La Lettre du Cardiologue - n° 375 - mai 2004
30
OPTIMAAL en 2002 et VALIANT en 2003 (6, 7). Actuellement,
nous disposons donc d’un ensemble d’études incluant près de
35 000 patients, dont près de 20 000 ont été exposés à un sartan,
ce qui permet de mieux préciser la place potentielle des antago-
nistes des récepteurs de l’angiotensine.
La présentation des deux études CHARM-Added et CHARM-
Alternative dans la dysfonction ventriculaire gauche symptoma-
tique apporte de nouvelles informations. Les deux essais ont, en
effet, démontré une réduction de la mortalité cardiovasculaire et
du taux d’hospitalisations pour insuffisance cardiaque ainsi que
d’un certain nombre d’autres objectifs secondaires cardiovascu-
laires, en faveur du candésartan prescrit à une dose allant jusqu’à
32 mg/jour.
L’étude OPTIMAAL dans le postinfarctus avec insuffisance car-
diaque a comparé 50 mg de losartan à 50 mg trois fois par jour de
c ap t o p r il. L’objectif pri m a i r e n’a pas montré de supéri o rit é en
faveur de l’ARB. Il était prévu de tester l’hypothèse de non-infé-
riorité. Les résultats observés n’ont pas permis de confirmer qu’il
n’y avait pas de non-infériorité de l’ARB par rapport au captopril.
L’étude VALIANT a comporté trois bras, l’un qui comparait le
valsartan à une dose maximale de 320 mg au captopril à une dose
maximale de 150 mg par jour,et un troisième bras qui associait
le valsartan à une dose maximale de 160 mg au captopril à la dose
de 150 mg par jour. L’objectif primaire était la mortalité toutes
causes et les comparaisons étaient faites par rapport au bras cap-
topril.
Il n’y a pas eu de différence de mortalité entre les trois bras. En
revanche, le bras valsartan seul a fait “jeu égal” avec le groupe
de patients traités par inhibiteurs de l’enzyme de conve r s i o n , l ’ i n-
t e rvalle de confiance restant dans les limites prédéfinies pour
caractériser une non-infériorité. Cette non-infériorité a été obser-
vée non seulement sur la mortalité mais également sur le critère
composite d’événements cardiovasculaires mortels ou non mor-
tels. Il y a eu de façon significative un accroissement des effets
s e c o n d a i res dans le groupe comportant la double associat i o n ,
notamment des phénomènes d’hypotension artérielle et d’insuf-
fisance rénale.
Les données actuellement disponibles permettent donc de dire
q u e , dans l’insuffisance cardiaque ch ro n i q u e , une étude a été
n é g at ive (ELITE II), une autre a été fa i ble ment positive sur la
morbidité (Val-HeFT) et deux autres ont été très positives sur la
morbimortalité cardiovasculaire (CHARM-Added et CHARM-
A l t e rn at ive). Dans l’infa r ctus du myo c a rde avec insuffisance car-
d i a q u e, on peut opposer les résultats négatifs d’OPTIMAAL à
ceux de non-inféri o rité de VALIANT dans la comparaison dire c t e
d’un ARB et d’un IEC.
Il est toujours très difficile de comparer les résultats d’études qui
ont inclus des patients aux profils différents ou exposés à un trai-
tement de base variable. Les essais concernant les ARB n’échap-
pent pas à cette règle (tableau I),notamment en ce qui concerne
le taux de prescription de bêtabloquants.
Quoi qu’il en soit, l’ensemble des études désormais disponibles
permet de tirer des conclusions :
●
le risque d’interaction négative avec le traitement bêtabloquant
suggéré par Val-HeFT n’a pas été confirmé dans les études ulté-
rieures (OPTIMAAL, CHARM, VALIANT) ;
●
les résultats récents permettent de penser que les antagonistes
des récepteurs de l’angiotensine sont une bonne alternative aux
inhibiteurs de l’enzyme de conversion chez les patients sympto-
m atiques intolérants à l’IEC pour améliorer non seulement la
morbidité mais également la mortalité.
Une récente méta-analyse portant sur les études consacrées à l’in-
suffisance cardiaque suggère que la réduction de mortalité obte-
nue par les ARB chez les patients intolérants aux IEC est au moins
de même grandeur que celle obtenue avec les IEC dans les études
précédentes (21 % contre 17 %) (8). Chez les patients chez les-
quels l’ARB est donné en supplément de l’IEC, il n’y a, p a r
c o n t re, pas d’effet signifi c atif sur la mort a l i t é , mais un effet signi-
ficatif sur la réduction des hospitalisations pour insuffisance car-
diaque. Une autre méta-analyse a raffiné l’impact du traitement
par ARB selon la pre s c ription ou non d’un bêtabloquant (9). C e t t e
méta-analyse confirme que, globalement, l’addition d’un ARB à
un IEC avec présence ou non d’un bêtabloquant n’induit pas de
diminution de la mortalité, mais réduit significativement le cri-
tère composite morbimortalité. Les auteurs ont analysé l’effet du
t r aitement bêtabloquant et ont conclu que l’effet de l’ARB en
addition à un IEC était surtout marqué chez les patients non trai-
tés par bêtabloquant. Cela a conduit à concl u re qu’il est utile d’as-
socier les ARB aux IEC chez les patients qui ne supportent pas
un traitement bêtabloquant.
Dans l’infarctus du myocarde avec des signes d’insuffisance car-
diaque, on peut raisonnablement conclure que les ARB sont une
bonne altern at i ve aux IEC chez les patients qui ne les tolère n t
pas. Il est par contre difficile de recommander en première inten-
M
I S E A U P O I N T
Tableau I. Principales études de morbimortalité avec les ARB.
Étude Moyenne d’âgeSuivi (mois) Mortalité annuelle Utilisation de bêtabloquants Dose quotidienne
ELITE II* 71,5 18,3 10,6 23 41
Val-HeFT* 62,5 23 10,2 34 254
CHARM-Added* 64 41 9,4 90 24
CHARM-Alternative* 66,3 33,7 10,3 54,5 23
OPTIMAAL** 67,4 31 5,9 79 45
VALIANT** 65 24,7 9,6 70 247/116
* Études dans l’insuffisance cardiaque chronique.
** Étude dans le postinfarctus.