Les lisières forestières : refuges de biodiversité

Les lisières forestières : refuges de
biodiversité
Environnement - Septembre 2014
Les petits massifs forestiers, très courants en Pays de la Loire, présentent l?avantage de produire de grandes
longueurs de lisières. Ces lisières, comme les haies avec lesquelles elles sont souvent connectées, sont en
général accompagnées d?un talus et d?un fossé ce qui en font des milieux extrêmement riches et
diversifiés. Comme les haies, elles servent de refuge pour de nombreuses espèces animales et végétales,
notamment pendant les périodes de l?année où les cultures des parcelles agricoles sont récoltées. Une
lisière forestière comme une haie doit être entretenue pour qu?elle puisse remplir pleinement ses rôles.
De l?avantage de la dispersion des forêts régionales
La région des Pays de la Loire avec son taux de boisement voisin de 10 %, très inférieur à la moyenne
nationale (30 %), tire un avantage particulier de cette faiblesse. Sur le territoire régional, à quelques exceptions
près (le massif de la Breille les Pins à l?est du Maine et Loire par exemple) les forêts ne forment souvent que
de petits massifs dispersés de quelques centaines d?hectares, comme le montre la carte ci-contre. Partant du
principe que plus une surface est divisée et irrégulière, plus les longueurs de périmètres sont élevées, le
rapport entre la longueur des lisières et la surface des forêts est donc élevé en Pays de la Loire. Cette forte
proportion de lisières est un atout pour la biodiversité régionale, à condition de leur apporter l?attention
qu?elles méritent. Il suffit dans la plupart des cas d?appliquer quelques simples règles de bon sens pour que
les lisières puissent remplir au mieux leur rôle d?abri pour la flore et la faune et leur fonction non moins
importante de protection de la forêt qu?elles bordent.
Une faune et de la flore à la banalité précieuse
Il n?existe pas de plante ou d?animal emblématique de la lisière forestière. Toutes les
espèces de plantes qui s?y trouvent se rencontrent dans d?autres milieux, notamment en forêt, dans les
prairies permanentes, les friches, les landes... En fonction de leur type, de leur localisation, de leur orientation,
les situations de lisières varient rapidement sur de courtes distances, par exemple entre le côté soleil et le côté
ombre, ou entre le sommet du talus et le fond du fossé. De nombreuses espèces peuvent ainsi se côtoyer
malgré, parfois, des besoins assez différents vis-à-vis de la lumière, de l?humidité et de la concurrence.
La situation est identique pour la faune. A l?exception de quelques rares insectes spécifiquement inféodés
aux haies (Rosalie des Alpes, Pique-Prune), un grand nombre d'espèces sylvicoles et d'espèces de milieux
ouverts peuvent se côtoyer dans les lisières forestières.
Des linéaires variés à soigner
Compte tenu de leur importance, le forestier a de nombreuses bonnes raisons de soigner ses lisières de forêt
ainsi que tout ce qui s?apparente à des alignements forestiers comme les arbres de bord d?allée.
L?importance de la diversité qu?elles abritent limite fortement le risque « d?explosions démographiques »
des ravageurs. En effet, proies et prédateurs sont régulièrement présents en nombre suffisant pour que
l?équilibre naturel entre ces populations puisse s?établir et se maintenir. Les oiseaux et chauve-souris
insectivores, les rapaces, les reptiles, les araignées, les insectes régulent par prédation ou parasitisme, les
populations de ravageurs, pucerons, chenilles, campagnols. Ils ne les éradiquent pas mais maintiennent leurs
populations à un niveau qui entraîne peu de baisse de vitalité sur les arbres ou les plantations et donc peu de
pertes économiques directes. C?est la grande différence avec l?utilisation des insecticides. En effet, l?action
du produit ne se limite pas en général à la destruction des populations d'insectes indésirables. Il a aussi
comme conséquence de faire disparaître les auxiliaires, soit par le manque de nourriture du fait de la
disparition des indésirables dont ils se nourrissent, soit atteints par un produit mal dosé ou insuffisamment
sélectif. Le « vide » ainsi créé est rapidement comblé par les populations les plus opportunistes, en général
les ravageurs, qui sont d?autant plus à l?aise pour se multiplier que leurs prédateurs ont disparu.
