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É U N I O N S
IIIe Réunion de la Fédération des Sociétés européennes
de pharmacologie (EPHAR)*
POINT SUR LA PHARMACOGÉNÉTIQUE
ET LA PHARMACOGÉNOMIQUE
Deux symposiums et une conférence plénière portaient sur ce
domaine durant le congrès de l’EPHAR. F. Sjöqvist
(Stockholm, Suède) a exposé les avancées obtenues dans la
compréhension du métabolisme des médicaments dépendant
des cytochromes P 450, en particulier les enzymes qui sont
exprimées d’une manière polymorphe comme les CYP 2D6,
CYP 2C9 et le CYP 2C19. L’auteur a rappelé les nombreuses
études qui ont montré la fréquence de ces mutations dans les
différents groupes ethniques et leur importance fonctionnelle.
Le progrès obtenu grâce à ces connaissances permettra de
mieux prédire, pour les sous-groupes de population, la réponse
à certains traitements tels que les antidépresseurs ou les
neuroleptiques, et de proposer une adaptation posologique
plus performante en termes de rapport bénéfice/risque.
Cependant, l’influence des facteurs environnementaux et des
effets des autres gènes entraîne d’importantes variations interindividuelles pour un même génotype. Le génotypage n’est
donc qu’un outil complémentaire qu’il faut corréler aux différentes procédures de phénotypage comme le dosage des
médicaments et des métabolites, associé ou non au suivi
thérapeutique pharmacologique.
Est-il utile de génotyper tous les patients traités par un médicament, dont la voie principale de métabolisation dépend d’un
CYP exprimé de manière polymorphe, afin de prédire leur
réponse individuelle au traitement ? F. Sjöqvist a répondu en
partie à cette question en dégageant trois indications majeures
de génotypage des enzymes de métabolisme des médicaments :
! identifier les patients métaboliseurs lents afin de prévenir un
surdosage du produit ;
! distinguer les patients métaboliseurs ultrarapides des
patients qui ont une mauvaise compliance au traitement ;
! séparer la part génétique et les facteurs environnementaux
en comparant le génotypage et le phénotypage.
* Lyon, 6-9 juillet 2001.
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La détection des mutations génétiques était de faisabilité
médiocre et souvent limitée à des fins de recherche, car elle
reposait sur des techniques de biologie moléculaire longues,
fastidieuses et coûteuses. Les améliorations récentes obtenues
dans les techniques de génotypage permettront peu à peu de
génotyper les patients dans le cadre de leur suivi thérapeutique.
Deux abstracts présentés au congrès illustrent bien ces
points. Les antivitamines K (AVK), des médicaments à
index thérapeutique étroit, exposent les patients à un risque
de surdosage et d’hémorragie importante. Les mutations du
CYP 2C9, impliqué dans le métabolisme des dérivés coumariniques, pourraient être un des facteurs de risque de surdosage. Une équipe italienne (M.G. Scordo et al., Padoue,
Italie) a présenté les résultats de génotypage chez 93 patients
(57 hommes et 36 femmes) traités par la warfarine. Parmi
ces patients, 31 étaient hétérozygotes (un allèle sauvage, un
allèle muté) et 8 étaient homozygotes mutés (2*/2*
et 3*/3*), dont 3 homozygotes pour l’allèle CYP 2C9*3. Les
auteurs ont également dosé la concentration plasmatique de
la warfarine et le ratio des deux énantiomères S- et R-warfarine pour l’ensemble des patients traités. La grande variabilité interindividuelle du métabolisme de la warfarine et
du ratio des énantiomères était significativement associée à
la présence des deux mutations alléliques. La dose de
warfarine nécessaire pour maintenir l’INR dans la limite thérapeutique est cinq fois plus élevée parmi les homozygotes
sauvages que parmi les homozygotes mutés 3*/3*.
