34 LaLettreduPsychiatre-Suppl.LesActualitésauvol.I-n°2-juin2005
Coordonné parE.Bacon&A.M.Arnold
INSERMet clinique psychiatrique,Strasbourg
REVUE
de presse
de presse
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Nature
>
Science
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Neuron
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Trends in Genetics
>
NatureNeuroscience
>
AmericanJournal
ofPsychiatry
>
JAMA(Journal
oftheAmericanMedical
Association)
>
ArchivesofGeneralPsychiatry
À
l’origine, le chromosome X a été
dénommé “X” pour signifier
“inconnu”. Il est resté longtemps
une bizarrerie qui a interpellé les géné-
ticiens pendant des siècles. C’est le seul
chromosome dont une des paires est
inactivée chez l’un des deux sexes,
en l’occurrence le sexe feminin. Il est
parsemé d’éléments répétés (56 % par
comparaison avec une moyenne de
45 % pour tout le génome) qui le ren-
dent particulièrement pertinent pour
produire une séquence détaillée de
gènes. Une impressionnante collabora-
tion entre deux cent cinquante cher-
cheurs a réussi à déterminer 99,3 % de
la séquence euchromatique du chro-
mosome X. Les auteurs ont aussi pu
construire une histoire remarquable-
ment détaillée du passé du X. Les pro-
priétés uniques du chromosome X sont
une conséquence de l’évolution des
chromosomes sexuels chez les mammi-
fères. Ces chromosomes ont évolué à
partir d’une paire d’autosomes, au cours
des dernières 30 millions d’années.
Dans ce processus, les éléments origi-
nels, fonctionnels, ont été conservés
sur le chromosome X, cependant que le
chromosome Y a perdu presque toutes
les traces de l’autosome ancestral, y
compris des gènes qui étaient au départ
partagés avec le X. Des études plus
anciennes comparant les gènes par-
tagés par les chromosomes X et Y
suggèrent l’existence de cinq strates
d’évolution sur le X, débutant au bas du
bras long du chromosome. Ces strates
représentent d’importants tronçons
autrefois partagés par le X et le Y, cer-
tains provenant de la paire autoso-
mique d’origine, d’autres étant arrivés
plus tardivement, jusqu’à ce que des
inversions sur une des paires signifient
que le X et le Y ne pouvaient désormais
plus échanger d’ADN dans cette
région. La pression de la sélection a
sans doute maintenu la petite région
autosomique persistante, de telle sorte
que toute érosion ultérieure de gènes
partagés serait minimale. La présente
analyse illustre l’origine autosomique
des chromosomes sexuels des mammi-
fères, processus associé à la perte pro-
gressive des recombinaisons entre le
X et le Y, et à l’amplitude de la dégra-
dation subséquente du chromosome Y.
Elle dénombre l’existence de 1 098 gènes
dans la séquence, parmi lesquels 99
encodent des protéines exprimées dans
les testicules et dans divers types de
tumeurs. Un nombre disproportionné de
maladies mendéliennes sont reliées au
chromosome X. Le caractère hémizygote
des mâles pour presque tous les gènes
du chromosome X les expose à des
phénotypes récessifs et par là, à une
grande quantité de maladies associées
au chromosome X.
Commentaire
L’achèvement du séquençage du chro-
mosome X constitue une avancée consi-
dérable des connaissances humaines. La
séquence du X est un tremplin pour
l’exploration des mystères de l’évolution
et du développement, et de l’apparition
de certaines maladies. Ces analyses ne
devront pas se restreindre à l’étude des
chromosomes sexuels des mammifères.
