L Les risques cardiovasculaires de la rosiglitazone MISE AU POINT

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MISE AU POINT
Les risques cardiovasculaires
de la rosiglitazone
Cardiovascular risks of rosiglitazone
Claude Le Feuvre*
L
es risques cardiovasculaires de la rosiglitazone
ont été révélés alors que ce traitement antidiabétique oral était l’un des plus vendus dans
le monde. La vente annuelle de la rosiglitazone en
2006 était évaluée à 3,3 billions de dollars américains (1). Fin 2008, l’Agence européenne des médicaments (EMEA) se prononçait contre l’utilisation
de la rosiglitazone chez le patient coronarien, et
recommandait de n’utiliser ce traitement qu’en troisième intention, après échec de 2 autres traitements
antidiabétiques. En janvier 2009, un algorithme de
traitement antidiabétique a été publié par l’American
Diabetes Association (ADA) et l’European Association for the Study of Diabetes (EASD) : les membres
de la commission se sont prononcés unanimement
contre l’utilisation de la rosiglitazone (2).
Les autorisations initiales de commercialisation sans
études de morbi-mortalité et la disgrâce de la rosiglitazone, qui a suivi la publication de méta-analyses
en faveur d’une augmentation du risque cardiovasculaire, ont soulevé des questions scientifiques et
éthiques sur le développement des médicaments.
Ces questions ont amené en décembre 2008 la
Food and drug Administration (FDA) à demander
des études de morbi-mortalité cardiovasculaires pour
tout nouveau médicament antidiabétique.
Développement
et commercialisation
de la rosiglitazone
*Institut de cardiologie, hôpital de la
Pitié-Salpêtrière, Paris.
Les glitazones, ou thiazolidinediones, sont des antidiabétiques oraux. Les effets antihyperglycémiants
de ces molécules sont liés à la grande affinité de
liaison au PPARγ (Peroxisomal Proliferator Activated
Receptor). Les glitazones augmentent la sensibilité à l’insuline par le biais d’une diminution de la
néoglucogenèse hépatique et par l’augmentation de
8 | La Lettre du Cardiologue • n° 439 - novembre 2010 la captation du glucose dans le muscle squelettique
et dans l’adipocyte. Les glitazones diminuent l’insulinorésistance par augmentation de la sensibilité
à l’insuline. Les glitazones en association avec les
sulfamides ou la metformine améliorent la fonction
cellulaire bêta-pancréatique.
La première glitazone commercialisée aux ÉtatsUnis a été la troglitazone, en 1998, et ce, malgré un
risque hépatique rare mais potentiellement fatal. La
FDA a approuvé l’utilisation de la rosiglitazone en
mai 1999, en raison de l’absence d’hépatotoxicité,
malgré une augmentation du LDL-cholestérol (entre
13 et 24 %), et une tendance non significative à une
augmentation du nombre d’événements ischémiques
cardiaques (1,2 % sous rosiglitazone versus 0,7 %
dans les groupes témoins).
La rosiglitazone (Avandia® 2 mg, 4 mg ou 8 mg) est
commercialisée en France depuis 2002.
La rosiglitazone peut être prescrite selon le Vidal
2010 :
➤➤ en monothérapie dans le traitement du patient
diabétique de type 2, en particulier en surpoids,
qui est insuffisamment contrôlé par le régime et
l’exercice physique, et pour lequel la metformine
est contre-indiquée ou non tolérée ;
➤➤ en association orale, dans le traitement du
diabète de type 2 lorsqu’une dose maximale tolérée
d’une monothérapie orale par metformine ou par un
sulfamide hypoglycémiant ne permet pas d’obtenir
un contrôle glycémique suffisant ;
➤➤ en association avec la metformine, en particulier
chez les patients en surpoids ;
➤➤ en association avec un sulfamide hypoglycémiant uniquement chez les patients intolérants à
la metformine ou pour lesquels la metformine est
contre-indiquée ;
➤➤ en trithérapie, en association avec la metformine
et un sulfamide hypoglycémiant chez les patients
non contrôlés en bithérapie orale.
