Origine de la vie 1
Origine de la vie
Cet article est consacré aux origines de la vie d'un point de vue scientifique. Les aspects mythiques et religieux sont
traités dans l'article Cosmogonie. La précédente théorie scientifique de l'origine de la vie est traitée dans l'article
génération spontanée.
Les origines de la vie sur Terre demeurent incertaines. Cependant, de nombreuses th€ories scientifiques existent
pour expliquer l'apparition de la vie, telle que nous la connaissons aujourd'hui, dont on pense qu'elle remonte •
environ 3,5 • 3,8 milliards d'ann€es.
Cet article traite des €v€nements ant€rieurs • l'apparition des trois grandes lign€es du vivant.
Stromatolites du pr€cambrien, dans la formation de
Siyeh. En 2002, William Schopf a affirm€ que ces
formations €taient ‚g€es de 3,5 milliards d'ann€es, elles
seraient alors les plus anciennes traces de vie sur Terre.
Stromatolites dans la Baie Shark (Australie).
L'apparition de la vie
John Maynard Smith et Eƒrs Szathm„ry d€finissent huit transitions
majeures de l'€volution, dont trois concernent l'apparition de la vie
:
1.1. Transition depuis des mol€cules autor€plicantes vers une
population de mol€cules dans un compartiment isol€ ;
2. Passage de r€plicateurs ind€pendants aux chromosomes ;
3. Transition d'un monde • ARN o… ce dernier joue le r†le de
g€nome et d'enzyme • un monde • ADN et prot€ines.
John Desmond Bernal, quant • lui, sugg‡re les trois €tapes
suivantes :
1. Apparition de monom‡res organiques,
2. Transitions vers des polym‡res organiques,
3. Evolution depuis des mol€cules vers la cellule.
De fait, il n'existe pas de mod‡le ˆ standard ‰ pour d€crire l'origine
de la vie. Cependant le mod‡le le plus couramment accept€ est
fond€ sur l'enchaŠnement suppos€ des €v€nements suivants :
1.1. Des conditions pr€biotiques plausibles entraŠnent la cr€ation de
mol€cules organiques simples qui sont les briques de base du
vivant.
2. Des phospholipides forment spontan€ment des doubles couches
qui sont la structure de base des membranes cellulaires.
3. Les m€canismes qui produisent al€atoirement des mol€cules
d'ARN (acide ribonucl€ique), en mesure d'agir comme des ARN-enzymes capables, dans certaines conditions tr‡s
particuli‡res, de se dupliquer. C'est une premi‡re forme de g€nome, et nous sommes alors en pr€sence de
protocellules.
4. Les ARN-enzymes sont progressivement remplac€es par des prot€ines-enzymes, gr‚ce • l'apparition des
ribozymes, ceux-ci €tant capables de r€aliser la synth‡se des prot€ines.
5. L'ADN apparaŠt et remplace l'ARN dans le r†le de support du g€nome, dans le m‹me temps les ribozymes sont
compl€t€s par des prot€ines, formant les ribosomes. C'est l'apparition de l'organisation actuelle des organismes
vivants.
Les €tapes 2 et 3 sont parfois invers€es, l'isolement en compartiment €tant alors pr€sent€ apr‡s l'apparition des ARN
autor€plicants.
Origine de la vie 2
L'origine des molécules organiques
Une explication : la condensation sur surfaces minérales
Cristaux de pyrite
L'assemblage de petites mol€cules (comme les acides amin€s) en
macromol€cules (comme les prot€ines) n€cessite l'€limination de
mol€cules d'eau. Or, la thermodynamique indique qu'il est d€favorable
de r€aliser une telle condensation dans l'eau elle-m‹me. Il est possible
pour r€soudre cette contradiction de faire appel • des surfaces
min€rales, comme les micas, les argiles ou les pyrites. L'adsorption des
petites mol€cules sur ces surfaces les concentre et les modifie
chimiquement, ce qui peut rendre la formation de macromol€cules plus
favorable.
L'argile, par exemple, se trouve tr‡s abondamment sur Terre et est
constitu€e d'un empilement de couches fines. Entre les diff€rentes
couches de l'argile peuvent se glisser certaines petites mol€cules organiques, ce qui permet une adsorption
importante. L'argile est aussi un catalyseur tr‡s efficace pour de nombreuses r€actions organiques, et aurait donc pu
permettre la polym€risation des acides amin€s et/ou des acides nucl€iques. Le chimiste anglais Graham Cairns-Smith
a d€velopp€ cette hypoth‡se dans Seven clues to the origin of life en 1985 (traduction franŒaise : L'énigme de la vie,
1990).
