446 | La Lettre du Cancérologue Vol. XVIII - n° 9 - novembre 2009
ÉDITORIAL
Avec le métabolome, nouveau parmi les “-omes,
émergence de la sarcosine dans le cancer de la prostate
With metabolomics – a new addition to the “-omics” –
emergence of sarcosine in prostate cancer
P. Beuzeboc 1
1 Département d’oncologie médicale, Institut Curie, Paris.
L
étude de l’ensemble de la composition métabolique
des cellules ouvre de nouvelles perspectives. Le méta-
bolome est le dernier en date des “-omes” à retenir
l’imagination des chercheurs(1). Il permet d’individualiser des
métabolites résultant des voies moléculaires modifi ées par
les anomalies des autres “-omes” (génomes, transcriptomes,
protéomes).
En pratique, l’analyse du métabolome est très complexe
du fait du grand nombre de métabolites détectables. Elle
a été améliorée par les progrès faits dans la séparation des
nombreux métabolites grâce au perfectionnement des
méthodes spectrométriques.
A. Sreekumar et al. (2) ont cherché à identifi er des méta-
bolites pouvant distinguer une prostate normale nigne
d’un cancer de la prostate localisé et métastatique. Parmi
1 126 métabolites isolés d’échantillons de tissu prostatique,
d’urine et de sérum, ils en ont identifi é 87 qui distinguent
le cancer de la prostate du tissu prostatique bénin. Parmi
eux, 6 sont élevés dans les formes métastatiques, et un, la
sarcosine, présente un intérêt tout particulier, car il pourrait
servir de marqueur de progression tumorale. La sarcosine (ou
N-méthylglycine) est générée par le transfert d’un groupe
méthyl de la S-adénosyl-méthionine sur la glycine, réaction
catalysée par la GNMT (glycine-N-méthyltransférase), qui est
le principal donneur de méthyl de plusieurs réactions essen-
tielles régulant l’expression génique et l’activité protéique,
notamment des histones.
A. Sreekumar et al. ont montré non seulement que la sarco-
sine était un biomarqueur de la progression du cancer de la
prostate, mais aussi qu’expérimentalement l’addition de
sarcosine à des cellules épithéliales normales de prostate
permettait la promotion de propriétés invasives, alors qu’au
contraire la baisse des niveaux de GNMT dans les cultures
de cellules tumorales de cancer de prostate réduisait leur
pouvoir invasif. Ils ont montré que les taux de sarcosine dans
les urines avaient une valeur prédictive certes modeste mais
signifi cative, suggérant que son dosage dans les urines couplé
au taux de PSA pourrait aider au monitoring de la progression
tumorale…
Il sera intéressant à l’avenir de voir comment des facteurs
environnementaux comme les régimes alimentaires peuvent
modifi er le profi l du métabolome*.
* Les dernières données de A. Sreekumar suggèrent un lien transcriptionnel entre la
progression tumorale et l’activité GNMT par le biais de la fi xation à la fois du récepteur
aux androgènes et de l’oncogène ERG à la séquence promoteur du gène de la GNMT
dans les cellules tumorales.
Références bibliographiques
1.◆Abate-Shen◆C,◆Shen◆MM.◆Diagnostics:◆the◆prostate-cancer◆metabolome.◆
Nature◆2009;457(7231):799-800.
2.◆Sreekumar◆A,◆Poisson◆LM,◆Rajendiran◆TM◆et◆al.◆Metabolomic◆profiles◆deli-
neate◆potential◆role◆for◆sarcosine◆in◆prostate◆cancer◆progression.◆Nature◆
2009;457(7231):910-4.
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