La Lettre du Neurologue - vol. X - n° 4 - avril 2006 123
d’équilibre (yeux ouverts [YO] et fermés [YF]). L’analyse des
résultats obtenus mettait en évidence une amélioration de la force
musculaire du quadriceps le plus faible et des ischio-jambiers les
plus forts en concentrique ainsi qu’une amélioration de l’équi-
libre statique YO et YF. L’étude de Robineau et al. (2) confirmait
la possibilité d’un renforcement musculaire des ischio-jambiers
en excentrique sur appareil d’isocinétisme chez 28 patients
atteints de SEP avec des EDSS de 3 à 6 après 12 séances de kinési-
thérapie, mais sans maintien de ce gain en force à 3 mois.
Amélioration fonctionnelle
et amélioration de la qualité de vie
L’étude de Cantalloube et al. (1) montrait, outre l’amélioration des
paramètres analytiques, un gain en vitesse de marche et une cor-
rélation positive entre vitesse de marche et force du quadriceps
et des ischio-jambiers. La mesure d’indépendance fonctionnelle
(MIF) était également déterminée à l’entrée et à la sortie chez les
21 patients, et l’on observait une amélioration significative de
4 points sur la MIF. Cette amélioration correspond à un gain
d’autonomie moyen de 15 minutes par jour, un point en MIF cor-
respondant à 3,7 minutes d’autonomie par jour dans la SEP (3).
Wiles et al. (4) décrivent également un gain significatif sur les
indices de mobilité. Dans cette étude contrôlée randomisée en
cross-over, l’effet de la kinésithérapie sur la mobilité a été éva-
lué chez 40 patients avec un score à l’échelle de Kurtzke inférieur
ou égal à 7,0 (déambulation de plus de 5 mètres avec ou sans aide
technique). Ces patients ont bénéficié de 3 périodes de 8 semaines
de traitement : kinésithérapie au domicile, kinésithérapie en
externe à l’hôpital (2 séances de 45 minutes par semaine), pas de
kinésithérapie, ces périodes étant séparées par un intervalle de
8 semaines. L’ordre des périodes de traitement était déterminé
de façon randomisée. Les évaluations étaient faites la semaine
précédant et la semaine suivant la période de traitement, puis
8 semaines après la dernière période, et portaient sur le critère
principal (index de mobilité Rivermead) et les critères secondaires
(équilibre, marche, fonction du membre supérieur, cognition,
humeur). Le patient et son entourage donnaient également leur
opinion quant aux effets sur la mobilité, la détresse relative aux
conséquences de la mobilité, les chutes. Cette étude mettait en
évidence un effet significativement positif d’une période de
8 semaines de rééducation (2 séances par semaine) sur la mobi-
lité, le bien-être subjectif et l’humeur, par rapport à l’absence de
kinésithérapie, sans différence entre les prises en charge à l’hô-
pital ou en libéral.
Enfin, une communication récente de Lassalle et al. (5) a mis en
évidence l’effet positif d’un séjour de rééducation en centre spé-
cialisé sur les sous-scores physiques de la SEP-59.
QUAND ET OÙ RÉÉDUQUER ?
La rééducation est indiquée dès l’apparition de symptômes
gênants persistants. Romberg et al. (6) ont ainsi mis en évidence
l’efficacité de la prise en charge rééducative pour des patients
avec des scores de 1 à 5,0 sur l’échelle de Kurtzke. Elle est éga-
lement indiquée au décours immédiat d’une poussée (7) ; la seule
limite alors sera la fatigue, qu’il conviendra de respecter en adap-
tant le programme de rééducation. Dans ce dernier cas, la prise
en charge par une équipe pluridisciplinaire a montré sa supério-
rité sur une hospitalisation en milieu neurologique classique (7).
En dehors des poussées, il ne semble pas y avoir de différence
significative entre une prise en charge par un kinésithérapeute
libéral et une prise en charge en externat ou en hospitalisation de
jour (4). Dans notre expérience, cependant, les déplacements hors
du domicile peuvent être source de fatigue ; néanmoins, ils peu-
vent, dans certains cas, être indispensables au maintien d’une vie
sociale a minima, en particulier pour les patients les plus isolés.
En pratique, le nombre réduit d’unités spécialisées et de cabinets
de kinésithérapie se disant aptes à prendre en charge ces patients,
en dehors de tout problème d’accessibilité, rend aléatoire toute
tentative de systématisation de la prise en charge.
COMMENT RÉÉDUQUER ?
Techniques classiques
Les techniques de rééducation utilisées sont les techniques clas-
siques, applicables dans toutes les pathologies neurologiques.
Des étirements des muscles spastiques doivent être réalisés afin
d’éviter des complications musculo-tendineuses et de permettre
aux muscles antagonistes de s’exercer.
Les sollicitations motrices s’aident des séquences de redresse-
ment inspirées de Bobath : à quatre pattes, genoux dressés, en
chevalier servant, debout, etc., chaque étape permettant le travail
des muscles déficitaires et de l’équilibre, sur un mode de plus en
plus complexe, et le travail des perceptions corporelles. Le ren-
forcement musculaire se fait en concentrique (sens de raccour-
cissement du muscle) et en excentrique, mode qui permet d’évi-
ter le renforcement de la spasticité, et uniquement contre
résistance manuelle. Les muscles qui ont besoin d’être renforcés
sont le plus souvent les fléchisseurs des membres inférieurs, et il
convient d’insister sur les ischio-jambiers et le tronc. L’utilisa-
tion de poids comme résistance est à proscrire car elle ne permet
pas une adaptation fine aux signes de fatigue et peut conduire à
un épuisement musculaire.
La rééducation proprioceptive se fait sur des plans instables
(mousses, plateau de Freeman, ballon de Klein), en charge
(debout) ou en décharge (allongé ou assis), et peut s’aider d’un
feed-back visuel (balances, par exemple, pour contrôler la symé-
trie de l’appui).
Ces techniques sont utilisées à des fins fonctionnelles : travail des
transferts, du schéma postural, de la marche.
Techniques plus spécifiques
La cryothérapie à visée antispastique, voire antitremblements
et antifatigue, est souvent proposée aux patients SEP thermo-
sensibles, dont l’état est aggravé par la chaleur (70 % des
patients). Il existe différents modes d’application en services