mai 2006, Le Ciel - 197
L’astronomie dans le monde
Comètes déguisées
Trois astéroïdes de la ceinture située entre
Mars et Jupiter se comportent parfois comme
des comètes. Avec des orbites circulaires dans
le plan de l’écliptique, ces astres se distinguent
nettement des comètes habituelles dont les or-
bites sont souvent allongées et orientées un peu
au hasard dans l’espace. Mais à un moment ou
l’autre, chacun de ces trois astéroïdes a éjec-
de la matière qui s’est étirée sous la forme
d’une queue de bon aloi visible pendant des
semaines ou des mois. Pour beaucoup d’astro-
nomes comme pour le grand public, c’est bien
cette dernière caractéristique qui dénit une
comète. Les trois objets sont donc maintenant
reconnus en tant que « comètes de la ceinture
principale ».
Certains ne se satisfont pas de cette ap-
pellation et préfèrent parler d’« astéroïdes acti-
vés ». Les astéroïdes contiennent des éléments
volatiles en plus ou moins grande proportion.
L’impact d’un petit astéroïde pourrait excaver
un cratère et déclencher une libération occa-
sionnelle de matière, sans faire pour autant de
l’astre une comète. Si ce scénario est le bon,
ces pseudo-comètes n’auraient guère de chance
de réitérer leur show. Mais il faudrait s’attendre
à ce que, de temps à autre, un astéroïde bien
sage se fasse comète et traîne une queue.
Pourtant c’est bien un même objet qui
en 1996 et 2002 a manifesté une queue. Il
a d’ailleurs reçu un nom ofciel de comète,
133P/Elst-Pizarro. L’activation par un impact
pourrait avoir mis à nu une poche de glace et de
matières volatiles, en rompant une croûte iner-
te. Cette poche resterait potentiellement active
à des degrés divers pendant des années.
La conclusion est que la distinction entre
astéroïdes et comètes est de plus en plus oue.
Et si l’on considère la na-
ture des satellites glacés
des planètes extérieures,
ou celle de Pluton et de ses
congénères, il semble qu’il
existe tout un éventail
continu d’objets plutôt que
deux ou trois classes bien
séparées.
La glace présente
dans la ceinture principale
pourrait être à l’origine de
l’eau terrestre. Il y a long-
temps qu’on soupçonne
que notre eau a été appor-
tée par des comètes qui
en des ères reculées ont
bombardé la Terre. Mais la
nature isotopique de l’eau
des comètes ne concorde
Les trois astéroïdes-
comètes de la ceinture
principale.
(© H. Hsieh and
D. Jewitt, Univ. Hawaii)
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pas avec celle de nos océans ou de nos robinets.
Les comètes de la ceinture principale seraient-
elles la clé du mystère?
Anneaux de Saturne
La sonde de la NASA Cassini a révélé
l’existence de toute une population de petits
satellites d’une centaine de mètres à l’intérieur
des anneaux de Saturne. Leur nombre se chiffre
sans doute en millions. Ce sont probablement
des débris de l’objet dont la dislocation a formé
les anneaux. Ces satellites sont trop petits pour
produire des structures à l’échelle du système
mais ils le perturbent localement de façon ca-
ractéristique.
L’image ci-dessous montre quatre ob-
jets curieux dans l’anneau A. Ils ont la forme
de doubles pales d’hélices, mesurent environ
cinq kilomètres d’une pointe à l’autre et sont
en quelque sorte le sillage des petites lunes.
Zooms successifs sur quatre petites lunes
découvertes par la sonde Cassini. Sur le
panneau de gauche on voit, de haut en bas,
l’anneau B, la division de Cassini, l’anneau
A, et tout en bas le n anneau F. L’image du
centre fait 1800 km de hauteur. Elle montre
trois ondes de densité, la plus forte, en bas,
étant due aux satellites Janus et Epiméthée.
Les panneaux de droite montrent les sillages
de quelques mini-lunes.
(© NASA/JPL/Space Science Institute)
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Ces dernières, trop petites, sont invisibles et se
trouvent sur l’axe des hélices.
La zone de l’anneau A l’on a découvert
ces structures est particulièrement uniforme et
c’est ce qui a permis de les apercevoir. Ailleurs
elles seraient perdues au milieu des sillons et
autres ondes parcourant les anneaux.
On estimait que la taille des particules
qui constituent l’anneau allait du centimètre à
quelques mètres. A ces cailloux il fallait ajouter
deux lunes, Pan et Daphnis, de 30 et 7 kilo-
mètres. Les petites lunes sont donc un chaînon
manquant. Elles opèrent la jonction entre les
deux populations et montrent qu’il existe dans
les anneaux un spectre complet de tailles, une
continuité depuis les poussières jusqu’aux lu-
nes comme Pan.
Jupiter par Cassini
Cassini tourne autour de Saturne et scrute
cette planète depuis juillet 2004 mais lors de
son voyage elle s’est approchée deux fois de
Vénus environ 300 et 600 kilomètre de la
surface), une fois de la Terre et nalement de
Jupiter pour gagner de l’énergie à leurs dépens.
Ces visites ont été mises à prot pour tester
l’équipement et de beaux résultats ont été ob-
tenus. Ainsi, lors du survol de la Terre à 1200
km d’altitude, en août 1999, Cassini a pris de
multiples images de notre planète et de la Lune,
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et a mesuré son champ magnétique. Plus d’un
an plus tard, après un voyage étonnamment
court, Cassini a traversé la zone d’inuence de
Jupiter. D’assez loin, il faut le reconnaître puis-
que la distance est à peine descendue sous les
dix millions de kilomètres. Les ingénieurs ont
proté de cette vue panoramique pour prendre
de nombreuses images du géant du système so-
laire. La NASA a rassemblé 36 de ces images
et vient d’en publier des mosaïques qui consti-
tuent les vues les plus détaillées de la planète
géante dans son ensemble.
Les images ci-jointes montrent une pro-
jection cylindrique de Jupiter, ainsi que les
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Dans cette projection cylindrique, les
distances en latitudes sont respectées
Les pôles ne sont donc pas rejetés à
l’inni comme dans la projection de
Mercator.
(© NASA/JPL/Space Science Institute)
calottes polaires, ou plutôt les deux hémisphè-
res dans leur entièreté, en projection polaire.
On remarquera sur la projection équatoriale
comme sur la polaire australe, la tache rouge
qui évolue dans ce que les observateurs spécia-
listes de la planète appellent la Zone Tropicale
Sud.
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