C. Versuyft et al. (Paris) ont montré les résultats du génotypage effectué chez deux patients ayant eu un surdosage en
AVK sans manifestation hémorragique, après l’administration de l’acénocoumarol à une posologie couramment
utilisée lors de l’instauration de traitement (4 mg/j). Les
deux patients étaient homozygotes mutés 3*/3*. C’est la
première observation qui identifie un surdosage important
au traitement par le Sintrom® dès les premiers jours de traitement chez des homozygotes mutés 3*/3*. Le surdosage a
été détecté dès le premier contrôle à 48 heures avec un
INR > 9. L’intérêt majeur de ce travail est de montrer une
nouvelle technique de génotypage qui permettrait d’identifier dans des délais très brefs (< une heure) les mutations
alléliques nécessitant une réduction de la dose et éviter un
surdosage chez ces patients.
La Lettre du Pharmacologue - Volume 15 - n° 10 - décembre 2001
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ESSAIS CLINIQUES
Le recrutement dans des essais cliniques de morbimortalité est
fréquemment réalisé sur une période de temps relativement
longue. Il arrive que certains patients inclus terminent l’essai,
alors que d’autres sont à peine recrutés. Une question qui préoccupe les pharmacologues cliniciens est de savoir comment
réduire au minimum la durée globale de l’étude tout en préservant la rigueur de l’analyse statistique et éviter des erreurs d’interprétation. Une approche classique pour y répondre est de prévoir à l’avance une analyse intermédiaire. Cependant, la responsabilité pour décider l’arrêt définitif d’une étude est majeure,
car cette décision influence non seulement l’étude, mais souvent les autres prévues dans la même indication. Poursuivre
trop longtemps l’étude n’est pas sans conséquence, d’une part
en raison d’une prise de risque inutile pour les patients restants
et, d’autre part, du retard pris dans la diffusion d’une information pertinente pour la communauté scientifique.
Une nouvelle approche pour permettre l’arrêt prématuré de
l’étude, basée sur un test dit triangulaire, a été récemment proposée par J. Whitehead (Reading, Grande-Bretagne). Dans
cette approche, l’hypothèse à prévoir est le nombre global d’événement attendus. Le critère principal de jugement est évalué à des
intervalles fixés avant le démarrage de l’étude. Ces intervalles
peuvent être des dates ou des événements liés au critère principal. Par exemple, pour une étude dont le critère principal est la
mortalité, on comparera la survie dans les groupes, par palier de
10 % du nombre total de décès attendus (10 %, 20 %, etc.).
Lorsque la différence entre les deux traitements dépasse la frontière d’un triangle tracé, l’étude peut être interrompue.
Le test triangulaire prend en compte les risques d’erreur, le
taux d’événement dans le groupe contrôle et un déterminant
d’amélioration sous traitement expérimental appelé θ. Un
nouveau logiciel appelé PEST 4.0 (planning evaluation of
sequential trial) va probablement faciliter son utilisation. Les
frontières du triangle sont corrigées au fur et à mesure des
tests, ce qui permet de maintenir le risque alpha à 5 %
(Whitehead et al. Br J Clin Pharmacol 2001 ; 51 :394-9).
Une présentation de l’équipe Lechat par S. Hulot (Paris) illustrait au congrès de l’EPHAR l’apport de ce test dans l’analyse
des études de grande échelle en prenant l’exemple de CIBIS II,
une étude évaluant les effets du bisoprolol sur la morbi-mortalité chez des patients avec une insuffisance cardiaque chronique stade III et IV. Les données de l’étude ont été analysées
par le test triangulaire de Whitehead et les deux méthodes
d’analyses intermédiaires classiques (Peto, LandeMets).
L’utilisation du test triangulaire aurait permis un arrêt plus précoce de l’étude (536 jours versus 829 avec les méthodes classiques). Ainsi, seuls 180 événements (111 dans le groupe placebo et 69 dans le groupe bisoprolol) auraient été suffisants
pour démontrer l’efficacité du bisoprolol au lieu de 384 événements avec les analyses intermédiaires classiques. Cependant,
l’utilisation du test triangulaire a des limites. Elle nécessite de
s’assurer de l’homogénéité des groupes analysés, ce qui suppose que l’inclusion, et donc la randomisation, soient terminées pour l’ensemble des patients. La véracité des données,
La Lettre du Pharmacologue - Volume 15 - n° 10 - décembre 2001
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notamment pour la survenue des événements, est également
primordiale. Les investigateurs doivent être très entraînés, en
particulier pour une déclaration rapide et exacte des événements survenus au cours du suivi. En effet, les expériences des
grands essais de morbi-mortalité montrent des déclarations des
événements parfois tardives et, surtout, des erreurs de classification des événements, rectifiées par un comité des événements critiques. Une gestion du suivi de l’étude et un monitoring très rigoureux des données sont plus que jamais indispensables si l’on souhaite utiliser le test triangulaire pour l’analyse des résultats et l’arrêt prématuré de l’étude.
