fonctions précises au sein du tissu. Parallèlement, cette spécialisation cellulaire s’accompagne de la perte des capacités inhérentes aux cellules souches (prolifération, multipotence). On parle de « différenciation » car chaque population cellulaire produite est distincte des autres et facilement identifiable par ses caractéristiques moléculaires et morphologiques, autrement dit son phénotype. La synthèse protéique au cœur de l’identité cellulaire. Notre équipe s’intéresse à l’identification des CITs dans les cancers colorectaux. Confrontés aux limites imposées par la variabilité phénotypiques des CITs nous avons décidé de nous intéresser aux acteurs façonnant le phénotype des cellules : les ribosomes. Ceux-ci produisent les protéines, matière première de l’architecture cellulaire, en « traduisant » les instructions encodées dans le support de l’information génétique cellulaire, l’ADN. Toute transformation cellulaire requiert une augmentation sensible de l’activité ribosomale, nécessaire a la production de protéines permettant l’acquisition de nouvelles fonctions cellulaires. Or, cette hausse d’activité traductionnelle est détectable alors même que la cellule initie son changement d’état, précédant Les cellules souches saines engendrent l’ensemble des cellules spécialisées propres à chaque tissu en se différenciant. Chaque étape de ce processus produit des intermédiaires cellulaires facilement identifiables par leur phénotype. La dédifférenciation par « plasticité » produit des intermédiaires cellulaires au phénotype dynamique et instable. ʻʻ Produco Ergo Sum ʼʼ (1) Une nouvelle approche pour isoler les cellules initiatrices de tumeur De par sa capacité à recréer une tumeur identique à l’originelle, la « cellule initiatrice de tumeur » (CIT) est rapidement devenue la Némésis des thérapies anti-cancéreuses. Cependant, ce véritable caméléon cellulaire échappe aux méthodes classiques de caractérisation des cellules. L’équipe de J. Pannequin propose de contourner ce problème en étudiant directement la machinerie forgeant l’identité cellulaire : les ribosomes. Une tumeur est constituée de nombreuses populations cellulaires. Parmi celles-ci, une fraction minoritaire possède la dangereuse capacité de proliférer et de reconstituer l’ensemble de la tumeur: ces cellules sont appelées « cellules souches cancéreuse » ou « cellules initiatrices de tumeur» (CITs). Résistantes aux traitements de chimiothérapies, les CITs sont directement impliquées dans l’émergence de récidives tumorales et la formation de foyers métastatiques. Par ailleurs elles sont retrouvées dans de nombreux cancers (colon, sein…) et leur présence est souvent associée à un mauvais pronostic médical. Leur caractérisation est donc devenue indispensable afin de mettre en place des stratégies thérapeutiques favorisant leur éradication. Résistantes aux chimiothérapies, les CITs pourraient bien être une cause majeure de récidive tumorale. Différenciation et plasticité cellulaires : comment démasquer une cellule caméléon ? A l’instar des cellules souches classiques, les CITs sont multipotentes, ce qui implique qu’elles peuvent produire l’ensemble des types cellulaires propres au tissu originel. Ce processus se réalise en plusieurs étapes, au cours desquelles la cellule acquiert des compétences qui lui permettront de remplir des Cependant, dans un contexte tumoral, un mécanisme antagoniste déstabilise ce système de classification: « la plasticité ». Celle-ci permet aux cellules différenciées de régresser vers un stade plus primitif, et de recouvrer les capacités de prolifération et d’initiation tumorale. Cette dynamique bidirectionnelle confère un phénotype variable aux CITs. En conséquence, l’identification des cellules tumorales sur la base de leur aspect physique n’est plus applicable. Bien au contraire, elle peut même prêter à confusion. La mise en place de nouvelles approches, plus dynamiques, est, à l’heure actuelle, devenue indispensable. ainsi toute modification morphologique ou moléculaire observable. De ce fait, l’activité ribosomale représente un indicateur précoce de transition cellulaire, pouvant discriminer, parmi des Multipotence : capacité d’une cellule à se différencier en tous les types cellulaires appartenant au même tissu. Génotype : ensemble de l’information génétique portée par un individu ou une cellule. Phénotype : ensemble des caractères observables chez un individu ou une cellule. cellules présentant un phénotype similaire, celles en cours de transformation. L’activité traductionnelle, un marqueur diagnostique prometteur. Les CITs, comme toute cellule souche, ont une faible activité traductionnelle. Or, celle-ci s’accroit considérablement lorsque les CITs entrent en phase de différenciation. Les ribosomes doivent alors produire les protéines nécessaires à leurs transformations physiques et fonctionnelles. En collaboration avec le National Institutes of Health (U.S.A.), nous travaillons sur une technique permettant d’identifier les cellules sur la base de leur activité traductionnelle dans les tissus vivants. Nous souhaitons utiliser cette méthode afin d’identifier les CITs au sein de l’environnement tumoral. Ce type d’approche est totalement novateur dans le domaine du cancer. A long terme, l’activité traductionnelle pourrait devenir un marqueur diagnostique permettant d’adapter les thérapies et le suivi postthérapeutique en fonction du contenu de la tumeur en CITs. Cancer du côlon: Cellules Initiatrices de Tumeurs et machinerie traductionnelle Institut de Génomique Fonctionnelle Alexandre DAVID (1) « Je produis donc je suis » L’information génétique contenue dans l’ADN est transcrite sous forme d’ARN messager (ARNm), puis transportée vers les ribosomes qui la traduisent en protéines. En contrôlant la quantité et la nature des protéines produites, les ribosomes façonnent le phénotype cellulaire en temps réel.