E Une mutation de GNAS dans un Leydigome responsable d’une hyper-

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Abbréviations :
LH : luteinizing hormone
FSH : follicle-stimulating hormone
TeBG : testosterone-estradiol-binding
globulin
hCG : human chorionic gonadotropin
Référence
1. Fragoso MC, Latronico AC,
Carvalho FM et al. Activating
mutation of the stimulatory
G protein (gsp) as a putative
cause of ovarian and testicular human stromal Leydig
cell tumors. J Clin Endocrinol
Metab 1998;83(6):2074-8.
R em er ci em ents
à tous les
co lla borateurs :
Amato Fratticci, Najiba Lahlou,
François R Jornayvaz, Frédérique
Tissier, Estelle Louiset, Jean
G u i b o u rd e n c h e, A n n i c k
Vieillefond, Marc Zerbib, Jérôme
Bertherat.
L’auteur déclare ne pas avoir
de liens d’intérêts.
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e n d o c r in o lo
g ie
Une mutation de GNAS dans un
Leydigome responsable d’une hyper­
testostéronémie chez un patient âgé
R. Libé*
E
n 2008, un homme de 72 ans a consulté pour
dysfonction sexuelle et une augmentation progressive de la taille du testicule gauche depuis
8 ans. L’examen clinique et l’échographie testiculaire
confirmaient l’augmentation du testicule gauche
(53 × 43 × 23 mm) et mettaient en évidence une
atrophie du testicule droit (30 × 28 × 13 mm). L’IRM a
confirmé l’hypertrophie testiculaire gauche en rapport
avec une tumeur (figure 1A). Une gynécomastie n’était
pas présente. Le bilan hormonal a mis en évidence des
taux très élevés de testostérone (125 nmol/l, normes :
6,6-24,3), d’estradiol (788 pmol/l, normes : 55-239), de
pan-α-inhibine (17 550 pg/ml, normes : 330-710), et des
taux de gonadotrophines indosables (LH : 0,05, normes :
1,4-12 ; FSH : 0,01, normes : 1,6-20). Le reste du bilan
(TeBG, α-fœtoprotéine, β-hCG, PSA) était normal. Le
spermogramme montrait une azoospermie. Le patient a
subi une orchidectomie gauche. Dès la première heure
suivant l'opération les taux de testostérone, d’estradiol
et de pan-α-inhibine étaient en baisse, avec une normalisation complète en 24 heures. L’examen macroscopique
a mis en évidence une tumeur de 5 cm, homogène,
compacte, rougeâtre, compatible avec une tumeur à
cellules de Leydig (figure 1B). L’analyse histologique
a montré des nappes de cellules d’assez grande taille,
à noyau arrondi, nucléolées, avec un cytoplasme acidophile. Dix pour cent des cellules présentaient des
cristaux de Reinke, pathognomoniques des tumeurs à
cellules de Leydig (figure 2A). Il n’existait pas d’atypie
cytonucléaire, ni de mitoses. L’index de prolifération
MIB1 a été quantifié à 5 %. Le diagnostic de tumeur à
cellules de Leydig a été confirmé par l’analyse immunohistochimique : il existait un immunomarquage pour
l’α-inhibine (figure 2B), les enzymes de la stéroïdogenèse,
telles que la 17α-hydroxylase (figure 2C), et l’insulin-like 3
qui est un marqueur des cellules de Leydig (figure 2D).
Nous avons essayé de comprendre l’origine de cette
situation clinique rare (hypertestostéronémie chez
un sujet âgé en rapport avec une tumeur de Leydig)
en recherchant différentes anomalies génétiques au
niveau somatique. Aucune mutation des gènes codant
pour la fumarate hydratase, le récepteur de la LH ou
la phosphodiestérase 11A, qui peuvent être associés
à la tumeur à cellules de Leydig, n’a été retrouvée. En
revanche, une mutation du gène GNAS (R201C) a été
mise en évidence dans le tissu tumoral. Cette mutation
n’était présente ni au niveau du tissu testiculaire normal
adjacent à la tumeur, ni au niveau leucocytaire.
À 6 mois de l’intervention, le bilan hormonal était
normal.
La tumeur à cellules de Leydig est le type histologique
le plus fréquent parmi les tumeurs non germinales.
Chez l’adulte, la gynécomastie, l’oligospermie et la dysfonction érectile sont les signes les plus fréquents, liés
à l’excès d’estrogènes. En revanche, les taux de testostérone sont généralement normaux ou légèrement
réduits. Chez notre patient, les taux élevés d’estradiol
et de testostérone ont provoqué une complète suppression de la sécrétion des gonadotrophines, complètement normalisée après l’intervention. Au niveau
physiopathologique, M.C. Fragoso et al. (1) ont rapporté
des mutations activatrices de GNAS dans 4 tumeurs de
Leydig (1 de type testiculaire et 3 de type ovarien). La
différence majeure entre notre cas et ceux de la littérature est la présentation clinique et le profil hormonal,
en particulier les taux de testostérone élevés associés
à des gonadotrophines indosables.
Ce cas, très original, est celui d’un homme âgé, présentant un tableau clinique et biologique atypique
(hypertestostéronémie et hyperestrogénie sans gynécomastie) en rapport avec une tumeur à cellules de Leydig
due à une mutation activatrice du gène GNAS.
■
Légende
* Service d’endocrinologie,
hôpital Cochin, Paris.
e n…
Figure 1.
A. Résonance magnétique nucléaire : image coronale de
l’hypertrophie testiculaire gauche en hypersignal T2 (flèche).
B. Aspect macroscopique de la tumeur de Leydig qui occupe
quasi entièrement le testicule gauche.
Figure 2.
A. Aspect histologique de la tumeur de Leydig : les flèches
noires indiquent les cristaux de Reinke, pathognomoniques
de la tumeur de Leydig (hématoxyline et éosine ; × 300).
B. Immunohistochimie (IHC) de la tumeur de Leydig : expression cytoplasmique de l’α-inhibine (× 300).
C. Expression de la 17α-hydroxylase (× 100).
D. Expression de l’insulin-like 3 (× 500).
Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XVIII - n° 1-2 - janvier-février 2014
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