Les études évaluant l’efficacité de l’acupuncture sont rares.
P. Boutouyrie (Paris) a présenté les résultats d’une étude randomisée évaluant l'effet de l'acupuncture (A) versus placebo
(P) sur le pouls radial, chez 19 patients régulièrement traités
par l’acupuncture (patients sensibilisés, PS) et chez 8 volontaires sains jamais exposés à l'acupuncture.
L'acupuncture était administrée par un médecin entraîné
à la médecine traditionnelle chinoise et occidentale.
L'implantation des aiguilles était faite soit dans les méridiens
adaptés (acupuncture vraie [A]), soit en dehors (acupuncture
placebo [P]). Le diamètre et l'onde de pouls de l'artère radiale
ont été mesurés par echotracking de haute résolution et tonométrie d’aplanation avant et pendant 20 minutes. Les patients,
les volontaires sains et les échographistes étaient en insu du
type d’acupuncture administré (acupuncture vraie ou implantation des aiguilles en dehors des méridiens adaptés).
Chez les patients déjà sensibilisés, le diamètre de
l’artère radiale augmente significativement en réponse à l’A
(+ 7,5 ± 2,8 %, p < 0,01), en comparaison au P (- 2,9 ± 2,7 %).
En revanche, le diamètre de l’artère radiale reste inchangé chez
les volontaires sains. Dans les deux populations, l’acupuncture ne
modifie ni la pression artérielle, ni l'onde de pression, ni la distensibilité radiale. L’acupuncture a pu par conséquent induire une
vasodilatation objective de l’artère radiale chez les sujets régulièrement exposés à cette thérapeutique. L’exposition préalable joue
peut-être un rôle par elle-même dans la mesure où aucune vasodilatation n'est retrouvée chez les sujets non exposés.
Une étude présentée par E. Autret et al. (Tours) a évalué la
capacité du traitement antibiotique versus placebo à prévenir
l’otite moyenne aiguë dans les 8 à 12 jours du traitement à
l’occasion d’une infection des voies respiratoires chez
203 enfants âgés de 3 mois à 3 ans avec un antécédent d’otites
à répétition. La fréquence des otites était de16,2 % dans le
groupe placebo et de 9,6 % dans le groupe d’enfants traités par
amoxicilline 100 mg et acide clavulanique 20 mg/j (p = 0,28).
La survenue d’événements indésirables était similaire dans les
deux groupes. Ces résultats suggèrent que la supériorité du
traitement antibiotique pour prévenir une otite dans les infections respiratoire n’est pas évidente, et qu’il faudrait inclure
plus de 1 000 enfants si l’on voulait prouver l’équivalence
entre cet antibiotique et le placebo ! Les auteurs estiment donc
nécessaire de réduire la prescription systématique des antibiotiques dans les infections respiratoires supérieures.
187
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AUTRES ABSTRACTS
A. Pathak et al. (Toulouse) ont analysé, grâce aux patients inclus
dans la rétrospective sur le registre MONICA, les prescriptions de
médicaments de 1 159 patients hospitalisés pour infarctus du
myocarde aigu. Seuls 54,8 % des patients recevaient des bêtabloquants. Les facteurs prédictifs de la “non-prescription”
d’un traitement bêtabloquant étaient une pathologie vasculaire
périphérique (RR = 1,82, IC95 = 1,18-2,81), une insuffisance
cardiaque chronique (RR = 2,08, IC95 = 1,31-3,29), et le sexe
féminin (RR = 1,60, IC95 = 1,05-2,43), mais non le diabète
(RR = 1,4, IC95 = 0,7-2,8).