>
ACTUALITÉS
sciences
sciences
Tout sur le X
Plusieurs centres de recherche (États-Unis, Grande-Bretagne, Allemagne, France, Italie)
LeXenfindécodé
>
LaLettreduPsychiatre-Suppl.LesActualitésauvol.I-n°2-juin2005 35
dans des cellules de souris, ce qui
permet de créer des hybrides conte-
nant le chromosome humain inactif
et non le chromosome actif. Les
Drs Carrel et Willard ont exploité
ce système pour créer un catalogue
presque complet de l’état d’inactiva-
tion des gènes liés au X. Ils ont, pour
ce faire, étudié les cellules de la peau
de 40 femmes. Les auteurs de cette
étude, publiée dans le même numéro
de Nature, ont mis à profit la
séquence du chromosome X décrite
par Ross et al. Ils ont ainsi pu
constater que des gènes supposés
silencieux chez les femmes sont
quelquefois exprimés, et que leur
degré d’expression varie d’une femme
à l’autre. Soixante-quinze pour cent
des gènes sont silencieux en perma-
nence, cependant qu’environ 15 %
échappent de manière permanente à
l’inactivation, ce qui signifie qu’ils
sont exprimés deux fois plus chez les
femmes que chez les hommes. Les
10 % restants sont exprimés dans cer-
tains X inactifs et silencieux dans
d’autres. La tendance à échapper à
l’inactivation est liée à l’âge du sub-
stratum, de sorte qu’il y a moins de gènes
qui s’échappent chez les femmes âgées,
et plus chez les jeunes.
Commentaire
Les auteurs ont révélé un remarquable
degré d’hétérogénéité d’expression
chez le sexe féminin, qu’on ne sus-
pectait pas auparavant. Cette grande
variabilité génétique chez les femmes
pourrait avoir une certaine pertinence
d’un point de vue médical. Cette pre-
mière mise à profit du décodage du
chromosome X constitue également
en elle-même un point de départ
extraordinaire pour explorer les mys-
tères de l’évolution et de certaines
pathologies. E.B., A.M.A
A
u cours de l’évolution, les chro-
mosomes X ont développé une
façon d’inactiver la plupart des gènes
situés sur l’un des deux chromosomes
X de la paire chez les femelles, ce qui
fait que mâles et femelles auraient
pour une large part la même quantité
de produits des gènes. De manière
précoce, dans le développement de la
femelle, les cellules choisissent au
hasard soit le X paternel, soit le X
maternel, qui sera le chromosome X
actif. Ce choix est permanent, et a un
certain nombre de conséquences. Un
exemple typique est celui de la chatte
calicot. Les couleurs de ces animaux
varient d’un individu à l’autre selon le
chromosome X qui a été inactivé dans
différentes cellules, précocement au
cours du développement. De la me
manière, dans l’espèce humaine, les
femmes sont des mosaïques des chro-
mosomes X de leurs deux parents, et
la sévérité d’une pathologie liée au
chromosome X dépendra du pourcen-
tage de cellules dans lesquelles le gène
mutant est exprimé ou silencieux.
Mais certains gènes échappent à l’in-
activation de leur chromosome X. Le
X inactivé reste globalement silen-
cieux même lorsqu’il a été transféré
L
e syndrome du X fragile est la
principale maladie héréditaire
source de retard mental. Il atteint une
personne sur 6 000 naissances (une
sur 4 000 chez les hommes et une sur
8 000 chez les femmes). Les déficits
cognitifs varient selon les individus, et
peuvent aller de légères difficultés
d’apprentissage jusqu’à un retard men-
tal grave. Le déclin cognitif s’aggrave
avec l’âge. En outre, le syndrome s’ac-
compagne d’autres signes comporte-
mentaux cliniquement significatifs,
comme des troubles du sommeil, de
l’hyperactivité ou des comportements
autistiques. Une perturbation neuro-
anatomique est associée au syndrome,
en l’occurrence une morphologie anor-
male des épines dendritiques qui a été
identifiée à l’autopsie post mortem.
Chez les patients atteints, le gène
FMR1 est transcriptionnellement silen-
cieux. Certains travaux ont, par
ailleurs, suggéré que la suractivation
de la signalisation par les récepteurs
glutamatergiques métabotropes du
groupe 1 (mGluRs) pourrait être un
mécanisme sous-tendant un grand
nombre de symptômes de la maladie.
En raison de la complexité du trouble,
les chercheurs ont développé un
modèle animal, certes simplifié mais
reproductible, de la maladie. Il existe
un modèle de drosophile pour le syn-
drome du X fragile, qui repose sur la
perte de l’activité de l’homologue du
35
La comparaison avec les systèmes non
mammaliens qui se sont développés
de manière indépendante au cours de
l’évolution sera également riche d’en-
seignements. E.B., A.M.A
>
Ross MT, Grafham DV, Coffey AJ et al. The
sequence of the human X chromosome. Nature
2005;434:325-35.