S'abriter du vent
La structure de la lisière est très importante pour sa capacité d?accueil et son efficacité
en tant que brise vent. Le rôle de ces deux fonctions augmente avec la hauteur et le nombre de strates
(d?étages) de végétation.
Une lisière intéressante est pourvue d?une strate herbacée (herbes et végétaux bas), d?une strate arbustive
(les arbustes et autres taillis) et d?une strate arborescente (les grands arbres).
Comme la structure, la perméabilité de la lisière est un élément essentiel. Elle joue un rôle protecteur pour le
boisement qu?elle borde et abrite. Par son effet filtre, une lisière à la perméabilité bien dosée, freine le vent,
ce qui réduit les risques de chablis (renversement des arbres). Trop claire, l?effet filtre est insuffisant. Trop
dense, le vent butte sur la lisière, ce qui provoque des tourbillons violents dans les peuplements situés
derrière et accentue le risque de bris de cimes ou de chablis.
Comment fournir le gîte et le couvert
Favoriser les arbres et arbustes à baies pour rendre les lisières plus accueillantes à la faune
qui y trouve une source alimentaire précieuse. Le merisier, l'aubépine, le noisetier, le fusain d?Europe, les
sureaux, la ronce, le lierre? offrent une nourriture recherchée par les animaux.
Créer un couvert permanent permet d?abriter la faune sauvage toute l?année. Il est intéressant d?avoir des
arbres au feuillage persistant comme le troène et le houx, ou marcescent (les feuilles sèchent mais restent sur
l?arbre durant l?hiver) comme le charme et certains chênes qui servent de refuge durant la période hivernale.
Conserver quelques arbres morts permet à certaines espèces de se loger.
Les arbres âgés doivent être renouvelés pour la pérennité de la lisière mais en maintenir quelques uns est
indispensable à certains animaux. La lisière forestière offre alors la possibilité d?habitat pour des insectes
comme le Pique-prune qui ne peuvent survivre que s?ils disposent d?arbres à grandes cavités, où ils trouveront
un terreau indispensable à leur développement larvaire. Par exemple, conserver un arbre mort (ne présentant
pas un danger potentiel), tous les 100 m est favorable aux écureuils, chauve-souris et à de nombreux oiseaux,
notamment les pics et rapaces nocturnes, comme la chouette chevêche, qui sont des grands prédateurs de
rongeurs. Ainsi lors de plantation de terres délaissées par l?agriculture, les haies doivent être conservées
autant que possible car elles apportent un abri aux jeunes arbres, favorable à leur démarrage, mais aussi à une
flore et une faune variée. Il faut éventuellement tailler la haie avant la plantation et garder un passage
périphérique pour l'entretenir.
On favorisera aussi les essences mellifères pour attirer les insectes pollinisateurs : saules, aubépines, tilleuls,
prunelliers?
Soigner et améliorer ses lisières, les intégrer au réseau bocager
Les très nombreuses lisières de nos forêts, zones de transition entre l?espace forestier fermé et l?espace
agricole ouvert, sont une source de diversité floristique et faunistique importante qu?il ne faut pas négliger.
Le forestier, à l?occasion d?une intervention dans une parcelle comportant une lisière, doit lui porter un regard
attentif afin de soigner sa structure et entretenir sa perméabilité. Le rôle environnemental des lisières est
d?autant plus important qu?elles se trouvent connectées avec les haies bocagères. L?ensemble forme alors un
véritable réseau favorable au déplacement des espèces animales et végétales. La Trame verte et bleue
régionale, actuellement en cours de préparation, a ainsi pour objectif d?identifier les principales voies de
circulation des espèces ; le maintien d?un réseau d?espaces boisés et de haies connectés entre eux sera
primordial pour la biodiversité de notre territoire régional.
Cécile Le Ferrec
Technicienne du CRPF
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