Points forts
»» La rosiglitazone peut provoquer des œdèmes et une rétention hydrique susceptibles d’aggraver ou
d’accélérer une insuffisance cardiaque.
»» Elle est contre-indiquée dans l’insuffisance cardiaque ou l’antécédent d’insuffisance cardiaque (NYHA I à IV).
»» La prévention de l’insuffisance cardiaque sous rosiglitazone repose sur la connaissance des facteurs
favorisants, le respect des contre-indications et des précautions d’emploi des glitazones.
»» En raison des incertitudes sur l’augmentation du risque d’infarctus, la rosiglitazone est contre-indiquée
dans le syndrome coronaire aigu, et déconseillée chez le patient coronarien et dans l’artériopathie oblitérante
des membres inférieurs.
»» L’Agence européenne des médicaments (EMEA) vient de la retirer de la liste des antidiabétiques oraux.
La Food and Drug Administration (FDA) en restreint l’usage aux patients sans autre alternative.
Effets indésirables
cardiovasculaires
de la rosiglitazone
Rétention hydrique et œdèmes
La rétention hydrique sous rosiglitazone peut
survenir indépendamment de l’état cardiaque et en
l’absence d’insuffisance cardiaque, mais peut également ressembler à une décompensation cardiaque.
Il s’agit le plus souvent d’œdèmes des membres inférieurs prétibiaux ; ils se situent exceptionnellement
au niveau de la face. Ils sont habituellement modérés
et nécessitent rarement l’arrêt du traitement. Ils sont
plus fréquents en cas d’une association rosiglitazone
et insuline. Les œdèmes sont réversibles à l’arrêt de
la rosiglitazone.
La physiopathologie des œdèmes sous glitazones
est mal connue, mais le mécanisme semble multi­
factoriel. Une augmentation du volume plasmatique
est constatée avec toutes les glitazones chez 6 à 8 %
des patients : elle est liée à une potentialisation des
effets antinatriurétiques et vasodilatateurs de l’insuline, à une diminution de l’excrétion rénale de sodium
et à une augmentation de la rétention hydrique, ce
qui explique l’anémie. L’autre mécanisme évoqué
des œdèmes est une augmentation de la perméabilité endothéliale et/ou une relative vasodilatation
précapillaire, observée avec l’utilisation de l’insuline,
et résultant de la diminution de l’insulinorésistance
sous glitazones.
Insuffisance cardiaque
Les taux d’insuffisance cardiaque rapportés dans le
Vidal sont de 0,3 % avec une association de rosiglitazone et de metformine, de 0,6 % avec une association de rosiglitazone et de sulfamide, le risque
d’œdème pulmonaire étant inférieur à 1/1 000.
L’excès de risque d’insuffisance cardiaque sous glitazones est retrouvé aussi bien dans les registres que
dans les études randomisées.
Dans le registre américain US Health-care data base
comparant 8 288 diabétiques sous glitazone avec
41 440 diabétiques sans glitazones, les diabétiques
sous glitazones étaient plus âgés et présentaient plus
souvent des complications du diabète, des facteurs
de risque d’insuffisance cardiaque plus nombreux et
une insulinothérapie plus fréquente. La survenue
d’une insuffisance cardiaque à 8 mois était plus
fréquente sous glitazone : 4,5 % versus 2,6 % sans
glitazone. En analyse multivariée, le traitement par
glitazones était un facteur prédictif indépendant
d’insuffisance cardiaque avec un risque ratio de 1,61
(p < 0,001) [3].
Dans le registre de F.A. Masoudi portant sur
16 417 patients diabétiques hospitalisés pour insuffisance cardiaque, le risque ajusté de nouvelles hospitalisations pour récidive d’insuffisance cardiaque
était plus élevé sous glitazones que sous metformine (RR = 1,06 versus 0,92 sous metformine), sans
augmentation du risque de décès à 1 an (4).
Les facteurs qui favorisent l’insuffisance cardiaque
sous glitazones sont l’existence d’une cardiopathie
sous-jacente, en particulier l’hypertrophie ventriculaire gauche, le sujet âgé, l’insuffisance rénale,
moyenne à modérée, l’administration concomitante
d’anti-inflammatoires non stéroïdiens, le traitement
par insuline.
