14 Actualités de réadaptation cardiaque et de prévention de la maladie cardiovasculaire
Les programmes de réadaptation cardiaque
multidisciplinaires offrent une occasion en or d’intervenir
chez ce groupe de patients. Malgré le risque accru auquel
ils sont exposés, les patients souffrant de néphropathie
chronique sont moins susceptibles de faire l’objet de
modifications énergiques des facteurs de risque au moyen
de traitements qui se sont avérés bénéfiques chez les patients
dont la fonction rénale est normale. Certaines études
ont démontré que la fréquence des ordonnances d’AAS,
de bêtabloquants, de statines et d’inhibiteurs de l’ECA
est inversement proportionnelle à l’état de la fonction
rénale1,3,5,9. Cependant, les résultats d’une analyse canadienne
publiée en 2004 portent à penser que les patients atteints de
néphropathie chronique, à quelque stade que ce soit, tirent
effectivement des bienfaits de ces traitements, souvent à un
degré comparable à ceux dont la FGE est normale.1,3
Forme physique et néphropathie chronique
Les patients atteints de néphropathie chronique présentent
une fonction physique limitée dans de nombreux domaines
subjectifs et objectifs. Plusieurs études ont révélé des déficits
au chapitre des mesures de la forme cardiorespiratoire
(distance/temps de marche, tapis roulant, bicyclette
ergométrique) et de la force musculaire lorsqu’on les
compare à des témoins en bonne santé ou à la performance
prédite. On a démontré que cette réduction de l’aptitude à
l’effort affectait significativement la qualité de vie et qu’elle
s’associait indépendamment à une morbidité et à une
mortalité plus élevées10-13.
S’ajoutant à ces observations, des résultats de recherche
ont récemment démontré qu’il existe un lien entre la diminu-
tion de la performance physique et la baisse de la créatinine au
fil du temps, indépendamment du taux d’hémoglobine. Lors
d’une étude récente, on a examiné des patients présentant
une atteinte rénale modérée (filtration glomérulaire [FG] de
31 mL/min)14. Au début de l’étude, les auteurs ont trouvé que
la performance à l’exercice était nettement inférieure à celle
prédite pour des personnes sédentaires saines du même âge
et du même sexe (VO2 maximal de 1,88 L/min à la bicyclette
ergométrique, soit 82 % de la valeur prédite). Sur deux ans,
la consommation d’oxygène a diminué parallèlement à la
détérioration de la fonction rénale (baisse de 9 % du VO2
maximal et diminution de 28 % de la FG). De la même
façon, la force dans les jambes, telle que mesurée au moyen
d’un dynamomètre isocinétique, a chuté en lien avec la FG
estimative en dépit du maintien de la région transversale des
muscles de la cuisse mesurée à la tomographie assistée par
ordinateur.
Les bienfaits de la réadaptation cardiaque
Jusqu’à présent, la population atteinte de néphropathie
chronique a fait l’objet d’études insuffisantes; toutefois,
des preuves indiquent que des programmes d’exercice
structurés peuvent améliorer les résultats dans cette
population. On a démontré que, grâce à une combinaison
d’exercices d’assouplissement et de musculation et d’exer-
cices aérobiques, les programmes de réadaptation cardiaque
avaient des effets bénéfiques sur la forme physique
(entraînement en aérobie et en résistance), la fonction
psychosociale, la qualité de vie (impact de la maladie et scores
relatifs aux symptômes), les paramètres cardiorespiratoires
(notamment la fonction systolique ventriculaire gauche)
et les paramètres de la fonction rénale chez des patients
atteints de néphropathie chronique d’intensité modérée à
grave2,10,15,16. On a également démontré qu’ils exerçaient des
bienfaits sur la pression artérielle, les paramètres lipidiques,
le taux d’hémoglobine et les mesures de la rigidité artérielle.
Cependant, jusqu’à présent, seules deux études se sont
penchées particulièrement sur les effets d’un programme de
réadaptation cardiaque structuré chez les patients atteints
de néphropathie chronique17,18.
La première étude, publiée en 2005, portait sur un
groupe de patients atteints ou non de néphropathie
chronique d’intensité légère à modérée qui ont suivi un
programme de réadaptation cardiaque. Les patients atteints
de néphropathie chronique admis au départ étaient plus
âgés, présentaient plus de facteurs de risque et d’affections
concomitantes et avaient une capacité fonctionnelle moindre
et une perception plus négative de leur état de santé que les
patients ne souffrant pas de néphropathie chronique. À la fin
du programme de réadaptation cardiaque, les deux groupes
présentaient des améliorations significatives de leur indice de
masse corporelle, de leur tour de taille, de leur alimentation,
de leur bilan lipidique, de la distance parcourue en 6 minutes
de marche, de leur degré d’activité physique autoévalué
et de leur perception de leur état de santé. De plus, une
proportion similaire de patients a atteint ses objectifs de
prévention secondaire dans les deux groupes. Il est intéressant
de noter que, bien que les patients atteints de néphropathie
chronique aient continué de présenter des scores inférieurs à
la composante physique de leur bilan de santé et une moins
bonne capacité fonctionnelle que les personnes du groupe ne
souffrant pas de néphropathie chronique, l’amélioration de
leur forme physique à la suite de la réadaptation cardiaque
était comparable à celle du groupe qui n’était pas atteint
de néphropathie chronique. Les auteurs ont observé que
les patients atteints de néphropathie chronique ont tiré
de la réadaptation cardiaque des bienfaits au chapitre de
la réduction du risque coronarien comparables à ceux des
patients ne souffrant pas de néphropathie chronique17.
La deuxième étude a poussé la recherche un peu plus loin
en se penchant sur les patients exposés à un risque plus élevé