Quelques études ont suggéré une morbi-mortalité plus importante après un IDM chez les patients avec une maladie vasculaire périphérique. Comme précédemment, à l’aide du registre
MONICA, l’équipe toulousaine a analysé les différences de
prescription médicamenteuse à la phase aiguë de l’infarctus
du myocarde selon qu’il existait une maladie vasculaire périphérique (n = 147) ou non (n = 1 012). L’âge et le sexe des
patients étaient similaires dans les deux groupes. Les patients
avec une maladie vasculaire périphérique recevaient significativement moins d’antiagrégants plaquettaires (58 % versus
72 %, p < 0,001), moins d’anticoagulants (86 % versus 93 %,
p < 0,003), moins de dérivés nitrés (86 % versus 91 %,
p < 0,003) et moins de bêtabloquants (35 % versus 58 %,
p < 0,001). La mortalité à 28 jours chez les patients ayant une
maladie vasculaire périphérique était le double de celle sans
maladie vasculaire périphérique associée (26,5 % versus
10,2 %, p < 0,001). Ces non-prescriptions pourraient jouer un
rôle dans la surmortalité observée après un infarctus du myocarde chez les patients avec une maladie vasculaire périphérique associée.
L. Legedz et al. (Lyon) ont analysé l’expression des gènes
des systèmes rénine-angiotensine et kallicréine-kinine dans
les plaques d’athérome carotidien de 15 patients hypertendus
(12 hommes et 3 femmes, d’âge moyen 72 ± 8 ans). L’équipe
lyonnaise a montré que la présence des facteurs de risque tels
que le diabète de type 2 et l’intoxication tabagique est associée à l’activation de la voie de synthèse de l’angiotensine
dans la paroi artérielle. Par ailleurs, l’expression des gènes des
deux systèmes est fortement activée dans le processus athéromateux humain. Ces résultats suggèrent un effet synergique
des facteurs de risque vasculaires sur le système rénine-angiotensine dans le remodelage de la paroi artérielle.
tifiée, un but non commercial, une mise à jour récente et
des informations référencées et, enfin, ne pas contenir de
publicité.
L’utilisateur du portail pourra explorer un éventail de
150 sites consacrés à la pharmacovigilance, avec plus de
200 liens supplémentaires établis. Les sites sont classés en
neuf catégories :
1. Sites gouvernementaux (européens, nord et sud-américains,
australiens, néo-zélandais et japonais).
2. Sites non gouvernementaux publics ou privés avec une activité liée au médicament.
3. Sites consacrés à la législation avec quelques sites français
(Journal et Bulletin officiel, code de santé publique), et européens (Eur-lex et Eudralex).
4. Sites de bibliographie, avec quatre sous-catégories :
– bases de données (dictionnaires, thesaurus [ICD9], MEMO
[MEdicines MOnitoring unit], GPRD, etc.) ;
– journaux scientifiques consacrés en totalité ou partiellement
à la pharmacovigilance ;
– bulletins officiels (AFSSAPS, Medicines Control Agency,
Committee on the Safety of Medicines, Institut national de
santé publique du Québec, etc.) ;
– éditeurs spécialisés institutionnels et privés.
5. Sites de tératologie évaluant les risques liés à la prise de
médicament durant la grossesse avec des registres (Antiepileptic drug pregnancy registry, Eurocat…), des journaux et
des bases de données (Dart/ETIC…).
6. Sites d’épidémiologie.
7. Sites de toxicologie.
8. Sites des sociétés savantes.
9. Sites des moteurs de recherche dans le domaine de la santé.
L’utilisateur n’aura pas de difficulté majeure pour naviguer
dans ce portail. Après une page de bienvenue, tout le portail
est présenté sur la colonne de gauche, tandis que sur la colonne
de droite, défilent les adresses des différents sites avec une
brève description de leur contenu. Enfin, pour une meilleure
exhaustivité, il est demandé aux utilisateurs de signaler par
e-mail des adresses de sites non mentionnés.
La question majeure reste néanmoins sa mise à jour, qui est
assurée pour le moment par son créateur et des collaborateurs
industriels.
T. Simon, Paris
PHARMACOVIGILANCE : COUP DE CŒUR !
