui fait conclure aux auteurs que le
déclenchement du travail était associé à une amélio-
ration de la morbidité maternelle. Concernant le
sous-groupe de patientes ayant un col défavorable
(score de Bishop < 2, sachant qu’aucune informa-
tion n’était disponible pour les patientes ayant un
score de Bishop compris entre 2 et 4), le taux de
césariennes avait tendance à être majoré (sans être
significatif) dans le groupe déclenchement (17 %
versus 29 % ; RR : 0,59 ; IC95 : 0,34-1,03).
En pratique, le déclenchement ou l’expectative sont
2 options possibles en cas de score de Bishop > 3,
mais, si le score de Bishop est < 3, la balance penche
pour une politique expectative afin de diminuer le
risque de césarienne. Cette position est à réévaluer
au cas par cas en fonction de la sévérité de l’hyper-
tension artérielle gravidique ou de la prééclampsie.
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