Dans l’étude DREAM randomisant l’association rosiglitazone et ramipril versus rosiglitazone versus ramipril versus placebo chez 5 269 patients intolérants
au glucose, le risque d’insuffisance cardiaque s’est
révélé plus élevé sous rosiglitazone (0,5 % versus
0,1 % sans ce traitement, p < 0,01) [5].
Dans l’étude RECORD randomisant rosiglitazone
et metformine ou sulfamide versus metformine et
sulfamide chez 4 447 patients diabétiques de type 2,
le risque d’insuffisance cardiaque (décès ou hospitalisation) était 2 fois plus élevé sous rosiglitazone,
avec un excès d’événements de 2,6/1 000 patientsannée (6). Cette étude ne retrouvait pas d’augmentation du risque de décès cardiaque à 5,5 ans
(60 versus 71 décès), malgré un plus grand nombre
de décès par insuffisance cardiaque sous rosiglitazone (10 versus 2 décès).
Cette augmentation du risque d’insuffisance cardiaque
sous glitazones est liée à la rétention hydrosodée
favorisée par ce traitement. En réduisant l’insulinorésistance, les glitazones pourraient intensifier les
effets de l’insuline sur la vasodilatation capillaire,
et peut-être sur leur perméabilité, augmentant le
Mots-clés
Diabète
Rosiglitazone
Cœur
Highlights
»» Rosiglitazone can cause
edemas and water retention
having the potential to aggravate or accelerate heart-failure.
»» It is contra-indicated in a
context of heart-failure or
history of heart-failure (NYHA I
to IV).
»» Heart-failure prevention
in patients treated with rosiglitazone relies on knowledge
of contributing factors and on
respect of contra-indications
and precautions regarding
glitazones.
»» Given the uncertainty
concerning increased risk
of infarct, rosiglitazone is
contra-indicated in acute
coronary syndrome, and is not
recommended for patients
with coronary artery disease
or obliterating arteriopathy
of the lower limbs.
»» The European Medicines
Agency (EMEA) has just taken it
off the list of oral antidiabetics.
The Food and Drug Administration (FDA) limits its use to
patients for whom there is no
other option.
Keywords
Diabetes
Rosiglitazone
Heart
La Lettre du Cardiologue • n° 439 - novembre 2010 | 9 MISE AU POINT
Les risques cardiovasculaires de la rosiglitazone
volume sanguin plasmatique par le biais des systèmes
de compensation neuro-hormonaux (système rénineangiotensine et système nerveux sympathique).
Malgré cette rétention hydrosodée, la rosiglitazone
diminue les chiffres tensionnels systoliques et diastoliques de manière plus importante (2 mmHg en
moyenne) que dans le groupe contrôle (études
DREAM et RECORD). Cette discordance entre la
rétention hydrosodée et l’absence d’HTA pourrait
s’expliquer par l’action pléiotrope de l’insuline et
peut-être des glitazones. L’insuline augmente la
rétention hydrosodée, mais a également une action
vasodilatatrice, par augmentation de la production
endothéliale de monoxyde d’azote (NO).
La prévention de l’insuffisance cardiaque sous rosiglitazone repose sur le respect des précautions d’emploi
(en présence de sujet âgé, d’insuffisance rénale, de
prise régulière d’anti-inflammatoires non stéroïdiens
ou d’association avec l’insuline) et des contre-indications (en cas d’insuffisance cardiaque ou d’antécédents d’insuffisance cardiaque [classes I à IV]).
Un traitement par rosiglitazone nécessite une
surveillance cardiovasculaire pour rechercher d’éventuels signes d’insuffisance cardiaque. Les signes fonctionnels sont peu spécifiques chez le diabétique de
type 2, souvent dyspnéique en raison de la surcharge
pondérale et présentant fréquemment des œdèmes
des membres inférieurs. L’électrocardiogramme est
rarement discriminant (car l’hypertrophie ventriculaire
gauche est fréquente en raison de l’association d’un
diabète et d’une hypertension artérielle). L’échocardiographie sera faite en cas de doute diagnostique,
avec, si nécessaire, un dosage du peptide natriurétique
de type B.