Notre coup de cœur est pour l’abstract de H. Schweich
(Paris) qui a créé un portail de sites Internet sur la pharmacovigilance, appelé Portal open on pharmacovigilance (POP),
dans le cadre d’un mémoire de diplôme universitaire à l’université Paris-VI sous la direction de A. Flahault
(http://www.u444.jussieu.fr/flahault/vigiweb-pop/).
Pour être sélectionnés dans ce portail, les sites choisis
devaient nécessairement avoir une origine clairement iden188
ATELIER SUR LA PHARMACOLOGIE ET LA NEUROBIOLOGIE
DE LA NOCICEPTINE/ORPHANINE FQ
Cette session a commencé par une présentation de G. Calo
(Ferrare, Italie) sur la pharmacologie du système de récepteur
nociceptine/OP4. La nociceptine/orphanine FQ (NC) est le
ligand endogène du récepteur opioid receptor like 1 (ORL1 ou
OP4). Par ses propriétés structurales, le système réceptoriel
NC/OP4 appartient à la famille des récepteurs opioïdes. Cependant, le profil pharmacologique des récepteurs OP4 est difféLa Lettre du Pharmacologue - Volume 15 - n° 10 - décembre 2001
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rent de celui des agonistes opiacés, et les effets biologiques de
la NC peuvent être identiques, ou opposés à ceux des opioïdes.
La caractérisation du récepteur OP4 s’est faite soit sur des
récepteurs murins natifs, soit sur des récepteurs recombinants
en utilisant des agonistes spécifiques et sélectifs [NC, NC
(1-13)NH2], un agoniste partiel [F/G]NC(1-13)NH2 et un antagoniste compétitif pur [Nphe1]NC(1-13)NH2. L’utilisation de
ce dernier composé a permis de montrer qu’un certain nombre
des effets de la NC (stimulation de la prise alimentaire, inhibition des processus d’apprentissage et de l’activité locomotrice,
bradycardie et hypotension, diminution de la libération de neurotransmetteurs aussi bien au niveau central que périphérique)
faisaient appel au récepteur OP4. La présentation de
D.R. Kapusta (La Nouvelle-Orléans, États-Unis) nous a rappelé que ces effets cardiovasculaires, ainsi que les effets rénaux
(diurétiques et antinatriurétiques), sont modulés de façon
différente par les récepteurs centraux et périphériques de la
nociceptine/orphanine FQ.
Les effets nociceptifs et antimorphine supraspinaux de la NC
sont antagonisés par le [Nphe1]NC(1-13)NH2, ce qui peut
laisser entrevoir son utilisation comme analgésique.
En effet, S. Ozaki et al. (Tsukuba, Japon) ont présenté le
J-113397, qui est le premier antagoniste non peptidique sélectif du récepteur OP4. Le J-113397, 1-[(3R,4R)-1-cyclooctylmethyl-3-hydroxymethyl-4-piperidyl]-3-ethyl1,3-dihydro-2Hbenzimidazol-2-one, a une affinité de 1,8 nM (Ki) pour le
récepteur ORL1 ou OP4, et est cent fois plus sélectif pour le
récepteur OP4 que pour les autres récepteurs opioïdes. L’utilisation du J-113397 est responsable d’une diminution de la douleur dans les phénomènes algiques persistants, mais
pas dans les douleurs aiguës ou réflexes. Cela suggère que la
nociceptine, contrairement aux autres opioïdes, facilite la nociception dans des situations d’exposition continue aux stimuli
nociceptifs.
D’un autre côté, comme nous l’a exposé F. Jenck (Allschwill,
Suisse), les agonistes de la NC pourraient être utilisés comme
anxiolytiques. En effet, on sait que l’injection intracérébrale de
NC entraîne une diminution de l’activité motrice de fuite des
souris lorsqu’elles sont soumises à une situation de stress, et
que la mutation du codon correspondant à la NC entraîne une
plus grande sensibilité au stress et une exagération des réponses
motrices de fuite en situation de stress. L’injection systémique
du Ro 64-6198, agoniste non peptidique sélectif de haute affinité du récepteur OP4, et qui a la propriété de pénétrer dans le
cerveau, est dépourvue d’effets dans un test d’attaque de
panique et d’effets anticonvulsivants. En revanche, elle entraîne
une diminution de l’anxiété dans les différents tests utilisés pour
l’évaluer, sans affecter les fonctions sensorimotrices ou les
capacités d’apprentissage, contrairement à ce qui est observé
avec les benzodiazépines.
