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Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (X), n° 6, novembre-décembre 2006
Écho des congrès
Écho des congrès
neurales. Leur intrigante capacité à produire des dérivés
endodermiques et ectodermiques pose la question
de leur identité. Les auteurs de ce travail ont produit
des souris transgéniques exprimant le gène rapporteur
GFP sous le contrôle du promoteur de l’insuline. Un
tri cellulaire par FACS suivi d’un bio-essai a révélé que
les cellules précurseurs multipotentes étaient présentes
majoritairement dans la fraction GFP+. Cela suggère
qu’une partie des cellules exprimant l’insuline dans le
pancréas adulte sont des cellules multipotentes. La ques-
tion est alors de savoir si de telles cellules existent dans
le pancréas humain. Le laboratoire de D. van der Kooy
a trouvé de rares cellules du pancréas humain adulte qui
possèdent une très forte capacité de prolifération. Une
analyse par RT-PCR a démontré que les colonies déri-
vées de ces cellules humaines expriment à la fois des
marqueurs pancréatiques et neuronaux (Nestin, Sox2,
Hash1, Pax6, PDX1 Hnf3b, HNF4, Gata4), mais pas de
marqueur mésodermique. Ces colonies peuvent se diffé-
rencier en cellules gliales et neuronales (détectées par la
présence de b3 tubuline et GFAP), ainsi qu’en cellules
pancréatiques endocrines, positives pour l’insuline, le
glucagon et la somatostatine. Ces données montrent
donc que dans le pancréas adulte, il existe encore, à la
fois chez la souris et chez l’homme, des cellules à capa-
cité de différenciation multiple, notamment neuronale
et pancréatique. Cela est extrêmement intéressant dès
lors que l’on envisage des possibilités de régénération
du pancréas chez l’adulte.
Utilisation des cellules ES pour la production
de cellules bêtapancréatiques
L’avantage de cette approche consiste en ce qu’elle
permet de générer une quantité illimitée de cellules
bêtapancréatiques. Néanmoins, à l’heure actuelle, cette
stratégie se heurte encore à de nombreuses difficultés :
il reste difficile d’obtenir une production adéquate d’in-
suline par les cellules, d’avoir une réponse au glucose
suffisante pour pouvoir avoir un effet sur la glycémie, et
enfin, il semble nécessaire de démontrer clairement que
les cellules produites in vitro sont capables de maintenir
une glycémie normale lorsqu’elles sont greffées à un
individu diabétique.
Le laboratoire de la Dr A. Wobus (Gatersleben, Alle-
magne) semble avoir franchi une étape dans cette pers-
pective. En effet, la Dr A. Rolletschek, qui travaille
avec ce laboratoire, a établi un protocole pour générer
des cellules bêtapancréatiques à partir de cellules ES
de souris. Des cellules ES dans lesquelles on a induit la
surexpression du gène Pax4 ont été mises en culture en
présence de laminine et de nicotinamide. Une analyse
par RT-PCR a alors démontré que ces cellules ES se
différencient en cellules endocrines pancréatiques
puisqu’elles expriment les marqueurs Isl1, Pdx1, insu-
line, glucagon, somatostatine, et polypeptide pancréa-
tique. Afin de poursuivre la caractérisation des cellules
obtenues, les auteurs ont détecté de l’insuline et du
peptide C par immuno-histochimie et ont montré que
les cellules ainsi obtenues sécrètent de l’insuline en
réponse au glucose. Enfin, lorsque ces cellules sont
greffées à des souris rendues diabétiques par l’injec-
tion de streptozotocine, elles sont alors capables de
maintenir une glycémie normale chez ces animaux.
Ce travail constitue donc une étape intéressante pour
progresser vers un protocole de génération de cellules
bêta in vitro.
D’autres experts qui travaillent sur les cellules ES
humaines pensent que pour générer des cellules bêta,
il est nécessaire de reproduire des étapes du dévelop-
pement embryonnaire. C’est le cas du laboratoire du
Dr T. Otonkoski (Helsinki, Finlande) qui procède à une
conversion des cellules ES en endoderme, préalable-
ment à leur différenciation en cellules bêta. K. Lundin,
de ce même laboratoire, a montré que la surexpres-
sion de FOXA2/Hnf3b dans les cellules ES humaines
induit leur conversion en endoderme. Lorsque ces
cellules sont greffées à des souris tolérantes pour une
allogreffe, on observe dans certains cas des tératomes
contenant des groupes de cellules produisant de l’in-
suline, du glucagon, de la somatostatine et du poly-
peptide pancréatique. Ces données histologiques ont
été confirmées par une analyse transcriptionnelle qui
révèle, en outre, la présence de marqueurs endodermi-
ques et hépatiques. Cette approche, qui semble plus
physiologique puisqu’elle reproduit les processus du
développement, est certes préliminaire, mais elle paraît
encourageante à l’égard de la recherche visant à obtenir
du tissu pancréatique humain.
Conclusion
L’ensemble des travaux présentés au Congrès de la
Société internationale de recherche sur les cellules
souches témoigne d’un intérêt croissant de la commu-
nauté internationale pour ce domaine, et des efforts
considérables y sont en effet réalisés. Des progrès
sont effectués pour caractériser les cellules souches de
nombreux tissus. Cela devrait permettre d’envisager,
dans le futur, des formes de thérapie cellulaire de mala-
dies neurodégénératives, cardiovasculaires ou du diabète.
Toutefois, certaines personnes plus impliquées dans le
journalisme, la philosophie ou le droit, ont fait part de
leurs interrogations relatives au bon usage des cellules
souches, et portant même sur les aspects politiques et
économiques. Elles ont notamment remarqué que les
contraintes éthiques et législatives diffèrent grandement
selon les pays et les points de vue s’affrontent même
à l’intérieur des différentes parties des États-Unis. En