La présence de tics verbaux, notam-
ment d’une écholalie (répétition des
mots entendus) ou d’une coprolalie
(prononciation de mots orduriers), doit
faire évoquer le diagnostic de SGT. Les
tics à type de raclements de gorge ou de
toux ne sont pas des éléments évoca-
teurs.
LE SYNDROME DE GILLES
DE LA TOURETTE
DIAGNOSTIC
Le diagnostic de syndrome de Gilles de
la Tourette est clinique. Il est habituel
d’utiliser les critères du DSM IV-TR. Le
tableau II rappelle ces critères. Il est im-
portant de noter que la coprolalie et/ou
la copropraxie, bien que communément
utilisées pour illustrer le tableau clinique
de SGT, sont loin d’être constantes (1 pa-
tient sur 5) [4].
Toutes les formes de SGT ne sont pas sé-
vères. La qualité de vie des patients est
très variable. La corrélation avec la sévé-
rité des tics n’est pas toujours évidente.
La présence de troubles psychiatriques
associés, tels que des troubles obsession-
nels compulsifs, une hyperactivité, un
trouble attentionnel, une hétéroaggres-
sivité ou une autoaggressivité, condi-
tionne également le pronostic. Ces
troubles sont extrêmement fréquents
puisqu’une comorbidité psychiatrique
est retrouvée chez 80 à 90 % des pa-
tients [5]. Il convient donc de les recher-
cher dès que le diagnostic est évoqué.
PRISE EN CHARGE
Il faut tout d’abord donner des informa-
tions et des conseils au patient et à sa
famille : explication de la maladie et de
son pronostic, conseils sur les attitudes
à avoir et les renseignements à donner
dans les différents lieux de vie du pa-
tient (école, collège ou lycée, activités
extra-scolaires, etc.). Un suivi médical
et psychologique régulier est essentiel.
Pour que la prise en charge soit optima-
le, elle doit englober les comorbidités :
TOC, THDA, syndrome dépressif. Il faut
donc rechercher et traiter ces comorbi-
dités systématiquement. On proposera
toujours une prise en charge psycholo-
gique et/ou pédopsychiatrique.
Le suivi par des équipes multidiscipli-
naires permet de proposer une prise en
charge des différents aspects de la ma-
ladie : traitement médical, suivi social,
suivi psychologique, soutien scolaire et
prise en charge des troubles de l’ap-
prentissage…
Un traitement médicamenteux n’est à
discuter que si les tics sont pénalisants
socialement ou entraînent des pro-
blèmes de comorbidités (anxiété, dé-
pression, phobie scolaire…). Il peut re-
poser sur l’aripiprazole ou d’autres neu-
roleptiques comme la rispéridone ou la
pimozide en cas d’échec. Le choix peut
se porter sur un inhibiteur de la recap-
ture de la sérotonine en cas de signes
dépressifs associés ou en cas de TOC.
ÉTAT DES CONNAISSANCES
On a longtemps pensé que le SGT était
un trouble avec une évolution à vie,
mais plusieurs études récentes sont ve-
nues modifier cette idée [5]. Il semble
ainsi que l’intensité des tics diminue au
cours de l’adolescence et que la sévérité
de la maladie au long cours soit liée au
degré d’intensité atteint par les tics au
cours de l’enfance. Si les tics s’amélio-
rent (mais ne disparaissent pas), il ne
semble pas en aller de même pour les
TOC et les autres comorbidités. Cela
reste toutefois à préciser.
Comme nous l’avons vu, l’étiologie du
SGT n’est actuellement pas identifiée.
Différentes hypothèses sont évoquées et
il est possible que plusieurs facteurs
contribuent au SGT : facteurs géné-
tiques, stress anté- ou périnatal, fac-
teurs infectieux ou immunologiques.
CONCLUSION
Le syndrome de Gilles de la Tourette est
maintenant mieux reconnu, mais cette
maladie garde sa part de mystère
puisque sa physiopathologie est encore
ignorée. La prise en charge se fait au
long cours, même si l’évolution n’est pas
monophasique. Elle doit idéalement re-
poser sur une équipe multidisciplinaire
habituée à prendre en charge le SGT et
ses fréquentes comorbidités.
첸
Références
[1] KNIGHT T., STEEVES T., DAY L. et al. : « Prevalence of tic di-
sorders : a systematic review and meta-analysis », Pediatr. Neu-
rol., 2012 ; 47 : 77-90.
[2] GERMINIANI F.M., MIRANDA A.P., FERENCZY P. et al. :
« Tourette’s syndrome : from demonic possession and psychoa-
nalysis to the discovery of genes », Arq. Neuropsiquiatr., 2012 ;
70 : 547-9.
[3] SWEDO S.E., LEONARD H.L., GARVEY M. et al. : « Pediatric
autoimmune neuropsychiatric disorders associated with strepto-
coccal infections : clinical description of the first 50 cases », Am.
J. Psychiatry, 1998 ; 155 : 264-71.
[4] FREEMAN R.D., ZINNER S.H., MULLER-VAHL K.R. et al. :
« Coprophenomena in Tourette syndrome », Dev. Med. Child
Neurol., 2009 ; 51 : 218-27.
[5] ROBERTSON M.M. : « The Gilles De La Tourette syndrome :
the current status », Arch. Dis. Child. Educ. Pract. Ed., 2012 ; 97 :
166-75.
Médecine
& enfance
novembre 2013
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Tableau II
Critères diagnostiques du syndrome de
Gilles de la Tourette (DSM IV-TR)
첸Début avant dix-huit ans
첸Présence de tics moteurs multiples
첸Au moins un tic vocal au cours de l’évolution
첸Tics survenant à de nombreuses reprises au
cours de la journée, presque tous les jours ou
de façon intermittente, sur une période d’un
an ne comportant pas d’intervalle sans tics de
plus de trois mois consécutifs
첸Tics n’étant pas des effets secondaires liés à
une substance ou à une autre maladie
Tableau I
Exemples de tics simples, de tics
complexes et de symptômes évocateurs
d’un syndrome de Gilles de la Tourette
(SGT)
Tics simples :
첸clignements des yeux
첸haussements des épaules
첸raclements de gorge
Tics complexes :
첸séquences motrices
첸gestuelles
Symptômes évocateurs d’un SGT :
첸écholalie (répétition de mots de
l’interlocuteur)
첸coprolalie (phrases ou mots socialement
inacceptables)
첸copropraxie (gestuelle pointant les organes
génitaux)
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