III Comment faire en classe pour que chaque élève soit capable de

III Comment faire en classe pour que chaque élève soit capable de manifester sa compréhension d’un récit
adapté à son âge ?
L’enfant manifeste sa compréhension par la reformulation : échanger, s’exprimer vient en premier dans les programmes car il faut
échanger pour communiquer.
A) L’enfant doit être capable de s’exprimer, de communiquer :
On trouve dans de nombreuses classes maternelles des moments de langage la maîtresse propose par exemple, aux enfants de
décrire ce qu’ils voient sur un beau poster, ou d’imaginer une histoire à partir de ce support. Or on sait que ce genre de situation,
complètement détachée de l’usage courant du langage, désarçonne les enfants qui parlent peu, parce qu’ils ne sont pas habitués à cette
relation au discours, sans enjeu, sans vraie communication, tandis qu’elle favorise les enfants déjà très parleurs et qui sont ravis
d’exercer leur talent.
1. Conditions pour le langage (recherche prog) : pour que les enfants puissent « dire »
Il faut qu’ils soient considérés comme des personnes
Il ne faut pas qu’une prise de parole soit un risque
Il ne faut pas qu’un malaise dû au contexte scolaire les préoccupe au premier chef (exemple Adèle à la cantine)
Ces conditions doivent être une vraie préoccupation du maître car les enfants ne savent pas montrer leur malaise comme le feraient des
adultes. Et lorsqu’ils ressentent un manque de confiance, de respect ou de sérénité, ils se taisent, se mettent en retrait, s’immobilisent,
parfois pleurent. La première chose à faire est donc de se demander si on peut faire quelque chose.
2. Travailler sur la qualité des énoncés oraux :
BENTOLILA : sans réelle maîtrise du langage oral, il n’y a pas d’entrée possible dans le monde de l’écrit
Il n’y a pas de chances réelles d’intégration sociale
Il faut se donner comme objectif ce que BENTOLILA désigne par « lutter contre l’insécurité linguistique », c'est-à-dire
construire un langage explicite et structuré.
NB : « Lorsque les paroles ne portent pas, les coups prennent le relais ». Philippe Meirieu
o Aider les enfants qui sont victimes de l’absence d’une véritable médiation familiale propre à leur faire comprendre ce que parler
veut dire.
3. Des exemples de situations :
Objectif : Favoriser les échanges au sens de « tenir des propos sur », de partage d’expériences en n’omettant pas les devoirs
qu’impose la communication linguistique.
COMPETENCES
EXEMPLES DE SITUATIONS
Produire un oral compréhensible par autrui
Analyse d’un message en situation de communication (tu
sais l’autre jour….)
Relater un événement inconnu des autres. Ajuster son
propos pour se faire comprendre en fonction de questions
ou de remarques
Installation de l’enfant à la table de la négociation
linguistique (exemple emprunté à A. BENTOLILA)
Formuler correctement une demande ou y répondre dans le
champ de la transmission de consignes
Information d’une personne étrangère à l’école
(situation dans la recherche PROG-FORM-INRP)
EXEMPLE 1 « Tu sais l’autre jour, lui, là-bas, il m’a dit que l’autre lui avait volé le truc ».
En grande section d’école maternelle, mais aussi beaucoup plus tard, tout au long de leur scolarité, jusqu’en sixième, certains
enfants sont susceptibles de dire à un adulte qu’ils n’ont jamais rencontré : « Tu sais l’autre jour, lui -bas, il m’a dit que l’autre
lui avait volé le truc ». Aux questions légitimes telles que : « Mais c’est qui il ? C’est -bas ? C’est quand l’autre jour ? »,
l’enfant répond avec irritation : « Mais tu sais bien ! ». Il y a chez cet enfant un étonnement incrédule devant le fait que l’adulte ne
sait pas ce qu’il sait, n’a pas assisté à ce qu’il a vécu et que pour répondre, il ne parvient pas à distinguer ce qui se trouve dans sa
tête. Cet étonnement là, est celui d’un enfant qui n’a pas rencontré, sur le chemin de l’apprentissage de la langue, les médiateurs
attentifs. Il arrive à un point relativement avancé de son cursus scolaire avec l’idée que les seuls indices déictiques (se dit de tout
élément linguistique qui fait référence à la situation dans laquelle il est énoncé : pronom, temps du verbe, démonstratif) que l’on
donne à l’autre suffiront à orienter son regard vers l’expérience qui est évoquée. Pour lui, le message est en quelque sorte un geste
verbal ; un geste qui dit à l’autre : « Parmi tous les spectacles possibles, regarde donc celui-ci plutôt que les autres ». C’est le
regard de l’interlocuteur qui est sollicité afin que, comme par magie, il prenne connaissance de l’image mentale présente dans
la tête de celui qui parle. Cet enfant fait partie de ceux dont la découverte des règles de communication orale s’est effectuée dans
un cercle à la fois étroit et silencieux : l’autre savait d’avance ce que l’on allait dire ou bien était d’une telle indifférence, d’une
telle indisponibilité que « le dire » même perdait tout intérêt.