L'expérience Urey-Miller et l'origine des molécules organiques
En 1953, Stanley Miller, accompagn€ de Harold Urey, a voulu reproduire les conditions de la Terre primitive. Ils ont
enferm€ dans un ballon des gaz (m€thane CH4, ammoniac NH3, hydrog‡ne H2 et eau H2O) et soumis le m€lange •
des d€charges €lectriques pendant sept jours.
Ils ont obtenu des mol€cules organiques, les briques du vivant, et notamment de l'ur€e (CON2H4), du formald€hyde
(H2CO), de l'acide cyanhydrique (HCN), des bases et des acides amin€s (AA), certains compos€s €tant pr€sents •
plus de 2 %.
Miller et Urey ont utilis€ une atmosph‡re r€ductrice et non pas une atmosph‡re oxydante. Depuis l'exp€rience a €t€
refaite plusieurs fois, en variant la composition de l'atmosph‡re et la source d'€nergie (utilisation du rayonnement
ultraviolet notamment). Cependant, une atmosph‡re moins r€ductrice (dioxyde de carbone CO2, azote N2, eau H2O)
qui provient du volcanisme donne de tr‡s mauvais rendements.
L'exploitation de l'idée de Miller
Suite aux exp€riences de Miller, il a fallu d€terminer les r€actions chimiques qui se sont produites dans l'enceinte (le
ballon dans lequel il avait enferm€ les diff€rents gaz). Ainsi est n€e la chimie organique dans l'eau.
Ces r€actions n€cessitent de fortes concentrations, des domaines de temp€rature et de pH tr‡s €troits qui font que ces
m€canismes sont tr‡s peu probables : une mare en voie d'ass‡chement pourrait peut-‹tre expliquer les fortes
concentrations.
L'exp€rience fut • l'€poque tr‡s critiqu€e • cause de cela. De plus, sa fiabilit€ a €t€ remise en cause car les mol€cules
organiques obtenues pourraient a priori provenir d'une contamination ext€rieure. (?) Une contamination ext€rieure
est toutefois improbable pour les raisons €voqu€es ci-apr‡s.
En outre, la pr€sence d'hydrog‡ne (libre) dans l'atmosph‡re primitive est possible, mais seulement en concentration
r€duite (de l'ordre du 1/100 de % ; ~100ppm ?) car compte tenu de la masse de la Terre et de la force de gravitation
qui en r€sulte, l'hydrog‡ne est tr‡s mal retenu vis-•-vis du vent solaire.
Une des sources d'hydrog‡ne (libre) primitive aurait pu ‹tre les gaz volcaniques rejetant l'hydrog‡ne issu de la
r€action de l'eau des roches avec des compos€s r€ducteurs, comme le fer des m€t€orites incorpor€ aux roches du
Origine de la vie 3
sous-sol. En effet, • plusieurs centaines de degr€s, l'eau interstitielle des roches peut r€agir avec le fer (thermolyse),
mais aussi par corrosion galvanique, donnant des oxydes de fer (se m‹lant aux roches) et de l'hydrog‡ne. Cet
hydrog‡ne produit peut aussi r€agir avec des compos€s carbon€s, comme le dioxyde de carbone, (ou bien aussi
l'azote ?) pour donner des formes r€ductrices, comme le m€thane (ou l'ammoniac).
L'expérience de Powner-Sutherland et l'origine des nucléotides à base pyrimidique
En 2009, Sutherland et son €quipe[1] sont parvenus • €tablir une voie de synth‡se des nucl€otides • base pyrimidique,
l'acide uridylique et l'acide cytidylique. Les chercheurs butaient sur cette voie de synth‡se pr€-biotique depuis 40 ans
en raison de la difficult€ • trouver la bonne faŒon de lier le ribose • la base azot€e. La cl€ de cette voie est de passer
par un pr€curseur commun au ribose et la base azot€e. Ce pr€curseur, le 2-aminooxazol, est obtenu • partir de
mol€cules organiques €l€mentaires : le glyc€rald€hyde, le cyanamide, le cyanoac€tald€hyde, le cyanoac€tyl‡ne et le
phosphate inorganique. Le m€lange r€actionnel aliment€ par de l'azote gazeux est soumis • un cycle de
chauffage-refroidissement afin de simuler le cycle d'€vaporation d'une mare par le rayonnement solaire et
l'alimentation par la pluie. Apr‡s une semaine le 2-aminooxazol s'accumule dans le r€acteur. Le pr€curseur se
transforme ensuite en ribose et cytosine li€s ensemble. Le phosphate est ensuite ajout€ au milieu r€actionnel en
pr€sence d'UV durant trois jours (l'absence d'ozone dans les conditions pr€-biotiques engendrait un bombardement
intense d'UV). L'acide cytidylique se synth€tise sous l'effet du rayonnement UV et quelques nucl€otides portant une
cytosine se transforment en acide uridylique. Pour les deux autres nucl€otides, l'€quipe de Sutherland travaillait sur
un pr€curseur commun aux acides nucl€iques • base purique.
