L’hétérogénéité paraît également importante dans le cas du syn-
drome de Brugada. S. Priori (Pavie, 415) a analysé un groupe de
54 patients âgés de 42 ± 18 ans, avec 72 % d’hommes chez
32 familles, définies par les anomalies ECG classiques. Seuls
10 patients sur 54 avaient présenté des FV, 22 sur 54 avaient été
testés à la flécaïne et étaient positifs, et 9 fois sur 22 une FV était
induite par stimulation. La recherche systématique de mutations
sur le canal sodique (SCN5A) n’a été positive que trois fois sur
25 familles (12 %). On retrouvait, dans ces familles, deux morts
subites, une FV et une TV, mais aussi 18 patients porteurs (80 %)
et totalement asymptomatiques, malgré un âge de 40 ± 20 ans.
Cette anomalie ECG est ainsi une entité multiforme, et la muta-
tion du canal sodique, quand elle existe, a une pénétrance très
variable.
De même, D. Klug (Lille, 3063) a évalué la signification des ano-
malies ECG décrites en cas de syndrome de Brugada : élévation
en selle du segment ST dans les précordiales droites V1, V2,V3.
Les symptômes étaient multiples : arrêt cardiaque, TV, syncopes
ou palpitations pour 8 d’entre eux, mais aussi douleurs thora-
ciques atypiques pour deux autres. Trois patients étaient asymp-
tomatiques. Après une étude rythmologique et morphologique
extensive, le diagnostic était variable : dysplasie arythmogène
ventriculaire droite chez deux patients, anomalie mineure du VD
chez 7 d’entre eux, cardiomyopathie alcoolique chez un patient,
et seuls trois patients n’avaient aucune anomalie anatomique déce-
lable. L’aspect ECG est donc sans doute un marqueur de l’atteinte
du ventricule droit, et son étiologie n’est pas univoque.
LES MARQUEURS DE RISQUE DE MORT SUBITE
La valeur pronostique du QT est encore largement débattue, avec
de nombreux indices, comme la dispersion, la dynamique ou l’al-
ternance de QT.
Ainsi, en étudiant les patients de l’étude EMIAT (amiodarone
après un infarctus avec FE < 0,40), P. Milliez (Paris, 830) a com-
paré 60 victimes de mort subite à 60 patients témoins. L’intervalle
QT n’était pas discriminant, respectivement 458 versus 446 ms,
mais la pente d’adaptation QT/RR était plus abrupte, de jour
comme de nuit, et expliquait peut-être le risque rythmique accru.
D. Bloomfield (New York, 2679) a comparé la valeur prédictive
de l’exploration et de l’alternance de l’onde T chez 130 patients
explorés pour lipothymie ou syncopes. Treize pour cent des
patients avaient des TV inductibles et 38 % avaient une alternance
de l’onde T. Après un suivi de 9 mois, 2 morts subites et 7 TV
étaient observées. La valeur prédictive de l’alternance paraît au
moins aussi bonne que celle de l’exploration, avec une survie à
un an sans événement rythmique de 97 % en l’absence d’alter-
nance (versus 81 % - risque relatif 7,1) et de 94 % en l’absence
de TV réduite (versus 79 % - risque relatif 3,4) (figure 2).
T. Klingenheben (Francfort, 831 et 832) s’est aussi interessé à
l’alternance de l’onde T. Cet indice était certes prédictif d’évé-
nement rythmique chez 107 patients avec insuffisance cardiaque
et chez 197 patients en post-infarctus, mais sa valeur disparais-
sait en analyse multivariée, celle-ci ne retenant que la fraction
d’éjection VG et la variabilité sinusale (SDNN).
La durée de l’intervalle QT est variable selon le sexe, avec un QT
plus long de 40 ms en moyenne chez la femme, participant peut-
être à la prévalence accrue des torsades de pointe acquises chez elle
(70 % des cas). Le rôle des hormones et notamment de la testosté-
rone a été analysé par H. Bidoggia (Buenos Aires, 815). Le JTmax
était de 214 ± 13 versus 188 ± 1 ms chez respectivement
250 femmes et 250 hommes témoins, alors que des valeurs de
214 ± 3 ms étaient trouvées chez 21 hommes orchidectomisés, et
des valeurs de 189 ± 1 ms chez 11 femmes présentant un syndrome
de virilisation.
FIBRILLATION AURICULAIRE
L’ablation des foyers issus des veines pulmonaires apparaît
comme un traitement prometteur de la fibrillation auriculaire, et
de nombreuses équipes ont présenté leurs travaux. Les risques
sont connus (thrombose et embolie cérébrale, sténose des veines
pulmonaires) et limitent actuellement la méthode. P. Jais (Bor-
deaux, 4113) a présenté les résultats actuels de l’équipe qui est à
l’origine de ce traitement. Sur un total de 110 patients, des ecto-
pies veineuses pulmonaires ont été mises en évidence chez
105 patients : 1 veine (52 cas), 2 veines (26 cas), 3 veines (25 cas)
et 4 veines (8 cas) sur 211 veines pulmonaires arythmogènes.
Après un suivi de 9 ± 6 mois, la FA était supprimée sans traite-
ment chez 66 % des patients et chez 37 autres patients avec un
traitement antiarythmique, soit un succès de 90 % après ablation
d’une seule veine pulmonaire, de 67 % si deux veines étaient
concernées et de 25 % lorsque plus de trois veines pulmonaires
étaient impliquées. Les complications comportent un accident
vasculaire cérébral, un hémopéricarde et 6 sténoses angiogra-
phiques. Un progrès technologique est encore nécessaire pour
pouvoir développer largement ce moyen thérapeutique.
Parmi les nouvelles méthodes, l’utilisation des ultrasons par
D. Wilber (Chicago, 1958) semble intéressante pour l’ablation
des foyers veineux pulmonaires. Le cathéter (UVAC, Atrionix)
comporte un cristal piézoélectrique à sa distalité, dans un bal-
La Lettre du Cardiologue - n° 323 - janvier 2000
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RYTHMOLOGIE