Études de morbi-mortalité
cardiovasculaire et risque d’infarctus
sous rosiglitazone
Le bénéfice potentiel de la rosiglitazone sur la
morbi-mortalité cardiovasculaire repose sur les
effets antihyperglycémiants, l’action antiathéromateuse directe sur la paroi vasculaire suggérée chez
l’animal, l’amélioration des marqueurs non traditionnels du risque cardiovasculaire. Les glitazones
inhibent l’induction des métalloprotéinases MMP-9,
des macrophages et des cellules musculaires lisses,
qui peuvent stabiliser la plaque athéromateuse. Les
glitazones pourraient réduire le risque de thrombose en diminuant le fibrinogène et l’inhibiteur de
l’activateur du plasminogène 1, et limiter le développement de la plaque d’athérome par une action
10 | La Lettre du Cardiologue • n° 439 - novembre 2010 anti-inflammatoire (diminution de la CRP), une inhibition de la migration et une prolifération des cellules
musculaires lisses. Chez l’homme, les glitazones
améliorent la fonction endothéliale, augmentent
le HDL-cholestérol de 5 à 10 %, et, dans certaines
études, atténuent la progression de l’athérosclérose
(évaluée sur l’épaisseur intima-média carotidienne).
Le bénéfice anti-ischémique potentiel de la rosiglitazone n’est pas retrouvé dans les études de morbimortalité cardiaque, un doute subsiste même quant
à son rôle dans l’augmentation du risque d’infarctus.
L’étude ADOPT (rosiglitazone versus metformine
versus sulfamide), menée chez 4 351 diabétiques de
type 2, était sous-dimensionnée pour une analyse
de morbi-mortalité (le critère principal était la
baisse de l’HbA1c). Cette étude retrouve cependant une augmentation d’événements cardiaques
sous rosiglitazone à 5 ans (3,4 % versus 1,8 % sous
glibenclamide, p < 0,05), par augmentation du
nombre d’insuffisances cardiaques (0,8 % versus
0,2 %, p < 0,05), avec une tendance à un plus grand
nombre d’infarctus du myocarde (1,6 % versus 1 %
sous glibenclamide ; NS) [tableau I] (7).
Les résultats de l’étude DREAM sont comparables,
avec une tendance à un accroissement des événements cardiaques sous rosiglitazone (HR 1,37 ;
p = 0,08), par augmentation du nombre d’insuffisances cardiaques (0,5 % versus 0,1 % ; p < 0,001),
mais sans augmentation significative du risque d’infarctus ou de décès cardiaques (5).
La controverse sur l’augmentation du risque d’infarctus avec la rosiglitazone a été lancée par la
publication de la méta-analyse de S.E. Nissen et al.
dans le New England Journal of Medicine le 14 juin
2007 (8). Cette méta-analyse portait sur 42 études
et concluait à une association entre la rosiglitazone
et une augmentation significative du risque d’infarctus (OR : 1,43 ; IC95 : 1,03-1,98 ; p = 0,03), avec
une tendance à l’augmentation du risque de décès
cardiovasculaire (OR : 1,64, IC95 : 0,98-2,74 ; p < 0,06).
Cette méta-analyse présentait comme limites un
nombre conséquent d’études portant sur un faible
nombre de patients, avec un suivi court, peu d’événements et de larges intervalles de confiance pour
les odds-ratios décès et infarctus. Ces résultats ont
cependant amené le laboratoire GlaxoSmithKline à
lever le double aveugle de l’étude RECORD (glitazone + metformine ou sulfamide versus metformine
+ sulfamide chez 4 447 diabétiques de type 2 ; critère
primaire : décès ou hospitalisation pour événement
cardiovasculaire à 6 ans), et à publier le 7 juillet dans
le même journal les résultats d’une analyse intermédiaire de cette étude. Cette analyse réalisée après
MISE AU POINT
3,7 années de suivi ne permettait pas de conclure
sur une association entre la rosiglitazone et le risque
d’hospitalisation ou de décès pour cause cardiovasculaire (HR : 1,08 ; NS) mais retrouvait une augmentation du risque d’insuffisance cardiaque (HR : 2,15 ;
IC95 : 1,3-3,57). Les résultats du suivi à 5,5 ans des
patients de l’étude RECORD confirmeront, en 2009,
ceux de cette analyse intermédiaire (9), avec, comme
limites, un faible nombre d’événements (2,5 % par
an alors que l’étude était construite sur un risque
supposé annuel de 11 %) et l’arrêt de la rosiglitazone
chez 40 % des patients avant la fin de l’étude (1).