Enfin, M. Corbani et J.C. Meunier (Toulouse) ont montré
que l’internalisation des récepteurs à la NC en réponse à la NC
ou à l’agoniste, le lofentanil, augmente quand la température
La Lettre du Pharmacologue - Volume 15 - n° 10 - décembre 2001
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s’élève, qu’elle est bloquée par l’antagoniste non peptidique,
le J-113397, ainsi que par le traitement des cellules par 0,45 M
de sucrose indiquant une implication d’une voie clathrin-dépendante dans les processus d’internalisation. Ces résultats suggèrent que les domaines transmembranaires des récepteurs
ORL1/OP4 pourraient être nécessaires aux phénomènes d’internalisation, qui ne peuvent survenir par la mise en jeu des
seules régions exposées en surface.
ATELIER SUR L’INFLAMMATION DES VOIES AÉRIENNES
V. Lagente (INSERM U456, Rennes) a souligné l’apport des
inhibiteurs sélectifs des phosphodiestérases comme nouveaux
agents anti-inflammatoires. Les phosphodiestérases sont une
famille d’enzymes impliquées dans le métabolisme des nucléotides cycliques AMPc et GMPc. Les PDE4 catabolisent principalement l’AMPc. Les inhibiteurs des PDE4 ont la capacité
de réduire la bronchoconstriction et l’hyperréactivité bronchique dans l’asthme ou les BPCO, et exercent en outre un effet
anti-inflammatoire. L’inflammation est souvent associée aux
phénomènes de remodelage bronchique faisant intervenir une
augmentation de l’activité des métalloprotéinases de la matrice
(MMP) et la production de facteurs de croissance. Le traitement par le RP 73-401 (une IPDE4) diminue l’activité MMP9
(gélatinase B) dans le liquide de lavage broncho-alvéolaire
(LBA) de souris sensibilisées par un antigène. Cet effet était
associé à une diminution du nombre de neutrophiles ainsi qu’à
la production de TNFα et de TGBβ dans le LBA. Les IPDE4
pourraient donc s’opposer au remodelage pariétal bronchique
par leur action anti-inflammatoire.
N. Frossard et al. (INSERM U425, Illkirch) ont étudié le rôle
du NGF (nerve growth factor), qui est à la fois un élément essentiel pour la croissance neuronale et un médiateur important de
l’inflammation. L’interleukine1β, cytokine pro-inflammatoire,
entraîne une hyperréactivité bronchique (HRB) et a, dans ce
travail, induit une augmentation des ARNm et de la protéine
NGF au niveau des bronches humaines isolées. Cet effet était
antagonisé par le SR 142801, qui est un antagoniste NK3. Le
NGF induisait lui-même une HRB. Cela suggère que le NGF,
produit après stimulation par l’IL1β, serait impliqué dans
l’HRB due à cette cytokine par le biais des neurones sensitifs.
Le rôle des tachykinines et du NGF a été également souligné
par F.P. Nijkamp (Utrecht, Pays-Bas). Les tachykinines sont
des neuropeptides impliqués dans la transmission du système
non adrénergique non cholinergique excitateur (NANCe) responsable d’une contraction musculaire, d’une vasodilatation
et d’une augmentation de la perméabilité vasculaire. Elles sont
également modulatrices des cellules immunitaires. Il a été
montré sur des cobayes que l’administration de NGF entraîne
une augmentation de la bronchoconstriction induite par
l’histamine. La différence avec le travail de Frossard et al. est
que cet effet était antagonisé par le SR 14033, un antagoniste
KN1. Ces deux travaux indiquent par conséquent le rôle des
tachykinines dans les phénomènes inflammatoires et l’hyperréactivité bronchique.
