Correspondances en Onco-Hématologie - Vol. VII - n° 3 - juillet-août-septembre 2012
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Mise au point : avant-propos
raconté à Juliette
Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition
Sous l’égide des
Directeur de la publication:
Claudie Damour-Terrasson
Rédacteur en chef: Pr Noël Milpied
Émissions présentées
par le Dr Alain Ducardonnet
Dr Agnès Guerci-Bresler
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Dr Xavier Leleu Pr Hervé Avet-Loiseau Pr Jean Soulier
CD52 raconté à Juliette
M.C. Béné*
* Laboratoire
d'immunologie et faculté
de médecine de Nancy.
L
a découverte de la technologie des
anticorps monoclonaux a permis
de faire de grands progrès dans la
connaissance des molécules exprimées
à la surface des leucocytes, souvent par
des chemins détournés et avec quelques
surprises. CD52 en est un bon exemple…
À la n des années 1970, des chercheurs
de Cambridge, à l’initiative de Herman
Waldmann, ayant connaissance de la
technologie récemment développée au
laboratoire voisin de biologie molé-
culaire par Georges Köhler et César
Milstein, font le projet de développer
des anticorps monoclonaux à partir de
cellules spléniques de rats immunisés
avec des lymphocytes humains.
Leur idée était d’obtenir un anticorps
efcace pour xer le complément et
lyser les lymphocytes, avec comme
objectif d’améliorer les greffes de
moelle osseuse en les déplétant des
lymphocytes T responsables de réactions
du greffon contre l’hôte.
À Noël 1979, ils isolent le premier clone
efcace, une IgM. Puisqu’ils appar-
tiennent au
Department of Pathology
de
Cambridge, ils appellent tout natu-
rellement leur anticorps CAMPATH-1M”.
Tenant ainsi leur molécule, ils réa-
lisent les premiers essais de déplétion
de greffons humains avec succès, dès
les premiers mois de 1980. Rapidement
cependant, les chercheurs se heurtent
au fait que ces moelles déplétées sont
rejetées par certains receveurs, ce qui
suggère qu’il faudrait aussi dépléter
les patients avant la greffe.
Une IgM étant peu efcace pour cet
objectif, ils s’attellent alors à trou-
ver une IgG2b présentant la même
spécificité. Un clone a effectué la
commutation de classe, et ils isolent
CAMPATH-1G.
Cette fois, c’est la partie murine de
l’anti corps qui est reconnue par le
système immunitaire des patients et
conduit à son élimination. La solution
serait de fabriquer une molécule huma-
nisée pour toute sa partie constante, ne
gardant que la spécicité du CAMPATH
murin.
Justement, Sir Gregory Winter, qui tra-
vaille aussi à Cambridge, vient de trou-
ver un moyen de modier ainsi les
anticorps monoclonaux. Dans l’équipe
de Waldmann, c’est Mike Clark qui, na-
lement, réussit à préparer CAMPATH-1H,
une IgG1 humaine portant le paratope
de CAMPATH. Cet anticorps est depuis
devenu l’alemtuzumab, son suffixe
"zumab" témoignant du fait qu’il s’agit
d’un anticorps monoclonal (mab) huma-
nisé (zu).
Cette histoire est déjà très jolie
par elle-même, mais, Juliette, ne te
demandes-tu pas ce que reconnaît ce
fameux CAMPATH ? Bonne question !
Effectivement, la saga ne s’arrête pas là.
C’est Geoffrey Hale et Meng-Qi Xia qui
essayent, au sein de l'équipe de Herman
Waldmann, de trouver ce que recon-
naît CAMPATH, mais il faudra attendre
l’atelier international de nomen clature
des anticorps mono clonaux (
Human
Leukocyte Differentiation Antigens
[HLDA]) en 1989 pour que CAMPATH
arrive avec un numéro provisoire,
CDw52”. Trois anticorps de chez Herman
Waldmann et un de chez Alain Bernard,
en France, sont testés dans cet atelier,
Correspondances en Onco-Hématologie - Vol. VII - n° 3 - juillet-août-septembre 2012
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Mise au point : avant-propos
raconté à Juliette
dont les résultats sont publiés à l’issue
de la réunion de Vienne. Et c’est nale-
ment à Boston, en 1993, que CD52 gagne
ses titres de noblesse et est intégré of-
ciellement dans la nomenclature des CD,
avec ses caractéristiques moléculaires.