Moins de 2 mois après la publication des résultats
intermédiaires de RECORD, M.B. Bracken publie,
toujours dans le New England Journal of Medicine,
une méta-analyse incluant RECORD, dont les résultats atténuent la responsabilité de la rosiglitazone
comme cause d’infarctus (HR : 1,24 ; IC95 : 0,97-1,58 ;
NS) et de décès cardiovasculaire (HR : 1,07 ; IC95 :
0,76-1,49 ; NS) [10]. À l’inverse, la méta-analyse de
S. Singh et al., incluant RECORD, ADOPT et DREAM,
retrouve une association entre un traitement d’au
moins 12 mois par rosiglitazone et le risque d’infarctus
(HR : 1,42 ; IC95 : 1,06-1,91 ; p < 0,02) et d’insuffisance
cardiaque (HR : 2,09 ; IC95 : 1,52-2,88 ; p < 0,001), sans
augmentation du risque de décès cardiaques (HR : 0,9 ;
IC95 : 0,63-1,26 ; NS) [11]. Dans cette méta-analyse, la
rosiglitazone n’est plus associée à une augmentation
du risque d’infarctus après exclusion des patients
en insuffisance cardiaque. Dans la méta-analyse de
la FDA incluant 42 études, le risque ischémique est
plus important lorsque la rosiglitazone est associée
à l’insuline, et chez les patients coronariens symptomatiques utilisant des dérivés nitrés (tableau II).
Les résultats sont également divergents dans les
études ACCORD et VADT qui comparent traitement standard et traitement intensif du diabète.
Dans l’étude ACCORD, 90 % des patients du groupe
intensif et 58 % de ceux du groupe standard étaient
sous rosiglitazone. Le traitement intensif était
associé à une augmentation du risque de décès
cardiaque et d’infarctus, pouvant faire suspecter
le rôle de la rosiglitazone. Après ajustement aux
caractéristiques de base, la rosiglitazone n’était pas
associée à une augmentation du risque de décès.
L’étude VADT n’a pas retrouvé d’augmentation du
risque d’événements cardiaques à 7,5 ans dans le
groupe intensif. Les patients des 2 groupes recevaient
de la rosiglitazone dans 95 % des cas. Contrairement
à la méta-analyse de S.E. Nissen et al., les taux de
décès cardiaques (p = 0,02) et d’infarctus (p = 0,01)
étaient plus bas chez les patients sous rosiglitazone
que chez les patients sans ce traitement.
Tableau I. Complications cardiovasculaires survenues dans l’étude ADOPT (7).
Rosiglitazone
n = 1 456
Metformine
n = 1 454
Glibenclamide
n = 1 441
Événement cardiaque majeur à 5 ans
3,4 %
3,2 %
1,8 %*
Infarctus du myocarde fatal
Infarctus du myocarde non fatal
0,1 %
1,5 %
0,1 %
1,2 %
0,2 %
0,8 %
Insuffisance cardiaque
0,8 %
0,8 %
0,2 %*
Accident vasculaire cérébral
0,5 %
0,4 %
0,3 %
* p < 0,05 versus rosiglitazone.
Tableau II. Événements ischémiques majeurs (décès-infarctus) survenus chez des patients
diabétiques de type 2 avec ou sans rosiglitazone (meta-analyse de la FDA regroupant 42 études).
Rosiglitazone
Témoins
OR (IC95)
Insuline + rosiglitazone versus insuline
24/867 (2,77 %) 9/663 (1,36 %) 2,07 (0,93-5,07)
Patients coronariens sans utilisation de nitrés
47/886 (5,3 %)
Patients coronariens avec utilisation de nitrés
43/323 (13,3 %) 16/223 (7,1 %)
33/622 (5,3 %) 1,06 (0,68-1,65)
2,1 (1,2-3,8)*
* p < 0,05.
