Canada : Recul de plusieurs décennies en matière d`environnement

Infolettre juin - juillet - août 2012
Actualités sur l’eau
Canada : Recul de plusieurs décennies
en matière denvironnement
Depuis son arrivée au Parlement en tant que gouvernement majoritaire,
le parti Conservateur de Stephen Harper a appor d’importantes
modications à plusieurs lois canadiennes en environnement.
Loi canadienne sur les évaluations environnementales
Le débat a commen en mars lorsquun comité parlementaire
do miné pa r des d éputés conse r vateurs a déposé un rappor t pro -
posant de réduire radicalement les exigences en vigueur depuis
des décennies en matre d’évaluation environnementale.
Les partis d’opposition ont d’abord dénoncé la durée anormale -
ment courte du processus d’examen de la Loi canadienne sur
l’évaluation environnementale (LCEE). Lexamen quinquennal
de cette loi prend généralement plus d’un an. Cette année, il
na duré que 9 jours. Selon le NPD et le parti Libéral du Canada,
plusieurs témoins importants n’auraient pas été entendus.
Dans son rapport, le Comité identie plusieurs failles dans le
processus actuel d’évaluations environnementales et émet 20
recommandations, principalement basées sur l’amélioration
de l’efcacité. Il est entre autre recommandé que l’Agence ca-
nadienne d’évaluation environnementale devienne lunique or-
ganisme responsable du processus dans le but de diminuer les
lais des travaux.
Toujours dans l’optique d’améliorer l’efcacité du processus
d’évaluations environnementales, le Comité suggère d’éliminer
certaines obligations qu’il qualie d’inutiles, notamment, celle
de fournir des renseignements sur des solutions de rechange à
un projet. Il recommande également l’élimination de l’obligation
d’examiner les répercussions du projet sur la capacité des res-
sources renouvelables de répondre aux besoins actuels et futurs.
Cette étape a été jugée inutile car il s’agit une question de jurid-
iction provinciale.
Loi sur les pêches
Le gouvernement fédéral songe aussi à apporter des change-
ments importants à la loi sur les pêches, notamment via la modi-
cation de larticle 35, qui porte sur la protection de l’habitat du
poisson. Cet article de loi est considécomme le pilier principal
de plusieurs lois environnementales au Canada, car il est utilisé
par tous les gouvernements pour protéger toutes les espèces en
interdisant d’intervenir dans l’habitat du poisson, de l’altérer ou
de le détruire. Il est fréquemment utilicontre les braconniers,
les remblayeurs ou les pollueurs en raison de sa simplicité.
Les modications proposées sont les suivantes : d’abord, tout le
concept d’altération de l’habitat du poisson disparait. Au lieu
d’interdire toute « altération tout dérangement ou toute de-
struction de l’habitat du poisson », ce qui comprend les espèces
d’eau douce, comme les espèces marines, la nouvelle loi ne
protégerait que les « poissons ayant une valeur économique,
culturelle ou écologique ».
Ces modications ont provoqué de vives réactions de la part de la
communauté scientique. En effet, 625 chercheurs et spécialistes
en biologie des milieux marins, aquatiques, en environnement
et de différentes disciplines relatives aux espèces aquatiques
ont fait parvenir une lettre au premier ministre dans laquelle ils
lui demandaient « d’abandonner cette initiative qui mettrait en
ril de nombreuses populations de poissons ainsi que les lacs,
les estuaires et les rivières qui les supportent ». Ils insistent par-
ticulrement sur le fait que la destruction d’habitats représente
la première cause du déclin des espèces. Ils estiment que
l’affaiblissement de la protection des habitats projetterait une
image irresponsable du Canada sur la scène internationale.
Le projet de loi qui en modie 70 autres
Pour les partis d’opposition une chose est sure : en man-
telant ainsi toutes les mesures de protection et les règlementa-
tions environnementales au pays et en éliminant les dispositions
visant la protection de l’habitat du poisson, les Conservateurs
peuvent aller de l’avant avec leurs projets de pipeline, de
circulation des superpétroliers et autres projets pouvant nuire à
l’environnement.
