Beau titre, donc belle pièce ! La formule n`est pas toujours vraie

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Beau titre, donc belle pièce ! La formule n’est pas toujours vraie, mais
elle est exacte ici. Il y a bien une mante religieuse et une amante
(quelque peu religieuse) dans la nouvelle pièce d’Hugo Paviot, La
Mante, qui fait suite aux Culs de plomb mais qu’on peut découvrir sans
connaître la pièce initiale. (…)
On ne peut pas résumer la pièce de Paviot, car sa trame est celle d’un
mélodrame. Mais l’écriture est celle d’une tragédie qui se place dans
l’ombre de Garcia Lorca et dans l’éclat du grand théâtre espagnol. C’est
d’ailleurs à une double tragédie que l’on assiste. La première interroge
l’art et les artistes. Que dit un tableau ? A quoi sert l’art ? Quels rapports
entretiennent les peintres avec leur temps, avec le pouvoir, avec le
public ? La seconde repose sur l’étouffement de l’individu dans une
société conservatrice telle que l’Espagne d’il y a quelques décennies
dans ses strates catholiques et franquistes. Ce double thème tourne en
hélice. Paviot a lui-même mis en scène son texte comme un tableau clair
obscur. Il n’y a même plus d’objet ou de lieu. Il n’y que de l’obscurité et
de la lumière. Les trois acteurs sont pris par les projecteurs dans des rais
latéraux ou des rayons perpendiculaires. C’est l’épure totale ! A
l’intérieur de cet éclairage pictural, David Arribe est un magnifique
interprète de l’artiste toujours blessé, qui rend coup pour coup à la
douleur de la vie et à celle de peindre : il donne une impressionnante
intensité à ce personnage de crucifié luttant contre sa crucifixion.
Delphine Serina est la muse dans la beauté et la rêverie : elle sait être
l’image et la femme qui est l’avers de cette image. Enfin, Paula Brunet
Sancho est la mère à l’amour mortifère : elle compose une double
représentation du personnage, saisissante dans les deux cas. Tous trois
créent une pièce qui parle de l’art à hauteur d’art.
Gilles Costaz
23 juillet 2016
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