La Lettre de l’Hépato-Gastroentérologue - n° 3 - vol. II - mai-juin 1999138
DOSSIER THÉMATIQUE
qu’il existait déjà une cirrhose, on a noté ensuite qu’il n’était peut-
être pas utile chez les sujets ayant une hépatite chronique de faible
activité. Nous avons montré, dans une étude contrôlée randomi-
sée, qu’un traitement de six mois par interféron au cours de l’hé-
patite chronique de faible activité (Knodell inférieur ou égal à 5
ou METAVIR inférieur ou égal à A1 F1) entraînait 18 % de néga-
tivation de l’ARN viral six mois après l’arrêt de celui-ci chez les
seuls malades traités, et que ce résultat était comparable à celui
des hépatites chroniques actives soignées pendant six mois par
interféron. Mais, cette étude n’a pas démontré qu’il était utile de
traiter de tels patients, dont peut-être la plupart n’évolueront pas
vers l’hépatite chronique active. Seul, le suivi prolongé de ces deux
cohortes pourra apporter une réponse au problème posé. La néces-
sité de traiter les hépatites de faible activité n’étant pas retenue, la
ponction-biopsie hépatique s’est imposée comme une étape pré-
liminaire, quasi obligée, à la prise en charge thérapeutique. Ce
passage nécessaire par la ponction-biopsie hépatique, étayé par la
conférence française de consensus, a ancré les hôpitaux publics
et certaines cliniques privées dans les réseaux de soins hépatite C.
Pour autant, ceux-ci peuvent ne pas être centrés sur la prise en
charge hospitalière exclusive ou prédominante du patient. La place
des médecins généralistes et des hépato-gastroentérologues libé-
raux, intervenant comme médecins référents de proximité, reste
plus que souhaitable.
Il importe maintenant de tenter de définir au mieux les missions
de ces réseaux. Pour l’hépatite C, la première consiste à appor-
ter au patient, au plus près de sa situation géographique, infor-
mations et prise en charge diagnostique et thérapeutique de qua-
lité. Cet objectif ambitieux doit se décliner de la façon suivante :
– formation de médecins référents, éventuellement généralistes,
au dépistage par la reconnaissance des sujets à risque ;
– aptitude du médecin référent à guider son patient vers une filière
de soins lui apportant qualité et sécurité ;
– capacité à suivre le traitement, renouveler l’ordonnance, dépis-
ter les effets secondaires et éclairer le patient sur les risques réels
néanmoins faibles pour son entourage.
Cette formation pose un problème. Si le rôle de médecin référent
est confié au médecin traitant du patient, il faudra étudier le rap-
port coût-efficacité de la formation de ces médecins généralistes,
qui n’auront peut-être qu’un ou deux patients. Nous verrons plus
loin, avec un réseau Intranet et de nombreuses aides en ligne, com-
ment surmonter cette difficulté.
Une étude pilote conduite dans le Doubs, subventionnée par le
Fonds de prévention de la Caisse nationale d’assurance maladie,
a montré que, formés aux facteurs de risque, les médecins géné-
ralistes obtenaient de bonnes performances en matière de dépis-
tage puisqu’ils ont obtenu une séropositivité de l’hépatite C chez
5 % des patients auxquels ils l’ont prescrit, c’est-à-dire qu’ils ont
fait cinq fois mieux que la séroprévalence estimée dans la popu-
lation générale. Ils ont fait mieux que les médecins du travail et
que les médecins biologistes, sensibilisés de la même façon aux
facteurs de risque (respectivement 2,5 % et 3,5 %).
Nous pouvons alors nous questionner sur l’avenir des réseaux
hépatite C. Il n’est pas déraisonnable de penser aujourd’hui,
compte tenu de l’évolution naturelle de l’hépatite C et du nombre
modeste de sujets dépistés (au mieux 30 %), que les réseaux ont
devant eux une à deux décennies de travail.
Les réseaux hépatite C, très nombreux, peuvent rester informels,
et centrés sur les pôles de référence. Ils peuvent aussi tenter de
s’institutionnaliser, puisque les ordonnances du 24 avril 1996,
relatives à la maîtrise médicalisée des dépenses de soins, leur en
donnent la possibilité.
Pour une durée de cinq ans, à compter de la publication de l’or-
donnance n° 96-345 du 24 avril 1996, des actions expérimentales
sont menées dans le domaine médical ou médico-social sur l’en-
semble du territoire, en vue de promouvoir, avec l’accord du béné-
ficiaire de l’assurance maladie concernée, des formes nouvelles
de prise en charge des patients, et d’organiser un accès plus ration-
nel au système de soins ainsi qu’une meilleure coordination de
la prise en charge, qu’il s’agisse de soins ou de prévention. Ces
actions peuvent consister à mettre en œuvre des réseaux de soins
expérimentaux permettant la prise en charge de patients atteints
de pathologies lourdes ou chroniques.
Cette perspective juridique a conduit le réseau ville-hôpital hépa-
tite C franc-comtois (REVHOC) et le réseau bourguignon ville-
hôpital (REBHOC) à se fédérer dans une structure, régie par la
loi de 1901.
Avec l’aide des institutionnels (Caisses primaires d’assurance
maladie, URCAM, ARH) et de la firme Schering Plough, nous
avons abouti à un projet de réseau expérimental de soins que nous
avons déposé à la commission Soubie en juillet 1998.
Les originalités de ce projet sont :
– un logiciel Intranet sécurisé sur Internet ;
– des dérogations tarifaires pour les médecins libéraux partici-
pant au projet.
Le choix d’un logiciel disponible sur Internet a été motivé par sa
grande souplesse, lui permettant d’évoluer rapidement en fonc-
tion des progrès de la science médicale et de la thérapeutique. En
effet, lorsque le logiciel est mis à jour, tous les professionnels de
la santé voient leurs informations mises à jour instantanément.
Les différents praticiens référents des patients auront accès en
permanence à toutes les données de leurs patients, mais évidem-
ment pas à celles des autres patients. Ils pourront cependant avoir
accès aux données statistiques anonymes de toute la cohorte des
patients pris en charge. L’autre intérêt de ce logiciel est la possi-
bilité d’une évaluation en temps réel des praticiens adhérents ;
ainsi, toute déviation standard majeure par rapport aux référen-
tiels de prise en charge des réseaux permettra au médecin coor-
donnateur de se rendre sur le site du médecin référent pour com-
prendre les raisons de telles déviations.
Grâce à ce logiciel, il sera possible d’effectuer une évaluation
financière et économique de la prise en charge du patient, qu’il
soit traité ou non. Ce logiciel, par ses aides en ligne, aura aussi