Asymétrie des biomolécules
L'Alanine, un acide amin€ existant sous une forme l€vogyre (L-Ala) ou
dextrogyre (D-Ala).
Les mol€cules ˆ chirales ‰ sont des mol€cules
pouvant exister sous deux formes possibles : l€vogyre
(gauche) et dextrogyre (droite), de la m‹me faŒon
que la main gauche et la main droite sont l'image
sym€trique l'une de l'autre. On appelle €nantiom‡res
ces diff€rentes formes.
Une analyse pouss€e des mol€cules obtenues dans
l'exp€rience de Miller montre que l'on obtient un
m€lange rac€mique de mol€cules (autant de formes
droites que de gauches), alors que l'on sait depuis le
milieu du XIXe•si‡cle (notamment avec des travaux
de Pasteur en 1847) que les acides amin€s naturels
n'existent pratiquement que sous une de leurs deux formes €nantiom‡res (on parle alors d'homochiralit€) : la forme
l€vogyre.
On a cependant retrouv€ des traces d'acides amin€s dextrogyres sous forme libre, dans des peptides ou m‹me des
prot€ines. Ces formes, peu fr€quentes, auraient par ailleurs des fonctions physiologiques. Dans le monde vivant, on
constate cependant que les sucres pr€sents dans l'ADN sont uniquement de type dextrogyre, ou que les agents de
saveur ont un goŽt diff€rent selon leur forme.
Origine de la vie 4
Théories sur l'origine de l'homochiralité
Il existe deux grandes cat€gories de th€ories expliquant l'homochiralit€ : les th€ories biotiques et les th€ories
abiotiques.
Dans la premi‡re, on postule que la vie serait apparue • partir d'un m€lange d'€nantiom‡res, et que l'homochiralit€ ne
serait apparue que progressivement au cours de l'€volution. Selon Laurent Nahon, ce type de th€orie n'est cependant
plus beaucoup soutenu, du fait que l'on a d€couvert que les prot€ines ne peuvent se replier correctement si les acides
amin€s qui les composent ne sont pas chiraux. On estimerait donc que l'homochiralit€ serait plut†t ant€rieure •
l'apparition de la vie, ce sont les th€ories abiotiques.
Cristaux et énantiomères
Les propri€t€s des cristaux permettent d'imaginer un sc€nario : certains cristaux inorganiques exposent des faces
poss€dant une chiralit€ intrins‡que, comme la calcite ou le quartz. Ces faces pourraient adsorber pr€f€rentiellement
une des deux formes €nantiom‡res et donc la concentrer s€lectivement aux d€pens de l'autre[2]. Cependant, rien
n'indique que les cristaux aient pu jouer un r†le dans la formation de mol€cules organiques.
Asymétricité et thermodynamique
Il a €t€ d€couvert que la mati‡re est intrins‡quement asym€trique. ˆ Lorsque l'on place des atomes de cobalt dans une
g€om€trie asym€trique, c'est-•-dire dans des champs magn€tiques, les €lectrons produits de la d€sint€gration de
neutron se d€placent toujours dans la direction oppos€e • leur spin (align€ sur le champ). Les €lectrons sont donc
intrins‡quement gauches. ‰ Cette exp€rience de Tsung Dao Lee et Chen Ning Yang qui reŒurent le prix Nobel en
1957 peut ‹tre reproduite avec n'importe quel atome. Un gaz de vapeur de c€sium par exemple dans un champ
€lectromagn€tique a un pouvoir rotatoire. C'est ce sur quoi a travaill€ Marie-Anne Bouchiat•(de), directrice de
recherche CNRS • l'ENS. Ce ph€nom‡ne est facilement observable sur les atomes lourds car la force mise en jeu est
la force d'interaction faible entre le noyau et l'€lectron.
Ainsi il a €t€ calcul€ que les acides amin€s naturels sont thermodynamiquement plus stables que leur image dans un
miroir.
Formation d'énantiomères dans l'espace
Une m€t€orite
Dans les ann€es 1970, des acides amin€s ont €t€ d€couverts dans la
m€t€orite de Murchison, or, ils €taient pr€sents majoritairement sous
leur forme l€vogyre. On a ainsi d€couvert 70 acides amin€s diff€rents,
dont 3 seulement font partie des 20 acides amin€s naturels. Le
pourcentage exact de mol€cules l€vogyres est cependant beaucoup
discut€, du fait d'€ventuelles contaminations, et varie entre 50 % et -5
% suivant les €quipes de recherche.