Qu’a-t-on appris, alors, de cette mo-
cule ? Eh bien, des choses étonnantes !
En particulier que c’est un des plus
petits antigènes de différenciation, avec
seulement 12 acides aminés dans sa
forme mature générée à partir d’une
préprotéine de 37 acides aminés. Cette
toute petite molécule (GQNDTSQTSSPS,
ou plus précisément Gly-Gln-Asn-
Asp-Thr-Ser-Gln-Thr-Ser-Ser-Pro-Ser)
n’est pas transmembranaire, mais est
xée dans la double couche phospho-
lipidique de la membrane cellulaire
par une liaison glycéro-phosphatidyli-
nositol
(gure 1)
. Elle appartient à une
toute petite famille de molécules simi-
laires qui comporte CD24 (antigène de
difrenciation des lymphocytes B et
des polynucléaires) et une molécule
présente seulement chez la souris, appe-
lée HSA
(Heat Stable Antigen)
ou J5. La
masse moculaire de ces antigènes
de différenciation est de 8 à 9 kDa,
mais, de par la présence d’un site de
N-glycosylation, elles ont 25 à 29 kDa
de masse apparente. Cette glycosyla-
tion importante n’interfère pourtant pas
sur l’immunogénicité, car les anticorps
(dont CAMPATH) reconnaissent le core
peptidique.
Le gène qui code CD52 est sur le chro-
mosome 1 (1p36) et comporte 2 allèles
présentant 2 bases de différence, n’in-
duisant pas de différence phénotypique.
Il existe 2 formes, RI et RII, qui dif-
fèrent essentiellement par leurs résidus
carbohydrates et leur phosphatidylino-
sitol
(gure 1)
.
Sur les lymphocytes, la densité d’ex-
pression de CD52 est d’environ 5 105
molécules par cellule, ce qui génère un
signal fort en cytotrie. CD52 est aussi
exprimé sur les monocytes, mais pas sur
les polynucléaires ni sur les cellules
CD34+
(gure 2)
. Il a été rapporté une
expression sur les éosinophiles et sur
des sous-populations de cellules den-
dritiques, notamment les cellules de
Langerhans de la peau.
Figure 1. Structure de CD52 et de sa liaison glycéro-phosphatidylinositol.
En gris : carbohydrate de N-glycosylation ; en vert : peptide de 12 acides aminés ; en rouge et bleu : structure de la liaison
glycéro-phosphatidylinositol.
R3 : résidu palmitoyl seulement dans la formeII
R1 et R2 : résidus stéaroyl dans la formeI, arachidonoyl et stéaroyl dans la forme II
H2N-Gly-Gln-Asn-Asp-Thr
Ser-Pro-Ser-Ser-Thr-Gln-Ser
HNEt-PO4
PO4
EtNH2
PO4
H4C-CH-CH2
OR3
OR1
R3O
Mannα1-2Mannα1-6Mannα1-4GlcNH2α1-6Inositol
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CD52 raconté à Juliette
De façon plus étonnante encore,
l’expression de CD52 est décrite dans
le tractus génital masculin
(gure 3)
!
Cette molécule est sécrétée par les
cellules épithéliales de l’épididyme
distal, du canal déférent et des vési-
cules séminales. Les spermatozoïdes se
retrouvent ainsi “recouverts de CD52, et
cette cible potentielle d’immunisation
contraceptive fait l’objet de beaucoup
d’investigations… en dehors de l’onco-
hématologie !
Figure 3. Spermatozoïdes CD52+ après passage dans le
liquide séminal (d’après Kirchoff et Schreuter, CTO 2001).
Figure 2. Expression de CD52 sur les cellules hématopoïé-
tiques. Les polynucléaires neutrophiles apparaissent en
rouge, les cellules immatures en bleu. Les cellules CD52-
positives sont les lymphocytes (violet) et les monocytes
(en vert).
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