Dans les données épidémiologiques fournies par
le laboratoire GlaxoSmithKline et portant sur
400 000 diabétiques, dont 100 000 sous rosiglitazone, le risque d’événements cardiovasculaires
sévères sous rosiglitazone versus un autre antidiabétique n’était que très faiblement augmenté
(HR : 1,029). Des données comparables ont été
rapportées sur 917 756 diabétiques en juin 2007
(HR : 1,02 pour la rosiglitazone, IC95 : 0,94-1,11 ; NS)
[Integrated Health Care Information Services, report
from Worldwide Epidemiology, June 6th 2007].
Les données dont nous disposons concernant le risque
d’infarctus sous rosiglitazone sont donc discordantes.
Il n’a pas été rapporté de progression de l’athérosclérose sous rosiglitazone, ni d’augmentation du risque
de rupture de plaque. La rosiglitazone est associée à
une diminution du risque d’accident vasculaire cérébral, probablement du fait de son action sur la réduction des chiffres tensionnels. La rétention hydrique
qu’elle peut induire augmente le risque d’insuffisances
cardiaques et pourrait, chez certains patients, favoriser
des événements ischémiques par l’augmentation de
la précharge. Devant ces incertitudes, la rosiglitazone
est contre-indiquée dans le syndrome coronaire aigu,
et déconseillée chez le patient coronarien et dans
l’artériopathie oblitérante des membres inférieurs.
Le nombre d’études sur la pioglitazone est considérablement inférieur à celui sur la rosiglitazone.
Dans l’étude PROactive, la pioglitazone est associée
à une tendance à un moindre risque d’infarctus ou
de décès cardiovasculaires (12). Il n’est cependant
pas retrouvé de différence sur le risque cumulé
d’infarctus et de revascularisation coronaire entre
rosiglitazone et pioglitazone dans le registre PharLa Lettre du Cardiologue • n° 439 - novembre 2010 | 11 MISE AU POINT
Les risques cardiovasculaires de la rosiglitazone
Metrics database du laboratoire GlaxoSmithKline.
En l’absence d’études randomisées comparant ces
2 traitements, il est difficile de conclure à d’éventuelles différences sur le risque ischémique. L’étude
TIDE (Thiazolidinedione Intervention with vitamin
D Evaluation), qui compare ces 2 glitazones, a été
mandatée par la FDA. Les résultats ne sont pas
attendus avant 2015, 16 ans après l’introduction
de la rosiglitazone par la FDA.
Conclusion
En raison des incertitudes concernant l’augmentation du risque d’infarctus, l’EMEA a retiré en
septembre 2010 la rosiglitazone de la liste des
antidiabétiques oraux, environ 10 000 diabétiques
de type 2 en France suivant actuellement ce traitement. La FDA en restreint l’usage aux patients pour
lesquels il n’existe pas une autre alternative. ■
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events in patients with type 2 diabetes in the PROactive
study (PROspective pioglitAzone Clinical Trial In macrovascular Events): a randomized controlled trial. Lancet
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Questionnaire d’auto-évaluation
1. La rosiglitazone est contre-indiquée :
1a. dans l’insuffisance cardiaque de classes I à IV
1b. dans l’antécédent d’insuffisance cardiaque de classes I à IV
1c. dans l’insuffisance cardiaque de classes III à IV
1d. dans l’antécédent d’insuffisance cardiaque de classes III à IV
2. La rosiglitazone :
2a. augmente le risque d’insuffisance cardiaque
2b. diminue le risque d’insuffisance cardiaque
2c. ne modifie pas le risque d’insuffisance cardiaque
3. La rosiglitazone :
3a. augmente la mortalité cardiovasculaire
3b. diminue la mortalité cardiovasculaire
3c. ne modifie pas la mortalité cardiovasculaire
Réponses : 1a, b, c, d ; 2a ; 3c.
12 | La Lettre du Cardiologue • n° 439 - novembre 2010 
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