sujets adultes au travail et à l’armée. Ils n’étaient pas utilisés chez
les groupes à haut risque médical.
Les méthodes d’évaluation utilisées, qui montraient des résultats
satisfaisants en termes de pourcentage de séroconversion, ne cor-
respondaient pas aux standards exigés dans les pays industrialisés,
et ces vaccins ne furent jamais acceptés par les autorités de con-
trôle occidentales. Cependant, des essais furent conduits en colla-
boration entre des équipes russes et américaines à partir de 1987
et les résultats confirmèrent que ces vaccins ne produisaient que
peu de réactions secondaires et montraient une efficacité dépendant
du taux d’anticorps préexistants, en général inférieure à celle des
vaccins inactivés correspondants (28). L’évaluation de l’efficacité
d’un tel vaccin a été prouvée à Kaliningrad au cours d’épidémies
naturelles, et a fait apparaître des taux de protection significatifs,
par exemple 52 % chez des enfants de 3-6 ans et 7-14 ans (29).
En outre, il a été observé, dans l’étude de Novgorod en 1993, que
le taux d’infection chez les enseignants non vaccinés et les enfants
non vaccinés était plus faible dans les écoles où le vaccin avait été
administré à une partie des enfants que dans celles où les enfants
avaient reçu un placebo ou un vaccin inactivé (30).
●
●Les vaccins américains. Les études américaines plus récentes
sur les souches temperature sensitive (sensibles à la température)
et cold-adapted (adaptées au froid), plus rigoureuses en ce qui
concerne la méthode d’atténuation du virus et utilisant des critères
plus stricts d’évaluation de la virulence, ont toutefois fait évoluer
le problème, et les souches plus récemment développées ont rem-
placé les vaccins russes.
Dans les années 1960, Massaab, aux États-Unis, a développé la
première souche donneuse par passage répété sur des cellules de
rein de la souche Influenza A/Ann Arbor/6/60 (H2N2) à des tem-
pératures progressivement décroissantes, jusqu’à l’obtention d’un
mutant qui se réplique de façon efficace à 25 °C. Un prototype de
souche Influenza B a été réalisé de la même façon. Ces souches
possèdent plusieurs phénotypes : cold-adapted[ca], temperature
sensitive[ts] (ils ne peuvent se repliquer à la température du corps
humain) et atténués (ils ne provoquent pas de grippe typique chez
les humains). Les réassortants sélectionnés, après réassortiment
de la souche donneuse cold-adaptedavec la souche sauvage circu-
lante, contiennent six segments de la souche donneuse (procurant
les qualités d’adaptation au froid, de thermosensibilité et d’atté-
nuation) et deux de la souche circulante (codant pour l’hémagglu-
tinine et la neuraminidase), ce qui suffit à obtenir une immuno-
génicité et une antigénicité efficaces.
●
●Les risques vaccinaux. Comme tous les vaccins vivants, ils sou-
lèvent plusieurs questions (24) : la stabilité génétique, le portage
du virus vaccinal (d’où découle le risque de transmissibilité inter-
humaine), la recombinaison avec le virus sauvage.
Le haut niveau de stabilité génétique est lié d’une part à la très
faible réplication du virus réassortant, ce qui diminue la probabi-
lité que des mutants apparaissent, d’autre part à la multiplicité des
mutations. La stabilité génétique après réplication chez l’être humain
repose sur les phénotypes ca et ts. Ils impliquent quatre gènes
contribuant aux phénotypes d’atténuation (le gène de la polymé-
rase PA, spécifique du phénotype ca, le gène M, et les gènes PB1
et PB2, indépendants et spécifiques du phénotype ts). Les muta-
tions portant sur ces quatre gènes différents sont acquises après
plusieurs passages cellulaires. Tout cela rend très peu probable
la possibilité de réversions au type sauvage.
Au cours des essais déjà réalisés, il a été montré que, en règle
générale, la moitié des enfants séronégatifs présentaient un por-
tage en faible quantité d’une ou plusieurs souche(s) vaccinale(s)
dans les sécrétions respiratoires. Les sujets séropositifs, enfants
ou adultes, portaient plus rarement le virus vaccinal, la durée du
portage étant habituellement inférieure à dix jours. Avec le vaccin
trivalent vivant atténué, Vesikari (31) a montré un taux de trans-
mission de 1 % chez des enfants en crèche (une souche transmise
– B – pour 98 enfants qui avaient été vaccinés). Les virus réassor-
tants casont peu transmissibles, même chez les enfants et nourris-
sons séronégatifs. Cela est lié à deux propriétés : d’une part, la
maladie symptomatique est rare avec les virus réassortants du por-
tage qui, conservant les caractères ca et ts, ont un risque nettement
diminué d’infectiosité et de transmission ; d’autre part, la quan-
tité de virus présente dans les sécrétions du tractus respiratoire n’est
pas suffisante pour permettre la diffusion aux sujets contact.
La recombinaison du vaccin atténué avec des souches sauvages
est un risque théorique, peu probable et peu dangereux. Il est peu
probable car le virus vaccinal se réplique lentement, sans atteindre
des titres élevés. De ce fait, la probabilité d’infection simultanée
d’une cellule avec des virus de la souche sauvage ou du vaccin
est faible. En outre, la stratégie vaccinale est de protéger avant
la période épidémique, c’est-à-dire avant le moment de forte cir-
culation du virus sauvage. Même si le risque potentiel existe, il est
en réalité peu dangereux, car il contribuerait à rendre sa virulence
au virus vaccinal, c’est-à-dire, au pire, à rendre la vaccination
inefficace. Le problème serait différent en début de pandémie, avec
un virus porteur d’un nouveau sous-type : le vaccin risquerait de
faciliter alors la diffusion de ce virus. Mais l’interférence de répli-
cation du virus sauvage avec celle des réassortants ca pourrait
supprimer la réplication de ce dernier, génétiquement altéré, s’il
existait dans le tractus respiratoire des vaccinés.
Les essais vaccinaux
Ils ont été conduits depuis trente ans chez plus de 10 000 volon-
taires, dont des enfants, avec des vaccins vivants monovalents,
bivalents ou trivalents. Les données accumulées concernent la
tolérance, l’immunogénicité et l’efficacité, en particulier chez les
nourrissons et les enfants. De nombreuses différences (24) existent
entre les vaccins vivants atténués actuels et ceux testés en 1996.
Ils ont été actualisés pour correspondre aux antigènes recomman-
dés par la FDA américaine. Les titres viraux du vaccin actuel sont
plus hauts que dans les essais préliminaires. Enfin, les premiers
essais utilisaient un vaccin administré en gouttes nasales, proba-
blement moins immunogénique que l’administration actuelle par
aérosol nasal. La comparaison des différents essais entre eux est
de ce fait délicate.
DOSSIER THÉMATIQUE
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La Lettre du Pneumologue - Volume VIII - no2 - mars-avril 2005
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