ACTION URGENTE AMR 51/070/2004 – ÉFAI DOCUMENT PUBLIC AU 158/04 Avertissement : Amnesty International défend des individus sans prendre position ni sur leurs idées ni sur les organisations auxquelles ils pourraient adhérer. PEINE DE MORT / PRÉOCCUPATIONS D’ORDRE JURIDIQUE ÉTATS-UNIS (MISSOURI) Raymond E. Wood (h), Blanc, 40 ans ______________________________________________________________________________________________ Londres, le 28 avril 2004 Raymond Wood risque d’être condamné à mort dans l'État du Missouri. Cet homme a des antécédents de troubles psychiatriques graves, et de nombreux éléments tendent à indiquer qu’il était psychotique au moment du crime qui lui est reproché. La Commission des droits de l’homme des Nations unies a exhorté à maintes reprises les pays non abolitionnistes à ne pas infliger la peine capitale aux individus souffrant d'une quelconque forme de maladie mentale. La date du procès de Raymond Wood n’a pas encore été fixée. Le 14 février 2000, la police a été prévenue par téléphone qu’une fusillade était survenue dans une maison située à la campagne, dans les environs de Warrensburg (comté de Johnson, Missouri). La femme qui a donné l’alerte a indiqué que son fils, Raymond Wood, lui avait dit avoir tué sa famille. Elle a ajouté qu’il souffrait de troubles mentaux et était sous traitement. La police s’est rendue à l’adresse indiquée et a constaté que l’épouse de Raymond Wood, Tina Wood, de même que ses six enfants, âgés de dix-huit mois à dix ans, avaient été blessés par balle. Les deux plus jeunes étaient encore vivants, mais les quatre autres et leur mère étaient morts. Raymond Wood a été arrêté sur les lieux du drame. Le même jour, dans la soirée, Raymond Wood a été interrogé au poste de police par deux policiers en civil. L’u n d’eux était un de ses amis proches et exerçait la fonction de ministre laïc dans l’église qu’il fréquentait. C’est ce fonctionnaire qui a mené l’interrogatoire, s’adressant à lui comme il l’aurait fait avec un fidèle à l’église. Raymond Wood a expliqué qu’il avait tiré sur sa femme, puis sur ses enfants, réalisant que ceux-ci souffriraient de la perte de leur mère. Il a ajouté qu’il avait alors retourné l’arme contre lui-même, et a montré aux fonctionnaires des marques d’abrasion et des traces de poudre sur son front. Au cours de l’interrogatoire, Raymond Wood a décrit le « trouble » qu’il avait connu au cours des jours précédant les faits, évoquant des « ricanements » dans sa tête et disant qu’il avait eu « trop de pensées entêtantes ». Son comportement a alors brusquement changé et l’interrogatoire a dû être interrompu. On l’a placé sous surveillance pour l’empêcher de se suicider. Devenu incontrôlable, il a été attaché à une chaise de contention. Il a ensuite été emmené, entravé, dans un hôpital, où il a été établi qu’il souffrait d’une psychose aiguë et d’une dépression majeure, associées à de graves troubles affectifs. Il a été interné contre son gré dans un établissement psychiatrique, où il a passé ces quatre dernières années. En février 2003, l’avocat de Raymond Wood a introduit une requête auprès du tribunal de première instance pour tenter d’obtenir l’annulation de ses aveux. Il a fait valoir que l’on ne pouvait considérer qu’il s’agissait de déclarations volontaires, dans la mesure où son client souffrait de troubles mentaux et où il avait subi une forme de pression, les autorités ayant confié l’interrogatoire à un fonctionnaire qui était son ami et son guide spirituel. Au cours d’une audience, ce policier a déclaré avoir constaté avec préoccupation, lors de l’interrogatoire, que Raymond Wood avait perdu le contact avec la réalité. Il a ajouté que celui-ci était « très perturbé » à l’époque. Des proches de Raymond Wood ont déclaré qu’il avait manifesté des signes de troubles mentaux au cours des jours précédant les homicides. Le 11 février 2000, il s’est rendu avec sa femme dans un établissement psychiatrique, où il a été décrit comme catatonique, psychotique et sous l’influence de pensées délirantes. Une hospitalisation a été recommandée, mais Raymond Wood a décidé, en accord avec son épouse, qu’il rentrerait chez lui et suivrait à domicile le traitement prescrit, qui comprenait un antipsychotique et un antidépresseur. Entre le 11 et le 14 février, son état a continué à se dégrader, et il s’est plaint d’entendre des voix et d’être possédé par le démon. Une psychiatre citée par la défense a déclaré qu’à son avis, Raymond Wood, du fait de sa maladie mentale, ne pouvait avoir renoncé à ses droits de manière volontaire (son droit de s’exprimer en présence d’un avocat, par exemple, ou de garder le silence). Un psychiatre cité par le ministère public a conclu, pour sa part, que Raymond Wood avait renoncé à ses droits de manière volontaire. Toutefois, il a reconnu la validité des éléments indiquant que l’accusé avait traversé une phase psychotique active au cours des jours précédant les homicides, qu’il avait fait une crise lors de l’interrogatoire et que, le matin des f aits, il