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SESSION DE POSTERS PHARMACO-ÉPIDÉMIOLOGIE
ET ÉCONOMIE
La prescription médicale chez les personnes âgées est un problème de santé publique souvent mal évalué. Trois posters traitaient de cette thématique. Le travail présenté par K. Beuzit
(Centre régional de pharmacovigilance [CRPV], Poitiers)
a consisté en une analyse des prescriptions dans une unité de
gériatrie en étudiant les prescriptions avec les médecins et les
pharmaciens, et en les confrontant à l’utilisation de bases de
données (Vidal®, Micromedex® et autres). Sur les 573 prescriptions étudiées, le CRPV a proposé 157 modifications, dont
106 ont été acceptées. Quarante-trois traitements ont été arrêtés sans problème pour le patient, et 123 prescriptions étaient
incorrectes pour une raison ou pour une autre (contre-indication, erreur de dosage, mauvaise durée…) ; seules 6 prescriptions ont nécessité l’analyse par le spécialiste. Cette étude renforce l’intérêt d’une étude pharmacologique des prescriptions
et d’une collaboration entre les CRPV et les équipes cliniques.
Le travail présenté par F. Clément (Bordeaux) étudiait
les variations de prescriptions chez 203 patients de plus de
60 ans (78,9 ans en moyenne) hospitalisés en médecine interne
principalement pour des problèmes cardiovasculaires ou infectieux. La durée moyenne d’hospitalisation était de 12,6 jours.
Quantitativement, les prescriptions ne différaient pas entre
l’admission et la sortie (5,12 médicaments en moyenne par
patient), mais, en revanche, il y avait des différences très significatives dans la nature des drogues prescrites, dépendant de
nombreux facteurs comme la durée d’hospitalisation, le degré
de médicalisation du patient.
On est en droit de se poser la question de l’adaptation des outils
de pharmaco-épidémiologie pour la prise en compte des effets
indésirables (EI) des médicaments chez les patients âgés en différenciant le troisième et quatrième âge. S. Bruneau et al.
(Angers) ont essayé de répondre à cette question. Les EI notifiés ont été analysés rétrospectivement sur une période de trois
ans en différenciant les patients de 75 à 84 ans et ceux de plus
de 84 ans. Globalement, ni la fréquence, ni la nature des EI ne
variaient d’un groupe à l’autre, suggérant qu’il n’y a pas de raison de les différencier pour l’étude des EI chez les patients âgés.
Dans un autre domaine, A. Pathak et al. (Toulouse) se sont
demandé pourquoi les bêtabloquants ne sont pas suffisamment
prescrits à la phase aiguë de l’infarctus du myocarde, alors que
leur bénéfice a été prouvé dans cette indication. Cette étude rétrospective est basée sur l’utilisation du registre MONICA (multinational MONItoring of trends and determinants of CArdiovascular disease). Sur les 1 159 patients étudiés, 54,8 % ont reçu
des bêtabloquants. Les facteurs significativement reliés à la
non-prescription étaient le sexe féminin, les atteintes vasculaires
périphériques, l’insuffisance cardiaque et, bien que non significativement, le diabète. La non-utilisation des bêtabloquants chez
ces patients pourrait expliquer le taux élevé de mortalité. Les
auteurs reposent la question d’une évaluation clinique et pharmacologique de la bonne définition des contre-indications.
SESSION DE POSTERS ENFANTS ET GROSSESSE
Le travail présenté par L. de Haro et al. (Marseille) tentait
d’étudier les médicaments utilisés par les jeunes dans leurs tentatives de suicide. Ils ont rétrospectivement étudié 706 tentatives chez des enfants ou adolescents de moins de 15 ans (88 %
de filles et 12 % de garçons). Quatre-vingt-quinze pour cent
des ces tentatives étaient médicamenteuses, avec une ingestion
de 25 comprimés en moyenne (1-150). Les médicaments le plus
souvent utilisés étaient les psychotropes, et provenaient en
grande majorité de l’environnement personnel ou familial. Les
tentatives de suicide semblent moins fréquentes mais plus
sévères chez les garçons, et la difficulté à obtenir des données
de la part des parents ou des médecins traitants montre que ce
sujet reste tabou.
M. Bardou, Dijon
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© février 1987 - EDIMARK S.A.
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La Lettre du Pharmacologue - Volume 15 - n° 10 - décembre 2001
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