Considéré dans l’autre sens et rapporté à la compréhension d’un écrit, comment celui qui s’imagine être compris en parlant de la
sorte peut-il comprendre un langage mobilisant une autre syntaxe et un autre lexique ?
Il est nécessaire de concevoir une démarche pédagogique de réhabilitation et de résistance.
Règle des 4 C :
Dresser un constat d’échec avec celui qui a fourni le message.
Identifier les causes et interroger précisément le message (Où se situent les difficultés de compréhension ?)
Créer les conditions de la réussite, c’est à dire s’emparer du message et le transformer.
Dresser un constat de réussite, c’est à dire destiner le message à un autre auditeur qui va attester l’efficacité de la démarche par
sa compréhension.
EXEMPLE 2 : Alain Bentolila « Installer les enfants à la table de la négociation linguistique »
Que signifie médiation familiale ? Prenons un exemple :
« Anton, 5ans, entre chez lui et dit : « Maman la maîtresse nous a raconté une belle histoire » et il raconte la chose suivante : »Ils
l’ont vue, et puis ils l’ont suivie et l’ont attrapée. Elle s’est cachée pour pas qui savent elle était ; malheureusement, ils l’ont
trouvée, ils l’ont enfermée là-bas, les autres l’ont vu, l’ont délivrée et il l’a épousée »
Voilà, la maman est devant son petit Anton qui lui a raconté son histoire et est content comme tout, et elle a trois solutions :
La première solution, c’est de lui dire :
« Anton, elle est formidable ton histoire, va
donc regarder la télévision ! ».
La deuxième solution, c’est de l’arrêter à la
seconde phrase, lorsqu’il a dit : « Pour pas qui
savent » et de le corriger. Ça, c’est la solution
qui consiste à se tromper d’intervention : il était
en train de raconter une histoire et ce n’était
donc pas le moment de faire de la morphologie
grammaticale.
Troisième solution, sa maman lui dit : « Mon chéri, ton histoire est formidable mais je n’ai rien compris ». Si elle adopte cette
solution, qui est la bonne, elle part sur la médiation. En effet, quand elle lui dit : « Je n’ai rien compris », elle lui transmet plusieurs
messages : « Il m’importe de te comprendre, tu ne m’indiffères pas » ; « Je suis ta mère, je t’aime mais je ne suis pas toi, tu es un
être différent de moi » ; « Toi qui as cinq ans, tu sais des choses que je ne sais pas puisque je n’ai rien compris » et, enfin : « La
langue est faite pour dire à des gens qui ne sont pas nous des choses qu’ils ne savent pas encore ».Tous ces messages sont
implicites. Et c’est que la médiation commence car quand la maman dit à Anton : « Je n’ai rien compris », il n’est pas content.