Ceci est dautant plus d’actualité qu’en temps normal, ladoption
de ces nouveaux projets de loi aurait exigé des bats, des con-
sultations publiques et des procédures d’adoption avec un co-
mité par lementaire. O r, pour accélére r le p roces sus, le gouverne-
ment propose de faire passer toutes ces modications avec une
loi omnibus. Le projet de loi C-38 contient 431 pages et modie
70 lois canadiennes. Selon Guy Caron, du NPD, il s’agit d’un pro-
cessus qui n’est pas démocratique et qui empêche une étude
bien approfondie de tous les éments du projet de loi.
Source 1 : pôt du rapport sur les modications proposées à la Loi
canadienne sur lévaluation environnementale.
Source 2 : Ottawa songe à émasculer la Loi sur les pêches.
Source 3 : Loi sur les pêches – 625 interpellent Harper.
Source 4 : Le NPD veut scinder le projet de loi de mise en œuvre du budget.
Source 5 : L’autre loi qui change tout.
Infolettre juin - juillet - août 2012
Actualités sur l’eau
Aurons-nous enn une « vraie » politique de protection
des milieux humides?
Le 12 mars 2012, la Cour supérieure du Québec annonçait que
le Ministère du Développement durable, de l’Environnement et
des Parcs (MDDEP) agissait de façon illégale en exigeant aux
promoteurs, des mesures de compensation pour la perte de mi-
lieux humides. Cette façon de faire a é instaurée en 2006 et
exigeait par exemple de compenser la destruction de zones hu-
mides par un don écologique d’un milieu naturel situé sur un au-
tre terrain ou par l’aménagement d’un nouveau milieu humide.
La poursuite a élancée par un producteur de canneberges
qui voulait augmenter sa production à même une tourbre.
Selon la Loi sur la quali de lenvironnement, « quiconque entre-
prend un projet dans un marais, un marécage ou une tourbière
doit préalablement obtenir du ministre un certicat d’autorisation
». Nulle part dans la Loi il n’est toutefois question de compensa-
tion en cas de destruction. Par son verdict, le juge Martin Dallaire
annule la valeur légale de cette obligation de compensation.
Christian Simard, de Nature Québec, estime que ce jugement
laisse un vide juridique énorme, mais qu’il fallait s’y attendre.
Comme les milieux humides ne sont pas inscrits dans la Loi, il ne
peut, selon lui, y avoir de politique claire pour leur protection. Il
souhaite une modication à la Loi et l’adoption d’une ritable
politique de protection des milieux humides.
C’est dans l’optique de régler cet imbroglio légal que le projet
de loi 71 a vu le jour. Ce projet de loi légalise les compensations
environnementales exies lors d’activités altérant les milieux hu-
mides et ce, de façon troactive an d’éviter d’autres poursuites
du même type. Toutefois, pour plusieurs organismes environ-
nementaux, un système de compensations qui faciliterait l’octroi
de certicats d’autorisation et multiplierait leur nombre pourrait
constituer un danger pour l’environnement. Selon Guy Garant,
directeur du Conseil régional de l’environnement (CRE) de Laval,
cest ce à quoi il faut faire attention avec le projet de loi 71.
Rappelons qu’il est plus simple, plus efcace et plus économique
de conserver les milieux humides existants que d’en recréer des
nouveaux avec plus ou moins de succès, particulièrement en
milieu urbain. Ceci est d’autant plus d’actualité puisque, selon
une étude récente, le Québec aurait perdu entre 80 et 85%
de ses milieux humides depuis les 100 dernières années. Les
sites pouvant servir de compensation se font donc de plus en
plus rares.
Pour en savoir plus :
Source 1 : Un jugement dévastateur contre le Ministère de
l’Environnement
Source 2 : Projet de loi 71 – Prioriser la conservation
Source 3 : Travaux parlementaires – Projet de loi 71
Après Longueuil, Laval est l’agglomération québécoise ayant subi la plus forte
augmentation démographique depuis le début du 20e siècle. Cette hausse
importante de la population a engendla construction de nombreux centres
commerciaux, de vastes stationnements et d’artères routres achalandées.
Malg ce développement sans précédent, la Ville de Laval fait partie des
villes du Québec dont les politiques écologiques sont les plus saluées. Elle vient
notamment de recevoir le prix Lucien-LAllier, du Réseau Environnement, pour
son approche novatrice en matière d’économie d’eau potable.