L'id€e que l'homochiralit€ aurait pour origine des mol€cules venues de
l'espace s'est donc d€velopp€e.
Les €nantiom‡res absorbent diff€remment la lumi‡re lorsque celle-ci
est polaris€e ˆ circulairement ‰ droite ou gauche. Or, ces mol€cules se d€gradent apr‡s absorption, conduisant donc •
un exc‡s d'une forme €nantiom€rique.
Origine de la vie 5
La n€buleuse d'Orion
On a d€couvert, en 1997, que la n€buleuse d'Orion produit de la
lumi‡re polaris€e circulaire • 17 % dans l'infrarouge (IR). L'infrarouge
n'a pas assez d'€nergie pour casser des liaisons covalentes, mais on
peut supposer que les ultraviolets (UV) sont €galement polaris€s
circulairement.
Une exp€rience men€e en 2005 a montr€ qu'un m€lange rac€mique
dun acide amin€ simple irradi€ par un rayonnement UV conduit • un
m€lange homochiral. Dans cette exp€rience, la leucine est utilis€e •
l'€tat solide, reproduisant les conditions spatiales. Apr‡s une irradiation
par un rayonnement synchrotron polaris€ circulairement droit (proche
de la longueur d'onde observ€e dans l'espace, dans l'UV lointain), l'exp€rience permet d'obtenir un exc‡s de
l'€nantiom‡re l€vogyre de 2,6 %.
Or, il suffit d'un exc‡s de 1 % dans des r€actions qui s'entretiennent pour conduire • un m€lange homochiral de 100
%. D'apr‡s Laurent Nahon, aucune exp€rience li€e • des th€ories concurrentes n'est parvenue • un tel exc‡s.
Des molécules organiques aux protocellules
Sch€ma d'une cellule animale.
Aujourd'hui, de nombreux mod‡les r€solvent le probl‡me de
l'apparition des mol€cules organiques. Les scientifiques arrivent •
produire de nombreuses petites mol€cules biologiques (acides amin€s,
sucres, bases nucl€iques) dans des conditions pr€biotiques en
laboratoires.
Les exp€riences de Miller et les mod‡les qui en sont d€riv€s ne
fournissent pas d'explication sur les €tapes suivantes qui incluent la
transition des monom‡res aux biopolym‡res, puis aux protocellules et
finalement aux cellules vivantes ayant un m€tabolisme de base. Aussi
les scientifiques ont explor€ d'autres voies de recherche.
Vésicules lipidiques
L'apparition de v€sicules dont la membrane serait form€e de phospholipides pose de s€rieux probl‡mes car ces
lipides n'€taient pas pr€sents sur la Terre primitive. Cependant des mol€cules amphiphile plus simples ont pu ‹tre
synth€tis€es de mani‡re abiotique dans des conditions particuli‡res. Par exemple il est reconnu que les sources
hydrothermales ('mont hydrothermal') sont des environnements favorables pour des synth‡ses abiotiques
soutenues[3]. A des temp€ratures entre 100• et 400• Celsius des compos€s amphiphile peuvent ‹tre produits par des
r€actions chimiques semblables au proc€d€ Fischer-Tropsch[4]. De fait, la production abiotique de chaines courtes
d'hydrocarbures a €t€ r€cemment d€couverte au niveau du site hydrothermal Lost City situ€ au milieu de
l'Atlantique[5]. Les concentrations millimolaires de m€thane pourraient ‹tre • l'origine des r€actions chimiques
r€ductrices du carbone au niveau de ce type de site hydrothermal[6]. De nombreuses exp€riences ont montr€ que les
v€sicules dont la membrane est form€e de lipides amphiphile sont capables de croŠtre et de se diviser • partir de
l'insertion additionnelle de nouveaux lipides. L'id€e principale de cette th€orie est que la composition mol€culaire
des membranes v€siculaires serait un moyen primitif de stockage d'information, et d'€volution possible vers
l'apparition de biopolym‡res[7] [8]. Les €tudes r€alis€es sur des v€sicules lipidiques se sont limit€es jusqu'•
maintenant • des membranes form€es de un • deux types de compos€s amphiphile. Ces conditions exp€rimentales ne
refl‡tent pas les r€sultats de simulations de r€actions de chimie pr€biotique qui, typiquement, produisent un m€lange
tr‡s h€t€rog‡ne de compos€s[9]. Dans le cadre de cette hypoth‡se d'une membrane form€e d'une bicouche lipidique
compos€e d'un m€lange h€t€rog‡ne de mol€cules amphiphile il existe un nombre consid€rable de combinaisons
possibles pour le positionnement respectif des diff€rents types de mol€cules au sein de la membrane. Parmi toutes
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