Médecine
& enfance
janvier 2009
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LE BILAN DE PREMIÈRE INTENTION
EST NORMAL
En cas d’infections bactériennes
sévères à germes encapsulés
La recherche des corps de Jolly per-
met d’éliminer une asplénie ou une
hyposplénie. L’asplénie/hyposplénie
peut être induite par un traitement (chi-
miothérapie, radiothérapie) ou congé-
nitale. Elle entraîne une sensibilité aux
germes encapsulés, associée dans cer-
tains cas à un syndrome malformatif, à
une cardiopathie. Il faut également
penser à ce diagnostic devant une mal-
rotation hétérotaxie thoracoabdomina-
le (syndrome d’Ivermark).
L’exploration des voies classique et
alterne du complément recherche un
déficit d’une des sous-unités du complé-
ment. Les infections à Neisseria orien-
tent vers un défaut d’une des sous-uni-
tés membranaires du complexe d’at-
taque du complément (C5 à C9) ou de
la properdine ; les infections bacté-
riennes récurrentes orientent vers un
défaut en C2, C3, C4 ou en facteurs I ou
H. Les déficits du complément se com-
pliquent d’infections le plus souvent in-
vasives, dues à des germes encapsulés.
Une auto-immunité peut être associée.
Le dosage des allohémagglutinines
permet de diagnostiquer un déficit de
l’immunité humorale chez les patients
incapables de répondre aux anticorps
polysaccharidiques.
L’étude des sous-classes d’IgG est utile
pour révéler un déficit en sous-classes
d’IgG qui peut être masqué par un dosage
pondéral des immunoglobulines normal.
En cas d’infections bactériennes
et/ou fongiques récurrentes
L’étude des fonctions phagocytaires
recherche une granulomatose septique
chronique (NBT) ou un défaut d’adhé-
sion leucocytaire (chimiotactisme). Les
déficits de la phagocytose se traduisent
par des infections essentiellement bac-
dement devant des IgG inférieures à 2 à
3 g/l, des IgA et IgM effondrées et, sur-
tout, des sérologies vaccinales et postin-
fectieuses négatives. Le gène respon-
sable, BTK, joue un rôle important dans
la différenciation des lymphocytes B.
La prise en charge des déficits de l’im-
munité humorale repose sur le traite-
ment des infections évolutives par anti-
biotiques et l’administration d’immuno-
globulines en perfusion ou par voie
sous-cutanée toutes les trois semaines.
Lymphocytes T normaux ou bas et
proliférations T basses : c’est un déficit
combiné. La clinique et les signes asso-
ciés permettent d’évoquer l’une ou
l’autre des nombreuses maladies que
comportent ces déficits.
Absence de lymphocytes T : c’est un
déficit immunitaire combiné sévère
(DICS), dont il existe quinze formes gé-
nétiques différentes.
Compte tenu de leur extrême gravité,
les déficits immunitaires combinés doi-
vent être diagnostiqués rapidement. Les
premiers signes apparaissent beaucoup
plus précocement que ceux des DIH hu-
moraux, en général avant l’âge de trois
mois dans le cadre des DICS. Les en-
fants atteints présentent des infections
bactériennes de tous types, à germes
« classiques », mais aussi à germes op-
portunistes (pneumocystoses…) et in-
tracellulaires, des infections fongiques
(candidoses…), des infections virales
(para-influenzae, adénovirus, cytomé-
galovirus, virus respiratoire syncytial)
ainsi que des bécégites graves. Ces in-
fections peuvent toucher tous les or-
ganes. La NFS (lymphopénie inférieure
à 3000 mm
3
) permet d’évoquer le dia-
gnostic. Le bilan doit comporter une ra-
diographie thoracique, qui montre un
syndrome interstitiel et l’absence de
thymus. La prise en charge des patients
s’effectue en centre spécialisé. A l’heure
actuelle, la greffe de cellules souches
hématopoïétiques est le traitement de
ces déficits immunitaires.
tériennes, parfois fongiques, et plutôt
tissulaires (abcès cérébraux, pulmo-
naires, hépatiques). La présence de gra-
nulomes oriente vers une granulomato-
se septique chronique (1/200000 nais-
sances), qui peut être liée à l’X (forme la
plus fréquente) ou autosomique récessi-
ve. Le défaut d’adhésion leucocytaire
s’accompagne d’une hyperleucocytose à
polynucléaires neutrophiles. Cette ma-
ladie rare est autosomique récessive.
Le dosage des IgE permet de diagnos-
tiquer un syndrome d’hyperIgE ou syn-
drome de Job ou de Buckley. Cette ma-
ladie se manifeste par des infections
respiratoires plutôt bactériennes (Sta-
phylococcus aureus) ou fongiques (as-
pergillose), des anomalies dentaires et
une dysmorphie apparaissant au cours
de la vie.
Si le bilan immunologique complé-
mentaire est normal chez un enfant qui
a des infections sévères et/ou récur-
rentes à un type de pathogène, il faut
rechercher un déficit de l’immunité in-
née.
CONCLUSION
L’exploration des infections idiopa-
thiques de l’enfant conduit à identifier
des DIH déjà connus, mais aussi de nou-
veaux DIH. En cas de normalité des exa-
mens immunologiques, le diagnostic de
déficit immunitaire ne doit pas être
écarté, car la définition de ces maladies
est avant tout clinique et les examens
actuels n’explorent qu’une partie du
système immunitaire. Au moindre dou-
te, il ne faut pas hésiter à prendre un
avis spécialisé.
Références
PICARD C., FILIPE-SANTOS O., CHAPGIER A., VON BERNUTH
H., VOGT G., CASANOVA J.L. : « Prédisposition génétique et in-
fections de l’enfant », Arch Pédiatr., 2006 ; 13 : 1342-6.
PICARD C. : « Immunité et défenses anti-infectieuses », Rev.
Prat., 2007 ; 57 : 1639-44.
PICARD C. : « Comment explorer un déficit immunitaire hérédi-
taire ? », Rev. Prat., 2007 ; 57 : 1671-6.
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