>
Gunter C. Genome biology: she moves in mys-
terious ways. Nature 2005;434:279-80.
Leschuchotements
duchromosomeXsilencieux
>
Hersey et Duke (États-Unis)
Lapharmacothérapie
delaplasticitésynaptique
ausecoursduXfragile
>
Philadelphia et New York (États-Unis)
>
Carrel L, Willard HF. X-inactivation profile
reveals extensive variability in X-linked gene
expression in females. Nature 2005;434:400-4.
>
Pennisi E. Mutterings from the silenced X
chromosome. Science 2005;307:1708.
LaLettreduPsychiatre-Suppl.LesActualitésauvol.I-n°2-juin2005
36
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MedicalAssociation)
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ArchivesofGeneralPsychiatry
O
n peut se demander quel intérêt
il y a à utiliser une mouche
mutante pour modéliser le syndrome
du X fragile. Ces trois dernières
années, le modèle X fragile de la dro-
sophile a permis d’obtenir des infor-
mations nouvelles sur les fonctions
de la protéine du gène FMR1, la FMRP,
et sur la pathogenèse moléculaire du
X fragile. Grâce à la contribution des
outils génétiques sophistiqués et des
études expérimentales, la drosophile
se révèle un moyen bien adapté de
contribuer à connaître les partenaires
physiologiques importants de la pro-
téine FMRP in vivo. En conjonction
avec le modèle de la souris, le modèle
de la drosophile va certainement
continuer à révéler les secrets de la
protéine FMRP et du chromosome X
fragile, et devrait permettre d’identi-
fier des cibles moléculaires ou des
voies pour la prévention ou l’interven-
tion médicale dans un avenir proche.
E.B., A.M.A
>
Zhang YQ, Broadie K. Fathoming fragile X in
fruit flies. Trends Genet 2005;3:37-45.
gène FMR1 chez la drosophile, le
dfmr1. Ces drosophiles présentent des
phénotypes qui révèlent des simila-
rités avec les symptômes reliés au X
fragile. Le Dr Mc Bride et ses collabo-
rateurs ont démontré que le traite-
ment avec des antagonistes du récep-
teur métabotrope du glutamate, ou
avec du lithium, peut restaurer le
comportement de parade nuptiale et
s’opposer au développement de cer-
taines perturbations cérébrales obser-
vées chez ces mouches. En outre, les
auteurs ont démontré que les mouches
mutantes dfmr1 présentent des troubles
cognitifs concernant les modifications
induites par l’expérience du comporte-
ment de parade nuptiale. Le traite-
ment par les antagonistes du mGluR
ou par le lithium restaure ces troubles
de mémoire.
Commentaire
Dans ce travail, les auteurs ont inclus
dans le modèle de la drosophile du syn-
drome du X fragile un phénotype de
perturbation mnésique dans un para-
digme expérimental de mémoire étho-
logiquement pertinent. Ils ont démon-
tré que le traitement des mouches
mutantes dfmr1 avec des molécules qui
sont des antagonistes de l’activité des
récepteurs glutamatergiques métabo-
tropes du groupe 1 permet de restaurer
l’activité de parade nuptiale, et celle
de la mémoire évaluée à l’aide d’un
paradigme de parade nuptiale condi-
tionnée. Ces observations impliquent
que l’augmentation de la signalisation
des récepteurs glutamatergiques méta-
botropes du groupe 1 soit la cause
sous- jacente des troubles cognitifs,
mais aussi de certains phénotypes
neuronaux et comportementaux de
la mouche mutante. Elles désignent la
modulation de l’activité du mGluR
comme la cible d’une éventuelle
approche thérapeutique destinée à
L
impact des événements traumati-
sants de l’existence est souvent
évalué d’après la manière dont les gens
font face à ces expériences. Cela signifie
qu’il existerait des processus psycholo-
giques de contrôle capables de contre-
balancer les conséquences adverses du
stress. Le degré de contrôle comporte-
mental qu’un organisme est capable
d’exercer sur un stresseur constitue un
modulateur potentiel de l’impact phy-
siologique et cognitif du stresseur.