remplissait toutes les conditions pour être interné contre son gré dans un hôpital. À la suite de l’audience, la juge a estimé que les aveux de Raymond Wood étaient involontaires. Elle a conclu que la police s avait, à l’époque de l’interrogatoire, que le suspect était atteint de maladie mentale, qu’il présentait depuis longtemps de grave s troubles mentaux et qu’il avait déjà effectué des séjours en établissement psychiatrique. Elle a ajouté que les autorités savaient éga lement que Raymond Wood était profondément croyant et répondrait probablement aux questions de celui qu’il considérait c omme un guide spirituel. Elle a déclaré : « Certaines des méthodes employées lors des interrogatoires […] sont tellement choquantes pour un système judiciaire civilisé qu’elles doivent être condamnées. Les méthodes utilisées dans cette affaire, compte tenu des caractéristiques du défendeur, entrent dans cette catégorie. » Le magistrate a alors annulé les aveux. Le ministère public a fait appel de cette décision, mais celle-ci a été confirmée en mars 2004 par la cour d’appel du Missouri. Raymond Wood a effectué son premier séjour en établissement psychiatrique en 1985, et a été interné à de nombreuses reprises par la suite. Il a été établi qu’il souffrait de graves problèmes mentaux depuis 1985, et qu’il présentait actuellement un tr ouble schizoaffectif. Selon la National Alliance for the Mentally Ill (NAMI, Alliance nationale pour les malades mentaux), une organisation américaine, le trouble schizoaffectif « se caractérise par l’association de symptômes relevant de la schizophrénie et d’un trouble affectif (c’est-à-dire de l’humeur). Pour qu’un diagnostic de trouble psychoaffectif puisse être posé, la personne doit présenter des symptômes primaires de schizophrénie (délire, hallucinations, discours désorganisé, comportement désorganisé) au cours d’une période où elle présente également des symptômes de dépression majeure ou un épisode maniaque. » La NAMI s’oppose à l’application de la peine capitale à toute personne souffrant d’une maladie mentale aussi grave. Amnesty International est opposée à la peine de mort en toutes circonstances. À ce jour, 117 pays ont aboli ce châtiment de jure ou de facto. Aux États-Unis, les autorités ont ôté la vie à plus de 900 prisonniers depuis la reprise des exécutions dans ce pays, en 1977. Certains d’entre eux souffraient de troubles mentaux au moment des faits pour lesquels ils ont été condamnés ou au moment de l’exécution. Depuis 1999, la Commission des droits de l’homme des Nations unies adopte chaque année des résolutions exhortant tous les pays non abolitionnistes à ne pas infliger la peine capitale aux individus souffrant d'une quelconque forme de maladie mentale. ACTION RECOMMANDÉE : dans les appels que vous ferez parvenir le plus vite possible aux destinataires mentionnés ciaprès, et que vous rédigerez (en anglais ou dans votre propre langue) en utilisant vos propres mots et en vous inspirant des recommandations suivantes : – reconnaissez la gravité du crime reproché à Raymond Wood et les souffrances qu’il a causées ; – rappelez toutefois que Raymond Wood souffre de longue date de graves troubles mentaux, et que de nombreux éléments tendent à prouver qu’il a traversé un épisode psychotique au cours des jours précédant les homicides et qu’il était en crise le jour où ils ont été commis ; – soulignez qu’après les faits, il a été placé contre son gré dans un établissement psychiatrique, dont il n’est pas sorti depuis quatre ans ; – dites-vous préoccupé par le fait que le ministère public du comté de Johnson ait l’intention de requérir la peine capitale contre cet homme, alors que celui-ci présente de graves troubles mentaux ; – exhortez le représentant du ministère public à ne pas requérir la peine de mort contre cet homme, au nom de la dignité humain e et dans l’intérêt de la réputation du Missouri et des États-Unis. APPELS À : Représentante du ministère public : Mary Ann Young Prosecuting Attorney Office of the Prosecutor 101 W. Market St., Suite 301, Warrensburg Missouri 64093 États-Unis Fax : + 1 660 422 7404 Formule d'appel : Dear Prosecuting Attorney, / Maître, COPIES aux représentants diplomatiques des États-Unis dans votre pays. Vous pouvez également adresser une lettre brève (250 mots maximum) au rédacteur en chef du journal suivant : Letters to the Editor, Kansas City Star, 1729 Grand Bvld, Kansas City, MO 64108 États-Unis Fax : +1 816 234 4940 Courriers électroniques : [email protected] PRIÈRE D'INTERVENIR IMMÉDIATEMENT. APRÈS LE 9 JUIN 2004, VÉRIFIEZ AUPRÈS DE VOTRE SECTION S'IL FAUT ENCORE INTERVENIR. MERCI. La version originale a été publiée par Amnesty International, Secrétariat international, 1 Easton Street, Londres WC1X 0DW, Royaume-Uni. La version française a été traduite et diffusée par Les Éditions Francophones d'Amnesty International - ÉFAI Vous trouverez les documents en français sur LotusNotes, rubrique ÉFAI - IS documents. Vous pouvez également consulter le site Internet des ÉFAI : www.efai.org