Diagnostic d’une maladie coronaire anévrismale C

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Diagnostic d’une maladie
coronaire anévrismale
● F. Bernard, J. Monsegu, I. Gandjbakhch, H. Broustet, J.P. Ollivier*
OBSERVATION CLINIQUE
Monsieur D., 64 ans, est hospitalisé pour l’exploration de douleurs thoraciques évoquant un angor et évoluant depuis trois mois.
La scintigraphie myocardique d’effort confirme le diagnostic ;
l’aspect est compatible avec une séquelle de nécrose myocardique inférieure et une ischémie sévère en territoire inférolatéral. Ce patient présente des facteurs de risque cardiovasculaires : un tabagisme non sevré évalué à 40 paquets-années et
une hypertension artérielle.
L’examen clinique est sans particularité. La coronarographie
révèle un volumineux anévrisme du tronc coronaire gauche, du
segment proximal de l’artère interventriculaire antérieure (IVA)
et du segment proximal de la coronaire droite, occluse par ailleurs
(figures 1 et 2). Il s’y associe une sténose significative de l’IVA
moyenne, de la première septale, de l’artère diagonale et de la
circonflexe.
Figure 2. Coronarographie : occlusion de la coronaire droite, elle-même
siège d’un anévrisme proximal.
L’échographie cardiaque montre une hypokinésie inférieure
avec une fonction ventriculaire gauche conservée. L’aorte ascendante n’est pas dilatée (36 mm). L’échocardiographie transœsophagienne précise la taille de cet anévrisme (12 x 10 mm),
non thrombosé (figure 3).
Figure 1. Coronarographie : anévrisme du tronc coronaire gauche et de l’IVA
proximale.
* Service de cardiologie, hôpital du Val-de-Grâce, 74, bd de Port-Royal,
75005 Paris.
La Lettre du Cardiologue - n° 346 - juin 2001
Figure 3. Échocardiographie transœsophagienne : anévrisme du tronc
coronaire gauche de 12 x 10 mm.
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La crosse et le segment descendant de l’aorte thoracique sont
d’un diamètre normal. Le bilan d’extension de cette dystrophie
anévrismale est négatif : l’écho-doppler des troncs artériels
supra-aortiques et des artères des membres inférieurs est normal.
L’IRM cranio-encéphalique montre un aspect grêle du réseau
artériel distal de calibre normal.
Monsieur D. bénéficie d’une chirurgie de revascularisation coronaire avec un pontage mammaire interne gauche-IVA , saphènecoronaire droite et saphène-1re latérale. Les suites sont simples,
sans récidive angineuse.
COMMENTAIRES
La maladie coronaire anévrismale est une entité particulière et
rare de l’athérosclérose coronarienne. Son incidence est de 1,3 %
sur plusieurs milliers de coronarographies consécutives (1).
L’évolution anévrismale d’une zone d’athérome est étroitement
liée à la destruction de la média par le processus d’athérosclérose. Si l’ectasie coronaire post-sténotique est un phénomène bien
connu, l’hypertension artérielle semble être un facteur indépendant de l’évolution anévrismale (2).
L’athérosclérose demeure l’étiologie principale des anévrismes
coronaires. La maladie de Kawasaki en est toutefois une cause
fréquente dans les pays asiatiques. Beaucoup plus rarement, ces
anévrismes peuvent être d’origine congénitale, traumatique,
syphilitique, bactérienne ou auto-immune dans le cadre d’une
vascularite (3).
L’association avec d’autres sites anévrismaux chez un même
patient a été variablement décrite. Néanmoins, A.S. Daoud
retrouve une association significative avec l’anévrisme de l’aorte
abdominale ou des artères ilio-fémorales justifiant une exploration vasculaire systématique minimale par écho-doppler des
troncs artériels supra-aortiques, de l’aorte abdominale et des
artères des membres inférieurs (4).
Le mode de révélation des anévrismes coronaires est le plus souvent la découverte systématique lors d’un examen coronarographique chez un patient hospitalisé pour une urgence coronaire.
Mais une forme de révélation doit être mentionnée : il s’agit des
cas d’infarctus myocardique sans lésion significative retrouvée
sur la coronarographie hormis l’anévrisme. L’hypothèse physiopathologique retenue est l’embole intracoronaire d’origine anévrismale, qui peut alors justifier chez ces patients la mise sous
traitement anticoagulant au long cours (antivitamine K).
En appariant des patients porteurs d’anévrismes coronaires avec
d’autres coronariens selon les données coronarographiques,
P.S. Swaye n’a pas montré de différence concernant la survie à
cinq ans, mais un taux significativement plus élevé d’infarctus du
myocarde chez les patients porteurs d’anévrisme (5).
Le traitement chirurgical systématique des lésions anévrismales
chez un patient indemne d’autre lésion coronaire sténosante reste
exceptionnel depuis l’implantation des endoprothèses couvertes
dans le cadre d’une angioplastie percutanée (3).
■
Bibliographie
1. Hartnell GG, Parnell BM, Pridie RB. Coronary artery ectasia ; its prevalence
and chirurgical significiance in 4 993 patients. Br Heart J 1985 ; 54 : 392-5.
2. Markis JE, Joffe CD, Cohn PF, Feen DJ, Herman MV, Gorlin R. Clinical significance of coronary arterial ectasia. Am J Cardiol 1976 ; 37 : 217-21.
3. Bernard F, Revel F, Monségu J, Duriez P, Langlade S, Ollivier JP. L’ectasie des
vaisseaux coronaires : une coronaropathie à haut risque thrombo-embolique. Ann
Cardiol Angeiol 1998 ; 47 (3) : 160-4.
4. Daoud AS, Pankin D, Tulgan H, Florentin RA. Aneurysm of the coronary artery.
Report of ten cases and review of literature. Am J Cardiol 1963 ; 11 : 228-37.
5. Swaye PS, Fisher LD. Aneurysmal coronary artery disease. Circulation 1983 ;
67 : 134-8.
ANNONCEURS
ABBOTT (Uprima), p. 18-19 ; BAYER PHARMA (Staltor), p. 36 ; FOURNIER (Cholstat), p. 32 ;
HEALTH BOX (Solution informatique), pp. 4, 34, 45, 49 ; LABORATOIRES AVENTIS (Nisisco), pp. 10-11 ;
MSD CHIBRET (Zocor), pp. 22-23 ; PFIZER (Tahor), p. 43 ;
SANOFI SYNTHELABO FRANCE (CoAprovel, Plavix, Plavix Opal), pp. 26-27, 6, 52 ;
SERVIER (Coversyl, Fludex), pp. 2, 35 ; TAKEDA (CoKenzen), p. 51 ;
THYLMER (Lipanthyl), p. 5.
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