La compréhension de la manière dont
ces facteurs cognitifs plus ou moins
insaisissables interagissent avec les
conséquences végétatives et souvent
inconscientes du stress est une ques-
tion centrale des recherches en neuro-
sciences, et constitue une des facettes
du vieux problème des liens entre le
corps et l’esprit. Les recherches concer-
nant la capacité de contrôle (contrôla-
bilité) se sont surtout focalisées sur les
noyaux de la moelle épinière comme
celles menées sur le noyau raphé dor-
sal. Les observations d’une équipe de
Boulder, dans le Colorado, suggèrent
qu’une interaction entre le cortex pré-
frontal, (un des “centres exécutifs” du
cerveau), et le système sérotoniner-
gique, qui se projette de façon diffuse
à partir de la zone phylogénétiquement
ancienne du noyau raphé dorsal, signa-
lerait la contrôlabilité du stress. La
nouveauté de leurs observations, faites
chez le rat, tient au fait qu’elles suggè-
rent que les entrées descendantes pro-
venant du cortex préfrontal pourraient
percevoir les contingences environne-
mentales du contrôle comportemental,
REVUE
de presse
de presse
>
ACTUALITÉS
sciences
sciences
Nashville (États-Unis)
Contrôlerlestress:
commentlecerveauseprotège
lui-mêmedeladépression
>
Boulder (États-Unis)
et Cambridge (Grande-Bretagne)
Sonderlesmystères
de la mouche fragile :
quelintérêt?
>
améliorer les troubles cognitifs des
personnes atteintes du syndrome du X
fragile. E.B., A.M.A
>
McBride SM, Choi CH, Wang Y et al. Phar-
macological rescue of synaptic plasticity,
courtship behavior, and mushroom body defects
in a Drosophila model of fragile X syndrome.
Neuron 2005;45:753-64.
>
Dolen G, Bear MF. Courting a cure for fragile X.
Neuron 2005;45:642-4.
.../...
LaLettreduPsychiatre-Suppl.LesActualitésauvol.I-n°2-juin2005
38
Coordonné parE. Bacon &A.M.Arnold
>
Nature
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Trends inGenetics
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JAMA(Journal oftheAmerican
MedicalAssociation)
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ACTUALITÉS
sciences
sciences
contrôle appris sont également blo-
qués. Des contrôles similaires à ceux
observés par le Dr Amat et ses collabo-
rateurs. peuvent aussi s’appliquer aux
systèmes ascendants noradrénergiques,
dopaminergiques et cholinergiques,
puisque le cortex préfrontal envoie éga-
lement des projections descendantes
vers chacun de ces systèmes modu-
lateurs. Toutefois, leurs observations
constituent à ce jour la démonstration
la plus fascinante de la capacité du
cortex préfrontal à médier l’influence
du contrôle cognitif. Leurs résultats
suggèrent une fonction nouvelle pour le
cortex préfrontal ventral médian, et
impliquent que la présence du contrôle
inhibe l’activité induite par le stress
dans les noyaux de la moelle épinière,
en opposition avec le point de vue
prévalant jusqu’alors, qui considérait
qu’une telle activité était induite par
une absence de contrôle. E.B., A.M.A
>
Amat J, Baratta MV, Paul E, Bland ST et al.
Medial prefrontal cortex determines how stres-
sor controllability affects behavior and dorsal
raphe nucleus. Nat Neurosci 2005;3:365-71.
>
Robbins TW. Controlling stress: how the brain
protects itself from depression. Nat Neurosci
2005;3:261-2.
et utiliser cette information pour régu-
ler l’activité des neurones sérotoniner-
giques dans le noyau raphé dorsal. Les
auteurs ont pu constater, à partir d’ob-
servations neuro-anatomiques et neu-
rophysiologiques, que le cortex infra-
limbique du rat envoie des projections
descendantes vers le noyau raphé dor-
sal, où elles font des synapses sur les
neurones 5-HT, et exercent un contrôle
inhibiteur indirectement, par l’intermé-
diaire des interneurones GABAergiques.
