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La Lettre du Gynécologue • n° 362 - mai 2011 | 29
MISE AU POINT
216 patients. Aucune différence significative en
termes de complications n’a été mise en évidence
entre les 3 groupes étudiés (patients âgés de moins
de 2 ans, de 9 à 11 ans et de plus de 16 ans) [11].
Pourtant, les données de l’épidémie française
actuelle montrent une forte proportion de cas
d’adultes hospitalisés (ainsi que des enfants de
moins de 1 an), notamment avec des complications
(tableau, p. 27).
Bien que l’infection par le virus de la rougeole
entraîne une réponse immune protectrice à long
terme, l’infection aiguë se caractérise par une immu-
nosuppression transitoire qui associe lymphopénies B
et T et diminution des réponses humorales et cellu-
laires contre d’autres antigènes/pathogènes (12).
Ce phénomène pourrait expliquer, en partie, la
fréquence des surinfections bactériennes faisant
suite à l’infection par la rougeole et les bénéfices
non spécifiques de la vaccination sur la mortalité
infantile globale (13).
Complications neurologiques
Bien que peu fréquentes, les complications neuro-
logiques résultant de l’infection par le virus de la
rougeole sont les plus redoutées.
La plus fréquente des complications neurologiques
est l’encéphalite postinfectieuse (EPI) : elle touche
1 patient sur 1 000 environ. Elle apparaît en général
5 à 14 jours après l’éruption, mais elle peut être
observée avant même l’apparition de ces signes
cliniques. Elle se caractérise par une réapparition de
la fièvre, des céphalées, des troubles de la conscience,
une obnubilation et des crises comitiales. L’élec-
troencéphalogramme est perturbé. L’évolution mène
au décès dans 10 à 20 % des cas ou à des séquelles
neurologiques dans la majorité des autres cas. L’étio-
logie de cette encéphalite aiguë pourrait être une
démyélinisation par réaction auto-immune dirigée
contre le virus de la rougeole dans le tissu céré-
bral. Il n’y a ni anticorps ni ARN viral dans le liquide
céphalo-rachidien (LCR). L’intérêt de la recherche
du virus par PCR (Polymerase Chain Reaction) dans
le LCR est donc nul dans ce cas.
La complication la plus connue est la panencéphalite
sclérosante subaiguë (PESS), une affection d’appa-
rition lente, progressive, invariablement mortelle,
qui survient entre 1 et 15 ans après la primo-infec-
tion (14). On estime qu’elle touche un patient infecté
sur 10 000 à 300 000, et elle survient plus fréquem-
ment si la primo-infection a lieu pendant l’enfance,
avant 2 ans, qu’à l’âge adulte. L’incidence de la PESS
a considérablement diminué depuis l’introduction de
la vaccination. Elle est caractérisée par une détério-
ration mentale, une ataxie, des secousses myoclo-
niques, une choréo-athétose et un coma terminal. Les
patients atteints de PESS ont un taux élevé d’anticorps
antirougeoleux dans le sang et une synthèse intra-
thécale d’anticorps dans le LCR (8). D’un point de vue
histologique, les neurones sont les cellules principale-
ment affectées bien que les astrocytes, les oligoden-
drocytes et les cellules endothéliales soient également
impliquées, notamment dans les phases tardives de
la maladie. La destruction neuronale affecte aussi
bien la substance blanche que la substance grise. Les
mécanismes exacts expliquant la survenue de la PESS
sont mal connus. L’hypothèse la plus citée est que les
neurones infectés ne sont pas capables de produire
des virus complets, pouvant bourgeonner à l’extérieur
de la cellule. Les virus retrouvés dans le tissu cérébral
sont ceux circulant au moment de la primo-infection,
mais des mutations y sont fréquemment observées
au niveau des gènes codant pour les protéines de
matrice ou d’enveloppe.
La complication la plus rare touche essentiellement
les patients immunodéprimés. Il s’agit d’encéphalites
à inclusions rougeoleuses (Measles inclusion body
encephalitis [MIBE]). Les complications neurolo-
giques apparaissent en général 2 à 6 mois après la
rougeole clinique et l’éruption. Les symptômes sont
proches de ceux observés lors de la PESS mais ont
une progression beaucoup plus rapide, qui conduit à
la mort en quelques jours ou en quelques semaines.
D’un point de vue histologique, on observe une mort
neuronale, des corps d’inclusions dans les neurones
et la glie, mais pas de marque d’inflammation
comme dans la PESS et l’EPI. Lors d’une MIBE, le
virus réplicatif peut être mis en évidence seulement
à partir de biopsies cérébrales.
Complications pulmonaires
Il peut s’agir de pneumonies interstitielles dues au
virus lui-même, observées en particulier chez l’im-
munodéprimé, ou de bronchopneumonies bacté-
riennes de surinfection (60 % des causes de décès
associés à la rougeole chez l’enfant). Les complica-
tions pulmonaires de l’adulte sont plus rares que
celles de l’enfant. Dans une étude rétrospective
de 3 220 patients adultes ayant une rougeole, une
atteinte pulmonaire était présente chez 3,3 % des
patients (106 cas) avec une surinfection bactérienne
secondaire chez 30 % d’entre eux (35 patients).
L’évolution était généralement bénigne (15).
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