Anton pense que sa mère, par définition, sait tout de lui, qu’elle est « dans sa tête ». Alors, il faut lui expliquer : « Je n’étais pas là
quand la maîtresse t’a raconté l’histoire, donc je ne peux pas savoir » et lui dire ce que vous ne pouvez pas savoir : « Je ne sais pas
qui a suivi qui, a attrapé qui, a enfermé et qui a délivré qui et qui a épousé qui ». Et, petit à petit, Anton va accepter l’exigence
de sa mère, prendre conscience qu’effectivement elle ne pouvait pas comprendre. Il va alors nommer les personnages de son
histoire qui deviendra, ainsi, compréhensible. Anton a, là, effectué un travail sur la langue, tel un ébéniste sculptant un morceau de
bois pour lui donner forme et sens. Et ce travail, il va en voir -et il faut qu’il en voie- la valeur et la récompense, ainsi, quand un
adulte viendra (père ou autre) et qu’Anton lui racontera cette histoire « travaillée », il aura alors la joie considérable que cet adulte
le comprenne immédiatement. Qu’est-ce qu’Anton aura tiré de ce parcours de médiation ? Il aura compris que les efforts qu’il a
faits pour travailler sur la langue, pour mieux maîtriser son langage lui ont permis de gagner un peu de pouvoir sur les autres et sur
le monde. »
EXEMPLE 3 : L’élève adapte son activité langagière au savoir non-partagé par le destinataire
Le maître accueille aussi les initiatives des enfants et leur laisse le plaisir de réfléchir à leur mise en œuvre. Un jour le lapin de
la classe circule en liberté, un enfant se souvient que le monsieur de la Mairie risque d’entrer pour faire des travaux et de blesser le
lapin. La maîtresse dit seulement : « Attention, Panpan se promène dans la classe ». Quand le mot est écrit, elle leur laisse le
soin de dire il faut le placer. Elle le confie à une enfant qui veut le coller bien en vue (pour elle !) sur la porte à l’intérieur de la
classe. Un autre enfant dit : « ah non, ça ne va pas i pourra pas le voir, Jean-Jacques ! » Il reprend le mot et le colle à
l’extérieur, mais un troisième enfant proteste « c’est à l’envers les écritures », et peu à peu la discussion permet de le placer au
mieux. Un enfant dit même « faut le mettre plus haut, parce que les yeux de Jean-Jacques, i sont » (geste). La maîtresse
souligne que c’est une bonne idée de le placer pour celui qui va lire. Un quart d’heure plus tard, Jean-Jacques entre avec précaution
dans la classe et demande « Qui est Panpan ? ». Les enfants sont très étonnés, c’est la première fois qu’ils touchent du doigt la
différence entre ce qu’ils savent, eux et ce que sait le destinataire de leur message.
B) L’enfant doit être capable de comprendre une histoire adaptée à son âge :
1. Principes à retenir :
Suivre les mondes des enfants
Tenir compte de la durée de l’attention des enfants
Choisir des histoires correspondant au niveau de compréhension des enfants
Etre rigoureux dans ce qu’on dit et ce qu’on fait d’un écrit, d’un livre
(remarque IO : Une attention particulière est portée à la compréhension qui, plus que l’expression, est à cet âge
étroitement liée aux capacités générales de l’enfant)
a) Suivre les mondes des enfants :
Les enfants de 2 à 6 ans sont TOUS réellement concernés lorsqu’on leur propose d’évoquer ce qui intéresse.
Les 2 3 ans : souci de retrouver une maman ou un grand frère qui vient les chercher à l’école, inquiétude d’un bébé qui doit arriver
dans la famille, bonheur des activités avec la triade « papa, maman, enfant », jouissance des jeux cognitifs dits réversibles
(cacher/trouver, emplir/vider, empiler/faire tomber, ouvrir/fermer…), recherche insatiable de ce qui est « pareil/pas pareil » dans les
couleurs, les vêtements, les chaussures.
Les 3 4 ans : comprendre la vie, de la naissance à l’âge adulte, les âges et les sexes, le « maintenant/pas maintenant », ranger et
classer en utilisant des critères (du plus petit au grand, par couleur, par usage), déplacer et replacer les personnages dans les maisons,
les garages, les fermes, jouer à faire semblant, au papa et à la maman, réussir à se faire des amis, dessiner et apprendre à dessiner…
Les 4 5 ans : se positionner comme un grand, aider les plus petits et leur expliquer le monde, s’occuper des animaux, construire des
objets complexes, monter et démonter, construire plus haut et plus grand, s’intéresser aux techniques, être plus fort (Zorro) et plus
belle (Barbie), faire partie d’un groupe, inviter les copains, être amoureux ou jaloux, choisir ses émissions de télé, jouer à des jeux à
règles…
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