Les régions infralimbiques et prélim-
biques du cortex préfrontal ventral
détectent si un stresseur est sous le
contrôle de l’organisme. Si le stresseur
est contrôlable, l’activation induite par
le stress du noyau raphé dorsal est inhi-
bée par le cortex préfrontal, et les
séquelles du stress sont bloquées. Le
cortex préfrontal ne serait pas impliqué
per se dans l’apprentissage associatif,
mais plutôt dans l’apprentissage de cer-
tains types de contingences instrumen-
tales par l’intermédiaire desquelles le
comportement volontaire amène à un
but tel qu’obtenir de la nourriture ou
éviter un choc électrique. Ainsi, il est
probable que certains mécanismes
localisés dans cette région permettent
à l’animal de pressentir et de réaliser
ses capacités à contrôler son environ-
nement, et d’utiliser ces informations
pour une variété de fonctions. Une de
ces fonctions semble être d’informer
les cellules du raphé nucleus dorsal sur
la contrôlabilité du stress.
Commentaire
Il apparaît, d’après les observations des
chercheurs, que la susceptibilité nor-
male des neurones 5-HT au stress, dont
on sait qu’il peut entraîner des consé-
quences fonctionnelles préjudiciables,
pourrait être modérée par des influences
cognitives relayées à partir du noyau
raphé dorsal. Quand cette influence
est bloquée, les effets protecteurs du
débat animé. Une question importante
concerne la vitesse d’apparition de leurs
effets antipsychotiques. L’existence d’une
latence d’apparition de ces effets, de
l’ordre de deux à trois semaines, était
considérée jusqu’à présent comme une
évidence. Dans cette optique, tout effet
précoce était vu comme un résultat
comportemental non spécifique sur des
aspects comme l’agitation, l’excitation
ou l’absence de coopérativité. Pourtant,
une méta-analyse récente (2003), incluant
les données de près de 7 500 patients
inclus dans une quarantaine d’étude en
double aveugle, avait déjà introduit le
doute sur cette affirmation : les auteurs
avaient en effet observé qu’un change-
ment clair dans les signes de la psychose
était perceptible dès la fin de la pre-
mière semaine de traitement, que le
niveau d’amélioration au bout de la pre-
mière semaine dépassait celui obtenu
au cours des semaines suivantes, et que
ces effets étaient supérieurs à ceux d’un
placebo. Si l’on considère comme acquis
que les effets des antipsychotiques sont
apparents au cours de la première semaine,
la question qui se pose dès lors est de
savoir à partir de quand précisément ils
sont perceptibles. L’équipe de S. Kapur a
testé l’hypothèse selon laquelle la psy-
chose s’améliorerait dès les premières
24 heures de traitement par un neuro-
leptique. Les chercheurs ont, pour ce
faire, mis en place une étude multicen-
trique internationale. Ils ont comparé en
double aveugle l’halopéridol et l’olanza-
pine avec un placebo. Trois cent onze
patients schizophrènes (âge moyen :
38 ans) qui présentaient un épisode
d’exacerbation aiguë dans le cadre de la
psychose ont ainsi reçu une injection
intramusculaire contenant soit un pla-
cebo, soit 10 mg d’olanzapine, soit
7,5 mg d’halopéridol. Les évaluations
ont été faites au départ, puis 2 heures et
24 heures après l’injection, avec l’échelle
BPRS, un item dérivé de la PANSS, et
Unecroyancebienancrée
battueenbrèche:leseffets
thérapeutiquesdesneuroleptiques
s’exercentenfaitdès
lespremières24heures
detraitement
>
L
es neuroleptiques existent dans
l’arsenal thérapeutique des traite-
ments psychiatriques depuis plus d’un
demi-siècle et, pourtant, leurs méca-
nismes d’action font encore l’objet d’un
Toronto (Canada)
.../...