Compensations monétaires et sensibilisation
Ladministration de la ville mise particulièrement sur le principe des compensa-
tions monétaires lorsqu’un projet est jugé néfaste pour l’environnement. Laval a
notamment dévelopun programme de compensation des gaz à effet de serre
(GES) par l’achat de crédits de carbone lors de la construction de projets rési-
Protection des milieux humides : le paradoxe de Laval
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Actualités sur l’eau
dentiel, commercial ou institutionnel. Une politique similaire a
également été développée pour pallier la problématique de la
surverse des eaux et la protection des milieux humides. Largent
recueilli est investi dans un fonds vert en vue d’éventuels achats
ou de la mise en valeur de milieux naturels.
Laval croit également largement en l’importance de la sensibili-
sation des citoyens aux enjeux écologiques. Par exemple, il y a
plusieurs années, la ville a mis sur pied une campagne de sensi-
bilisation sur les chemins de l’eau, destinée à tous les élèves de
cinquième année du primaire. « Ces élèves sont aujourdhui de
jeunes adultes. Ils sont beaucoup plus sensibilisés à la probma-
tique de l’eau que leurs ais. On peut le constater concrète-
ment puisque leur consommation et leur utilisation de l’eau sont
différentes de celles des autres générations », explique M. Gilles
Benoit, ingénieur au Service de l’environnement de la Ville de
Laval depuis 1989. Plusieurs stratégies sont aussi développées
pour informer la population adulte et la sensibiliser aux enjeux
environnementaux. Des guides sont remis lors de campagnes de
sensibilisation ou de joures porte-ouvertes, en plus d’être di-
sponibles sur le site internet de la ville.
L’envers de la médaille
Malgtous ces efforts, la ville de Laval voit ces derniers milieux hu-
mides menacés. En moins d’un an et demi, le ministère du Dével-
oppement durable, de l’Environnement et des Parcs (MDDEP) a
octro 17 certicats dautorisation permettant à des promoteurs
L’UniversiLaval et l’Institut national de la recherche scientique
(INRS) ont annon la création de l’Institut international de
l’aquaresponsabilité municipale (IIAM). Cet organisme à but
non-lucratif aura comme mission d’encourager les villes du
monde à améliorer leur performance et leur efcience en
matre de gestion de leur ressource en eau an d’en assurer la
renni, le partage et une utilisation équitable.
Source 1 : Création d’un institut de l’aquaresponsabilité
municipale
Source 2 : Pollution des élus veulent une meilleure protection
de l’eau
de remblayer, en toute légalité, 25 des derniers milieux humides
de Laval. Selon le Conseil gional de l’environnement (CRE) de
Laval, six autres demandes dautorisation pour de nouveaux rem-
blayages seraient aujourd’hui à létude au MDDEP, menaçant de
10 à 12 autres milieux humides.
De 2004 à 2010, Laval a connu une perte globale de 104,8 ha
de milieux humides. On estime quil ne reste aujourd’hui que
1 à 1,5% des milieux humides dorigine. Pour Guy Garand,
coordonnateur du CRE, il est incompréhensible que le MDDEP
continue dautoriser des remblayages, d’autant plus que ce ministère
investit beaucoup defforts pour sensibiliser la population face à
l’énorme valeur économique de ces milieux. Le MDDEP avance en
effet que les milieux humidesltrent annuellement pour 185 000$
de nutriments par hectare, en plus de participer à régulation des
eaux pour une valeur de 240 000$ par hectare, sans parler leur
capacité à xer le carbone. « Ce sont donc des millions en ser-
vices publics que le ministère a sacriés irrémédiablement et en
toute connaissance de cause », conclut M. Garand.
La question demeure ouverte : doit-on demander des com-
pensations monétaires pour laltération des milieux humides, ou
simplement interdire leur destruction?
Pour en savoir plus :
Source 1 : Environnement – Laval préconise une démarche globale
Source 2 : Laval – les derniers milieux humides menacés
Source 3 : Québec protège trois îles de Laval
La bonne nouvelle dAGIR! Création dun institut de
laquaresponsabilité municipale
Des dizaines de milliers de personnes (entre 250 000 et 300 000)
ont marché paciquement dans les rues de Montréal le 22
avril 2012, pour brer le 42e jour de la terre. Gaz de schiste,
protection des écosystèmes, protocole de Kyoto, Plan Nord :
toutes les raisons étaient bonnes pour participer au plus grand
rassemblement pour la cause environnementale dans l’histoire
du Qbec!
22 avril 2012 : Une page historique est tournée!
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