La Lettre du Cardiologue • n° 429 - novembre 2009 | 17
Résumé
Une mort subite inexpliquée survenue chez un sujet jeune doit conduire à la réalisation d’une
enquête familiale.
Cette enquête devra rechercher la présence d’un aspect de maladie rythmique héréditaire qui
permettra de guider l’analyse moléculaire puis de permettre la mise en place d’une prévention
chez les membres de la famille à risque de mort subite.
Ce dépistage permet d’identifier la cause de la mort subite dans la moitié des cas.
Mots-clés
Mort subite
Génétique
Fibrillation
ventriculaire
Généalogie
Highlights
A sudden unexplained death
occurred in a young person
should lead to a family
screening. This screening will
investigate the presence of an
ECG pattern of a hereditary
arrhythmic disease that will
guide the molecular analysis
and enable the implementa-
tion of prevention in family
members at risk for sudden
death. Familial and molecular
screening can identify the
cause of sudden death in 50%
of cases.
Keywords
Sudden death
Genetic
Ventricular fibrillation
Genealogy
être adjoints un courrier résumant l’histoire clinique
du patient ainsi que l’électrocardiogramme (ECG)
montrant la pathologie concernée. Ces deux derniers
éléments permettent de confirmer le diagnostic
clinique mais également d’orienter le diagnostic
moléculaire, en particulier pour le syndrome du QT
long, car les analyses sont réalisées dans des centres
de référence avec expertise rythmologique.
Avant de proposer au patient des analyses molé-
culaires, il faut l’informer de leurs limites. Tout
d’abord, ces analyses sont longues et il est rare de
pouvoir donner un résultat avant 6 mois. Ensuite,
leur taux de succès est très variable en fonction de
la pathologie : environ 70 % pour le syndrome du
QT long mais seulement 20 % pour le syndrome
de Brugada. Une analyse négative ne remet donc
pas en cause le diagnostic clinique. Enfin et surtout,
l’identification d’un variant génétique ne signifie pas
forcément qu’il est responsable de la pathologie.
Des variants sans conséquence pathologique sont
fréquemment identifiés (polymorphisme géné-
tique). Certains variants peuvent être facilement
considérés sans conséquence, ou au contraire très
probablement responsables de la pathologie, mais
pour beaucoup d’autres, appelés “variants de signi-
fication inconnue”, l’analyse moléculaire seule ne
permet pas de conclure. Dans ces cas, seule l’analyse
de la ségrégation familiale permettra de conclure. Si
le variant est retrouvé chez d’autres membres de la
famille porteurs de l’anomalie clinique, alors il peut
être considéré comme responsable de la maladie et
utilisé ensuite pour le dépistage familial. À l’inverse,
si des membres de la famille sont porteurs du variant
sans être atteints cliniquement ou, surtout, si des
membres de la famille sont atteints cliniquement
sans être porteurs du variant, alors le variant n’est
manifestement pas responsable du syndrome fami-
lial. Enfin, même lorsqu’un variant pathologique
est clairement identifié, il faut se souvenir que la
pénétrance de la maladie est variable. Cela signifie
que, avec la même mutation, certains membres de
la famille vont développer une forme grave de la
maladie, alors que d’autres, bien que porteurs du
gène morbide, ne seront pas ou peu atteints.
Ces exemples montrent bien que l’analyse molé-
culaire ne se substitue pas, bien au contraire, à
l’enquête familiale, et que le clinicien doit rester
au centre de la démarche diagnostique. La labelli-
sation récente de centres de référence et de centres
de compétence devrait faciliter la mise en place de
ces dépistages familiaux, dont voici les principales
indications.
Mort subite inexpliquée
chez un sujet jeune
Quel cardiologue n’a pas été un jour confronté à un
patient venant consulter car un membre proche et
jeune de sa famille venait de faire une mort subite.
Le plus souvent, dans ce cas, on se contente de poser
quelques questions de routine, de faire un ECG, peut-
être une échographie et finalement de rassurer le
patient en lui disant que l’on n’a rien retrouvé chez
lui. Pourtant il s’agit là d’une situation dans laquelle
une enquête familiale large et bien conduite peut
permettre, dans plus de la moitié des cas, d’identi-
fier la cause de la mort subite (essentiellement des
syndromes du QT long et des syndromes de Brugada
en l’absence d’anomalie morphologique) [2]. L’iden-
tification de la pathologie familiale a deux consé-
quences majeures. En premier lieu, elle conduit à
une meilleure acceptation du décès grâce à l’iden-
tification de la pathologie responsable. Cette mort
cesse d’être un événement incompréhensible chez
quelqu’un qui se portait bien pour devenir la consé-
quence d’une pathologie. Ensuite, bien entendu,
l’identification de la pathologie est bénéfique en ce
qu’elle rend possible la mise en place d’une préven-
tion chez les membres de la famille porteurs de la
maladie, que cette prévention soit médicamenteuse
ou qu’elle fasse appel au défibrillateur.
Il est raisonnable de proposer un dépistage familial
chez tous les apparentés du premier degré (père,
mère, frères, sœurs et enfants) de sujets décédés
brutalement, a priori d’un trouble du rythme
cardiaque avant 35 ans en l’absence de cardiopathie
connue. En l’absence d’anomalies morphologiques
cardiaques retrouvées à l’autopsie ou si l’autopsie
n’a pas été réalisée, le dépistage devra comporter
un ECG, une épreuve d’effort, une échographie
cardiaque et un test à l’ajmaline. Dans les familles
où plusieurs morts subites sont survenues et où le
risque qu’il s’agisse d’une maladie génétique est