
132 | La Lettre du Psychiatre • Vol. V - n° 6 - novembre-décembre 2009
Résumé
L’évaluation des facteurs prédictifs de la réinsertion professionnelle des schizophrènes s’inscrit
dans le cadre de l’évaluation des conséquences fonctionnelles des pathologies psychiatriques.
Ces conséquences concernent la qualité de vie subjective, l’insertion professionnelle, la qualité
des relations sociales, l’insertion sociale et l’autonomie. Dans cet article, nous rappelons les
principes généraux des études de qualité de vie et nous décrivons le contenu de quelques-uns
des instruments disponibles en insistant sur le sérieux ainsi que la rigueur méthodologique
et scientifique nécessaires à la réussite de ces études.
Mots-clés
Qualité de vie
Pathologie
psychiatrique
Highlights
The evaluation of the predic-
tive factors of vocational reha-
bilitation of subjects living with
schizophrenia is one aspect of
the evaluation of the func-
tional outcomes of severe
mental illnesses. Other aspects
include the evaluation of the
impact of these diseases on the
quality of life of the subjects,
the quality of social relation-
ships, the social inclusion, and
the autonomy of the subjects.
In this paper we discuss some
of the defining features of
quality of life measurement in
health service reseach and we
review some of the available
instruments.
Keywords
Quality of life
Severe mental illness
“opérationnalisé” dans ces instruments diffère de la
notion intuitive et idiosyncratique de qualité de vie à
laquelle chacun a accès. Plusieurs définitions – dites
opérationnelles – ont été proposées. Par exemple,
l’Organisation mondiale de la santé (OMS), dans une
perspective de santé publique, a défini la qualité de
vie comme “la perception qu’a un individu de sa place
dans l’existence, dans le contexte de la culture et du
système de valeurs dans lesquels il vit, en relation
avec ses objectifs, ses attentes, ses normes et ses
inquiétudes” (2). Selon d’autres auteurs (3, 4), le point
clé est de comprendre que chaque situation patholo-
gique interfère de façon particulière avec la capacité
des individus à satisfaire leurs besoins. Si les besoins
perçus sont satisfaits, la qualité de vie est augmentée ;
s’ils sont peu satisfaits, la qualité de vie est diminuée.
Il est donc important de prendre en compte, dans les
évaluations de qualité de vie, les besoins perçus par
les patients, et pas seulement les besoins identifiés
par les médecins (tableau).
Par-delà ces différences conceptuelles, la caracté-
ristique commune des mesures de qualité de vie
est donc de prétendre refléter l’impact des mala-
dies et des interventions de santé sur la vie quoti-
dienne des patients du point de vue des intéressés
eux-mêmes. Elles reposent sur le jugement que les
patients portent sur leur propre état de santé, leur
satisfaction vis-à-vis de leur santé et, surtout, sur les
répercussions de leurs maladies et des traitements
associés. Les mesures sont obtenues à partir de
l’analyse des réponses des patients à des question-
naires standardisés développés selon des méthodes
psychométriques. Soulignons qu’il n’est pas suffisant
de dire que les patients répondent à des questions
élaborées par des experts pour affirmer que leurs
réponses reflètent leur point de vue.
Quelques instruments proposés
pour mesurer la qualité de vie
des schizophrènes
Les questionnaires mis au point pour mesurer la
qualité de vie des schizophrènes ont été développés,
dès les années 1980, dans un contexte de désinsti-
tutionnalisation (5). Il s’agissait de permettre l’éva-
luation des stratégies mises en œuvre et d’améliorer
la prise en charge ambulatoire. Cela explique que
le contenu de ces questionnaires fasse une large
place à l’impact social et économique des troubles
psychotiques, comme nous allons le voir maintenant.
D’une façon générale, les instruments et échelles de
qualité de vie destinés aux patients présentant une
maladie mentale chronique sont le plus souvent de
type générique ou généraliste et évaluent de multiples
domaines de la qualité de vie en incluant des mesures
de conditions de vie (en général objectives), l’accès
aux ressources et le sentiment de bien-être.
Community Adjustment Form
L’échelle Community Adjustment Form (CAF),
développée par L.I. Stein et M.A. Test (6), est un
autoquestionnaire semi-structuré élaboré pour
évaluer la satisfaction à l’égard de la vie et de la
qualité de vie lors d’une étude randomisée visant
à étudier des systèmes de soins ambulatoires. Elle
comprend 140 questions et sa passation nécessite
environ 45 minutes. Les domaines abordés sont :
les activités de loisirs, la satisfaction de la vie, l’es-
time de soi, les contacts avec les amis et la famille,
l’histoire et le statut professionnel, les revenus,
l’hébergement, les relations avec la justice et les
soins médicaux.
Quality of Life Checklist
La Quality of Life Checklist (QLC), échelle développée
par U. Malm et al. (7) a été élaborée pour fournir
aux cliniciens des informations sur les aspects de
la qualité de vie des patients malades mentaux
chroniques afin de les aider dans la planification
des programmes de soins. Il s’agit d’un autoques-
tionnaire de 93 questions qui doit être complété
par un enquêteur après un entretien. Les différents
Tableau. Liste de besoins dont la satisfaction est importante
pour la qualité de vie.
Alimentation, sommeil, activité, vie sexuelle,
absence de douleur
Logement, sécurité, stabilité
Affection, amour, communication, sentiment
de communauté, de filiation
Curiosité, jeux, créativité, sentiment que sa vie a un sens
Identité, reconnaissance sociale, respect, estime de soi,
capacité de se réaliser