Le CNGOF et la Société française de radiologie réagissent au rapport

8 | La Lettre du Gynécologue 380-381 - mars-avril 2013
TRIBUNE
J. Levêque1,
P. Descamps2,
L. Verzaux3
1 Service de gynécologie, CHU de
Rennes, département d’oncologie
chirurgicale CRLCC de Rennes.
2 Service de gynécologie-obsté-
trique, pôle femme-mère-enfant,
CHU d’Angers.
3 Radiologue, Le Havre.
L’Institut national du cancer (INCa) a rendu public son rapport sur la situation
du cancer en France en 2012 : cette publication est très attendue par l’ensemble
des médecins français en raison, d’une part, de sa hauteur de vue (il couvre tous
les aspects de la cancérologie), et, d’autre part, de son impact sur la pratique médicale
au quotidien.
Les cancers de la femme (158 500nouveaux cas annuels responsables
de 63 000décès par an) restent fréquents et sont dominés par le cancer du sein
et le cancer colorectal qui bénéfi cient d’un dépistage organisé.
Avec 8 100décès annuels, le cancer du poumon talonne le cancer du sein
et le cancer colorectal (8 300décès annuels); il représente un réel problème
de santé publique, alors que sa prévention est simple pour la plupart des patients
(l’arrêt du tabac, etc.).
En gynécologie, 2cancers s’off rent au dépistage et à la prévention:
le cancer du col utérin et le cancer du sein.
Le cancer du col utérin est viro-induit (papillomavirus humain et,
en particulier, les génotypes à haut risque 16 et 18). Son histoire naturelle passe
par des états précancéreux dépistés par le frottis du col utérin
(dépistage individuel à partir de 25 ans) et son évolution est assez lente.
Cela explique la diminution constante des cas de cancers incidents
(estimés à 2 810nouveaux cas annuels) et une mortalité qualifi ée de faible
avec 1 000 décès annuels. Les décès sont observés dans les formes évoluées
de la maladie, soit chez des patientes jeunes du fait d’une évolution rapide se prêtant
mal au dépistage (cancers d’intervalle), soit chez des patientes plus âgées
non dépistées. Le rapport pointe les faiblesses du dépistage qui, en France,
est non organisé ; de ce fait, 40 % des Françaises ne seront pas dépistées.
Il fait des propositions concrètes : organiser le dépistage par frottis sur l’ensemble
du territoire, à l’instar des cancers du sein et du côlon-rectum, en le centrant
sur les médecins généralistes, proposer de nouvelles modalités de dépistage
(dépistage des patientes porteuses de papillomavirus humains à risque, notamment
par autoprélèvement), et améliorer la prévention vaccinale vis-à-vis des génotypes
HPV 16 et 18 en renforçant la diff usion du vaccin chez les jeunes fi lles (désormais à
partir de 11ans) et le respect du schéma vaccinal qui comprend 3 doses.
Le cancer du sein est le cancer emblématique de la femme: son incidence
(53 000 nouveaux cas par an, soit à lui seul un tiers des cancers féminins!)
est telle qu’il est vécu comme un fl éau par la population féminine.
Il s’agit actuellement en France de la première cause de décès par cancer,
notamment chez la femme jeune.
En réalité le rapport de l’INCa apporte une touche d’optimisme :
le taux d’incidence se stabilise après la forte croissance notée depuis les années
1980 : plusieurs facteurs interviennent, en particulier ceux liés à la maternité
Le CNGOF et la Société française
de radiologie réagissent au rapport
INCa 2012 présenté le 15 janvier
dernier sur la situation du cancer
en France
P. Descamps
La Lettre du Gynécologue 380-381 - mars-avril 2013 | 9
TRIBUNE
(nombre d’enfants choisi, allaitement maternel court, etc.) qui ont beaucoup changé
à partir des années 1960 et nont guère évolué depuis les années 1980,
plus que les facteurs hormonaux tels les traitements de la ménopause,
dont le rôle est toujours sujet à controverse;
et, surtout, la mortalité a affi ché une baisse de 13% entre 1980 et 2010,
liée au dépistage mammographique (augmentation des cancers découverts à un stade
précoce) et aux progrès thérapeutiques majeurs du début des années 2000.
Les taux de survie relative observés en France se situent dans des valeurs élevées
par rapport aux taux observés dans les autres pays d’Europe.
Le dépistage mammographique entraîne une réduction de la mortalité de 10%
selon une étude américaine récente (1) corroborée par 2études publiées en 2012:
une méta-analyse anglaise (2) estimant à 11% la réduction de mortalité par cancer
du sein chez les femmes dépistées, et une étude fondée sur le registre américain
du cancer entre 1976 et 2008 (3) – soit avant et après le dépistage mammographique
chez les femmes de 40 ans et plus – où le nombre de cancers diagnostiqués à un stade
précoce a été multiplié par 2 et où la diminution observée des stades évolués
a été de 8%. Toutefois, ces bénéfi ces sont à rapprocher d’un surdiagnostic de lésions
qui nauraient probablement pas évolué vers un cancer cliniquement décelable:
10% des cas pour les Britanniques et 31% des cas pour les Américains.
Reste qu’aujourd’hui, les médecins ne sont pas capables d’évaluer avec certitude
le risque évolutif d’un cas particulier.
Enfi n, il est important de rappeler que les femmes les plus jeunes (moins de 45ans)
ont un moins bon pronostic que les autres (tumeurs plus agressives, diagnostic à un stade
plus évolué) et que le dépistage classique dans cette frange jeune de la population
ne semble pas apporter de bénéfi ce net, hormis sans doute en cas de risque génétique.
D’autres aspects positifs sont soulignés par ce rapport: une meilleure organisation
des soins, rendus plus effi caces sur l’ensemble du territoire
(création de fi lières cancérologiques, prise en charge élargie, en particulier des plus
démunies), une prise de conscience des diffi cultés de l’après-cancer tant sur le plan
individuel que sur le plan social, et un accent mis sur l’eff ort de recherche.
Références
bibliographiques
1. Kalager M, Zelen M, Langmark
F, Adami HO. Effect of screening
mammography on breast-cancer
mortality in Norway. N Engl J
Med 2010;363:1203-10.
2. Marmot M. The benefi ts and
harms of breast cancer scree-
ning: an independent review.
Lancet 2012;380:1778-86.
3. Bleyer A, Welch HG. Effect
of three decades of screening
mammography on breast-
cancer incidence. New Engl J
Med 2012;367:1998-2005.
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Le CNGOF et la Société française de radiologie réagissent au rapport

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