LaLettreduPsychiatre-Suppl.LesActualitésauvol.I-n°2-juin2005 39
L
identification en routine de la
dépression en médecine géné-
rale est actuellement chose com-
mune. Toutefois, on a, à ce jour,
porté assez peu d’attention à une
situation délicate, celle des patients
qui consultent un généraliste et pré-
sentent une dépression, mais qui ont
des épisodes antérieurs d’hypomanie
ou de manie. Il s’agit donc de
patients avec une histoire qui peut
indiquer l’existence d’un trouble
bipolaire, nécessitant un traitement
spécialisé. Lors d’une consultation de
médecine générale, l’établissement
d’un diagnostic de dépression sans
évaluation des symptômes maniaques
antérieurs pourrait amener le généra-
liste à un diagnostic et à un traite-
ment incorrects. Une équipe améri-
caine a étudié les cas de plus de
1 000 patients ayant consulté un
médecin dans un service de médecine
générale du centre médical universi-
taire de l’université de Columbia. Ce
service reçoit environ 18 000 patients
adultes chaque année. L’étude a été
menée entre décembre 2001 et jan-
vier 2003. Les patients inclus étaient
âgés de 18 à 70 ans, avaient fait au
moins déjà une visite au centre médi-
cal, et souhaitaient consulter un
généraliste dans un entretien en face
à face. Les données sociodémogra-
phiques des patients ont été rele-
vées, ainsi que la prévalence de
troubles bipolaires, la nature des
traitements et le fonctionnement du
patient. Pour près de 10 % des
patients, un diagnostic de trouble
bipolaire a ainsi pu être établi sur le
long cours. Parmi la centaine de ces
l’impression clinique globale. Les résultats
révèlent que les groupes ayant reçu
l’olanzapine ou l’halopéridol présen-
taient une plus grande résorption glo-
bale des symptômes que ceux ayant reçu
un placebo. Cet effet était déjà visible
deux heures après la prise. Une analyse
factorielle a montré qu’un effet indé-
pendant sur les symptômes de la psy-
chose (incluant la désorganisation
conceptuelle, le comportement halluci-
natoire, le contenu inhabituel de la pen-
sée) était évident au cours des premières
24 heures. Cette amélioration n’était pas
médiée de façon unidirectionnelle par
des modifications concernant des effets
comportementaux non spécifiques ou
d’autres psychopathologies.
Commentaire
L’action des neuroleptiques se met
donc en place rapidement et croît avec
le temps. Les résultats de l’étude
confirment et précisent expérimenta-
lement l’existence de modifications
avérées dans les mesures des compo-
santes psychotiques à une étape très
précoce du traitement. En outre, ces
changements se différencient des
modifications observées sur l’agitation
ou d’autres aspects non spécifiques
des effets de la prise aiguë des neuro-
leptiques. Ces observations remettent
en question les hypothèses précé-
dentes, solidement ancrées, selon les-
quelles l’action des neuroleptiques ne
serait effective qu’après un certain
laps de temps. Elles suggèrent égale-
ment que l’effet neuroleptique pourrait
être plus directement relié qu’on ne le
pensait jusqu’alors au blocage de la
transmission dopaminergique.
E.B., A.M.A
>
Kapur S, Arenovich T, Agid O et al. Evidence
for onset of antipsychotic effects within the
first 24 hours of treatment. Am J Psychiatry
2005;162:939-46.
patients présentant un trouble bipo-
laire, seuls 7 (6,5 %) rapportaient
avoir pris un stabilisateur d’humeur au
cours du dernier mois. Soixante-douze
pour cent avaient recherché une aide
médicale pour leurs symptômes. Pour-
tant, seuls 9 % d’entre eux avaient été
précédemment diagnostiqués pour un
trouble bipolaire ou une dépression
dans le cadre d’un trouble bipolaire.
La plupart du temps, les termes cités
pour qualifier leur état étaient ceux
de : “dépression”, “anxiété”, “nerfs” ou
“dépression nerveuse”. Les médecins
généralistes avaient relevé l’existence
d’une dépression chez 49 % des
patients présentant un trouble bipo-
laire, mais ils n’avaient enregistré
celle d’un trouble bipolaire chez aucun
de ces patients, dans le dossier admi-
nistratif aussi bien que dans le dossier
médical. Les patients diagnostiqués
avec un trouble bipolaire rapportaient
une moins bonne qualité de vie, en
rapport avec la santé, et davantage
de problèmes sociaux et familiaux que
les autres.
Commentaire
Cette étude new-yorkaise confirme
que, dans la pratique clinique géné-
raliste, l’existence d’un trouble bipo-
laire est une chose relativement com-
mune, mais fréquemment sous-estimée
par les médecins. Cette observation
peut probablement s’appliquer à la
France. Or, ces patients courent des
risques s’ils sont traités avec une
monothérapie par antidépresseur. Il
serait donc de la plus haute impor-
tance d’initier les médecins généra-
listes aux méthodes de diagnostic, de
gestion et de traitement pharmacolo-
gique des troubles bipolaires.
E.B., A.M.A
>
Das A, Olfson M, Gameroff M et al. Screening
for bipolar disorder in a primary care practice.
JAMA 2005;293:956-63.
New York (États-Unis)
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