L'équipe Meps travaille par exemple sur les processus de gentrification urbaine. Outre la recherche que j’évoquais tout à
l’heure, deux thèses ont été soutenues récemment : l'une abordait la question de la gentrification à travers l’analyse du
rôle et de la place des populations gays, l'autre à travers une comparaison des « gentrifieurs » d’hier (des années 1970)
et d’aujourd’hui (à partir du quartier des pentes de la Croix-Rousse à Lyon et du quartier du Bas-Montreuil à proximité de
Paris)..
D’autres collègues travaillent sur les démolitions et les rénovations urbaines. Sylvia Faure travaille sur Saint-Etienne, un
doctorant sur le quartier des Minguettes (Vénissieux). Vous trouverez aussi des études sur la Duchère, Mermoz, etc.
Le péri-urbain est également un sujet de recherche. Josette Debroux travaille notamment sur les mobilités « à
contre-sens », c'est-à-dire les citadins qui vont s'installer en zones péri-urbaines.
Isabelle Mallon mène une recherche sur le phénomène du vieillissement en milieu rural. D’autres collègues ou les
mêmes, je ne pourrai pas tous les citer ici, travaillent sur les choix résidentiels (comment les gens choisissent leur
habitation, leur quartier, leur ville ?), sur les milieux populaires (Daniel Thin s'intéresse par exemple à l'articulation entre
l'école et le quartier), sur les agents immobiliers, sur les mémoires urbaines...
Comme vous le voyez, le spectre est très large et beaucoup de ces études touchent des territoires du Grand Lyon.
Quelles types de collaborations sont envisageables avec les collectivités locales??
Je dirais que cela dépend beaucoup du temps que les chercheurs peuvent avoir. Même des sollicitations pour des
études très ponctuelles, et elles sont nombreuses, sont parfois difficiles à organiser. Nous sommes bien occupés par nos
obligations de recherche et/ou d'enseignements, d'encadrement, de tâches administratives... Nous devons avant tout
produire des résultats de recherche.
S'il s'agit d'une intervention ponctuelle, la présentation de résultats de recherche par exemple, cela se fait très
couramment. Mais construire de réels partenariats exige plus d'organisation, de temps et d'argent. Cela fait pourtant
partie de la reconfiguration des financements de la recherche : les financements ANR incitent beaucoup à développer
des partenariats avec des acteurs économiques ou des collectivités.
Comment votre équipe aborde-t-elle par exemple le champ de la mobilité??
Dans le champ de la mobilité, on peut distinguer différents domaines. La mobilité résidentielle correspond au
changement de logement, de quartier. Nous avons abordé les raisons et les contraintes (économiques, sociales,
contextuelles) qui influencent ou pèsent sur les choix résidentiels des individus et des ménages (voir l'ouvrage « Elire
domicile. La construction sociale des choix résidentiels », 2010).
Les mobilités quotidiennes prennent en compte toutes les mobilités dans la ville. Nous avons étudié, avec Yves
Grafmeyer, Jean-Pierre Lévy, Claire Lévy-Vroelant et Bernard Benssoussan, certains aspects de ces mobilités urbaines
dans notre ouvrage « Du domicile à la ville » (2001). Nous sommes aussi (avec Sonia Lehman Frisch et Frédéric Dufaux)
en train de réaliser une étude auprès d'enfants pour comprendre ce qui se joue dans les déplacements entre l'école et le
domicile : comment le trajet se passe, qu'est-ce qui s'y passe, comment ce trajet construit son rapport avec le quartier,
etc.
Au côté de ces mobilités, il y a aussi les mobilités liées aux voyages, aux vacances, etc. Enfin, les migrations
représentent encore une autre dimension : les migrations de travailleurs, les migrations inter-régionales, etc. Mais il ne
faut pas oublier les nouvelles formes de mobilité qui se développent actuellement : les mobilités pendulaires, qui
concernent les personnes qui se déplacent loin, quotidiennement pour leur travail, les bi-résidents et les « over-nighters
» (c'est-à-dire des personnes passant plus de 60 nuits par an en-dehors de chez eux pour des raisons professionnelles).
Je suis justement en train de rédiger la préface d'un ouvrage à paraître sur le sujet. Un aspect peu étudié m'intéresse en
particulier : ce qui se construit socialement dans la 2e résidence, les répercussions de cette vie sociale dans cet autre
résidence sur les pratiques et sociabilités dans l'espace quotidien et, aussi, ce qui se joue dans l'espace de
déplacement... Il semblerait que ces grands déplacements s'accompagnent de petites mobilités au sens social du terme :
il y aurait peu de changement social en termes de rôle, de statut, de pratiques, etc. mais cela reste à étudier.
Pourriez-vous nous donner un exemple d'une étude dans le champ de la mobilité??
Dans le prolongement de l'étude que j'évoquais tout à l'heure, je vais débuter prochainement une nouvelle étude
financée par la Ville de Paris sur le territoire de la vie urbaine et donc aussi sur la mobilité urbaine des enfants. Il s'agit
d'une étude comparative entre Paris et San Francisco, impliquant des enfants vivant dans des quartiers bourgeois et des
quartiers populaires, donc dans des contextes familiaux et urbains différents. L'idée est aussi de voir comment se
reconfigure au cours du temps le territoire de la vie urbaine des enfants lorsqu'ils grandissent. Nous envisageons donc
de suivre les mêmes enfants, rencontrés lorsqu'ils étaient en CM1, CM2, jusqu'au collège.
Comment votre équipe pourrait-elle aborder le champ de l'espace public et de ses usages??
Ce thème est très classique pour la sociologie urbaine comme je vous le disais. Dans l'étude sur les enfants des
quartiers gentrifiés de Paris, Londres et San Francisco, que j’ai évoqué, nous avons traité cette question par